CONFÉRENCE DE DOHA: LES PARTICIPANTS À UNE TABLE RONDE SUR LA DETTE EXTÉRIEURE COMMENTENT LES RÉSULTATS DE L’INITIATIVE PPTE
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CONFÉRENCE DE DOHA: LES PARTICIPANTS À UNE TABLE RONDE SUR LA DETTE EXTÉRIEURE COMMENTENT LES RÉSULTATS DE L’INITIATIVE PPTE
(Publié tel que reçu)
DOHA, 1er décembre -- La responsabilité des pays développés et des institutions de Bretton Woods dans la crise financière actuelle a été clairement évoquée, cet après-midi, à Doha, lors d’une table ronde de la Conférence internationale sur le financement du développement consacrée à la dette extérieure, chapitre V du Consensus de Monterrey.
Si la plupart des intervenants ont diversement commenté les progrès réalisés dans le cadre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), tout en s’interrogeant sur les retombées que pourra avoir la crise financière sur l’économie de ces États, la Présidente de l’Initiative pour la mondialisation de l’éthique, Mme Mary Robinson, a constaté que les problèmes actuels découlaient d’un « comportement irresponsable » de déréglementation.
Les institutions de Bretton Woods « ne pourront pas échapper à leurs responsabilités », de même que les consommateurs des pays développés qui ont vécu au-dessus de leurs moyens, a ajouté l’ancienne Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. « Les pays riches ont le devoir de tendre la main aux pauvres », a souligné, en écho à Mme Robinson, le représentant du Bahreïn.
Le Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI), M. Murillo Portugal, qui animait les débats, a mis en avant les avancées significatives enregistrées depuis Monterrey, en particulier dans l’allégement de la dette des pays les plus pauvres. Trente-trois pays ont atteint le point de décision PPTE, tandis que 23 d’entre eux ont dépassé le point d’achèvement, bénéficiant d’environ 90 milliards de dollars, a-t-il expliqué.
L’allégement de la dette au titre de l’Initiative PPTE a permis de réduire de 4 à 2% du PIB le poids de la dette des pays bénéficiaires, ce qui permet une augmentation similaire dans des dépenses pour la réduction de la pauvreté, a-t-il précisé, en ouvrant cette table ronde que coprésidaient la Vice-Présidente de la Gambie, Mme Isatou Njie-Saidy, et le Directeur général pour la coopération de développement et l’action humanitaire de Catalogne.
L’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, lancée conjointement en 1996 par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, vise à assister les pays les plus pauvres au monde en rendant leurs dettes internationales « soutenables ».
Ce programme a connu une révision et une réforme en 1999 (Initiative PPTE renforcée). La réduction de la dette est normalement fonction des efforts dans la lutte contre la pauvreté des pays concernés.
DETTE EXTÉRIEURE
Déclarations
Mme NANCY BIRDSALL, Présidente du Center for Global Development, a déclaré que le choc financier annulerait certainement les progrès sociaux et économiques réalisés par les pays pauvres très endettés et d’autres pays à faible revenu, à moins qu’une modification très rapide ne soit apportée aux règles qui régissent l’accès des pays à faible revenu à l’emprunt. Mme Birdsall a estimé que l’Initiative PPTE n’avait pas réussi à contrecarrer la forte vulnérabilité épisodique et structurelle des pays pauvres. Elle a plaidé en faveur d’une modification de cette Initiative, laquelle peut s’opérer par un transfert d’aide. Les institutions de Bretton Wodds devraient, a-t-elle suggéré, réfléchir aux solutions qui prévalent aujourd’hui pour l’allégement de la dette des pays à faible revenu.
M. CARLOS BRAGA, Directeur du Département des politiques économiques et de la dette à la Banque mondiale, a estimé qu’en dépit du constat selon lequel la mise en œuvre du Consensus de Monterrey a produit des résultats mitigés, des progrès solides ont été enregistrés dans l’allégement de la dette. Il a néanmoins reconnu des « attitudes schizophréniques » au sujet de la dette. D’un côté, a-t-il expliqué, on pense que l’emprunt peut être une bonne chose, et de l’autre, on juge que ces financements ne sont pas utilisés à bon escient. Si ces ressources étaient bien investies, des résultats positifs pourraient être obtenus en matière de développement économique et social. S’agissant de l’Initiative PPTE, M. Braga a proposé que le statut de ce programme soit jugé par les critères qui étaient à l’origine de son lancement. Il a ainsi mis l’accent sur le devoir de transparence et a souligné que l’allégement de la dette devrait servir au démarrage de la croissance. De même, les ressources dégagées doivent être consacrées à la réduction de la pauvreté. Au chapitre des bonnes nouvelles, M. Braga a également expliqué que les pays en développement participant à cette Initiative ont connu une croissance remarquable au cours des six dernières années. Si l’Initiative PPTE n’est pas seule responsable de cette croissance, ce programme a été crucial pour libérer des fonds qui ont contribué à la réduction de la pauvreté dans ces pays.
M. BENOÎT COEURÉ, Coprésident du Club de Paris, a assuré que les membres du Club de Paris étaient des contributeurs importants de l’allégement de la dette dans le cadre de l’Initiative PPTE. Le Club de Paris est un groupe informel de créanciers publics, dont 19 pays développés sont membres permanents, qui a pour but de trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de nations endettées. M. Coeuré a en outre fait état d’une grande souplesse du traitement de la dette par le Club de Paris depuis le Consensus de Monterrey. Il a plaidé pour la mise en place d’un cadre visant à s’attaquer aux chocs extérieurs. C’est ainsi, a-t-il précisé, que le Club de Paris a accordé un traitement exceptionnel aux pays frappés notamment par les catastrophes naturelles ou par une dégradation des termes de l’échange. Dans un environnement mondial qui se dégrade, un certain nombre de pays sont très endettés, et leur nombre va augmenter en 2009, a-t-il estimé. Tout doit être fait pour éviter une spirale d’endettement, a-t-il estimé. Il est donc important de respecter le cadre de viabilité de la dette et d’entamer une évolution de ce cadre, notamment lorsqu’il s’agit d’accorder de nouveaux prêts qui servent à financer des programmes à haut rendement.
M. ROBERT GRAY, Président du Financement de la dette et services consultatifs à la banque HSBC, a constaté, au cours des différentes crises, des améliorations significatives dans la coopération entre les secteurs privé et public. Il y a, a-t-il dit, un meilleur niveau de confiance et de compréhension entre les deux. Pour M. Gray, il reste beaucoup à faire pour détendre les contraintes juridiques qui entravent l’évolution du marché.
Mme MARY ROBINSON, Présidente de l’Initiative pour la mondialisation de l’éthique, s’est livrée à une approche du problème de la dette et de la crise financière actuelle à partir d’une perspective des droits de l’homme. Se félicitant des progrès réalisés par les pays endettés, elle a indiqué qu’elle aurait été plus heureuse si un représentant des pays développés avait reconnu leur responsabilité dans cette crise financière et s’en fût déclaré désolé. Elle a en effet affirmé que les crises actuelles que subissaient les pays en développement avaient été provoquées par les pays développés. Elles découlent d’un comportement irresponsable de déréglementation, a-t-elle dit. Elle a en particulier estimé que les institutions de Bretton Woods ne pourront pas échapper à leurs responsabilités, de même que les consommateurs des pays développés qui ont vécu au-dessus de leurs moyens. Elle a également mis l’accent sur la question du changement climatique, provoqué, a-t-elle dit, par le comportement de générations d’êtres humains dont le mode de vie a contribué au réchauffement de la planète. La situation actuelle exige la pleine mise en œuvre du Consensus de Monterrey et la réalisation des objectifs de développement, a-t-elle dit. Mme Robinson a insisté sur le devoir de responsabilisation dans le financement du développement. L’ancienne Présidente de l’Irlande a lancé un appel pour que la crise financière fasse ressortir les responsabilités afin d’assurer que le fardeau ne repose pas sur les pays les plus pauvres.
Échange de vues
Le représentant du Bahreïn a estimé que les pays riches avaient le devoir de tendre la main aux pays pauvres, par le biais du Club de Paris ou par d’autres moyens. Au lieu d’annuler la dette des pays pauvres, ils ne pensent qu’à leurs propres intérêts, a-t-il déploré. Le délégué de la Norvège a, pour sa part, reconnu que le fardeau de la dette n’était pas seul responsable de la vulnérabilité de certains pays. Étant donné que les défis du développement ne peuvent être réglés par le seul allégement de la dette, il a plaidé en faveur d’un ensemble de mesures diversifiées, dont la possibilité d’injecter de « l’argent frais ».
Le représentant des États-Unis a notamment réaffirmé l’importance des Objectifs du Millénaire pour le développement et des engagements qui en découlent. Il a, de même, rappelé les principes de développement convenus à Monterrey, lesquels mettent en particulier l’accent sur l’appropriation des pays pour mobiliser les ressources nationales pour le développement. La déléguée du Sénégal a proposé que soient fixées des conditionnalités plus raisonnables et plus souples. Il est temps, a-t-elle également dit, que l’on pose la question du désengagement durable de la dette en réclamant une profonde réforme du système financier actuel.
Un expert indépendant du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a souligné que les droits fondamentaux n’avaient reçu que très peu d’attention dans les discussions sur la crise de la dette. Cette situation doit changer si l’on veut trouver des solutions complètes et durables à la crise. Il a plaidé en faveur d’un nouveau cadre de viabilité de la dette conçu avec la pleine participation des pays concernés.
Plusieurs orateurs ont par ailleurs observé que l’actuel système de gestion de la dette ne répondait pas aux besoins réels de la plupart des pays en développement et des pays les moins avancés. Ils ont défendu la création d’un système indépendant des institutions de Bretton Woods, à l’écoute de la voix des pays débiteurs.
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