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SG/SM/10957-DEV/2624-ECO/115

BAN KI-MOON APPELLE À LA MISE EN PLACE DE GOUVERNEMENTS TRANSPARENTS, D’UN COMMERCE RÉELLEMENT LIBRE ET D’UNE MONDIALISATION FAVORABLE À TOUS

23/04/2007
Secrétaire généralSG/SM/10957
DEV/2624
ECO/115
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

BAN KI-MOON APPELLE À LA MISE EN PLACE DE GOUVERNEMENTS TRANSPARENTS, D’UN COMMERCE RÉELLEMENT LIBRE ET D’UNE MONDIALISATION FAVORABLE À TOUS


Vous trouverez ci-après la déclaration du Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, à l’occasion du septième Forum sur la démocratie, le développement et le libre-échange qui s’est tenu aujourd’hui à Doha, au Qatar: 


Je suis enchanté d’avoir l’occasion de prendre la parole à ce septième Forum sur la démocratie, le développement et le libre-échange.


Dans l’esprit de millions de gens, le nom de cette belle ville où nous sommes réunis est déjà associé à l’idée de libre-échange.


Le Qatar est aussi l’exemple même d’un pays qui a compris la nécessité de partager les fruits de la mondialisation et de la croissance et de veiller à ce qu’ils contribuent au développement social.


Et, bien sûr, le Qatar préside le Mouvement des démocraties nouvelles ou rétablies depuis octobre 2006, est l’un des principaux donateurs au Fonds des Nations Unies pour la démocratie et soutient activement la liberté de la presse.


Pour toutes ces raisons, ainsi que pour sa généreuse hospitalité, je tiens à rendre hommage à S. A. l’Émir cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani.  Sa hauteur de vues a ouvert de nouvelles perspectives de participation à la vie politique dans son pays.  Le Qatar est donc un lieu particulièrement approprié pour la tenue de cette importante rencontre internationale.


Les trois questions auxquelles notre réunion d’aujourd’hui est consacrée – la démocratie, le développement et le libre-échange – ont joué un rôle très important dans le développement de mon propre pays.  La Corée du Sud a été l’un de ces pays qu’on a appelé les « dragons d’Asie » en raison de son industrialisation rapide et de la forte croissance de ses revenus.  Sa croissance a été stimulée par un gouvernement qui encourageait la création d’entreprises et a été alimentée, dans une large mesure, par les exportations.  Autrement dit, par le commerce.  Le dynamisme de l’économie sud-coréenne a connu des fluctuations, mais c’est au cours de cette période que le pays s’est transformé en une nation moderne – moderne dans tous les sens du terme sauf pour ce qui est de l’existence d’une démocratie véritable.  La démocratie est venue plus tard, à l’issue de nouveaux combats.  Et c’est sur la démocratie que repose désormais la capacité du pays à conserver et consolider ses acquis.


Les trois éléments sont donc intimement liés, et se combinent, pour l’essentiel, de façon positive.


De nombreuses études ont illustré les différentes façons dont les modes de gouvernement démocratiques contribuent à une plus grande stabilité institutionnelle, laquelle incite à son tour les entreprises à avoir davantage confiance dans les perspectives économiques du pays.  Un investissement est, en définitive, un pari sur l’avenir, et il y a plus de chances de gagner un pari lorsqu’un certain nombre de facteurs sont prévisibles.


Les relations positives entre le libre-échange et le développement sont aussi bien établies.  Les avantages du commerce sont plus évidents que jamais avec la facilité des voyages, des transports et des communications que nous offre le monde moderne.  C’est pourquoi il est si important que les négociations commerciales de Doha aboutissent.  Le commerce mondial doit offrir des débouchés aux pays les plus pauvres au lieu de les désavantager.


Si le cycle de négociations commerciales échoue, les dégâts seront considérables pour ceux qui sont le moins en mesure de les supporter, pour le système commercial multilatéral et pour le multilatéralisme lui-même.  S'il réussit, non seulement Doha sera synonyme de liberté du commerce, mais elle deviendra liée de façon indélébile au développement.  Au cours des prochains mois, il faudra collectivement redoubler d'efforts pour assurer le succès de ces négociations.


Quant aux relations entre démocratie et libre-échange, on sait depuis longtemps que l’échange de marchandises est souvent inséparable de l’échange d’idées.  En outre, les relations commerciales de plus en plus nombreuses que les pays établissent entre eux font que chacun contribue à sa manière à la stabilité politique et au bien-être des autres.


La démocratie, le développement et le libre-échange reposent sur la même conception de l’être humain – à savoir un individu autonome capable de réaliser son potentiel.  Amartya Sen, prix Nobel de la paix, définit dans une large mesure le développement par le degré de liberté qu’il donne aux individus.  Le libre-échange, pour sa part, peut être défini comme la liberté de trouver un marché pour quelque chose que quelqu’un a créé, ou d’acheter quelque chose que quelqu’un d’autre a créé, quelle que soit la distance qui sépare le vendeur de l’acheteur.  D’ailleurs, le désir de troquer, comme le désir d’être libre, est sans doute l’une des plus anciennes caractéristiques connues de l’être humain.


Mais s’il est vrai que les relations entre démocratie, développement et libre-échange ont des aspects positifs, il faut aussi souligner la valeur intrinsèque de la démocratie, indépendamment de ses effets positifs sur le commerce et le développement.


Une des caractéristiques essentielles de la démocratie est l’existence d’une presse libre, capable de remplir sans crainte, et sans être harcelée ou censurée, son rôle indispensable d’information et d’éducation des citoyens.  Une autre caractéristique de la démocratie est la séparation des pouvoirs, à savoir qu’aucune institution ou personne ne peut détenir à elle seule tous les pouvoirs.  Pour bien fonctionner, un gouvernement démocratique doit tenir des consultations.  La tenue d’élections élargit et institutionnalise le principe des consultations.  Elle signifie que les hommes et les femmes ne sont pas seulement des sujets mais aussi des acteurs politiques et des décideurs.


Le terme « démocratie » ne figure pas dans la Charte des Nations Unies, et certains font valoir que ce n’est pas le rôle de l’Organisation de la promouvoir.  Cette conception est peut-être conforme à la lettre, mais certainement pas à l’esprit de la Charte.  La recherche de la dignité humaine sous tous ses aspects est partout présente dans la Charte, et l’Organisation des Nations Unies s’emploie depuis longtemps à faire en sorte que chaque personne puisse exercer les droits reconnus par toute démocratie.  La Déclaration universelle des droits de l’homme – autre document fondamental qui a façonné l’Organisation – stipule que « toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis ».


N’oublions pas non plus que, lorsqu’elle a été créée, l’Organisation n’avait que 51 États Membres.  Aujourd’hui, après le succès éclatant de la décolonisation, elle en compte 192.  La grande majorité de ces Membres supplémentaires étaient auparavant des territoires non autonomes administrés par certains des Membres fondateurs.  Le processus qui les a conduits vers l’indépendance était énoncé dans les Chapitres X et XI de la Charte.  Et c’est en vertu du principe d’autodétermination, qui est l’un des principes fondamentaux de toute démocratie, que l’ONU a encadré ce processus.


Une autre étape importante du travail que l’ONU mène en faveur de la démocratie a été franchie lorsque, il y a deux mois, nous avons reçu la centième demande d’assistance électorale.  Au cours des 15 dernières années, l’Organisation des Nations Unies est devenue le principal prestataire d’aide à la mise en place d’institutions démocratiques.  Nous sommes des experts de l’aide aux pays sortant d’un conflit dans le domaine de l’établissement d’institutions démocratiques, comme le parlement ou les commissions électorales.  Nous apportons aussi un appui au renforcement des systèmes judiciaires, des autorités locales et de la société civile.


L’une des modalités de l’aide apportée par l’ONU est le Fonds pour la démocratie.  Lancé en 2005, le Fonds s’emploie à renforcer le tissu démocratique grâce à des alliances avec les gouvernements, la société civile et d’autres partenaires.  La première série de projets financés par le Fonds a bénéficié à 110 pays.  La majorité des projets était axée sur les droits des femmes, dans la mesure où il ne peut pas y avoir de démocratie si les femmes n’y participent pas pleinement et sur un pied d’égalité avec les hommes.  Le montant des contributions versées à ce fonds par le Qatar est remarquable, et j’espère que d’autres pays suivront son exemple.


Lorsque l’Organisation des Nations Unies mène ce type d’activités, elle veille toujours à respecter la dynamique politique et sociale des pays et elle ne fournit une assistance que lorsqu’un gouvernement le lui demande.  Nous sommes aussi tout à fait conscients du caractère délicat de notre action, et n’ignorons pas que les réformes démocratiques demandées sont parfois interprétées comme des manœuvres visant à dissimuler la volonté d’ingérence d’un État dans les affaires d’un autre État.  On ne peut ni exporter ni importer la démocratie; on peut seulement apporter un appui aux aspirations qui se font jour dans les pays.  Il faut aussi rappeler, comme l’ont fait les participants au Sommet mondial de 2005 dans le document final qu’ils ont adopté, qu’il « n’existe pas de modèle unique de démocratie » et que « la démocratie n’est pas l’apanage d’un pays ou d’une région ».  Les principes fondamentaux de la démocratie – égalité, transparence, obligation de rendre compte, liberté de pensée et d’expression – sont universels.  Mais les modalités varieront toujours d’un pays à l’autre.


Le secteur privé et la société civile ont aussi un rôle très important à jouer.  Le Pacte mondial, qui vise à promouvoir l’idée d’une entreprise citoyenne, fait appel à des entreprises, à des syndicats de travailleurs et à d’autres partenaires en vue de faire respecter les droits de l’homme, d’assurer la sécurité des conditions de travail et la protection de l’environnement, et de combattre la corruption.  Le Bureau de l’ONU pour les partenariats offre une autre grande plateforme à partir de laquelle peut s’engager le dialogue avec les entreprises et d’autres acteurs pour soutenir la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. 


La démocratie n’est pas une garantie de succès, qu’il s’agisse de formuler des politiques ou de les exécuter.  Mais c’est sans aucun doute le moyen le plus puissant et le plus juste de donner à chacun une chance de participer au débat, de régler pacifiquement les différends et de bâtir des sociétés qui fonctionnent bien.  La démocratie signifie aussi que ceux qui prennent les décisions doivent rendre des comptes, et que les citoyens peuvent changer la donne par le biais des élections.


Je vous félicite de l’attention soutenue que vous apportez à ces importantes questions.  C’est la septième fois que vous vous réunissez pour faire avancer le débat à l’échelle mondiale, et je suis heureux d’avoir eu l’occasion d’y participer aussi tôt dans l’exercice de mon mandat.


Nous devons maintenant agir sur trois fronts à la fois:


--    Pour mettre en place des modes de gouvernement transparents et des institutions nationales fondées sur la volonté du peuple;


--    Pour instituer un système d’échanges commerciaux réellement libres;


--    Et pour parvenir au développement durable et à une mondialisation dont tous les habitants de la planète puissent bénéficier.


Je me réjouis à l’avance de collaborer avec vous pour atteindre ces objectifs et donner vie à ces principes, et souhaite que le débat que vous allez tenir au cours des jours qui viennent soit libre et ouvert.


Je vous remercie.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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