CONFÉRENCE DPI/ONG: LE PÉRIL CLIMATIQUE PÈSE SUR LA SURVIE DES PEUPLES AUTOCHTONES ET LA SÉCURITÉ HYDRIQUE
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CONFÉRENCE DPI/ONG: LE PÉRIL CLIMATIQUE PÈSE SUR LA SURVIE DES PEUPLES AUTOCHTONES ET LA SÉCURITÉ HYDRIQUE
Les conséquences des changements climatiques pour les peuples autochtones et sur la sécurité hydrique ont été les sujets saillants abordés par les participants aux différentes tables rondes tenues aujourd’hui dans le cadre de la soixantième Conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales (ONG). Consacrée cette année à l’incidence des périls climatiques sur le bien-être humain, cet évènement réunit du 5 au 7 septembre au Siège de l’ONU quelque 2 000 ONG et partenaires de la société civile représentant 90 pays.
La culture et les savoirs traditionnels des peuples autochtones subissent de plein fouet les conséquences dévastatrices de l’évolution du climat. C’est le constat alarmiste qu’ont dressé les participants à la discussion sur cette question. Dans l’ensemble, ils ont mis l’accent sur l’extension à toutes les régions du globe des menaces à la préservation de modes de vie ancestraux et respectueux de l’environnement.
Un ressortissant du Samoa et directeur de l’organisation « Ole Siosiomaga Society » a ainsi évoqué la situation dans le Pacifique, « continent oublié au profit du géant asiatique et peuplé à 95% d’autochtones ». Il a notamment déploré l’indifférence de la communauté internationale vis-à-vis de Tuvalu, « État Membre des Nations Unies en voie d’être entièrement submergé par les eaux, d’ici à
50 ans », a-t-il dit. Estimant que ce pays méritait le même degré d’attention que les autres États Membres de l’ONU, le panéliste a demandé que cesse la marginalisation des pays du Pacifique.
De son côté, M. Daniel Slau Rogei, ressortissant kényen d’origine masaïe et représentant de l’ONG « Simba Maasai Outreach Organization », a expliqué que le type d’exploitation dont dépend sa communauté pour vivre était déterminé par les changements climatiques, les peuples autochtones en Afrique comme ailleurs étant tenus, selon lui, de respecter l’environnement dont ils tirent les moyens de leur subsistance. M. Rogei a par ailleurs déclaré que le territoire masaï était menacé non seulement par le péril climatique mais aussi par le comportement agressif des entreprises internationales qu’il a accusées de « piller » les ressources de son peuple.
S’exprimant à propos de la situation des peuples autochtones de Sibérie et du Grand Nord, le représentant de l’Association russe des peuples autochtones du Nord a déploré que la disparition d’espèces animales due aux changements climatiques entraînait celle de communautés entières. Face à l’exode de populations de chasseurs poussées sur la route par la fonte des glaciers, l’orateur a exhorté les représentants d’ONG d’appeler l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU, dès cette année, la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. M. Mikhail Todishev a en effet jugé que l’entrée en vigueur rapide de cet instrument permettrait que les peuples concernés puissent faire entendre leur voix et se doter des moyens adaptés à la défense de leurs modes d’existence.
En ce qui concerne l’impact des changements climatiques sur la sécurité hydrique, la Directrice adjointe du Bureau du Rapport mondial sur le développement humaina déclaré que les investissements nécessaires pour garantir cette sécurité à l’échelle mondiale se chiffraient à 10 milliards de dollars par an, le problème des inégalités dans l’accès à l’eau étant, pour l’heure, celui qui se pose de la manière la plus criante. L’intervenante a estimé que pour prévenir une augmentation du réchauffement climatique, à l’origine d’inondations et de contaminations des sources aquifères, des mesures concrètes devaient être prises à court terme.
M. Eilon Adar, Directeur de l’Institut de Zuckerburg pour la recherche d’eau, à l’Université Ben Gourion, a pour sa part estimé que si les changements climatiques sont bien un phénomène naturel, les activités humaines ne font qu’en exacerber les effets néfastes. C’est en ce sens qu’il a plaidé pour une meilleure utilisation de l’eau, des sources alternatives d’énergie, comme l’énergie solaire, devant être mises à profit. À cet égard, l’un des panélistes a estimé que des partenariats renforcés entre le secteur public et le secteur privé pourraient faciliter l’accès à ces sources alternatives encore trop couteuses.
Deux autres tables rondes avaient porté respectivement sur les pratiques d’occupation des sols et sur les politiques de l’énergie.
M. Dickson Despommier, Professeur en santé publique et en microbiologie du Département de l’hygiène de l’environnement de Columbia University, a notamment proposé de revoir l’idée d’agriculture face à l’aggravation des intempéries. Évoquant le projet en cours à New York intitulé « Ferme verticale », le panéliste a expliqué qu’un pâté de maisons de cette ville d’une hauteur de 30 étages pourrait fournir assez de calories pour satisfaire les besoins alimentaires de 50 000 personnes, en employant principalement des technologies déjà disponibles.
Les conférenciers ont également estimé que le marché pouvait être l’activateur principal de la transformation des habitudes de consommation dans le domaine énergétique. De nombreux représentants d’ONG ont par ailleurs appelé de leurs vœux une réduction des budgets militaires au profit de la lutte contre les conséquences du réchauffement de la planète.
La Conférence DPI/ONG tiendra parallèlement deux autres tables rondes demain, vendredi 7 septembre, à 10 heures. Elle achèvera ses travaux dans l’après-midi.
SOIXANTIÈME CONFÉRENCE ANNUELLE DU DÉPARTEMENT DE L’INFORMATION POUR LES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES, INTITULÉE « LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES: NOUS SOMMES TOUS CONCERNÉS »
Table ronde sur la « sécurité hydrique et les changements climatiques »
Mme CECILIA UGAZ, Directrice adjointe du Bureau du Rapport mondial sur le développement humain, a déclaré que les investissements qui seraient nécessaires pour réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) afin de garantir la sécurité hydrique mondiale se chiffraient à 10 milliards de dollars par an. Ce montant, qui ne représente qu’une fraction du budget militaire que les puissances occidentales dépensent chaque année, permettrait d’obtenir en retour des bénéfices d’un montant de 28 milliards de dollars. Le problème des inégalités est donc celui qui se pose de la manière la plus criante en ce qui concerne l’accès à l’eau, a expliqué l’experte, qui a souligné la nécessité pour les gouvernements de le réglementer, puisque cette ressource indispensable fait de plus en plus souvent l’objet de privatisation. Selon les estimations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIECC), plus de trois milliards de personnes dans le monde risquent, à l’avenir, de ne pas avoir accès à l’eau, en particulier en Afrique subsaharienne, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, mais aussi en Inde et en Chine, où la croissance démographique est constante et les problèmes climatiques nombreux. L’accès à l’eau potable dépend aussi de la fonte des glaciers, qui ne doit pas s’accroître, sous peine de poser des problèmes d’inondation et de contamination des sources aquifères, a prévenu Mme Ugaz. Pour y remédier, les températures ne doivent pas augmenter de plus de deux degrés Celsius. Des mesures urgentes sont donc nécessaires pour s’assurer que le réchauffement ne s’accentue encore.
M. EILON ADAR, Directeur de l’Institut de Zuckerburg pour la recherche d’eau, Université Ben Gurion, a fait remarquer qu’actuellement, le Mexique et les États-Unis détournent les eaux du Rio Grande avec de graves conséquences, et qu’Israël assèche le Jourdain et la Mer morte. La Mer morte, a-t-il précisé, ne représente plus que la moitié de ce qu’elle était il y a un siècle. Les changements climatiques sont certes un phénomène naturel, mais les activités humaines ne font que les précipiter. Pour y remédier, il faut commencer par améliorer l’efficacité de l’utilisation de l’eau, a préconisé M. Adar. Il faut aussi trouver de nouvelles sources et investir dans la recherche scientifique. À cette fin, il faudrait adopter une nouvelle politique de développement pour les régions arides et semi-arides qui viserait à progresser vers des méthodes d’exploration et d’exploitation de nouvelles sources d’eau. Des sources alternatives d’énergie, telles que l’énergie solaire, doivent être également mises à profit. Pour sa part, Israël devra s’habituer à retraiter les eaux usées de la Cisjordanie, sans quoi le pays connaîtra de graves problèmes d’approvisionnement à l’avenir, a-t-il prévenu.
Mme ELEANOR B. JONES, Directrice générale d’Environmental Solutions Ltd., a abordé la question de l’approvisionnement en eau, qui est capitale pour toutes les régions, en particulier les Caraïbes, où les ressources ne sont pas toujours suffisantes pour répondre aux besoins des populations locales. Outre un accès parfois éloigné des sources hydriques, Mme Jones a estimé qu’il faut incriminer les catastrophes naturelles auxquelles sont exposés les petits pays insulaires en développement. Les inondations et les ouragans qui touchent régulièrement l’archipel érodent les canaux, provoquent des glissements de terrain et infligent des dégâts aux stations de pompage. Face à cette situation, Mme Jones a suggéré d’adopter des mesures d’atténuation efficaces, de minimiser la contamination et de reconnaître sur le plan politique l’importance d’un accès équitable à l’eau. Ainsi, depuis 2001, des initiatives ont été lancées par les différents pays de la région pour faire face à cette vulnérabilité, notamment dans les domaines du renforcement des capacités institutionnelles, du développement des savoirs scientifiques et de l’aide directe auprès des communautés locales.
M. GALEN FULFORD, Fondateur de l’Institut d’écovillage, a évoqué son expérience de 15 ans en ce qui concerne les problèmes de sécurité hydrique. Il a expliqué que s’il y avait sur le globe une augmentation de l’ordre de six degrés Celsius, de très graves problèmes se poseraient en matière d’accès à l’eau, a-t-il affirmé. Pour redresser la barre, il faut donc travailler avec la nature pour puiser dans la capacité qui existe au niveau microbiologique. Révélant qu’en Chine, il y avait une province dans laquelle les eaux usées sont déversées directement dans des zones piscicoles, M. Fulford a préconisé de mettre en place des méthodes pour réutiliser et recycler l’eau « consommée » dans les zones habitées ou agricoles afin qu’elle réalimente les sources dont elle est tirée. Il a donc souligné la nécessité de substituer une approche « circulaire » à l’approche « linéaire » qui prévaut aujourd’hui dans de nombreux pays. Il faut également réfléchir à de nouveaux moyens d’approvisionnement « décentralisés » en eau pour se prémunir des dégâts que les intempéries peuvent infliger aux infrastructures. Il a enfin recommandé que chacun se fixe des principes aux niveaux personnel, familial et communautaire, pour limiter les émissions de Co2 et la consommation d’eau.
Débat interactif
Répondant à une question, un des panélistes a estimé qu’il était indispensable de nouer des partenariats avec le secteur privé pour mettre en place des politiques de gestion des ressources en eau, en particulier dans le retraitement et le recyclage des eaux usées. Les partenariats entre le secteur public et le secteur privé pourraient également faciliter l’accès aux sources alternatives, qui ne sont pas toujours bon marché. Rappelant qu’en 2016, il faudra doubler la quantité d’eau pour répondre aux besoins des populations du Moyen-Orient, l’un des experts a encouragé le développement des nouvelles technologies de dessalement des eaux des mers et des océans. La science, les connaissances sont là, mais il y a un manque de volonté politique, a-t-il insisté. En réponse à une dernière question, les experts ont unanimement reconnu que le réchauffement climatique et ses conséquences pouvaient être assimilés à une crise mondiale. La réponse à un tel phénomène devrait être celle qu’on apporte à une crise mondiale.
Table ronde sur « les peuples autochtones, culture et savoir traditionnel »
Ouvrant la table ronde par des remarques liminaires, Mme LUCY MULENKEI, Directrice générale d’« Indigenous Information Network », a indiqué que les peuples autochtones étaient parmi les plus vulnérables au monde. Elle a estimé que les problèmes auxquels ceux-ci font face pour, notamment, maintenir en vie leurs traditions et cultures, étaient exacerbés par les effets néfastes des changements climatiques sur leur organisation sociale et leur économie.
De son côté, Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, Présidente du Forum permanent des Nations Unies sur les questions autochtones, a noté que les peuples autochtones de l’Arctique avaient été parmi les premiers à alerter l’opinion internationale sur les conséquences du changement climatique. Les actions lancées par les peuples autochtones à travers le monde ont permis de limiter les dégâts en ce qui concerne les extractions illégales de minerais dans les régions où vivent ces populations très attachées à leurs modes de vie traditionnels, a encore dit l’intervenante.
M. FIU MATA’ESE ELISARA’ULU, ressortissant du Samoa et Directeur d’« Ole Siosiomaga Society », a quant à lui évoqué la situation qui prévaut dans sa région d’origine du Pacifique, qu’il a qualifié de « Continent liquide qui est cependant peuplé de plus de 7 millions d’habitants ». Le Pacifique est également un « continent » oublié au profit du géant asiatique, ce qui rend doublement difficile d’y engager des politiques de développement adaptées aux défis modernes, en particulier en ce qui concerne les réponses à apporter aux effets du réchauffement climatique, a dit l’intervenant. La population du Pacifique est constituée à 95% d’autochtones affectés chaque jour par l’impact de ce phénomène et par la survivance de comportements coloniaux qui contribuent, ensemble, à saper les efforts que déploient de nombreux petits états insulaires, a noté M. Elesara’ulu. L’intervenant a ensuite déclaré qu’il était indigné par l’indifférence entourant, de son point de vue, le sort de Tuvalu, qui est un « État Membre des Nations Unies en voie d’être entièrement submergé par les eaux d’ici à 50 ans. » « Cette nation mérite le même degré d’attention que les autres États Membres, a lancé M. Elisara’ulu », ajoutant qu’il fallait mettre fin à la marginalisation dont souffre l’ensemble de la région du Pacifique.
M. DANIEL SLAU ROGEI, ressortissant kenyan d’origine masaï et représentant l’ONG « Simba Maasai Outreach Organisation », a expliqué que sa communauté était nomade et constituée de petits fermiers qui sont dépendants de l’exploitation de leurs terres traditionnelles. Ce type d’exploitation est dépendant des changements climatiques, les peuples autochtones en Afrique comme ailleurs se devant de respecter l’environnement dont ils tirent les moyens de leur subsistance, a ajouté l’intervenant. Les Masaïs se considèrent eux-mêmes comme faisant partie intégrante de la nature. Leur territoire est menacé non seulement par les changements climatiques, mais aussi par le comportement agressif de certaines compagnies internationales qui « pillent » leurs ressources naturelles, a-t-il regretté.
M. MIKHAIL TODISHEV, représentant l’Association russe des peuples autochtones du Nord, a pour sa part abordé la situation des peuples autochtones de Sibérie et du Grand Nord. Il a indiqué que ces peuples vivant de la pêche, de la chasse et de l’agriculture, étaient confrontés aux mêmes problèmes que leurs homologues africains, leur subsistance dépendant du maintien d’un équilibre environnemental particulièrement « fragile ». L’intervenant a déploré que la disparation de certaines espèces animales, due aux changements climatiques, entraîne celles de communautés entière et, partant, de traditions, de cultures et de langues ancestrales. Pour répondre à l’exode des communautés de chasseurs-cueilleurs poussés sur la route par la fonte des glaciers, l’intervenant a exhorté tous les représentants d’ONG de lancer un appel en faveur de l’adoption, lors de la prochaine Assemblée générale de l’ONU, de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.
Débat interactif
Les participants à la table ronde ont reconnu qu’il faudrait exercer en premier lieu des pressions sur les gouvernements. Ceux-ci doivent être tenus responsables de tout échec qui affecterait la mise en œuvre des grandes conventions, ont-ils dit. Plusieurs intervenants ont rappelé les objectifs définis à l’occasion du Sommet de la terre de Rio, il y a 15 ans, et ont noté que l’essentiel des mises en garde concernant le péril climatique était connu depuis longtemps par les peuples autochtones. Des représentants de ces peuples qui prenaient part aux échanges ont également relevé que l’augmentation constante des températures détruisait chaque année un peu plus les systèmes de transport, sur l’eau comme sur la glace, qui sont indispensables à l’exploitation des ressources naturelles. Il en résulte, ont estimé les participants à la table ronde, un appauvrissement en denrées et, par conséquent, une dégradation des conditions de santé des populations.
M. Marcos Terena, Professeur et expert en savoirs traditionnels et spirituels des autochtones, a pris la parole pour signaler que, d’expérience, il savait combien il est difficile pour les interlocuteurs occidentaux d’engendrer « la voix de la Terre ». Il a cependant formé le souhait que la présente conférence permette que cette voix soit entendue et surtout « comprise ». M. Rogei, qui parlait au nom d’une ONG masaï du Kenya, a, de son côté, appelé les jeunes à s’engager beaucoup en faveur de la défense de la cause des peuples autochtones, tandis que M. Elisara’ulu, des Samoas, a demandé aux gouvernements d’intégrer dans leurs programmes nationaux de développement un volet consacré à cette question. Enfin, M. Todishev, de l’Association russe des peuples autochtones du Nord, a de nouveau estimé qu’adopter rapidement la Déclaration sur les droits des peuples autochtones était la première condition à remplir pour que les peuples autochtones puissent se doter des moyens adaptés à la défense de leurs modes d’existence.
Table ronde intitulée « composer avec les changements climatiques: pratiques optimales d’occupation des sols »
Mme LI XIAOLIN, Vice-Présidente de l’Association populaire chinoise d’amitié avec les pays étrangers, a expliqué que le Gouvernement chinois s’était lancé dans une politique de protection vigoureuse de ses terres cultivables -qui représentent 175 millions d’hectares- en partenariat avec le secteur privé et la société civile. Évoquant la désertification qui frappe le Tibet, Mme Xiaolin a expliqué que l’éducation et la sensibilisation à ce problème étaient devenues indispensables. Pour lutter contre la pollution atmosphérique qui frappe certaines métropoles, comme Beijing, les autorités chinoises sont en train d’installer des conduites de gaz naturel pour limiter l’usage du charbon, très polluant, a indiqué l’experte.
Mme ROSALIND PETERSON, Cofondatrice de l’Agriculture Defense Coalition (ADC) et Présidente de sa section californienne, a dénoncé pour sa part l’usage des pesticides, qui dégradent la qualité des sols, et compromettent l’équilibre des microclimats et les processus de pollinisation. La réduction de la photosynthèse indispensable aux plantes résulte également des traînées que laissent les avions à réaction dans leur sillage. Ces formations gazeuses créent des nuages artificiels qui retiennent la lumière indispensable aux végétaux.
Mme Peterson a expliqué qu’un rapport de 1999 avait établi que les carburéacteurs contenaient du monoxyde de carbone, des composés organiques volatiles et des oxydes d’azote, qui constituent de dangereux polluants.
M. PEKKA PATOSAARI, Directeur du Secrétariat du Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF), s’est interrogé sur les moyens visant à réduire les effets de l’activité humaine et à mieux s’adapter aux changements climatiques. À cet égard, a-t-il souligné, les forêts peuvent jouer un rôle dans ces deux domaines. Les arbres, les sols et les forêts stockent un vaste volume de carbone et représentent 1,2 milliard de tonnes de carbone. La déforestation est la première cause des émissions de dioxyde de carbone provenant des forêts. En Amérique latine, ce phénomène résulte de l’agriculture à court terme et de la production non viable du bois. Le FNUF a adopté cette année un instrument juridiquement non contraignant, qui offre des orientations pour parvenir à une gestion durable des forêts, a rappelé M. Patosaari. Au niveau international, les principaux obstacles à la réduction de la déforestation sont le manque de moyens, une surveillance inefficace et des capacités institutionnelles insuffisantes, a-t-il ajouté.
M. DICKSON DESPOMMIER, Professeur en santé publique et en microbiologie, Département de l’hygiène de l’environnement, École de santé publique Mailman, Columbia University, a évoqué la nécessité de revoir totalement l’idée d’agriculture face à la multiplication des intempéries et des catastrophes naturelles. L’agriculture mondiale subit des pertes considérables, à cause de la combinaison d’un certain nombre de facteurs, à savoir les changements climatiques, les pesticides et la surexploitation. Pour aborder ces problèmes et aussi ceux qui semblent sur le point d’émerger à l’horizon, une méthode alternative pour la production alimentaire existe: la culture de produits alimentaires dans les gratte-ciel. Cette idée semble être une approche nouvelle et pratique pour prévenir un impact plus fort sur le paysage naturel déjà radicalement modifié. Le projet de la Ferme Verticale a été établi en 2001 et se poursuit aujourd’hui à l’École de santé publique Mailman, à New York, a expliqué le Professeur. La Ferme Verticale est encore dans une phase virtuelle, ayant survécu à quatre ans d’analyse critique en salle de cours et d’exposition globale sur l’Internet pour devenir une idée qui mérite d’être considérée sérieusement au niveau pratique, a-t-il plaidé. L’équipe que dirige
M. Despommier a compilé une liste extensive de raisons pour lesquelles l’agriculture verticale pourrait être une solution à toute une gamme de problèmes, tels que la faim, l’augmentation des populations, et la restauration des fonctions et services des écosystèmes (par exemple, permettre aux terres de revenir au processus naturel de séquestration du carbone). Il a été démontré qu’une seule ferme verticale équivalente à un pâté de maisons de New York et d’une hauteur de 30 étages pourrait fournir assez de calories (2 000 par jour et par 50 000 personnes, et principalement en employant des technologies actuellement disponibles, a conclu le panéliste.
Échange interactif
Répondant à une question, Mme Peterson a expliqué que les traînées de fumée que laissent les avions dans leur sillage et dont elle avait parlé dans son exposé ne sont pas seulement imputables aux vols commerciaux, mais aussi aux avions militaires. Elle a ajouté qu’il est tout à fait possible de réduire le niveau des polluants contenus dans le kérosène, pour approcher les taux qui prévalaient dans les années 1960. Interrogé pour sa part sur le caractère juridiquement non contraignant du nouvel instrument sur les forêts, M. Patosaari a reconnu qu’il s’agissait d’un problème majeur qui se posait pour sa mise en œuvre. M. Despommier a répondu à un intervenant que son projet de Ferme Verticale suscitait beaucoup d’intérêt et que l’appui de la société civile ne pouvait que contribuer à sa promotion.
Table ronde sur « les enjeux économiques et politiques de l’énergie et des changements climatiques »
Mme JACQUELINE McGLADE, Directrice exécutive de l’Agence européenne pour l’environnement, a lancé la discussion sur le thème des enjeux économiques et politiques de l’énergie et des changements climatiques en déclarant d’emblée que, parmi les problèmes présentés par les changements climatiques, ceux concernant les domaines de l’énergie et de l’utilisation des terres étaient les plus complexes.
M. RICHARD KINLEY, Directeur exécutif adjoint du Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, a ensuite salué le fait qu’au cours des dernières années, les efforts conjoints de sensibilisation aux problématiques du climat avaient conduit à une reconnaissance mondiale de l’importance des défis qui se posent en la matière. Les travaux scientifiques, notamment, ont permis d’établir un consensus indiscutable sur la responsabilité humaine dans la dégradation du climat, a-t-il noté. Selon le panéliste, il faut à présent accepter l’idée que la croissance économique et la protection de l’environnement doivent aller de pair, des économies fortes donnant aux pays plus de moyens pour contrer efficacement le péril climatique. M. Kinley a ajouté que le débat de haut niveau qui se tiendra dans deux semaines au Siège de l’ONU, à New York, devra, en vue de la Conférence de Bali de décembre prochain, aboutir à des engagements crédibles sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les pays industrialisés ainsi que sur le renforcement de l’appui technique à apporter aux pays en développement.
M. JOHN HOLDREN, Directeur de l’Institut de recherche Woods Hole, a plaidé, à moyen terme, pour une réduction drastique des émissions de dioxyde de carbone. Sur le long terme, a-t-il estimé, seuls des accords contraignants post-Kyoto rendront possible le passage de l’utilisation « délirante » des combustibles fossiles à celle des énergies vertes. Le panéliste s’est également dit favorable à ce que les grandes puissances industrielles prennent des mesures pour aider les pays en développement à mettre un terme à la déforestation.
M. KLAUS SCHEUERER, Représentant du Conseil sur la circulation et l’environnement du groupe BMW, a déclaré que l’industrie automobile avait la volonté de participer à la lutte contre les effets néfastes des changements climatiques. Les dimensions sociales, économiques et écologiques du problème sont liées, a-t-il dit, ajoutant que le plaisir de conduire et la protection de l’environnement pouvaient aller de pair. Le remplacement des énergies polluantes par les biocarburants est une affaire de temps, les stratégies à court terme devant plutôt, selon l’intervenant, se concentrer sur la rationalisation du trafic routier. De même, M. Scheuerer a plaidé pour la construction de véhicules plus légers, qui, en étant moins coûteux, seraient moins polluants car ils consommeraient moins de carburant. Il a ajouté que ces transformations ne seraient possibles que si les gouvernements engagent véritablement leur pays sur la voie de la modernisation de leurs infrastructures industrielles.
Mme BARBARA BRAMBLE, Conseillère principale en matière d’affaires internationales de la « National Wildlife Federation », a expliqué que l’augmentation des températures et de l’humidité, qui est à l’origine du stress hydrique, avait pour effet de favoriser la propagation de maladies infectieuses. Dans ce contexte, les pays les plus exposés sont aussi les plus pauvres, a-t-elle dit, le développement de ces derniers risquant d’être entravé pour longtemps si l’aide technique internationale n’augmente pas.
La Conseillère a ensuite expliqué que son organisation avait mis en place le « Fair Climate Deal », un programme visant à sensibiliser les citoyens américains à la nécessité, chez eux comme à l’étranger, d’investir dans des mesures d’économie d’énergie et d’incitation à l’utilisation de sources d’énergies renouvelables.
Mme ALISON SANDER, Conseillère pour les questions de mondialisation pour le « Boston Consulting Group », a déclaré que l’évolution des mœurs, avec la montée en puissance de la consommation de produits bio, allait entrainer, de la part des gouvernements, une révision de leurs priorités. Cette industrie génère chaque année quelque 100 milliards de dollars de revenus, a-t-elle dit, ajoutant qu’étant donné que ce type d’exploitation agricole dépend lui aussi des conditions climatiques et environnementales, il fallait que les décideurs et les entreprises adaptent leur politique à cette nouvelle donne « verte ».
Débat interactif
Les panélistes, qui répondaient aux questions écrites de la salle, ont parlé d’une seule voix pour signifier que les données scientifiques actuellement disponibles sur les effets des changements climatiques indiquaient qu’une action conjointe, immédiate et de grande ampleur, était nécessaire pour stabiliser au plus vite la situation. Ils ont par ailleurs regretté que trop de temps et de discussions soient consacrés, dans les grandes instances internationales, aux méthodes d’utilisation des fonds dévolus à la lutte contre ces effets. M. Kinley s’est positionné en faveur d’une ouverture accrue du marché aux énergies renouvelables, et ce, par le biais de partenariats privé-public renforcés. « Le marché peut être l’activateur principal de la transformation de nos habitudes de consommation dans le domaine énergétique », a-t-il dit. De nombreux représentants d’ONG ont appelé de leurs vœux une réduction des budgets militaires en faveur d’un meilleur financement de la lutte contre les conséquences du réchauffement de la planète.
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