LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES DU HONDURAS ET LES DISCRIMINATIONS À LEUR ÉGARD PRÉOCCUPENT ÉNORMÉMENT LES EXPERTES DU COMITÉ CEDAW
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Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
Trente-neuvième session
Chambre A - 797e & 798e séances – matin & après-midi
LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES DU HONDURAS ET LES DISCRIMINATIONS À LEUR ÉGARD PRÉOCCUPENT ÉNORMÉMENT LES EXPERTES DU COMITÉ CED AW
Les expertes s’interrogent également sur la volonté politique du Gouvernement hondurien en ce qui concerne la promotion de la parité
La persistance de la violence dont sont victimes les femmes honduriennes, les dures conditions de travail auxquelles elles sont soumises dans les usines de sous-traitance « maquilas », et l’absence d’une réelle volonté politique en matière de promotion du respect des droits de la femme et de la parité ont suscité aujourd’hui l’inquiétude des expertes du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes qui examinaient les quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques combinés du Honduras.
Le Honduras a ratifié la Convention CEDAW en 1983. Ce pays n’a toutefois pas encore ratifié son Protocole facultatif, qui permet aux femmes ou à des groupes de femmes de porter plainte contre les violations de leurs droits auprès du Comité une fois tous les recours nationaux épuisés. Le texte de la Convention est une véritable feuille de route pour garantir le respect des droits de la femme. Chaque État partie à la Convention doit soumettre au Comité, tous les quatre ans, un rapport faisant état des mesures qu’il a prises pour faire respecter le droit de ses citoyennes à une égalité de traitement.
Au cours des séances de questions posées par les membres du Comité à la délégation de l’État partie, Mme Silvia Pimentel, experte du Brésil, a noté que les délits sexuels sont devenus un problème extrêmement grave dans les sociétés latino-américaines, y compris au Honduras. L’experte de la Jamaïque a quant à elle relevé avec consternation que seules les prostituées sont poursuivies par la législation hondurienne, tandis que les proxénètes et les auteurs de trafics humains semblent opérer et vivre dans l’impunité la plus totale dans ce pays. Ce sont ces hommes qui devraient être trainés devant les tribunaux, a-t-elle souligné. Aux maux relevés par les expertes, la délégation de l’État partie, qui était conduite par Mme Selma Estrada, Ministre de la femme, a ajouté que le Honduras connaît également ces dernières années un nombre élevé de crimes qui se traduit notamment par un taux disproportionné d’assassinats de femmes.
La situation des femmes travaillant dans les « maquilas », les usines de sous-traitance travaillant pour des grandes compagnies étrangères, a été évoquée à plusieurs reprises par les expertes. Les femmes représentent 79% des 130 000 personnes employées dans ce secteur et, a relevé l’experte de Maurice, elles sont soumises à des rythmes de travail et de production inhumains pendant des journées de travail extrêmement longues. La délégation hondurienne a cependant défendu le modèle social des « maquilas » œuvrant dans le secteur du textile au Honduras et a signalé que le Gouvernement y améliorait constamment les conditions de travail.
Parlant de la situation des femmes honduriennes en matière de santé, l’experte de la République de Corée l’a qualifiée de « déprimante » et a noté le nombre élevé d’avortements clandestins, et la multiplication des grossesses précoces et des cas de VIH/sida, qui sont devenus autant d’obstacles sur la voie de la promotion sociale des femmes. La délégation de l’État partie a reconnu que l’avortement, qui est interdit par le Code civil hondurien, est une question particulièrement délicate dans le pays. Sur cette question, plusieurs expertes ont constaté que la promotion des programmes d’éducation sexuelle se heurtait à de nombreux obstacles du fait de l’influence des églises et des organisations religieuses dans le pays.
Les expertes ont parfois mis en doute la volonté du Gouvernement hondurien à faire appliquer les termes de la Convention CEDAW. Selon Mme Pramila Patten, l’experte de Maurice, l’appareil judiciaire du Honduras demeure « insensible aux questions de la parité ». À cet égard, les expertes ont relevé qu’aucun tribunal de l’État partie n’avait encore prononcé de jugement en s’appuyant sur les termes de la Convention. Elles ont aussi noté le fait que les Codes de la famille et du travail contiennent trop de mesures qui sont discriminations à l’égard des femmes.
Le Comité CEDAW poursuivra ses travaux demain, vendredi 27 juillet, en chambre A, avec l’examen des quatrième et cinquième rapports périodiques combinés de l’Indonésie.
Pour de plus amples informations, veuillez consulter le site du CEDAW: www.un.org/womenwatch/daw/cedaw.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES: RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL PRÉSESSION
Quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques combinés du Honduras (CEDAW/C/HON/4-6)
Déclaration liminaire
Mme Selma Estrada, Ministre de la femme du Honduras, a indiqué que l’Institut qu’elle dirige a été créé pour promouvoir les droits de la femme, mais que ses effectifs restent limités. Elle a reconnu que le Honduras n’est pas encore à la hauteur des critères requis en matière de collecte de statistiques et notamment en ce qui concerne celles relatives aux violences faites aux femmes. L’Institut national de la femme suit néanmoins toutes les plaintes de violences au foyer et est en collaboration constante avec la Cour Suprême et la police, notamment en ce qui concerne la formation des juges. Le pouvoir judiciaire et la police doivent participer aux efforts de mise en œuvre des articles de la Convention CEDAW, a estimé la Ministre. Mme Estrada a ensuite indiqué que la Cour suprême du Honduras procède actuellement à l’élimination des lois qui sont jugées discriminatoires à l’égard des femmes. Elle a signalé que le « fémicide », ou le taux disproportionné d’assassinats de femmes que connaît le Honduras, est un réel problème et qu’une loi spéciale visant à infliger des sanctions de type pénal aux auteurs de ces meurtres a été promulguée. Les tribunaux se chargent des cas de violences faites aux femmes et un guichet unique relevant de la Cour suprême de justice apporte une aide financière aux femmes ayant peu de ressources. Mme Estrada a également indiqué que l’Institut œuvre pour que la question de la parité soit traitée de manière transversale dans tous les ministères et qu’il a sollicité une aide budgétaire supplémentaire auprès du Gouvernement.
Abordant la question des traditions culturelles, la Ministre a indiqué que le Gouvernement hondurien fait tout son possible pour mettre fin aux pratiques qui nuisent au respect des droits de la femme. À cet égard, les questions touchant à l’éducation, à la participation politique des femmes et à leur participation aux prises de décisions sont particulièrement importantes, a estimé la Ministre. Elle a indiqué que l’Institut national de la femme du Honduras collabore avec plusieurs bureaux chargés de la condition féminine, ce qui permet de sensibiliser les maires de nombreuses municipalités aux questions sexospécifiques.
En ce qui concerne les médias, Mme Estrada a estimé que ceux-ci devaient appuyer les efforts du Gouvernement en matière de promotion et de respect des droits de la femme.
La Ministre a ensuite indiqué que les femmes autochtones sont souvent victimes de discriminations du fait de certaines coutumes traditionnelles encore en vigueur dans le pays. Nous essayons de lutter contre les préjugés en modifiant les manuels scolaires, notamment en mettant l’accent sur l’importance de respecter les femmes, a dit Mme Estrada. D’autre part, une Commission sur l’éducation permet au Gouvernement de se positionner et de promouvoir sa politique dans les régions les plus reculées du pays. Mme Estrada a également signalé que l’analphabétisme est très répandu au Honduras. Pour contrer ce phénomène, plusieurs programmes permettant aux femmes d’apprendre à lire et à écrire en trois mois ont été créés dans plusieurs communes du pays.
Abordant l’éducation sexuelle, la chef de la délégation de l’État partie a rappelé que la question de la propagation du VIH/sida reste très délicate. Nous œuvrons néanmoins pour trouver une solution au problème, a-t-elle signalé. L’Institut national de la femme a demandé que la commande de médicaments rétroviraux destinés au traitement du VIH/sida soit une priorité de l’action du Gouvernement. Les enseignants suivent une formation en matière d’éducation sexuelle, a indiqué la Ministre. Elle a également estimé qu’il est important que le Gouvernement et les organismes de la société civile, dont les médias, collaborent avec les hommes et les sensibilisent à mieux lutter contre le machisme.
Par ailleurs, la Ministre a souligné que le Honduras a jugé qu’il était important de travailler avec les femmes à haut risque, notamment les femmes migrantes. Sur ce point, plusieurs programmes ont été organisés avec des ONG et des organismes comme l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).
S’agissant de la représentation des femmes en politique et dans la vie publique, Mme Estrada a indiqué qu’une loi imposant des quotas est entrée en vigueur en 2005. Il y a maintenant 56 femmes députées au Congrès hondurien et plusieurs femmes dirigent les Comités directeurs du pays. De nombreux progrès ont également été enregistrés au sein des partis politiques du pays. C’est un travail de longue haleine, mais les hommes doivent se rendre compte qu’il s’agit d’une application de la justice, a-t-elle estimé. La Ministre a également signalé que la participation d’organisations féminines à la vie publique et dans la mise en œuvre des politiques et des programmes nationaux était extrêmement importante au Honduras. Ce sont ces organes qui font pression au nom des femmes exclues ou sans emploi, a-t-elle expliqué.
Finalement, la Ministre a indiqué que la Cour Suprême du Honduras devrait se prononcer prochainement sur la ratification du Protocole facultatif de la Convention CEDAW. Nous voulons élaborer un programme pour les femmes, qui permette de créer une société meilleure et un cadre de justice qui défende les femmes, leurs droits et leurs intérêts, a-t-elle conclu.
Dialogue avec les experts
Questions des expertes portant sur les articles 1 à 9
Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a noté avec satisfaction que l’État partie était sur le point de ratifier le Protocole facultatif relatif à la Convention CEDAW. Elle a toutefois enjoint la délégation du Honduras à soumettre plus régulièrement ses rapports au Comité. Saluant ensuite les progrès réalisés dans l’amélioration du cadre législatif du Honduras, l’experte a regretté que les Codes de la famille et du travail contiennent encore trop de discriminations à l’égard des femmes. Ces lois doivent être éliminées, a-t-elle dit, ajoutant que l’appareil judiciaire de l’État partie demeurait à ce stade « insensible aux questions de parité ». L’experte a ainsi exhorté la délégation à renforcer la formation des personnels judiciaires à la question du genre et notamment aux dispositions de la Convention CEDAW. L’experte a également noté que la Convention faisait partie du droit national du Honduras mais qu’aucun tribunal de ce pays n’avait encore prononcé de jugement en s’appuyant sur le texte en question. Elle a souhaité savoir quelles mesures avaient été prises pour que les femmes aient un meilleur accès à la justice en cas de violences exercées à leur encontre.
Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, a indiqué que l’Institut national de la femme était l’unité centrale du Gouvernement du Honduras en matière de parité. Le mandat de ce mécanisme est-il bien défini? a-t-elle demandé. L’experte a aussi demandé que plus d’informations claires soient fournies en ce qui concerne l’autorité dont jouit l’Institut au sein de l’appareil politique hondurien. Comment est assuré son fonctionnement? Est-il reconnu et appuyé politiquement de sorte que soit assuré le suivi de la mise en œuvre de la Convention CEDAW? a encore demandé l’experte.
Mme FRANCOISE GASPARD, experte de la France, s’est étonnée que la présente réunion ne constitue que la deuxième occasion de dialogue entre le Honduras et le Comité. Elle a demandé à la délégation à quel niveau s’était effectuée la mobilisation pour que soit confectionné le rapport du Honduras aujourd’hui présenté au Comité. Toutes les administrations ont-elles été impliquées pour mesurer ce qui a été fait pour mettre en œuvre la Convention CEDAW ou, tout simplement, pour faire connaître ce document à tous les acteurs concernés de la société? a demandé l’experte. S’agissant du mécanisme national chargé de l’égalité, Mme Gaspard a souhaité savoir quelle était sa position dans la hiérarchie administrative. A-t-il les moyens de peser sur les différents départements ministériels et dispose-t-il de relais auprès des collectivités territoriales pour diffuser les plans nationaux pertinents?
Poursuivant son intervention, Mme Gaspard a estimé que l’État partie avait mal compris l’article 4.1 de la Convention, qui est relatif aux mesures temporaires spéciales. Le Comité recommande à l’État partie de prendre ces mesures lorsque ses membres constatent que l’égalité de facto est atteinte, que des discriminations perdurent dans des secteurs clefs de la société, comme l’éducation, l’emploi ou encore la participation des femmes aux processus de décision, a-t-elle expliqué.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh, a, elle aussi, fait part de sa préoccupation quant au manque de mesures temporaires spéciales qui auraient dû être prises par le Gouvernement hondurien. La part des femmes et des filles est exceptionnellement basse dans les secteurs clefs de la société hondurienne, a ajouté l’experte, et ce, même s’il y a 56 députées femmes sur 128 élus siégeant au Parlement. Il faudrait adopter des mesures de quotas pour accélérer la promotion des femmes, en définissant au préalable des objectifs concrets et des échéanciers pour parvenir à une véritable égalité dans le domaine de la participation des femmes au processus de décision, a suggéré l’experte. À cette fin, la Constitution du Honduras devrait être en conformité avec la Convention CEDAW, a dit Mme Begum.
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a demandé combien de femmes pouvaient accéder à la Cour suprême de justice pour faire entendre leur cause. Elle a également souhaité savoir ce qu’il advenait des affaires de violences domestiques classées sans suite lorsque les services de police négligent les cas sur lesquels ils sont interpellés.
Mme TIZIANA MAIOLO, experte de l’Italie, a voulu avoir des données sur le nombre d’hommes et de femmes qui travaillent dans les médias honduriens. Elle a également voulu savoir si le Gouvernement avait mis sur pied des programmes de formation pour les femmes désirant travailler dans ce milieu professionnel. Quelle est la nature des programmes télévisuels du pays, a-t-elle demandé, en notant que ceux-ci propagent souvent une image stéréotypée de la femme.
Mme SAISUREE CHUTIKUL, experte de la Thaïlande, a estimé que de réels professionnels devaient traiter les questions sexospécifiques du pays. S’étonnant que l’Institut national de la femme soit financé seulement à hauteur de 0,001% du budget national, l’experte a voulu savoir à combien s’élevait l’aide budgétaire qui avait été demandée au Gouvernement par l’Institut. Elle a également voulu obtenir des précisions sur la nature des efforts de coordination qui sont préconisés entre l’Institut national de la femme et les autres Ministères du Gouvernement du Honduras.
Mme GLENDA P. SIMMS, Vice-Présidente du Comité, intervenant en sa qualité d’experte de la Jamaïque, a abordé la question de la traite des êtres humains et notamment des femmes. Relevant que la législation hondurienne poursuit les prostituées, l’experte a voulu savoir pourquoi ni les proxénètes, ni les auteurs de trafic n’étaient à ce jour passibles de condamnation. Ce sont ces hommes qui doivent être trainés devant les tribunaux, a-t-elle estimé.
Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil, a également insisté sur la question de l’accès à la justice et sur le problème de l’impunité. Elle a signalé que les délits sexuels sont un véritable problème dans les sociétés latino-américaines. Elle a voulu obtenir plus de précisions sur les mesures judiciaires adoptées pour faire face à cette situation.
Répondant à ce premier groupe de questions, la délégation a indiqué qu’elle ferait en sorte que les prochaines réponses aux questions des membres du Comité leur soient livrées à temps.
La délégation a ensuite indiqué que l’actuelle législation nationale du Honduras en matière de respect des droits de la femme est le fruit d’une articulation efficace avec la législation nationale qui elle-même tient compte des instruments internationaux. C’est pour cela que de nombreux membres du secteur judiciaire du Honduras font partie de notre délégation, a-t-elle signalé. Les ONG, par le biais du Congrès national, apportent aussi un soutien important au pays en matière de respect des droits de la femme. Aujourd’hui, la femme hondurienne sait quels types de violences domestiques existent et quels recours existent pour s’en défendre, a déclaré la délégation. Elle a expliqué que l’évolution de la société sur ce point était liée au fait qu’auparavant le pays n’invoquait que rarement les traités internationaux traitant de la promotion et du respect des droits de l’homme. Par ailleurs, le Centre des droits de la femme a énormément œuvré pour promouvoir la pratique de la conciliation et de la réconciliation.
Abordant la question de la formation des forces de l’ordre, la délégation a indiqué que la police nationale compte un effectif de 15 000 hommes. Les programmes d’enseignement contiennent une dimension sexospécifique, et un document unique pour enregistrer les plaintes de violence domestique est en cours de publication. Si un policier ne donne pas suite à une plainte, il est possible de porter plainte contre lui devant le Bureau des affaires internes. Il importe également de former la police de base, notamment pour l’élaboration des procès verbaux, a signalé la délégation. L’Institut travaille avec le Ministère de la sécurité pour assurer une formation continue des forces de l’ordre en matière de respect des droits de la femme. Mais un grand nombre de policiers doivent néanmoins toujours être formés, a convenu la délégation.
La délégation a ensuite indiqué qu’une femme victime de violence domestique peut porter plainte devant le Ministère public, à la police, ou à la Cour Suprême de justice. Le Ministère et la Cour peuvent appliquer des mesures judiciaires pour les cas d’urgences et les condamnations pour violence sexuelle et domestique augmentent. Ceci est un progrès, même si la loi n’est pas toujours appliquée à 100%, a estimé la délégation. Elle a indiqué qu’un bureau chargé des questions sexospécifiques a été crée au sein de la police, ce qui était impensable il y a encore quelques années.
La délégationa ensuite expliqué que l’Institut national de la femme est le seul instrument capable de promouvoir les droits de la femme dans toutes les régions du pays. Les résultats qu’il obtient sont cependant limités du fait de ses faibles ressources. Son financement est en effet dérisoire, a convenu la délégation, notant que ce sont également les femmes qui élisent des hommes machistes à la tête du Gouvernement. Elle a cependant estimé que le Cabinet gouvernemental commence peu à peu à comprendre les problématiques de la discrimination faite aux femmes. La chef de la délégation a également indiqué qu’elle espère que l’Institut national de la femme sera transformé en Secrétariat d’État. Ceci nous permettrait d’obtenir de meilleurs résultats, a-t-elle signalé. Cinquante « Bureaux de la femme » ont été ouverts à travers le pays et la plupart des maires du pays ont soutenu leur création. L’Institut national de la femme compte poursuivre la création de nouvelles alliances, a indiqué la délégation.
Abordant la question de la participation des femmes au fonctionnement des médias, la délégation a signalé que l’Institut national de la femme était parvenu à une véritable transparence en matière de financements et de dépenses. Nous avons ainsi pu former des journalistes qui ne connaissaient pas la problématique de la parité, a-t-elle dit. L’Institut dépend énormément du financement d’organisations étrangères pour assurer la poursuite de ses activités, a-t-elle souligné.
La délégation du Honduras a fait savoir que les stratégies nationales de réduction de la pauvreté comportaient une dimension genre. Elle a noté que le Gouvernement avait mis en place un système de recueil des statistiques pour évaluer au mieux l’utilisation du temps par les femmes honduriennes au foyer. Leurs activités ne sont pas génératrices de salaires mais sont essentielles à l’harmonie de la famille hondurienne. La délégation a ajouté qu’en cas de divorce, les femmes se retrouvaient souvent démunies car, dans la majorité des cas, l’épouse n’est pas propriétaire des biens du ménage. L’État partie a ainsi fait savoir que la réforme du Code de la famille prévoyait que soit reconnu le régime de la communauté des biens au bout de trois ans d’union entre époux.
Questions portant sur les articles 10 à 14
L’experte de la Slovénie a exprimé son inquiétude concernant la loi sur les élections qui prévoit un minimum de 30% de participation des femmes au processus électoral. Le fond de la loi est conforme à la Convention CEDAW, a-t-elle dit, et elle dispose également que les partis politiques adoptent les politiques nationales sur la parité et fassent rapport sur ce point avant la tenue de scrutins nationaux ou locaux. L’experte a souhaité savoir si depuis l’entrée en vigueur de cette loi, une évaluation avait été faite pour savoir si les partis politiques respectent ses dispositions. L’experte a ensuite noté que moins de femmes étaient actuellement en fonctions à la tête des ministères et des districts. De même, a-t-elle encore dit, on compte seulement 28,5% de femmes au sein du corps diplomatique. Avez-vous pris des mesures d’encouragement à la promotion des femmes dans la fonction publique et dans le corps diplomatique?
L’experte de la France a noté qu’à l’occasion des dernières élections au Congrès, le nombre de femmes élues avait augmenté de manière considérable. Elle a demandé à la délégation si cette augmentation était le résultat de la loi de 2004 qui impose un quota de 30% de femmes? Les partis politiques qui n’atteignent pas ces quotas sont-ils sanctionnés? a demandé l’experte de la France. Mme Gaspard a par ailleurs relevé que partout où cette loi sur les quotas était en vigueur, une fois les 30% de participation de femmes atteints, la situation avait tendance à plafonner. Pourquoi, dans ces cas-là, ne pas passer à 40% de participation afin de parvenir à une parité réelle? a-t-elle suggéré.
La délégation a répondu en revenant préalablement sur le thème de la traite. Elle a indiqué qu’en 2004, il apparaissait que 10 000 enfants faisaient l’objet d’exploitation sexuelle à des fins commerciales. Face à cette situation, la délégation a expliqué que les autorités honduriennes, au premier rang desquelles la police nationale et le Bureau du procureur, avaient multiplié les enquêtes et les arrestations, cela en menant des actions communes jusque dans les pays frontaliers de la sous-région à partir desquels se développent des réseaux clandestins.
La délégation a indiqué qu’une ligne téléphonique permet aux femmes dans une situation d’urgence de demander de l’aide. Cependant, cette ligne téléphonique n’est pas accessible dans tous les départements du pays.
S’agissant des engagements pris par les ONG, la délégation a estimé qu’il importait de conduire une évaluation sur la question. Elle a ensuite abordé le problème de l’application de la loi sur l’égalité des chances et le respect du quota de 30% de représentation féminine qu’elle impose. Certains des cinq partis politiques du pays ont respecté ces quotas, mais d’autres ne l’ont pas fait, a expliqué la délégation. La faible représentation des femmes en politique est également due au fait que le tribunal électoral n’a pas fait pression pour faire appliquer cette loi, a-t-elle indiqué. Nous préparons une nouvelle réforme demandant l’inclusion obligatoire des femmes dans les principales réunions à caractère politique qui se tiennent dans le pays, a indiqué la délégation. Par ailleurs, l’Institut national de la femme compte appuyer les efforts de la Coalition des femmes, créée au sein du Parti National du Honduras. La délégation a signalé qu’il y a actuellement huit femmes qui occupent des postes de ministres au Honduras et a expliqué que les Gouverneurs du pays sont nommés par le pouvoir exécutif. Elle a également préconisé l’espacement des élections nationales et régionales du pays.
L’experte de Maurice a évoqué l’absence, dans le rapport de l’État partie, d’informations sur les femmes travaillant dans le secteur informel. Elle a voulu savoir si le Gouvernement traitait de la vulnérabilité des différentes catégories de travailleurs travaillant dans l’informel, en particulier celle des travailleurs domestiques. Elle a également préconisé une meilleure collecte des données à ce sujet. S’agissant des « maquilas », qui sont des usines qui se consacrent à la de sous-traitance pour des firmes étrangères, l’experte a indiqué que les femmes qui y travaillent sont soumises à des rythmes de production inhumains et à des journées de travail extrêmement longues. On leur fait également subir des tests de dépistage de grossesses. Que fait le Gouvernement pour sauvegarder les droits de ces femmes? a demandé l’experte.
L’experte de l’Italie a quant à elle fait part de sa préoccupation vis-à-vis des enfants du Honduras. Tandis que certains d’entre eux sont victimes d’exploitation sexuelle, d’autres doivent travailler dès un très jeune âge alors qu’ils devraient être scolarisés. L’experte a voulu avoir plus de précisions sur les mesures prises par le Gouvernement à leur égard.
L’experte de la République de Corée a qualifié de « déprimante » la situation des femmes honduriennes en matière de soins de santé. Les avortements clandestins, les grossesses précoces et le VIH/sida font obstacle au respect des droits de la femme, a-t-elle estimé. L’experte a exhorté la délégation à pousser son gouvernement à agir rapidement pour trouver remède à cette situation. Elle a également voulu avoir des précisions sur la teneur de l’éducation sexuelle au Honduras et sur l’influence qu’a l’Église catholique à ce sujet.
L’experte du Brésil a également exprimé sa préoccupation face aux difficultés rencontrées pour établir des programmes d’éducation sexuelle dans les écoles du Honduras. Elle a voulu savoir dans quelle mesure les préjugés religieux faisaient obstacle à l’application constitutionnelle de la laïcité au Honduras.
L’experte de la Thaïlande a voulu savoir si une nouvelle loi traitant exclusivement du problème de la traite des êtres humains allait être mise en œuvre. Elle a également voulu savoir si le Honduras avait ratifié le Protocole de Palerme.
L’experte du Bangladesh a voulu savoir si les femmes vivant en milieu rural sont traitées sur un pied d’égalité avec les hommes. Ont-elles accès aux crédits et aux emprunts agricoles? a-t-elle demandé. Elle a également voulu savoir combien d’entres elles bénéficient de la mécanisation de l’agriculture et si elles avaient accès aux services de santé. L’experte a également demandé s’il existait des programmes ciblant les jeunes filles vivant en milieu rural. Qu’en est-il en particulier des programmes de microcrédits? L’experte a également voulu recevoir des informations sur la situation des femmes âgées, handicapées ou autochtones vivant en milieu rural.
L’experte de la Jamaïque a estimé qu’une tragédie se déroulait actuellement au Honduras. D’après la Banque mondiale il y a une inégalité profonde dans le pays. De nombreux enfants nés dans les communautés autochtones et métisses ne sont pas scolarisés, a-t-elle indiqué. L’experte a voulu savoir si le Gouvernement hondurien envisageait de rendre l’éducation obligatoire. Il faut examiner l’interconnexion entre le sexisme et le racisme, et le pays doit adopter des mesures temporaires spéciales pour aider les communautés autochtones, a estimé l’experte de la Jamaïque. Par ailleurs, Mme Simms a voulu savoir ce que faisait le Gouvernement du Honduras en matière d’industrie forestière et de protection de l’environnement. Elle a également évoqué la situation des femmes qui travaillent dans les « maquilas »·.
La délégation a répondu en reconnaissant qu’au Honduras, la contribution des femmes à l’économie informelle était considérable mais qu’elles étaient mal rémunérées. Pour corriger cela, la délégation a fait savoir que des initiatives prises par le Gouvernement avaient permis aux femmes employées de maison d’avoir une assurance sociale. C’est le même type de mesure qui a facilité l’accès au microcrédit dans les zones rurales. L’État partie a en outre estimé que la femme hondurienne ne devait pas être considérée comme un acteur vulnérable, mais plutôt comme un acteur faisant partie à part entière de l’économie nationale. La délégation a ensuite expliqué qu’un nouveau système de prêts, pris en charge par les organisations de femmes dont notamment les coopératives, visait désormais quelque 130 000 femmes. Ces dernières peuvent participer à des cours de formation professionnelle qui les préparent à faire face aux obstacles qu’elles rencontreront en tant que futures chefs d’entreprise. Par ce biais, ces femmes reçoivent des conseils pour trouver un créneau d’activités viable, en particulier au niveau des communautés villageoises où, souvent, la population entière adhère à ce genre de projets professionnels. La délégation a ajouté que l’État apportait son soutien financier dans le cadre de projets de plus grande envergure.
Sur la question de l’accès des femmes aux terres, la délégation a indiqué que la cellule chargée de la question du genre à la Banque mondiale œuvrait conjointement avec les services publics honduriens pour que les femmes participent davantage aux activités agricoles. La délégation a ensuite reconnu que l’échelle de salaires des ouvriers agricoles était très favorable aux hommes, ceux-ci étant considérés de facto comme des chefs de famille, alors qu’ils ne contribuent dans la réalité que faiblement à l’épanouissement du ménage.
La délégation de l’État partie a poursuivi en donnant la parole à un représentant du secteur textile des « maquillas ». Ce dernier a expliqué que la direction des ateliers textiles implantés au Honduras était très attachée à l’amélioration constante des conditions de travail des femmes, qui représentent 79% des 130 000 employés de ce secteur d’activité. Il a défendu le modèle social des maquillas du secteur textile hondurien, qui est « le plus moderne d’Amérique latine », a-t-il dit. Nous formons nos travailleuses et nos salaires sont les plus élevés du pays par rapport aux autres secteurs industriels fournissant des emplois rémunérés, a-t-il dit. Le respect des normes du droit du travail est régulièrement contrôlé par des compagnies très strictes qui, en cas d’entorses répétées au droit, appliquent des sanctions très lourdes. L’intervenant a estimé que les entreprises qu’il représente ne pouvaient pas fonctionner et encore moins prospérer, si les travailleuses subissaient de mauvais traitements. Le secteur textile hondurien occupe la quatrième position en ce qui concerne les exportations vers les États-Unis. Un tel succès n’aurait pas été possible si la réalité était celle que décrivent nos critiques, a conclu l’intervenant.
La délégation a également indiqué que le Honduras organiserait des réunions visant à améliorer la situation des femmes travaillant dans les « maquilas ». S’agissant de la traite, la délégation a indiqué que le projet de Code pénal envisage de pénaliser la traite d’êtres humains à d’autres fins que l’exploitation sexuelle commerciale et a notamment cité les trafics d’organes humains. La délégation a indiqué que le Honduras avait ratifié le Convention de Palerme et espérait que son Protocole le serait bientôt. Elle a également signalé que le Gouvernement connaît les itinéraires utilisés par les trafiquants d’êtres humains qui sont les mêmes que ceux empruntés par les trafiquants de drogues et d’armes.
Abordant les questions soulevées au sujet de la santé, la délégation a fait part de sa préoccupation face au phénomène des grossesses précoces. La diffusion de programmes pornographiques à la télévision préoccupe également les autorités honduriennes. La délégation a reconnu que les pratiques religieuses provoquent souvent une situation de deux poids deux mesures au Honduras. Le pays n’est pas un état fondé sur une base religieuse et il importe de fournir une éducation à la santé sexuelle, a estimé la représentante de l’État partie, en regrettant cependant que de nombreux groupes religieux et églises se soient prononcés contre un guide d’éducation sexuel qui était à l’étude.
Questions de suivi
L’experte du Brésil a tenu à féliciter la délégation pour les efforts qu’elle avait déployés pour faire avancer la ratification du Protocole facultatif de la CEDAW par le Honduras. Elle a également abordé le sujet des arrestations fréquentes d’homosexuels et a voulu connaître la politique du Gouvernement à ce sujet. L’experte a relevé qu’un nombre considérable d’enfants de moins de 14 ans sont employés comme travailleurs domestiques et a indiqué qu’elle était surprise d’apprendre que les « maquilas » du Honduras étaient des « paradis ». S’agissant de l’avortement, l’experte a salué les efforts de prévention du pays en la matière, mais a fait part de son incompréhension lorsque l’on favorise la vie d’un fœtus plutôt que celle de sa mère.
L’experte de la Slovénie est revenue sur la question de l’éducation et a exhorté la délégation à inclure plus de données dans son prochain rapport à ce sujet. Quelles sont les mesures prises pour inscrire la sexospecificité dans le contexte des droits de l’homme et la formation des enseignants? a-t-elle demandé.
L’experte de Maurice est revenue sur la loi sur l’égalité des chances et le fait que celle-ci ne stipule pas clairement la notion de l’égalité entre ressortissants des deux sexes. Existe-t-il des recommandations pour inclure cette dimension dans la loi? a-t-elle voulu savoir. L’experte est également revenue sur les « maquilas » et a convenu que ces usines étaient excellentes pour l’économie du Honduras. Mais les conditions de travail des femmes qu’elles emploient et leur incapacité à faire valoir leurs droits sont le revers de la médaille, a-t-elle affirmé. L’inspection du travail est-elle pourvue en moyens financiers et humains? a-t-elle demandé. L’experte a ensuite demandé à la délégation si elle avait déjà entendu parler des pratiques troublantes qui ont cours dans les « maquilas ». S’agissant de l’article 16, l’experte a voulu savoir si le pays disposait de tribunaux pour la famille et quelle était leur attitude vis-à-vis des femmes. Pourquoi les femmes connaissent-elles des difficultés à obtenir la garde de leurs enfants en cas de séparation? Le Gouvernement envisage-t-il de réviser le Code de la famille pour que celui-ci assure une pleine égalité paritaire?
Répondant aux questions traitant des minorités, la délégation a indiqué qu’il y a deux mois, le Cabinet gouvernemental avait publié un décret concernant exclusivement les groupes minoritaires vivant sur les côtes littorales du Honduras.
S’agissant du travail des enfants, la délégation a expliqué que le Ministère public fait partie d’une équipe technique qui examine l’élimination du travail des enfants. Ce groupe procède à la révision de tous les aspects juridiques qui réglementent le travail des enfants. La délégation a expliqué que le travail des enfants devrait être aboli, mais que plus de 150 000 enfants travaillent du fait de la pauvreté de leur famille. Un projet de loi définit les termes selon lesquels un enfant peut travailler. Le groupe de travail établit actuellement une liste détaillée d’emplois dangereux et une peine de cinq ans est prévue pour les personnes qui exploitent les enfants.
S’agissant des grossesses d’adolescentes, la délégation a indiqué qu’un réseau de 26 cliniques était chargé de recevoir des femmes victimes d’abus sexuels ayant entraîné une maternité. Elle a noté que de nombreuses affaires d’abus étaient présentées devant les tribunaux suite à l’admission de ces victimes. La délégation a expliqué que les personnels médicaux mettaient l’accent sur l’appui psychologique et les soins aux nourrissons, et ce en dépit du sous-équipement de ces établissements.
La délégation a ensuite reconnu que la question de l’avortement était particulièrement délicate à débattre et qu’elle entrouvrait la porte à des situations qui sont parfois pénibles et difficiles. Le Code civil interdit en effet l’avortement mais cela ne signifie que cette pratique a cessé. Au Honduras, sur 1 000 naissances, 108 avortements sont pratiqués en clinique. La délégation a précisé que la Constitution hondurienne consacrait depuis 1982 le principe selon lequel « celui qui doit naître est déjà né ». L’État partie a déclaré que la Commission des droits de l’homme exhortait le Gouvernement du Honduras à revenir sur l’application de ce principe.
La délégation a également reconnu que le manque de statistiques en matière d’éducation posait problème et rendait difficile les progrès sur la voie de la parité dans les établissements éducatifs. La délégation a noté que dans de nombreux secteurs de la vie hondurienne, dont celui de l’éducation, les questions relatives à l’égalité entre les sexes étaient tout à fait nouvelles. Il semblerait que le corps enseignant ne soit pas encore disposé à discuter ouvertement de ces questions, le poids des stéréotypes empêchant la révision et la modernisation des programmes scolaires. Cependant, a signalé la délégation, des progrès ont été accomplis dans le domaine des sciences naturelles et de la représentation du corps humain dans les manuels.
Composition de la délégation de l’État partie
Outre Mme Selma Estrada, Ministre de la femme, la délégation du Honduras était constituée de Mme Vilma Cecilia Morales, Présidente de la Cour suprême de justice; Mme Sonia Marlina Dubón, Magistrate auprès de la Cour suprême de justice; Mme Irma Grissel Amaya, Procureure spéciale pour la femme; Mme Nora Urbina, Procureure spéciale pour les enfants; Mme Doris Cortex, Inspecteur de police; Mme Kenia Irias, de l’Institut national de la femme, et M. Arnaldo Solís, Président de l’Association hondurienne de Maquilas.
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