LES CRIMES D’HONNEUR ET LES VIOLENCES GRAVES À L’ENCONTRE DES PAKISTANAISES INQUIÈTENT LE COMITÉ CHARGÉ DE SUIVRE LA MISE EN ŒUVRE DE LA CEDEF
| |||
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York |
Comité pour l’élimination de la discrimination
à l’égard des femmes
Trente-huitième session
781e et 782e séances – matin et après-midi
LES CRIMES D’HONNEUR ET LES VIOLENCES GRAVES À L’ENCONTRE DES PAKISTANAISES INQUIÈTENT LE COMITÉ CHARGÉ DE SUIVRE LA MISE EN ŒUVRE DE LA CEDEF
Malgré de récentes modifications législatives et la création d’instances juridiques destinées à protéger les femmes pakistanaises, la persistance de traditions discriminatoires a suscité l’inquiétude des membres du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. Les 23 experts indépendants du Comité examinaient pour la première fois la situation des femmes au Pakistan. Ce pays, qui est partie à la Convention CEDEF* depuis 1996, n’a pas adhéré au Protocole facultatif qui permet aux femmes de saisir le Comité pour de graves violations de leurs droits une fois tous les recours nationaux épuisés.
La déclaration qu’a faite le Pakistan lors de la ratification de la Convention CEDEF concernant la supériorité de la Constitution sur la Convention a été dénoncée dès le début du débat par l’expert des Pays-Bas. Cette déclaration s’apparente en effet à une réserve générale sur tous les articles de la Convention. La Constitution de la République islamique du Pakistan est la norme suprême et aucun texte ne peut aller à son encontre, de même qu’aucune loi ne peut violer les lois fondamentales de l’islam, a affirmé la délégation pakistanaise.
Bien qu’une loi de 2004 rende illégaux les crimes d’honneur, les violences graves à l’encontre des femmes persistent au Pakistan. Les jirgas, ou conseils tribaux, condamnent régulièrement des Pakistanaises à la mort ou au viol, ce qu’ont fortement dénoncé les experts du Comité. La violence domestique, qui fait actuellement l’objet d’un projet de loi, est aussi une vraie préoccupation. Le Pakistan est en outre un pays d’origine, de transit et de destination de la traite de personnes, a souligné l’experte de la Jamaïque.
L’une des clefs pour remédier à ces violences faites aux femmes réside dans la lutte contre les stéréotypes, comme l’a indiqué l’experte de l’Égypte, mais également dans l’inscription des femmes sur les registres d’état civil. N’existant pas aux yeux de la loi, de nombreuses Pakistanaises sont en effet exclues automatiquement des programmes mis en place par le Gouvernement. La délégation du Pakistan a indiqué à plusieurs reprises que les médias avaient un rôle très important en matière de lutte contre les stéréotypes à l’encontre des femmes. D’autre part, la délégation pakistanaise a assuré que le Gouvernement allait permettre à toutes les femmes de recevoir leur carte d’identité nationale.
La délégation a en outre affirmé que le Pakistan allait se pencher sur la question des mariages précoces et a convenu que les dispositions sur l’âge minimum du mariage étaient discriminatoires, les filles étant autorisées à se marier à 16 ans et les garçons à 18 ans.
Depuis sa ratification de la Convention, le Pakistan a introduit un ensemble de réformes pour l’autonomisation sociale, économique et politique des femmes. Un Ministère pour le développement des femmes du Pakistan et une Commission nationale de la condition de la femme ont ainsi été créés. Tenant compte des sexospécificités, des mesures ont en outre été adoptées pour l’éducation et l’accès des femmes à la justice. Néanmoins, l’experte de la Slovénie a souligné le manque de ressources financières et humaines de ces instances.
Le Comité poursuivra ses travaux mercredi 23 mai avec l’examen du rapport initial et premier rapport périodique du Mozambique.
* Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES
Rapport initial et deuxième et troisième rapports périodiques combinés présentés par l’État partie (CEDAW/C/PAK/Q/3/Add.1)
M. MAHMOOD SALIM MAHMOOD, Secrétaire au Ministère pour le développement des femmes du Pakistan, a affirmé que son pays prenait toutes ses obligations internationales très au sérieux. La Constitution garantit des droits égaux à tous les citoyens ainsi que la participation des femmes à tous les domaines de la vie nationale. Le Pakistan a ratifié la Convention afin d’affirmer notre détermination à autonomiser les femmes pakistanaises. Néanmoins, et malgré nos efforts, les femmes sont parfois les victimes d’accidents malheureux en raison de mentalités patriarcales et tribales profondément ancrées.
Les mesures prises par le Gouvernement se situent aux niveaux politique, administratif et institutionnel. La question des femmes handicapées est également prise en compte par le Pakistan. Le Plan d’action adopté à Beijing en 1998 établit un ensemble d’actions prioritaires pour le renforcement des capacités des femmes. En 2002, la première Politique nationale pour le développement et l’autonomisation des femmes a été adoptée qui élabore des mesures politiques clefs pour l’autonomisation sociales, économique et politique des femmes. Néanmoins, les traditions sont parfois difficiles à éliminer, a expliqué le représentant, qui a plaidé en faveur d’une politique de tolérance zéro à l’égard des violences faites aux femmes, notamment des crimes d’honneur. Le Représentant a également précisé que des programmes de protection familiale et de sensibilisation de la police étaient prévus dans la Politique nationale pour le développement et l’autonomisation des femmes.
Le Gouvernement est déterminé à répondre très sévèrement aux violences faites aux femmes. Ainsi, une loi contre le crime d’honneur a été adoptée par le Parlement en 2004 et une loi adoptée en 2006 a supprimé le décret Hudood aux termes duquel une femme devait disposer de quatre témoins de sexe masculin pour prouver l’acte d’adultère commis par son mari. Le harcèlement au travail est également devenu un délit grave qui peut être puni et la loi sur la citoyenneté datant de 1951 a été amendée. D’autres initiatives ont été prises pour appuyer les efforts du Gouvernement. Ainsi, une cellule de crise a été formée au Bureau de la police nationale et le Ministère pour le développement des femmes a mis en place des comités de surveillance au niveau fédéral et provincial. Des unités de plainte distinctes ont également été établies dans les commissariats de police, a expliqué le représentant. Enfin, une aide juridique gratuite est disponible pour les femmes afin de faciliter leur accès à la justice.
Une commission nationale sur le statut de la femme a en outre été établie en 2000 pour examiner toutes les questions clefs du développement des femmes. Un Plan d’action pour la réforme en faveur de la parité vient d’être lancé au sein du Ministère pour le développement des femmes. Le Gouvernement pakistanais a par ailleurs exprimé son appui à la budgétisation sexospécifique et plusieurs ministères, notamment le Ministère des finances, ont incorporé divers amendements disposant d’une dimension sexospécifique dans le cadre budgétaire à moyen terme pour 2007/2008.
Le manque de capacités et le faible niveau d’alphabétisation des femmes sont de vrais obstacles, mais le Pakistan a fait des progrès dans ce domaine. L’éducation des femmes connaît une tendance à la hausse, notamment grâce au Plan d’action pour la réforme du secteur éducatif et le Plan d’action pour l’éducation pour tous. Le rapport entre garçons et filles à tous les niveaux d’éducation s’est équilibré, a expliqué le représentant. La pauvreté a un visage féminin, a-t-il ensuite reconnu. Néanmoins, la qualité de vie au Pakistan s’est améliorée. S’agissant du monde rural, de nombreux projets ont également été mis en œuvre afin d’améliorer la condition des femmes rurales, notamment dans le secteur informel. Ainsi, le Fonds national pour l’avancement des femmes rurales fonctionne par le biais de banques nationales tandis que des programmes d’accès au microcrédit ont été mis en œuvre. Il existe également une banque des femmes qui est dirigée par des femmes et s’adresse aux femmes uniquement, a ajouté le Représentant.
L’autonomisation économique des femmes est une priorité pour le Gouvernement du Pakistan, a expliqué la délégation. Le Gouvernement encourage les femmes à travailler à tous les niveaux. Ainsi, des mesures sont prises afin de favoriser leur insertion dans le monde professionnel. Les femmes occupent des postes électoraux importants à tous les niveaux, ce qui assure leur représentation et autonomisation politiques. C’est une révolution, a déclaré le Représentant.
Les médias jouent un rôle très positif au Pakistan, car les femmes sont désormais représentées dans des rôles plus positifs dans les programmes télévisuels.
La délégation a reconnu que des données ventilées par sexe étaient indispensables à l’élaboration d’une politique nationale. Il a insisté sur le rôle proactif que joue la société civile au Pakistan qui a notamment appuyé le Gouvernement dans ses politiques à l’égard des femmes. Le processus d’élaboration du rapport était en outre transparent et toutes les parties prenantes ont été consultées. Mais en dépit de tous ces efforts, beaucoup de progrès restent encore à faire, a reconnu le représentant.
Dialogue avec les experts
Questions portant sur les articles 1 à 6
M. CORNELIS FLINTERMAN,expert des Pays-Bas,a noté la réserve générale du Pakistan sur tous les articles de la Convention. Il est en effet prévu que la Constitution pakistanaise prime en cas de conflit avec une disposition de la Convention. L’expert a voulu connaître les conditions sous lesquelles le Pakistan pourrait retirer sa réserve. Il a aussi émis le souhait que le Pakistan adhère au Protocole facultatif.
Pour sa part Mme NAELA GABR, experte de l’Égypte, a voulu connaître le lien qui existe entre les diverses institutions qui s’occupent du développement de la femme. Quelles sont les dotations financières prévues pour les trois institutions mentionnées, a-t-elle aussi voulu savoir. Relevant ensuite le rôle du Pakistan dans le monde musulman, elle a demandé des précisions sur la législation islamique concernant les femmes.
Mme HEISHO SHIN, experte de la Corée, notant que partout dans le monde les dispositions constitutionnelles ne suffisent pas à garantir la non-discrimination à l’égard des femmes, s’est interrogée sur l’intégration de la Convention dans les lois nationales. Est-ce que les femmes sont informées des amendements adoptés en leur faveur, s’est-elle aussi demandée.
Mme FERDOUS ARA BEGUM, experte du Bangladesh, a ensuite félicité le Pakistan pour ses programmes politiques d’avant-garde. Elle a voulu savoir si, pour la rédaction du rapport, la délégation avait mené des consultations avec les ONG chargées des questions sur le statut de la femme. Elle s’est aussi demandée si l’on pouvait libérer les femmes détenues qui ont été condamnées sur la base de lois pénales discriminatoires. Comment le Gouvernement arrive-t-il à modifier les comportements en faveur de la non-discrimination sans soulever de désordre social, s’est ensuite demandée Mme TIZIANA MAIOLO, experte de l’Italie.
De son côté, la Présidente du Comité etexperte de la Croatie, Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, a considéré que l’égalité des chances n’est pas tout à fait assurée selon la loi et la Constitution pakistanaises. Elle a donc demandé quel mécanisme permettait de remettre en cause des lois non conformes à la Constitution.
Pour répondre à toutes ces questions et remarques, le chef de la délégation a expliqué que la Constitution prévoit l’égalité homme-femme. Il a précisé que 72 membres du Parlement sont des femmes et que 80 femmes siègent au Sénat. La position du Gouvernement est conforme à la Constitution, mais aucune loi ne peut violer les lois fondamentales de l’Islam, a-t-il ajouté. Notre religion est le Coran qui fournit la base du respect des femmes, notamment en leur assurant des droits de succession.
Pour répondre à l’expert néerlandais, une représentante de la délégation a indiqué que le médiateur doit se pencher sur toute plainte déposée en matière de discrimination à l’égard des femmes. La Commission nationale sur le statut de la femme a été créée par le Gouvernement et le Ministère pour le développement des femmes peut s’adresser à cet organe pour avis consultatif, a-t-elle poursuivi. S’agissant des réserves à la Convention, la Commission nationale peut donner des conseils sur leur maintien ou leur abrogation. La représentante a aussi indiqué que le Ministère pour le développement de la femme entretient de nombreux contacts avec des organisations de la société civile. Nous avons aussi élaboré un code pour l’égalité homme-femme, en consultation avec la Commission et les ONG.
Reprenant la parole, le chef de la délégation a ensuite expliqué que la Commission permanente sur le développement de la femme de l’Assemblée nationale a tenu 13 réunions avec le Ministère, dont trois en dehors de la capitale. Tous les interlocuteurs, dont les ONG, ont pu venir participer à la rédaction du rapport soumis au Comité, a ajouté un autre représentant de la délégation. Le paragraphe 89 portant sur la vie de famille, a fait l’objet d’un débat.
La délégation a rappelé que tout État partie est un partenaire souverain et que sa Constitution représente donc sa position juridique de base à laquelle rien ne peut être contraire. Néanmoins, les dispositions de la Convention complètent et ajoutent aux dispositions de la Constitution, a affirmé la délégation. La question de la discrimination dispose d’une importante législation au Pakistan et en des termes très clairs. En outre, la Constitution garantit l’égalité de traitement. L’article 25 de la Constitution précise en effet qu’aucune discrimination ne peut être fondée sur le sexe. Ceci établit très clairement les garanties contre les discriminations. L’esprit de la Convention rejoint celui de la Constitution et leurs textes sont complémentaires, a affirmé la délégation. En outre, le concept de base de l’Islam garantit l’égalité de traitement entre hommes et femmes. Concernant le Protocole facultatif, le Pakistan l’a examiné très profondément et la question de l’adhésion du Pakistan sera abordée en temps voulu.
Le Pakistan a eu recours aux médias pour sensibiliser les femmes à l’existence et aux dispositions de la Convention, a expliqué la délégation. Il existe notamment beaucoup de canaux de communication privés sur lesquels le Gouvernement n’a aucun contrôle. Le Gouvernement encourage également les femmes à avoir accès à la justice et aux professions juridique. Le Fonds pour l’accès à la justice, financé par la Banque asiatique, facilite l’accès des femmes à la justice
et créé une infrastructure de base pour créer un environnement en faveur des femmes pakistanaises. Ce Fonds sert aussi aux infrastructures et aux réformes. En outre, le rapport a été posté sur Internet pour qu’il soit largement disponible à la société civile et le peuple du Pakistan.
Mme SAISUREE CHUTIKUL, experte de la Thaïlande, a estimé que le problème de base provient des lacunes dans l’inscription des naissances et des mariages, ce qui a pour conséquences de priver les femmes d’un grand nombre de services de base, notamment l’accès aux tribunaux. L’experte a demandé à la délégation où en était le système de suivi de la Politique nationale pour le développement et l’autonomisation des femmes et quelles étaient ses actions. Elle a souhaité des explications quant aux différences entre cette Politique et le nouveau Plan d’action pour la réforme en faveur de la parité. Elle a également demandé des précisions sur le lien entre le Ministère et la Commission de la condition de la femme. Elle a souhaité savoir s’ils basaient leurs plans et programmes sur les dispositions de la Convention.
Mme VIOLETA NEUBAUER, experte de la Slovénie, a relevé le manque de ressources financières et humaines des nombreux mécanismes d’amélioration des conditions de la femme. Ces mécanismes souffrent d’un manque de compétence, a-t-elle déclaré. Elle a demandé des informations quant au nombre de personnes travaillant au Ministère pour le développement des femmes, et notamment le pourcentage de femmes. Elle a demandé quelle était la structure de coordination existante au sein du Gouvernement fédéral d’une part et entre le Gouvernement fédéral et les unités provinciales récemment établies, d’autre part. Quelles sont les mesures prises pour renforcer les capacités des fonctionnaires de rang élevé pour s’acquitter du mandat lié à l’application de la Convention, a enfin demandé l’experte.
Mme HANNA BEATE SCHOPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a félicité l’approche participative adoptée par le Pakistan pour la rédaction du rapport. Après avoir noté les efforts de modification juridique entrepris dans le pays, elle s’est demandée s’il restait encore des dispositions discriminatoires dans le droit pakistanais et si une réforme juridique pour examiner toutes les lois au Pakistan était envisagée. En outre, des femmes pakistanaises pourraient ne pas jouir de leur citoyenneté car un certain nombre d’entre elles n’ont pas de carte d’identité nationale. Ceci a en effet des conséquences sérieuses pour les femmes pakistanaises, notamment s’agissant de l’accès aux services et programmes du Gouvernement, à la justice, etc. L’experte a donc sollicité des informations sur les mesures que le Pakistan prévoit en la matière.
Mme FUMIKO SAIGA, experte du Japon, a souhaité obtenir davantage d’information au sujet de la Commission nationale de la condition de la femme.
Le Chef dela délégation a assuré que la Commission nationale sur le statut de la femme, créée en 2002, fonctionnait bien. Sa fonction principale consiste à amender les lois existantes et à essayer de combler les lacunes quand cela s’avère nécessaire. Elle prépare ensuite des recommandations qui sont envoyées au Ministère de la justice et des droits de la personne humaine, a-t-il expliqué. Il faut encore prévoir du personnel supplémentaire pour cette Commission, a-t-il ajouté. Il a aussi assuré les experts de l’indépendance de la Commission, indiquant que le ministre n’a pas le pouvoir d’intervenir dans le processus d’examen des lois par cet organe. Outre la Commission, tout citoyen peut prendre l’initiative de modifier une loi existante, en saisissant l’une des deux chambres, a aussi indiqué le représentant.
Pour sensibiliser les femmes au niveau régional, le Gouvernement fédéral a largement diffusé les informations qui les concernent. Le Gouvernement encourage aussi la participation des femmes aux travaux du Ministère pour le développement des femmes, grâce à des guichets créés à cet effet. Le chef de la délégation a toutefois regretté que le Ministère ne dispose pas de suffisamment de personnel et de moyens financiers. Celui-ci ne compte en effet que trois secrétaires adjoints et six membres du personnel, avec aussi un membre du personnel technique. Le Ministère reçoit des financements de trois programmes, dont le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
Un autre membre de la délégation a indiqué qu’un centre spécialisé veille à la distribution des cartes d’identité aux femmes et que des unités mobiles se rendent dans les villages pour enregistrer celles-ci. Revenant au Plan d’action nationale, un autre membre de la délégation a rappelé que celui-ci avait été élaboré après la Conférence de Beijing, en essayant d’inclure tous les acteurs pertinents, comme les ONG et des experts. C’est le Gouvernement central qui l’a élaboré tandis que ce sont les gouvernements provinciaux qui s’occupent de sa mise en vigueur, a-t-il précisé. Sur le plan financier, le représentant a fait remarquer que la mise en place du Ministère pour le développement des femmes, l’élaboration du Plan d’action pour la réforme en faveur de la parité et de la Politique nationale en faveur de la femme ont entraîné une augmentation des ressources financières allouées à la question de la femme. Nous avons reçu beaucoup d’aide pour cela, a-t-il dit, notamment de la part d’institutions internationales.
L’experte de la Croatie a posé des questions sur les mesures spéciales et temporaires, notant par exemple que les dispositions relatives aux quotas pour la participation des femmes à la vie politique ne sont pas toujours respectés par toutes les provinces.
Le représentant de la délégation a répondu que, dans le service public, le quota de représentation de femmes est passé de 5 à 10%. Ce quota est valable au niveau fédéral, même s’il n’est pas encore atteint au niveau des gouvernements provinciaux. Il faut encore créer des capacités dans le domaine de l’éducation pour améliorer la formation des employées, a-t-il relevé, notant déjà avec satisfaction que les femmes ont commencé à avoir de meilleurs résultats scolaires que les hommes ces dernières années.
Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a relevé que le manque de données rendait très difficile le suivi des réformes juridiques. L’experte a souhaité savoir si des données sur la violence à l’égard des femmes étaient collectées par l’organisation des statistiques du Pakistan. La loi sur la violence domestique étant en cours d’élaboration, l’experte a demandé quel était le degré de priorité qu’accordait le Gouvernement pour l’adoption de cette loi, ainsi que son contenu précis. Des mesures de protection sont-elles envisagées, a demandé Mme Patten. Elle a également demandé si la définition de la violence allait être élargie et inclure la violence sexuelle, psychologique et morale. Elle a demandé si l’adultère et les rapports sexuels en dehors du mariage étaient toujours criminalisés.
L’experte de l’Égypte a souligné les dangers liés au maintien des stéréotypes négatifs à l’égard des femmes. Cela va à l’encontre des lois de la charia tolérante. En Égypte comme au Pakistan, il y a une recrudescence de ces stéréotypes, a signalé l’experte, qui a demandé ce que le Pakistan faisait pour
lutter contre ce phénomène. Comment l’éducation est-elle abordée et comment l’essence de l’Islam est-elle diffusée, a-t-elle demandé à la délégation. La question de la formation des agents judicaires est très importante et l’experte a voulu savoir ce que le Pakistan faisait en ce sens.
Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a affirmé qu’il fallait accélérer le changement. Elle a aussi signalé qu’à la suite de la criminalisation des crimes d’honneur en 2004 avec l’adoption d’une loi, des centaines de femmes avaient continué à être tuées au nom de l’honneur. Elle a demandé si tous les criminels coupables de ces meurtres avaient été punis. Elle a interpellé la délégation sur le phénomène des femmes brûlées, des attaques à l’acide, des viols et des divorces forcés qui semblent perdurer au Pakistan. La situation exige une campagne de sensibilisation intense qui devrait commencer à l’école.
La délégation a affirmé que des efforts étaient en cours pour modifier les traditions dans le pays. Le meurtre de petites filles n’existe pas au Pakistan et, bien que les crimes d’honneur continuent, tous les efforts sont faits pour parvenir à leur élimination. Les crimes commis avant la loi de 2004 n’étaient pas comptabilisés et, depuis le vote de la loi, de plus en plus de femmes viennent porter plainte. Ce n’est donc pas le nombre de cas qui a augmenté, mais plutôt le nombre de femmes ayant accès à la justice. Il existe une cellule du crime lié au genre qui suit de façon constante les cas rapportés. Il communique ensuite les dossiers aux gouvernements et autorités locales qui sont chargés de mener l’enquête. Le système, qui pourrait certes être plus efficace, fonctionne le mieux possible et le renforcement de cette petite unité est en cours.
Il existe des académies provinciales et des modules de sensibilisation au genre. D’autre part, les juges déjà en poste sont sensibilisés, tout comme les nouveaux entrants dans le système judicaire. Il existe donc une formation intensive et continue du judiciaire. S’agissant de l’ordonnance Hudood, les quatre témoins sont exigés pour l’acte de zina, c’est-à-dire l’adultère, et non pas pour le viol qui, pour être prouvé, exige quant à lui des preuves circonstancielles et un contrôle médical. L’adultère est en effet un crime contre la société, c’est la raison pour laquelle quatre témoins sont requis.
L’adoption de la loi sur la violence domestique, qui vise notamment les mariages forcés, est une priorité suprême. Quant aux données sur la violence faite aux femmes, la délégation est en possession de données qu’elle pourrait mettre à la disposition des délégations. Le comité permanent de l’Assemblée nationale a créé un sous-comité destiné à étudier la loi sur la violence domestique. Les femmes musulmanes sont les égales des hommes, ont le droit de travailler et peuvent garder leurs gains obtenus au travail. En outre, de nombreux programmes de télévision montrent des femmes cheffes de famille. Il existe une carte familiale où tous les membres de la famille sont indiqués et la femme peut être inscrite comme étant le chef de famille. Enfin, les programmes scolaires vont être réétudiés et le Pakistan a entrepris une formation destinée aux personnels de la justice, la police et le corps médical.
Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil, a souhaité que l’action du Gouvernement contre la violence domestique se renforce. Elle a sollicité des informations sur le contenu de la loi contre la violence domestique ainsi que sur son calendrier de promulgation. D’autre part, Mme PIMENTEL a noté que selon la Commission indépendante des droits de l’homme du Pakistan, les crimes d’honneur augmenteraient, notamment en zones urbaines.
L’experte de la République de Corée a noté avec inquiétude les propos diffusés sur certaines radios illégales qui incitent à la violence contre les femmes et qui s’opposent, par exemple, à l’éducation des filles sous prétexte que c’est contraire à l’islam. Elle a aussi demandé des précisions sur la pratique des jirgas, tribunaux coutumiers locaux. Elle a en effet déploré une décision d’un de ces tribunaux qui a condamné à mort deux adolescentes parce qu’elles avaient rendu visite à leur grand-père sans prévenir leurs familles. Enfin, elle a voulu savoir si le nombre de plaintes déposées par les femmes dans les postes de police avait augmenté.
L’experte de la Malaisie a demandé comment sont suivies les plaintes déposées et jusqu’où vont les procédures ainsi entamées. Y a-t-il des pénalités en cas de violation des dispositions protégeant les femmes, a-t-elle aussi voulu savoir.
Le Chef de ladélégation a expliqué qu’à leur arrivée dans le sous-continent indien, les Britanniques avaient décidé que les tribus devaient garder leurs propres règles et lois. Ce sont les Britanniques qui ont alors décidé que le Code pénal britannique ne devait pas s’appliquer et c’est là l’origine des jirgas, même si la situation a largement évoluée depuis, dans le souci grandissant de protéger les droits des femmes. Un autre représentant a expliqué qu’il s’agissait d’un mécanisme alternatif de règlement des litiges à faible coût qui est facile à utiliser, d’où sa popularité au niveau local. En fait, ces procédures ne concernent que des petits litiges, a-t-il précisé, mais il est vrai que les jirgas ont commencé à juger des cas de plus en plus graves.
Passant à la gestion des cellules de crise, le représentant a précisé que celles-ci sont ouvertes 24 heures sur 24 et que leur nombre augmente, 55 cellules devant être opérationnelles l’année prochaine. Les femmes doivent pouvoir s’y rendre immédiatement lorsqu’elles subissent une injustice, a-t-il expliqué. Quant aux émissions de radios illégales, cela reste un problème dans certaines régions, a-t-il convenu.
Les crimes d’honneur sont maintenant davantage portés à la connaissance du public depuis que les médias jouissent de leur indépendance, a poursuivi la délégation, mais cela ne veut pas dire qu’il y en a plus. Au contraire, a affirmé le représentant, il y en a moins qu’avant.
La représentante a précisé qu’en ce qui concerne les femmes handicapées, il existe des écoles spécialisées et des formations professionnelles adéquates pour ces personnes. En outre, une loi du travail interdit la discrimination du fait du handicap.
Abordant la question de la traite des personnes, l’experte du Bangladesh a demandé s’il existait un plan de lutte contre ce crime contre l’humanité. Quel est le nombre d’auteurs de ces crimes qui ont été poursuivis, a-t-elle aussi voulu savoir. Le mariage des petites filles à des hommes plus âgés est un autre problème sur lequel elle a demandé plus de précisions. Est-ce que les abris mis en place pour les victimes de la traite bénéficient aussi aux femmes étrangères, a-t-elle également demandé. Enfin, l’experte a voulu savoir si l’augmentation de l’attribution de cartes d’identité permet de mieux contrôler la traite de femmes et d’enfants.
L’experte de la Thaïlande a remarqué la définition de la traite des personnes dans la loi pakistanaise, mais relevé les différences de traitement entre les victimes nationales et étrangères. Certains fonctionnaires sont impliqués dans la traite de personnes, a-t-elle aussi noté, se demandant si le Pakistan envisageait de prévoir des peines plus élevées pour ces auteurs comme cela se fait dans certains pays.
Pour sa part, Mme GLENDA P. SIMMS, experte de la Jamaïque, a noté que le Pakistan est un pays d’origine, de transit et de destination de la traite de personnes. Or, la position officielle de la délégation n’est pas en accord avec les informations données par les ONG, a-t-elle constaté. Elle a rappelé que beaucoup de jeunes femmes sont envoyées au Moyen-Orient pour accomplir des tâches domestiques ou être mariées de force. Ce sont les auteurs de ces crimes, et non les femmes qui en sont victimes, qui doivent se retrouver en prison, a-t-elle déclaré avec force.
La délégation a souligné qu’il était difficile pour un pays de régler seul la question de la traite. Le Pakistan est conscient de ce problème et a adopté, à ce titre, une ordonnance relative à la prévention et au contrôle de la traite des êtres humains. Cette ordonnance fait clairement la différence entre la victime et le criminel. Après la présente réunion, la question fera à nouveau l’objet de discussions au Pakistan. S’agissant de la traite des femmes en provenance du Bangladesh, la situation est particulièrement difficile. Néanmoins, les peines en matière de traite sont très dures et, si la victime est une femme ou un enfant, la peine est encore plus forte. En outre, les personnes victimes de traite peuvent faire appel à des centres d’aide au Pakistan et elles bénéficient de consultations juridiques gratuites. L’auteur de la traite doit payer une amende permettant de réhabiliter la victime. Il n’y a néanmoins pas de statistiques quant au nombre de personnes ayant versé une telle amende. La nouvelle ordonnance de 2002 sur la traite humaine prévoit que si un enlèvement a eu lieu à des fins sexuelles, les peines sont encore plus sévères. En ce qui concerne les pays voisins, le Pakistan et l’Iran se sont rencontrés à Islamabad pour adopter une politique coordonnée en matière de traite.
Questions portant sur les articles 7 et 8
Mme FRANCOISE GASPARD, experte de la France, a constaté que l’égalité était loin d’être une réalité dans les faits. Les femmes votent moins que les hommes et elles sont inscrites en plus petit nombre sur les listes électorales. La Constitution et la loi pakistanaises assurent une représentation de femmes à l’Assemblée nationale ainsi que dans les assemblées provinciales, a relevé l’experte. Néanmoins, quel est le mode de désignation des femmes dans ces instances? En effet, il semblerait que les femmes ne sont pas élues, ce qui voudrait dire qu’elles jouissent de moins de légitimité que les hommes dans l’exercice de leur mandat. Mme GASPARD a conseillé au Gouvernement pakistanais d’inclure davantage de données statistiques dans son prochain rapport.
L’experte du Portugal a déclaré que les femmes n’étaient pas suffisamment représentées dans les instances politiques, malgré l’imposition de quotas. En outre, elles sont représentées à hauteur de moins de 1% aux postes de haut niveau, c’est donc un domaine dans lequel le Pakistan devrait agir. La présence de femmes dans les tribunaux de niveau supérieur est extrêmement faible a aussi relevé l’experte, qui a souhaité savoir ce que le Pakistan envisageait pour inclure les femmes dans les instances de décision.
Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a relevé que le Pakistan connaissait d’immenses difficultés en raison de frontières communes avec des pays ayant d’énormes problèmes, notamment l’Afghanistan. Le Pakistan a néanmoins fait beaucoup pour les femmes pakistanaises. Celles-ci devraient avoir leur place dans les partis politiques, a affirmé l’experte. Il faudrait songer à élaborer une loi sur les partis qui encourage la participation des femmes et qui n’apporterait des subventions qu’aux seuls partis qui respectent ces quotas. L’experte a noté qu’aucune femme n’avait été nommée à la tête d’institutions locales, il faudrait donc faire quelque chose dans ce domaine. En outre, il serait bon que des femmes soient nommées à des postes stratégiques au sein du Gouvernement. Les femmes devraient être davantage encouragées à occuper des postes à responsabilités.
La délégation a répondu à ces questions, en précisant qu’en vertu de la loi sur les quotas, 17% des sièges sont réservés aux femmes à l’Assemblée nationale et au Sénat. Mais, même sans tenir compte des quotas, les femmes se présentent largement aux élections nationales. En ce qui concerne la magistrature, la délégation a indiqué qu’il faut 15 ans d’expérience et un âge minimum de 45 ans pour être élu juge à la Cour suprême, et que ces postes sont ouverts aux femmes. Au niveau des gouvernements provinciaux, on trouve des femmes secrétaires au plus haut niveau, a ajouté le représentant, et il y a actuellement 7 femmes ministres au Gouvernement fédéral. Le Ministère des affaires étrangères est l’institution qui compte le plus de femmes, avec 18 femmes ambassadrices qui se trouvent notamment en postes à Paris, Sarajevo, Lisbonne, Berne et Londres. Ces femmes ont dû passer un concours. Enfin, le délégué a indiqué que les femmes n’ont accès à la fonction publique de haut rang que depuis les années 1970, expliquant que la promotion se fait ensuite sur la base de l’ancienneté.
Questions portant sur l’article 9
Mme ZOU XIAOQIAO, experte de la Chine, a noté que la loi de 1991 a été amendée pour permettre aux enfants de père n’ayant pas la nationalité pakistanaise d’obtenir cette nationalité par leur mère pakistanaise. La délégation a indiqué que cette loi a permis d’accorder la nationalité à des enfants de maris étrangers, mais pas encore aux maris eux-mêmes. Ces derniers ont déjà pu obtenir des cartes de résidents permanents, mais nous ne disposons pas de calendrier définitif pour arriver au stade où la transmission de la nationalité par l’épouse sera admise, a reconnu la délégation.
Questions portant sur l’article 1 0
L’experte de la Jamaïque a noté les efforts que déployait le Pakistan en faveur de l’éducation des jeunes filles. Il faut que les femmes aient accès à l’éducation, a-t-elle toutefois insisté. Les écoles privées sont surtout fréquentées par les classes moyennes et les plus riches. Il est important que l’éducation des petites filles soit également une priorité dans les écoles publiques des provinces. L’experte a demandé si les cours étaient identiques pour les garçons et les filles. Elle a également souhaité savoir si les cours orientaient les filles vers des secteurs traditionnellement considérés comme féminins, ou si l’éducation était plus ouverte. Les lois sont très répressives dans les zones tribales, a souligné l’experte.
L’expert des Pays-Bas a souhaité un complément d’informations sur la question de la scolarisation des jeunes filles. Il a demandé s’il y avait une différence de scolarisation des jeunes filles en fonction des régions. Il a également interpelé la délégation sur la question de l’abandon scolaire et sur les
mesures que le Pakistan envisageait de prendre dans ce domaine. Enfin, il a demandé à la délégation ce que le Gouvernement pakistanais faisait pour réformer les manuels scolaires qui entretiennent les stéréotypes sur les rôles respectifs des hommes et des femmes.
L’experte du Japon a demandé jusqu’à quel niveau l’éducation était gratuite au Pakistan. Elle a mis l’accent sur le taux élevé d’analphabétisme, notamment chez les jeunes filles qui, pour la plupart, ne reçoivent pas d’éducation primaire. En outre, le rapport ne donne pas de chiffres en ce qui concerne l’éducation secondaire. Elle a demandé si les classes étaient mixtes et si les garçons et les filles jouaient ensemble dans la cour. L’experte a également rejoint les préoccupations de l’expert des Pays-Bas sur la question des manuels scolaires.
Mme DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, a noté que le taux d’alphabétisation des femmes au Pakistan était un vrai défi. Il semblerait que de plus en plus d’intégristes s’élèveraient contre l’éducation des filles et certaines ont donc été obligées de quitter l’école. Comment réagit le Gouvernement pour mettre un terme aux activités de ces intégristes, a demandé l’experte.
La délégation a déclaré que les personnes passant le concours de la fonction publique préfèrent ensuite s’expatrier. S’agissant de la mixité, il existe des écoles de jeunes filles et de jeunes garçons. Les programmes, les manuels et les examens sont les mêmes. La question des zones tribales devra être abordée, a reconnu la délégation. Le rôle des hommes et des femmes dans les manuels sont actuellement revus afin que les stéréotypes ne persistent pas. L’éducation primaire universelle est une priorité pour le Gouvernement, a affirmé la délégation. Il existe un écart garçons-filles dans l’éducation, mais le Pakistan essaie de le réduire. Le Gouvernement d’une province a récemment attribué une bourse pour les petites filles qui se scolarisent et des déjeuners gratuits ont également été assurés dans les écoles.
Questions portant sur l’article 11
Sur les questions relatives à l’emploi, l’experte de Maurice a constaté une forme d’exploitation de la main d’œuvre des femmes qui travaillent au foyer. Elle a demandé des précisions sur les mesures envisagées pour donner à ces femmes la possibilité d’être plus concurrentielles ainsi que sur la Déclaration de Katmandou citée dans le rapport. Une convention de l’Organisation internationale du Travail (OIT) reconnaît les droits des travailleurs au foyer, a-t-elle rappelé, se demandant si le Pakistan l’avait ratifiée. Elle a toutefois relevé que le Pakistan a ratifié les Conventions 100 (égalité de la rémunération) et 111 (discrimination en matière d’emploi) de l’OIT et voulu savoir comment sont mises en œuvre leurs dispositions. Y a-t-il des sanctions si elles ne sont pas appliquées, a-t-elle demandé.
La délégation a expliqué que la Déclaration de Katmandou concerne les travailleurs du Népal. L’Inde n’a pas ratifié la Convention de l’OIT sur les travailleurs domestiques, mais nous œuvrons dans ce sens, a assuré le représentant. Il a en outre indiqué que 65% de la population pakistanaise vit dans les zones rurales et qu’il est difficile d’obtenir des statistiques à leur sujet. Ces femmes travaillent dans les champs, s’occupent de la volaille, vendent des fruits et légumes, a-t-il expliqué. Un séminaire a d’ailleurs eu lieu à Islamabad en juillet dernier sur cette question. Le représentant a ensuite évoqué la diversification des professions en précisant que les femmes n’occupent pas
uniquement des postes d’enseignantes ou d’infirmières, mais ont maintenant accès à d’autres métiers. Ainsi, nous sommes le premier pays musulman à avoir des pilotes dans l’armée de l’air, a déclaré le représentant, et 30 femmes Casques bleus ont été déployées dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.
Questions portent sur l’article 12
Abordant l’article 12 relatif à la santé, l’experte de la Chine a noté que le taux de mortalité maternelle au Pakistan est de 340 sur 10 000 naissances vivantes. Elle a voulu connaître quel était ce taux dans les villes et quel était celui des zones rurales. Concernant l’avortement, qui est illégal, elle a voulu savoir s’il est considéré comme un crime lorsqu’il est subi par une fille enceinte à la suite d’un viol. Elle a demandé ce que veut dire la délégation lorsqu’elle indique que le Gouvernement va « si possible » modifier la législation sur l’avortement.
Pour sa part, l’experte de la Malaisie a demandé si le Gouvernement avait mené des études pour voir comment les femmes ont accès aux services de santé et quelle catégorie de femmes n’y a pas accès. Elle a mentionné, comme l’experte du Brésil, la question des services contraceptifs dont le taux d’utilisation est faible, selon le rapport. Le Pakistan a-t-il des projets pour améliorer la formation des assistantes de santé, a-t-elle aussi voulu savoir. Elle a aussi demandé des indications sur les soins postavortement.
Toujours sur les questions de santé, l’experte du Brésil a demandé si le Gouvernement lie la question de la pauvreté à celles de la mortalité maternelle et des avortements clandestins. Elle a voulu savoir si le Gouvernement traite du problème des avortements clandestins comme un problème de santé, constatant, comme l’experte de la Malaisie, que c’est l’une des causes de mortalité maternelle.
Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, experte de Cuba, a ensuite demandé si des mesures concrètes avaient été adoptées pour diminuer le taux de fécondité. Elle a aussi voulu savoir si des études sont menées sur les causes du taux de mortalité des femmes. Elle s’est aussi demandée si le personnel médical était formé à reconnaître les signes de violence domestique.
La délégation a déclaré que les difficultés d’accès aux services provenaient du manque de ressources. Le Pakistan est en effet un ancien pays agricole et les infrastructures manquent. Néanmoins, il existe des dispositifs de santé de base dans tous les districts. La planification familiale est devenue une question provinciale et il existe 80 000 assistantes-visiteuses de santé dans le pays. S’agissant du faible taux d’emploi des contraceptifs, il a précisé que cette question était actuellement étudiée au niveau ministériel. Il y a néanmoins eu beaucoup d’amélioration dans ce domaine. Le Gouvernement a formé les dirigeants religieux aux besoins de la planification familiale et cette question doit donc être abordée dans les discours religieux.
En ce qui concerne les traumatismes causés par les actes de violence, il a admis que la plupart des médecins n’étaient pas formés pour faire rapport à la police ou aux autres intéressés, mais que des efforts allaient être menés dans ce sens. Le projet sur la santé des femmes, financé par la Banque asiatique de développement, vise à promouvoir l’accès aux soins de santé des femmes des couches de la population ne recevant aucun service. Le projet a été couronné de succès et des hôpitaux et cliniques régionales ont été créés. Des sages-femmes et des infirmières ont été formées et des équipements ont été fournis. La santé féminine a ainsi été une priorité pour le Ministère de la santé. L’avortement est illégal au Pakistan, car il est considéré comme un assassinat. Néanmoins, il est autorisé pour raisons médicales. Il y a un lien entre les avortements clandestins et la faible utilisation des contraceptifs, a reconnu la délégation. Des campagnes de sensibilisation à la contraception ont donc été menées, mais il y a eu un manque de confiance ces dernières années car la planification familiale a été considérée comme un outil pour tuer des enfants.
Questions portent sur l’article 13
L’experte de la Chine a noté les difficultés qu’éprouvent les femmes pour l’obtention de crédits. Beaucoup de femmes n’ont pas de carte d’identité, ce qui les empêche d’obtenir des prêts. L’experte a souhaité savoir comment le Gouvernement envisageait d’aider les femmes à obtenir leurs papiers d’identité nationale. En outre, certaines femmes ne peuvent pas accéder aux activités sociales et culturelles. Quel type de mesures concrètes prend le Gouvernement pakistanais pour lutter contre ce type de discriminations, a demandé l’experte.
La délégation a indiqué que d’ici la fin de l’année, un nombre maximum de cartes d’identité allait être distribué. Le plan de dotation en cartes d’identité devrait en effet s’accélérer. D’autre part, aucune banque n’a fait état de refus opposé à des femmes demandant un prêt. S’agissant de la First Woman Bank, les femmes en sont les seules bénéficiaires, a précisé la délégation. Le microcrédit est un domaine important pour l’émancipation des femmes au Pakistan et des progrès ont été observés dans ce domaine.
Questions portent sur l’article 14
Mme ANAMAH TAN, experte de Singapour, a demandé quand le Fonds de réduction de la pauvreté au Pakistan avait été créé et quel avait été le succès de cette initiative. Elle a également souhaité connaître le nombre de législatrices représentant les communautés rurales au sein de l’Assemblée nationale. D’autre part, les femmes rurales devraient être consultées dans les stratégies de développement, a affirmé l’experte. Elle a demandé à la délégation si elles étaient consultées et de quelle manière. En outre, la plupart des crimes commis à l’égard des femmes ont lieu dans les zones rurales, mais il n’existe pas de mécanisme pour modifier ces violences dans ces zones. Des efforts ont-ils été faits pour mesurer l’incidence des crimes dans ces régions, a demandé l’experte.
Le Chef de la délégation a précisé qu’il y avait plusieurs femmes rurales élues à l’Assemblée nationale car la majorité de la population votante est issue des zones rurales. D’autre part, le Fonds de réduction de la pauvreté au Pakistan a versé 10 milliards de roupies aux populations rurales depuis cinq ans, ce dont bénéficie un grand nombre de femmes. Des mesures ont été prises pour que toutes les femmes soient impliquées dans les processus de réforme du district. Le maire doit consulter les groupes de femmes avant d’élaborer un budget. S’agissant de la participation des femmes dans les districts, 17 000 femmes ont bénéficié du microcrédit. Enfin, la délégation a reconnu l’absence actuelle de statistiques sur l’avortement des femmes victimes de viol.
Questions portant sur les articles 15 et 16
L’experte du Ghana a noté que certaines lois remontent à un passé lointain. Elle a demandé quel était le processus d’examen de ces lois.
L’experte de l’Algérie, relevant elle aussi la persistance de dispositions antérieures à la création de l’État pakistanais, a indiqué que le statut des minorités ne devait pas être affecté par les lois qui s’appliquent à toute la population selon le droit pakistanais. Elle a donc voulu savoir quelle était la législation qui s’appliquait à la population non musulmane. Est-ce que ce sont les tribunaux musulmans qui se chargent de faire respecter les lois générales, a-t-elle aussi demandé.
Notant ensuite que le mariage est autorisé à 18 ans pour les garçons et 16 ans pour les filles, elle a estimé qu’il s’agissait là d’une discrimination, alors que le Pakistan a adhéré à la Convention sur les droits de l’enfant, sans réserve, Convention qui fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans. Que comptez-vous faire à ce sujet, a-t-elle demandé. Au sujet du divorce, elle a voulu savoir pourquoi la tutelle revient au père et la garde à la mère, alors que le droit musulman n’empêche pas la tutelle conjointe par les parents. Après le divorce, les femmes reçoivent leur part de patrimoine à laquelle elles ne peuvent pas toucher, le mari en ayant la gestion, s’est-elle aussi étonnée.
Quant aux droits de succession, l’experte de l’Algériea voulu savoir pourquoi la possibilité de partager équitablement entre les enfants, filles et garçons, n’était pas prévue alors que cette possibilité existe pour les donations faites du vivant du donateur. Elle a aussi évoqué le problème des mariages forcés, notamment lorsque les filles sont mariées en guise de dédommagement.
L’experte de Singapour a relevé quant à elle que certains ex-maris ne fournissaient pas les documents prouvant la dissolution du mariage, leurs anciennes épouses pouvant par la suite être accusées d’adultère. Y a-t-il des dispositions civiles sur le mariage, a-t-elle aussi voulu savoir, et est-ce que les femmes divorcées peuvent bénéficier d’une pension alimentaire?
Le Chef de la délégation a cité l’article 25 de la Constitution qui garantit l’égalité des droits et le principe de non discrimination basée sur le sexe. Il ne peut donc pas y avoir de loi contraire à ces dispositions, a-t-il assuré. Concernant les mariages forcés, un projet de loi a été présenté pour abolir ce genre de discrimination. Il fera l’objet d’un débat au Parlement et a de bonne chance d’être adopté. Une représentante a ensuite indiqué que le nouveau Code pénal comporte des dispositions prévoyant trois ans d’emprisonnement minimum en cas de mariage forcé, pour le mari, comme pour les parents.
En ce qui concerne les lois des minorités, elles doivent suivre les règles nationales, notamment pour ce qui est de l’état civil, a-t-elle ensuite précisé. En ce qui concerne le divorce, la femme ne dépend pas de son ex-mari pour obtenir les documents prouvant la dissolution du lien conjugal, mais peut les obtenir de la juridiction qui a prononcé le divorce. En outre, c’est bien le père divorcé qui est le tuteur naturel des enfants, mais les tribunaux prennent en compte les intérêts des enfants et la mère peut avoir leur garde. L’islam encourage les femmes à se remarier pour recommencer leur vie, a-t-elle aussi précisé. En ce qui concerne l’héritage, les lois découlent de la jurisprudence islamique et la responsabilité de chef de famille revient à l’homme. Mais ce qu’une femme gagne est sa propriété privée et si elle partage ses richesses avec son mari, cela est considéré comme une faveur.
Concernant l’âge du mariage, les jeunes femmes peuvent en effet se marier dès 16 ans, a reconnu le représentant, mais elles ont le droit de choisir leur époux. Le Pakistan doit cependant se pencher sur la discrimination qui est induite par une différence d’âge de mariage entre les filles et les garçons, ayant en effet ratifié la Convention sur les droits de l’enfant. Il existe aussi des mariages civils devant les tribunaux pour ceux qui ne souhaitent pas un mariage religieux, a confirmé la délégation.
Questions additionnelles
L’experte de Singapour a demandé de quelle manière le pourcentage de personnes handicapées avait été obtenu. Elle a également souhaité savoir à quelles mesures ces femmes avaient accès.
L’experte de Maurice a demandé des précisions sur le projet de loi relatif à la violence domestique. La notion de viol marital a-t-elle été introduite dans ce projet de loi, a demandé l’experte. En outre, il existe 42 lois sur le travail, mais aucune ne concerne le harcèlement sur le lieu de travail. Il existe des décisions du Gouvernement en la matière, mais pas de loi à proprement parler. Quelle en est la raison?
L’experte du Portugal a expliqué que l’amendement à la loi sur les crimes d’honneur permet à celui qui rapporte le crime de l’inscrire soit comme crime d’honneur, soit comme assassinat. Or, les peines étant plus lourdes pour les crimes d’honneur, elle a demandé s’il n’y avait pas là une incitation à rapporter les crimes comme étant des assassinats et non pas des crimes d’honneur.
L’experte de l’Algérie a félicité la délégation pour son rapport. Elle a indiqué que le problème récurrent soulevé par les ONG est celui de l’enregistrement des femmes à tous les stades, c’est-à-dire lors de la naissance, du décès, du mariage et aussi sur les listes électorales. Or, il s’agit là d’une condition essentielle de la visibilité de l’existence des femmes pakistanaises. L’experte a demandé au Chef de la délégation de largement diffuser les résultats des discussions ayant eu lieu à New York avec les experts et lui a conseillé de tenir une conférence de presse en présence des ONG lors du retour de la délégation au Pakistan. La religion est toujours utilisée par les hommes pour mater les femmes, a souligné l’experte.
L’experte du Bangladesh a loué l’initiative de la First Woman’s Bank. Elle a néanmoins demandé comment les femmes pauvres en milieu rural avaient accès au crédit. Elle a en outre souhaité connaître le taux d’intérêt appliqué qui leur est accordé.
Le Chef de la délégation a indiqué que le projet de loi sur la violence au foyer, qui a été discuté de manière approfondie pendant des mois, prévoit des peines sévères et inclut toutes les formes de violence. Ce projet sera bientôt présenté à l’Assemblée nationale, a-t-il assuré.
S’agissant des fonctionnaires coupables de harcèlement, il a indiqué qu’ils peuvent se faire démettre de leurs fonctions s’ils enfreignent les règles du code de conduite qui leur est imposé. Une loi sur le harcèlement sur le lieu de travail est en outre en préparation, qui s’appliquera aux entreprises publiques comme aux sociétés privées. En ce qui concerne la First Women Bank, le Gouvernement participe à hauteur de 38% à son capital, a ensuite indiqué le représentant. Il existe de nombreuses histoires à succès de femmes qui ont lancé une entreprise avec de tous petits montants, s’est-il réjoui, citant ainsi
l’exemple d’une société qui fournit des repas à des compagnies aériennes. Enfin, il a assuré qu’une conférence de presse aura lieu au Pakistan au retour de la délégation pour faire connaître aux Pakistanaises les efforts menés par le pays en leur faveur et les avis des experts.
Une autre membre de la délégation a ajouté qu’une politique avait été mise en place en faveur des personnes souffrant d’un handicap du fait du séisme. Une formation professionnelle est ainsi donnée aux handicapés des deux sexes pour qu’ils deviennent indépendants. Revenant sur les crimes d’honneur, elle a indiqué qu’ils sont punis de 25 ans d’emprisonnement.
Remarques de clôture
Le Chef de la délégation a qualifié d’enrichissant le dialogue avec les experts du Comité. Nous avons pleinement conscience des tâches qui restent à accomplir, a-t-il déclaré. Le Gouvernement poursuivra ses efforts pour appliquer toutes les dispositions de la Convention. Aucune société ne peut progresser sans une participation entière des femmes, a-t-il conclu.
L’experte de la Croatie a encouragé la délégation à poursuivre ses efforts à l’avenir, avec la pleine participation des ONG. Elle l’a aussi encouragée à présenter le prochain rapport à temps, à lever les réserves à la Convention et à ratifier le Protocole facultatif. Elle a enfin souligné l’engagement politique pris par le Gouvernement de lutter contre la violence à l’égard des femmes, notamment la violence au foyer et les crimes d’honneur.
Composition de la délégation de l’État partie
La délégation pakistanaise, qui était dirigée par M. Mahmood Salim Mahmood, Secrétaire au Ministère du développement des femmes, était composée de M. Farukh Amil, Vice-Représentant permanent du Pakistan auprès des Nations Unies, Mme Parveen Qadir Agha, Ancien Secrétaire au Ministère du développement des femmes, M. Syrus Qazi, Ministre des affaires étrangères, Mme Huma Chughtai, Expert technique national, M. Zafar Hassaan Mahmood, Directeur de projet au CEDAW, Mme Mahreen Ishaque, avocate, et M. Bilal Hayee, membre de la Mission permanente du Pakistan auprès des Nations Unies.
* *** *
À l’intention des organes d’information • Document non officiel