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DH/CT/690

LE COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME DISCUTE DE PLAINTES RELATIVES À LA VIOLATION PRÉSUMÉE DU PACTE PAR DES ÉTATS PARTIES

29/03/2007
Assemblée généraleDH/CT/690
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Pacte international relatif

aux droits civils et politiques

Comité des droits de l’homme

Quatre-vingt-neuvième session                              

2450e séance – matin


LE COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME DISCUTE DE PLAINTES RELATIVES À LA VIOLATION PRÉSUMÉE DU PACTE PAR DES ÉTATS PARTIES


Il examine des recommandations visant à renforcer les activités de suivi de ses constatations


Le Comité des droits de l’homme a examiné, ce matin, 12 plaintes déposées par des particuliers à l’encontre d’États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (le Pacte), au titre du suivi des observations finales sur les rapports de ces États et des constatations adoptées au titre du Protocole facultatif au Pacte.  Les experts du Comité ont d’autre part discuté des recommandations du Rapporteur spécial sur les méthodes de travail du Comité des droits de l’homme, concernant la procédure de suivi des constatations et des observations finales.


En vertu du Protocole facultatif habilitant le Comité à examiner les plaintes de particuliers relevant de la juridiction d’un État partie au Pacte, qui est entré en vigueur le 23 mars 1976, 294 communications étaient inscrites à l’ordre du jour du Comité des droits de l’homme à la date du 11 décembre 2006.  Un certain nombre de ces communications a été examiné au cours de cette session du Comité des droits de l’homme ouverte il y a trois semaines.  Cent neuf États parties ont adhéré à ce Protocole facultatif, qui est l’un des deux que compte le Pacte.


Après la présentation du rapport intérimaire par M. Ivan Shearer, expert del’Australie et Rapporteur spécial, sur les différents cas examinés ce matin, les experts ont formulé des observations.  Le Comité a décidé de poursuivre l’examen de 11 affaires et de clore une plainte déposée contre la Pologne.


Communications individuelles


Dans l’affaire Coleman mettant en cause l’Australie, le Comité a regretté le refus de l’État partie d’accepter ses constatations et a décidé de poursuivre le dialogue.  Pour ce cas, le Comité a considéré qu’il y avait restriction de la liberté d’expression et donc violation de l’article 19 puisque l’auteur s’était vu demander une autorisation pour pouvoir tenir un discours politique sur une voie publique en vertu d’une réglementation locale.  L’État partie a fait valoir que la détention de l’auteur ne se justifiait pas simplement à cause du discours tenu sans autorisation, mais aussi à cause du refus de l’auteur de s’acquitter de l’amende qui lui avait été infligée.  Le Comité a indiqué que suite à la présentation par l’État partie d’une réfutation détaillée et raisonnée de son point de vue, les commentaires de l’auteur de la plainte sont à présent attendus pour la fin du mois prochain.


Pour une autre plainte contre l’Australie, l’affaire Brough, qui est relative à la détention d’un jeune aborigène souffrant de profonds troubles mentaux, le Comité a décidé que le dialogue devait également se poursuivre.  En l’espèce, l’État partie a refusé les constatations du Comité selon lesquelles il aurait violé les droits du jeune homme.  Le Comité avait recommandé une réparation sous forme d’indemnité adéquate, mais le Gouvernement a présenté un compte rendu détaillé sur les raisons qui le motivent à ne pas accepter les commentaires du Comité qui attend également lui-même les commentaires de l’auteur de la plainte.


Abordant les affaires impliquant le Bélarus, les experts du Comité ont regretté que l’État partie ait refusé l’avis rendu par le Comité des droits de l’homme dans les affaires Bondarenko et Lyashkevich.  Ils ont précisé que le dialogue continuait et que le Comité et le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme étaient prêts à apporter leur concours à l’État partie pour examiner ses obligations en vertu du droit international concernant l’application de la peine capitale.  Les violations du Pacte invoquées pour ces cas concernent l’article 7 relatif aux mauvais traitements en raison du refus de communiquer la date d’une exécution et le lieu d’un enterrement.  L’État partie a cependant exprimé son désaccord, s’agissant de l’interprétation de cet article par le Comité, considérant que la notion de torture n’est pas étendue à la souffrance morale résultant de sanctions légitimes.  Le Bélarus a, par ailleurs, indiqué que le refus de divulguer le lieu de l’enterrement se justifiait par le fait que ce lieu pouvait devenir un lieu de culte ou de pèlerinage.


Pour ce qui est de l’affaire Svetik, relative à un cas de liberté d’expression au Bélarus, le Comité a décidé de laisser l’affaire pendante.  En l’espèce, l’État partie a considéré qu’il s’agissait d’une ingérence dans le processus démocratique et non d’une limitation de la liberté d’expression.  L’auteur de la plainte a, par ailleurs, fait part au Comité du fait qu’il avait épuisé tous les recours internes.


Toujours concernant le Bélarus, les experts du Comité ont indiqué qu’ils regrettaient que l’État partie refuse leur point de vue dans l’affaire Viktor Korneenko, qui porte sur la liberté d’association, et ont précisé que le dialogue se poursuivait.  Cette affaire concerne une organisation dissoute au motif que son inscription n’avait pas été conforme au droit.  L’État partie a rejeté l’avis du Comité, arguant que l’auteur de la plainte n’avait pas épuisé tous les recours internes.


Passant au suivi d’une plainte à l’encontre du Burkina Faso, le Comité a décidé de ne pas clore le dossier Sankara (Thomas), Président de la République du Burkina Faso, qui avait été condamné à la peine de mort et exécuté.  Le Comité avait recommandé que ses ayants droit perçoivent des dommages-intérêts et qu’il y ait une reconnaissance officielle du lieu de sa sépulture, a rappelé M. Shearer.  C’est ainsi que le pays a reconnu indirectement sa faute, versé des dommages-intérêts importants (434 450 000 FCFA) à la famille et annoncé qu’un monument serait érigé en la mémoire de M. Sankara qui a été élevé au rang de héros national.  Mais, la famille ayant insisté pour qu’une enquête publique soit menée afin d’établir les circonstances du décès, le Comité a décidé de continuer à étudier ce cas dans l’attente de la réponse de l’État partie à la demande de tests ADN.


Pour ce qui est d’un dossier concernant la Jamahiriya arabe libyenne, le Comité a décidé de demander à l’État partie de fournir des explications sur le cas El Ghar et d’émettre un passeport avec une durée de validité normale pour l’étudiante libyenne qui veut poursuivre ses études en Suisse.  M. Shearer a rappelé que la jeune femme concernée s’était vue, dans un premier temps, refuser la délivrance d’un passeport, cet acte étant en contradiction avec l’article 12 du Pacte.  Cette personne a finalement reçu son passeport, mais pour une durée seulement de deux ans, alors que la durée de validité normale d’un passeport est de cinq ans et que ses études sont envisagées pour une durée de trois ans.


S’agissant de l’affaire Fijalkowska concernant la Pologne et qui relève de l’article 9, l’auteur de la plainte a accepté l’offre qui lui a été faite concernant le montant des indemnités.  Le Comité a, de ce fait, estimé que la réparation était satisfaisante et a indiqué qu’il n’avait pas l’intention d’examiner la question plus avant au titre de la procédure de suivi.


Étudiant ensuite l’affaire Correia de Matos, qui met en cause le Portugal, le Comité a considéré que ce cas aboutissait à une impasse, regretté le refus de l’État partie d’accepter ses recommandations et noté que le dialogue se poursuivait.  Jugeant que l’État partie ne semblait pas avoir beaucoup de respect pour le Comité, ce dernier est d’avis de lui réécrire à ce sujet.  Dans cette affaire, un avocat avait demandé au tribunal qui le jugeait le droit de se défendre lui-même.  Mais il avait vu sa demande refusée, en violation de l’article 14 du Pacte, a estimé le Comité, puisque l’auteur de la plainte s’était vu imposer un conseil.


S’agissant de la Fédération de Russie et du cas Zheikov qui porte sur un cas de torture relevant de l’article 7, le Comité a regretté le refus de ses constatations par l’État partie et a décidé de ne pas clore ce dossier.  Le Comité avait recommandé un recours utile et exécutoire pour que l’enquête soit menée à bien, mais l’État partie a fait savoir que l’auteur n’avait pas épuisé tous les recours internes.


Le Comité a enfin examiné deux affaires concernant l’Ouzbékistan.  Dans l’affaire Bazarov, qui relève des articles 7, 9 et 14 du Pacte, le Comité a décidé de poursuivre le dialogue.  En l’espèce, le Comité avait jugé le procès inéquitable tandis que l’État partie n’avait pas constaté de violation du droit.  Le Rapporteur du Comité, M. Shearer a indiqué que la législation relative au refus de dévoiler le lieu de l’enterrement était actuellement examinée par le Parlement ouzbek.  S’agissant de l’affaire Kornetov qui porte sur un cas de torture, le Comité a indiqué que son suivi restait pendant.  L’État partie a fait savoir que la Cour suprême avait commué la peine capitale en une peine de 20 ans d’emprisonnement et qu’il n’y avait pas lieu de réduire la peine comme recommandé par le Comité.


En conclusion de l’examen de ces dossiers, Mme Christine Chanet, experte de la France, a constaté que les pays concernés avaient progressé dans la compréhension des mécanismes de contrôle par le Comité.  Le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, de la Colombie, a lui aussi apprécié les résultats positifs constatés et le fait que dans l’ensemble, les États parties respectent leurs engagements. 


Recommandations du Comité des droits de l’homme pour le renforcement des activités de suivi*


Les experts du Comité des droits de l’homme ont poursuivi la réunion en présentant leurs observations sur les recommandations du Groupe de travail intersessions visant à renforcer les activités de suivi des constatations et des observations finales du Comité.  Ces observations étaient présentées par M. Shearer, Rapporteur spécial et expert de l’Australie.  Le Groupe de travail a été constitué en vertu d’une décision prise par le Comité lors de sa vingt-sixième session.  La procédure de suivi a pour objectif de veiller à ce qu’il soit donné effet aux constatations et aux observations finales.  Elle permet non seulement d’assurer une réparation, mais peut aussi avoir une conséquence plus générale quand la recommandation aboutit à une réforme de la législation nationale, comme il est expliqué dans le document de travail examiné par les experts.


Dans les commentaires qu’ont fait les membres du Comité sur ces recommandations, les experts ont soulevé en particulier l’importance de renforcer la communication avec la presse sur les travaux du Comité, abondant ainsi dans le sens de la recommandation faite à ce sujet.  M. Shearer a rappelé que le Haut Commissariat aux droits de l’homme, basé à Genève, avait créé une session des communications l’année dernière, et il a proposé d’établir une relation avec ce bureau au mois de juillet.  Évoquant la tenue de conférences de presse, Mme Chanet a prédit que celle qui aura lieu en juillet à Genève rassemblera de nombreux journalistes, notamment en raison de l’examen du cas du Soudan.  Elle a donc invité le Comité à bien la préparer.


M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, expert de l’Inde, M. Ahmed Tawfik Khalil, expert de l’Égypte, et Mme Zonke Zanele Majodina, experte de l’Afrique du Sud, ont attiré l’attention du Comité sur la nécessité, dans la stratégie de communication à élaborer, de tenir compte de la situation des pays en développement où les activités du Comité sont généralement peu connues.  M. Maurice Ahanhanzo Glélé-Ahanhanzo, expert du Bénin, a d’ailleurs fait remarquer que rares sont les personnes qui peuvent distinguer les compétences respectives du Conseil des droits de l’homme et du Comité.  Mme Elizabeth Palm, experte de la Suède, a quant à elle, regretté la méconnaissance des dispositions du Pacte dans de nombreux pays, y compris dans le sien.  Tout ce qui pourrait rendre plus visible les travaux du Comité est souhaitable, a-t-elle conclu.


Les experts ont aussi abordé la question des visites des membres du Comité sur le terrain.  M. O’Flaherty, expert de l’Irlande, appuyé par Mme Palm, a souhaité que l’un des critères pour ce type de visite soit celui de l’invitation adressée par un État.  Si l’invitation n’est pas spontanée, Mme Chanet a proposé que ces missions de visite soient suggérées et soient négociées, sans toutefois être imposées.  Le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, de la Colombie, a été d’avis de tenir également compte des conditions de faisabilité.


Pour conclure ce débat, M. Shearer a indiqué avoir pris bonne note des propositions de ses collègues.  Trois semaines au moins avant la prochaine session, qui aura lieu à Genève, ses propositions seront communiquées à ses pairs pour avis.


Le Comité des droits de l’homme poursuivra ses travaux demain, vendredi 30 mars, à 10 heures, et achèvera dans l’après midi les travaux de sa quatre-vingt-neuvième session.


* CCPR/C/88/CRP.1

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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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