LES MEMBRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ SOUHAITENT UNE SOLUTION POLITIQUE RAPIDE AUX CRISES DU SOUDAN, DU TCHAD ET DE LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
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Conseil de sécurité
5655e séance – matin
LES MEMBRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ SOUHAITENT UNE SOLUTION POLITIQUE RAPIDE AUX CRISES DU SOUDAN, DU TCHAD ET DE LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, John Holmes, a informé le Conseil de sécurité, ce matin, des résultats de la mission qu’il vient d’effectuer au Soudan, au Tchad et en République centrafricaine, trois pays dont les situations humanitaire et sécuritaire se sont beaucoup détériorées du fait des crises qui les affectent. À l’issue de la présentation que leur a faite M. Holmes, les membres du Conseil de sécurité ont souligné qu’il était urgent de trouver une solution politique aux différents conflits qui touchent la région afin d’y ramener la paix, certains réaffirmant leur volonté de déployer au Darfour une force hybride qui associerait l’ONU et l’Union africaine.
« Les solutions à apporter à chacun de ces cas passent par le dialogue et la médiation entre les acteurs nationaux avec, quand le besoin se fait sentir, une aide et un soutien de l’extérieur », a déclaré M. Holmes au cours de son intervention qui était la première du genre devant le Conseil de sécurité depuis sa prise de fonctions.
S’agissant de la République centrafricaine, où un million de personnes, soit le quart de la population, ont besoin d’une assistance humanitaire, une solution durable à la crise exigerait des autorités qu’elles assument l’obligation qu’elles ont de protéger les populations civiles et de mettre fin à l’impunité, a estimé M. Holmes. Quelle que soit leur bonne volonté, les autorités centrafricaines ne sont pas en mesure de relever seules ce défi, a-t-il néanmoins constaté, en invitant la communauté internationale à apporter des solutions à la crise politique et sécuritaire que connaît la République centrafricaine. Au plan politique, il est urgent que les diverses parties au conflit qui y perdure consentent à un cessez-le-feu et entament des négociations, a-t-il ajouté. Indiquant qu’il fallait rapidement aider la RCA à protéger ses frontières, notamment celle qu’elle partage avec le Darfour, M. Holmes s’est demandé si le déploiement d’une force multidimensionnelle dans le nord-est du pays devait nécessairement être soumis à la volonté des autorités du Tchad d’accepter une présence internationale sur leur propre territoire.
Au Tchad, où dans l’est, des centaines de personnes ont été tuées et des dizaines de villages brûlés depuis l’automne 2006 et où le nombre de réfugiés est passé en quelques mois de 50 000 à 140 000, il est vital que les discussions qui ont lieu entre le Conseil de sécurité et le Gouvernement sur le déploiement de cette force multidimensionnelle aboutissent au plus vite, a plaidé M. Holmes. Une présence sécuritaire internationale est en effet indispensable pour assurer la protection des réfugiés et des personnes déplacées, a-t-il souligné, en assurant aux membres du Conseil que si rien n’est fait pour améliorer la situation sécuritaire dans cette partie du Tchad, la situation humanitaire continuera de s’y détériorer.
L’intervention de M. Holmes coïncidait avec le troisième anniversaire du premier exposé fait au Conseil de sécurité sur la situation au Soudan. Il y a trois ans, 230 travailleurs humanitaires tentaient tant bien que mal d’apporter une aide humanitaire à 350 000 personnes au Darfour, a-t-il rappelé. Aujourd’hui, ils sont plus de 13 000, qui œuvrent à porter assistance à quatre millions de personnes, dont deux millions sont déplacées, a constaté John Holmes. Toutes les parties au conflit du Darfour semblent responsables des violations du droit international humanitaire et des abus contre les droits de l’homme qui y sont commis, a-t-il estimé. Néanmoins, le Gouvernement soudanais a la responsabilité première de protéger sa population, a insisté M. Holmes, en ajoutant que le Gouvernement soudanais devrait mener des enquêtes et traduire en justice les auteurs des violations et des crimes.
Cet avis a été partagé par plusieurs membres du Conseil de sécurité. Le Darfour est au bord de la catastrophe, a ainsi affirmé la représentante des États-Unis, qui a demandé au Gouvernement soudanais de respecter ses engagements et de mettre fin aux restrictions imposées aux travailleurs humanitaires, devenus les cibles de certaines factions. Les défaillances du Gouvernement du Soudan face à la question du Darfour obligent la communauté internationale à s’en mêler, a estimé le représentant de la France. Le Conseil de sécurité ne peut plus attendre longtemps, car c’est le sort des populations du Darfour qui est en jeu, et il doit être prêt à tirer les conséquences de la situation actuelle. Sans l’appui efficace de l’ONU, la communauté internationale ne ramènera pas la paix au Darfour, a souligné pour sa part le représentant de la Fédération de Russie. Comme d’autres, les trois intervenants ont plaidé en faveur du lancement d’une opération hybride au Darfour, qui associerait les forces de paix de l’ONU et celles de l’Union africaine.
À l’instar de nombre de ses collègues, le représentant de l’Afrique du Sud a relevé l’aspect régional de la situation au Darfour, qui a des conséquences sur des pays de la région, comme cela est visible au Tchad et en République centrafricaine. Il a déclaré que sa délégation favorisait une démarche politique au Darfour. Des efforts lancés dans ce cadre permettraient de trouver, en concertation avec les forces rebelles et les autorités gouvernementales, une solution susceptible de ramener la paix dans cette région, a estimé le représentant.
Les représentants des pays suivants se sont exprimés au cours du débat: Ghana, Afrique du Sud, Chine, États-Unis, Belgique, Slovaquie, Congo, Fédération de Russie, France, Pérou, Panama, Indonésie, Italie, Qatar et Royaume-Uni.
LA SITUATION EN AFRIQUE
Exposé
M. JOHN HOLMES, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, a fait aux membres du Conseil de sécurité un exposé sur sa première mission au Soudan, au Tchad et en République centrafricaine. Il a indiqué avoir choisi cette région parce que c’est au Darfour que se déroule en ce moment l’opération humanitaire la plus importante au monde et du fait que la protection des civils y fait face à des difficultés particulièrement importantes.
Évoquant la situation en République centrafricaine (RCA), M. Holmes a affirmé qu’il s’était rendu dans le Nord-Ouest et qu’il n’y existait pas de camps de déplacés à proprement parler. Au contraire, a-t-il précisé, les populations déplacées par les combats qui ont eu lieu entre les rebelles de l’Armée pour la restauration de la République et de la démocratie (APRD) et les Forces armées centrafricaines (FACA), demeurent éparpillées dans la brousse, ce qui rend difficile leur localisation. Ces populations, a indiqué M. Holmes, ont tendance à fuir à l’approche de tout véhicule. Il a souligné que ces personnes lui ont dit, de manière quasi-unanime, avoir fui non pas les rebelles, mais les représailles des Forces armées centrafricaines (FACA) et de la Garde présidentielle. Il est apparent, a-t-il ajouté, que l’État n’est plus présent, sous aucune forme, les populations étant livrées à leur propre sort. D’autres zones de la RCA sont affectées par des situations comparables, a-t-il déclaré.
Les organisations humanitaires estiment qu’un million de Centrafricains, soit environ un quart de la population, ont besoin d’une assistance humanitaire. Le nombre estimé des déplacés internes est passé en moins d’un an de 50 000 à 212 000, a précisé John Holmes, en notant que cette situation risquait encore de s’aggraver dans les mois à venir, notamment pendant la saison des pluies. Il a lancé un appel aux agences des Nations Unies, aux organisations non gouvernementales et aux bailleurs de fonds afin d’avoir plus de partenaires et plus de ressources. Au 31 mars dernier, l’Appel humanitaire des Nations Unies pour la Centrafrique, d’un montant de 54 millions de dollars, n’était encore financé qu’à 18%, a regretté M. Holmes. Une solution durable exige que les autorités centrafricaines assument leur obligation de protection de la population civile et mettent fin à l’impunité, a-t-il ajouté. Les autorités centrafricaines, quelque soit la bonne volonté affichée, ne sont pas en mesure de relever seules ce défi, a-t-il ensuite estimé, en invitant la communauté internationale à prendre ses responsabilités afin d’apporter des solutions politiques et sécuritaires à cette crise politique et sécuritaire.
Au plan politique, a poursuivi M. Holmes, il est urgent que les diverses parties au conflit consentent à un cessez-le-feu et entament des négociations pour pouvoir parvenir à une solution politique durable, comme cela a été recommandé par le groupe des sages. En matière de sécurité, la situation exige une accélération de la réforme du secteur sécuritaire afin de soutenir les efforts déployés par le Gouvernement centrafricain pour rétablir son autorité sur tout le territoire du pays et se doter d’une armée professionnelle. En outre, il est urgent d’assurer une meilleure protection des frontières de la République centrafricaine, notamment avec le Darfour. À cet égard, le déploiement d’une force multidimensionnelle dans le nord de la République centrafricaine doit-il être nécessairement soumis à la volonté des autorités tchadiennes d’accepter une présence internationale sur leur propre territoire? s’est interrogé M. Holmes. Il a évoqué, à cet égard, la possibilité de demander à l’Union africaine et à la CEMAC d’étudier un renforcement du mandat et du rôle des 380 soldats de la FOMUC.
S’agissant de la situation dans l’est du Tchad, M. Holmes a souligné qu’un an après la visite que le Conseil y avait faite, les préoccupations des personnels humanitaires demeuraient. Y trouver des réponses pragmatiques est devenu encore plus indispensable et urgent, a-t-il dit. Depuis la dernière mission sur place du Conseil de sécurité, il y a un an, la situation s’est dégradée d’une manière significative, a-t-il observé. Concentrée sur d’autres objectifs, l’armée tchadienne a de fait abandonné une grande partie de l’est du pays à la loi de milices et de groupes armés en tout genre et de tout bord, entraînant une multiplication des violences ethniques et politiques, a indiqué M. Holmes. Il a dit que depuis l’automne 2006, des centaines de personnes avaient été tuées et des dizaines de villages brûlés. Le nombre des personnes déplacées dans l’est du Tchad est passé, a-t-il précisé, de 50 000 à 140 000 en à peine quelques mois. La militarisation des camps de réfugiés et des sites de déplacés s’est accélérée, tandis que le phénomène des recrutements forcés, y compris d’enfants, devient un problème majeur, a noté le Coordonnateur des secours d’urgence. Il ne fait aucun doute, a-t-il constaté, que la réponse humanitaire doit être plus forte, plus rapide et plus stratégique. Il faut répondre d’une manière mieux coordonnée aux besoins les plus urgents, avant la saison des pluies, a-t-il assuré. C’est pour cette raison, a-t-il ajouté, qu’il a décidé de renforcer la présence d’OCHA au Tchad. De même, M. Holmes a jugé important que les bailleurs financent l’Appel humanitaire pour le Tchad. D’un montant de 174 millions de dollars, celui-ci n’est financé qu’à hauteur de 23%.
Le Secrétaire général adjoint a alerté le Conseil de sécurité sur le fait que si rien n’est fait pour améliorer la situation sécuritaire dans l’est du Tchad, la situation humanitaire continuerait à s’y détériorer. Il est urgent que le Gouvernement tchadien commence à combattre l’impunité et offre sa protection aux populations tchadiennes et aux réfugiés de l’est du pays, a-t-il ajouté. Il est également vital que les discussions en cours entre le Conseil et le Gouvernement sur le déploiement d’une force multidimensionnelle aboutissent au plus vite, a recommandé M. Holmes. Une présence sécuritaire internationale est en effet indispensable pour assurer la protection des réfugiés et des personnes déplacées, a-t-il souligné.
S’agissant de la situation au Soudan, M. Holmes a rappelé que cette semaine marquait un triste anniversaire, car c’est le 6 avril, il y a trois ans, que le Conseil a entendu le premier exposé consacré au Darfour. Il y a trois ans, 230 travailleurs humanitaires tentaient tant bien que mal d’apporter une aide humanitaire à 350 000 personnes au Darfour. Aujourd’hui plus de 13 000 travailleurs humanitaires tentent d’y porter assistance à quatre millions de personnes, dont deux millions sont déplacées, a déploré M. Holmes. Aujourd’hui, a-t-il précisé, malgré la basse intensité des affrontements entre les forces gouvernementales et les groupes rebelles, des incidents violents se produisent tous les jours, qu’il s’agisse d’affrontements tribaux ou d’attaques menées par des milices janjaouites ou d’autres groupes contre des villages. Ceci entretient un climat généralisé de violence et d’impunité. Les victimes se trouvent principalement parmi la population civile. Les besoins humanitaires continuent de s’accroître, la communauté internationale fournissant 95% des 800 millions de dollars dépensés chaque année.
Au cours des six derniers mois, environ 250 000 personnes innocentes et chassées de leurs foyers sont venues grossir les rangs des réfugiés qui cherchent principalement à se mettre à l’abri des attaques de milices soutenues par le Gouvernement soudanais, a accusé M. Holmes. Désormais, un tiers de la population du Darfour est déplacé, soit 2,2 millions de personnes. À ce rythme, la moitié de la population pourrait être déplacée au cours des 18 prochains mois. Entre temps, la politisation et la militarisation des camps de réfugiés sont devenues une réalité. De même, les violations du droit humanitaire et les violations des droits de l’homme, notamment dirigées contre les femmes, se poursuivent.
M. Holmes a indiqué que l’opération humanitaire au Darfour a été, à plusieurs égards, un succès dans la mesure où la majorité des 4 millions de réfugiés ont de la nourriture, de l’eau et des conditions d’hygiène de base. « Toutefois, nous n’avons pas réussi à les protéger de la violence et des abus », a-t-il regretté. Il semble que toutes les parties sont responsables des violations du droit international humanitaire et des abus contre les droits de l’homme. Néanmoins, le Gouvernement soudanais a la responsabilité première de protéger sa population, a insisté M. Holmes, en ajoutant que le Gouvernement devait mener des enquêtes et traduire en justice les auteurs des violations et des crimes.
M. Holmes a, par ailleurs, fait état des difficultés d’accès aux populations qui sont dans le besoin. Il y aurait ainsi un million de personnes hors de portée des travailleurs humanitaires. Il y a aussi des obstacles bureaucratiques, a indiqué M. Holmes, en précisant qu’il s’était vu refouler à un point de passage lors de sa visite. Il a néanmoins fait état de certains progrès, qui se sont matérialisés par la signature entre le Gouvernement soudanais et les Nations Unies d’un communiqué conjoint afin d’alléger le poids de la bureaucratie en vue de faciliter la fourniture de l’aide humanitaire.
M. Holmes a insisté sur la menace que représentent les conséquences des violences à l’encontre des travailleurs humanitaires, qui font l’objet d’attaques verbales et physiques. Aucune des parties ne peut clamer son innocence à cet égard, a-t-il estimé. Il est revenu, dans ce contexte, sur les allégations du Gouvernement soudanais selon lesquelles certaines ONG se seraient lancées dans des activités « politiques » ou d’« espionnage » et a souhaité que ce type d’allégations cesse. Il a, par ailleurs, fait part de ses condoléances aux familles des cinq soldats de la paix de l’Union africaines ayant perdu la vie dimanche dernier au Darfour, leur mort reflétant, selon lui, une politique délibérée visant à cibler ceux qui sont venus aider.
M. Holmes a conclu en précisant que la situation au Darfour se fragilise de jour en jour. Le moral y est bas et les travailleurs humanitaires y font face à des pressions croissantes. Si la situation ne s’améliore pas et si les attaques à l’encontre des travailleurs humanitaires se poursuivent, certaines organisations pourraient se retirer et nous devrions faire face à une catastrophe humanitaire, a-t-il prévenu. Le Gouvernement soudanais a une responsabilité particulière à cet égard, a-t-il indiqué.
M. Holmes a appelé la communauté internationale à ne pas se laisser distraire par le conflit au Darfour en insistant sur l’importance de la mise en œuvre de l’Accord Nord-Sud. Il a aussi souligné l’importance de relancer les pourparlers entre l’Armée de résistance du Seigneur et le Gouvernement de l’Ouganda. Ceci aiderait à stabiliser la République centrafricaine et à régler la situation dans le nord de l’Ouganda, a-t-il indiqué. Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires s’est dit aussi frappé par la complexité des conflits et des situations qui ont cours dans chacun des pays qu’il a visités et par leurs implications régionales. Les solutions à apporter à chacun de ces cas passent par le dialogue et la médiation entre les acteurs nationaux avec, quand le besoin s’en fait sentir, une aide et un soutien de l’extérieur.
M. CHRISTIAN (Ghana) a lancé un appel au Gouvernement du Soudan pour qu’il permette l’accès aux personnels humanitaires et pour qu’il mette fin aux attaques et aux violences contre eux. Le représentant a également demandé à la communauté des donateurs de verser les fonds demandés dans l’appel humanitaire pour le Tchad. Il s’est, en outre, dit préoccupé par les exécutions sommaires menées dans certains groupes en République centrafricaine. Les civils ont droit à la protection, a-t-il déclaré, demandant à toutes les parties de la leur assurer. Il faut trouver des solutions aux problèmes de sécurité dans toutes ces régions, a-t-il conclu.
M. DUMISANI KUMALO (Afrique du Sud) a déclaré avoir toujours fait valoir l’aspect régional de la situation au Darfour qui a en effet des conséquences sur les pays de la région. Le Darfour est la clef de la situation. Cette situation menace également l’Accord général de paix entre le nord et le sud du Soudan, et si on laisse faire les choses, cette situation deviendrait encore plus tragique. Il faut, a plaidé le représentant, un effort politique marqué au Darfour pour trouver, avec les forces rebelles et gouvernementales, une solution susceptible de ramener la paix dans cette région. Les forces de l’Union africaine menacent de partir en juin ou juillet de cette année et dans ce cas de figure, les populations resteraient la proie des milices janjaweed et autres, a prévenu le représentant avant de lancer un appel à la communauté internationale pour qu’elle redouble d’efforts.
M. LIU ZHENMIN (Chine) a affirmé que de longues périodes de sous-développement ont conduit à la pauvreté extrême et à des tragédies humanitaires. Il a estimé que des efforts doivent être faits pour empêcher des catastrophes humanitaires à grande échelle. Il est impératif, a-t-il ajouté, de bien choisir les cibles, de traiter des causes profondes et des symptômes, d’envisager des mesures concrètes et d’éviter de politiser les problèmes humanitaires. Le représentant a ajouté que la communauté internationale doit aider l’Afrique et réduire l’ampleur de la crise humanitaire. Il a lancé un appel aux parties pour qu’elles fassent des efforts collectifs en vue de gérer les crises de manière intégrée ainsi qu’aux bailleurs de fonds pour qu’ils répondent aux besoins humanitaires.
Mme JACKIESANDERS (États-Unis) s’est félicitée de ce que M. Holmes ait choisi de consacrer sa première session à ces trois pays. Elle a exprimé sa préoccupation face à l’aggravation de la situation humanitaire et à la baisse catastrophique des indicateurs sociaux. Le Darfour est au bord de la catastrophe et nous demandons au Gouvernement soudanais de respecter ses engagements et de mettre fin aux restrictions imposées aux travailleurs humanitaires qui sont devenus de véritables cibles, a-t-elle plaidé. Il faut absolument, a-t-elle poursuivi, mettre fin à la violence que subit le personnel humanitaire. La représentante a également évoqué l’augmentation de la violence dans le sud du Soudan, ce qui montre, a-t-elle dit, que le conflit au Darfour a un impact sur les autres régions du pays. Dans ce contexte, elle a appuyé l’idée de déployer une force hybride au Darfour parce qu’il faut mettre fin à la violence et à la souffrance. Il s’agit, a-t-elle affirmé, d’une priorité pour les États-Unis. Il faut que les responsables de ces atrocités rendent des comptes et que le consensus de novembre 2006 à Addis-Abeba soit respecté. Nous demandons instamment au Gouvernement de respecter ses obligations, a encore insisté la représentante.
M. OLIVIER BELLE (Belgique) s’est déclaré très préoccupé par l’aggravation des violences et des tensions au Darfour, et ce, depuis l’été dernier. Les violences contre les civils se poursuivent et les violations graves du droit international se multiplient, a-t-il dit, les qualifiant d’inacceptables. Le représentant a demandé à toutes les parties d’assurer la protection des civils. Le Gouvernement du Soudan doit mettre fin à l’impunité et arrêter sans délai les responsables pour qu’ils répondent de leurs actes devant la justice, a-t-il également dit. La communauté internationale doit poursuivre une stratégie globale, celle-ci devant comporter, aux yeux du représentant, des volets complémentaires et non interchangeables. Il a ainsi plaidé en faveur d’une relance du processus politique et du déploiement d’une force de maintien de la paix efficace et robuste, avant de souligner la nécessité de faire pression sur les parties pour qu’elles coopèrent. Le représentant s’est dit, en outre, inquiet des répercussions du conflit du Darfour au Tchad et en République centrafricaine. Il importe, a-t-il estimé, d’agir diligemment pour enrayer la propagation du conflit du Darfour. Il a indiqué, à cet égard, que son pays est favorable au déploiement d’une force de maintien de la paix au Tchad et en République centrafricaine pour assurer notamment la protection des populations civiles en danger.
M. PETER BURIAN (Slovaquie) s’est dit préoccupé par la détérioration de la situation sur le terrain et a lancé un appel au Gouvernement soudanais pour qu’il respecte ses engagements et protège sa population civile. Il semblerait, a-t-il constaté, que les travailleurs humanitaires doivent affronter de plus en plus d’obstacles administratifs. Le déploiement d’une mission de paix internationale dans la région est le seul moyen de sauver les vies au Darfour, dans l’est du pays et en République centrafricaine. Il faut aussi que les choses soient claires: tous les individus coupables de violations des droits de l’homme, qu’ils se trouvent au Soudan ou dans les pays voisins, doivent être traduits en justice et le Conseil devrait peut-être envisager des sanctions ciblées à l’avenir. Dans quel autre pays d’Afrique, comptez-vous vous rendre à l’avenir, a demandé le représentant à M. Holmes. Avez-vous l’intention de vous rendre au Zimbabwe?
M. JUSTIN BIABOROH-IBORO (Congo) a estimé que le tableau de la situation décrite par le Secrétaire général adjoint est sombre et que les défis sont importants. Il a qualifié d’intolérable la situation humanitaire que subissent les populations civiles. C’est une question de responsabilité à tous les niveaux, la communauté internationale et le Conseil de sécurité se devant, a-t-il précisé, d’assumer leur responsabilité.
M. KONSTANTIN K. DOLGOV (Fédération de Russie) s’est dit préoccupé par le fait que le nombre de réfugiés et de personnes déplacées augmente, soulignant que ces derniers sont la cible d’attaques violentes. Toute solution à la crise passera par un processus politique, incluant les groupes qui ne sont pas parties à l’Accord de paix pour le Darfour. L’accord obtenu entre M. Holmes et les autorités soudanaises et le communiqué conjoint sont des réalisations importantes, a estimé le représentant. Sans l’appui efficace de l’ONU, la communauté internationale ne ramènera pas la paix au Darfour. Le représentant s’est, en outre, prononcé en faveur d’une opération hybride au Darfour, associant les forces de paix de l’ONU et celles de l’Union africaine. Compte tenu de la situation humanitaire dans les régions frontalières, les recommandations du Secrétaire général visant le déploiement de missions semblent les bienvenues tant que ce déploiement s’appuie sur des accords préalables avec les pays concernés. Nous appuyons en la matière, a conclu le représentant, le travail réalisé par le Secrétaire général de l’ONU ainsi que le recours aux forces spéciales d’urgence, qui doit se faire sur la base d’éléments objectifs et non politisés.
M. JEAN-MARC DE LA SABLIÈRE (France) a affirmé que la gravité de la situation humanitaire décrite par le Secrétaire général adjoint soulevait de nombreuses interrogations et soulignait à quel point le Conseil de sécurité devait se montrer préoccupé. Il s’est dit, en outre, préoccupé par la dégradation des indicateurs humanitaires au Darfour qui se rapprochent, a-t-il dit, des seuils d’urgence alors qu’ils avaient enregistré une amélioration l’an dernier grâce notamment au travail des personnels humanitaires, dont il a salué le courage. Il a rappelé que le Conseil de sécurité s’efforçait d’agir à la fois dans le domaine humanitaire, le processus politique et le renforcement de la force internationale sur le terrain. Selon lui, les autorités soudanaises doivent faire tout leur possible pour améliorer la sécurité des populations civiles et des personnels humanitaires sur le terrain.
Le Gouvernement soudanais a une responsabilité particulière pour assurer la protection des populations civiles, a-t-il affirmé, soulignant, une nouvelle fois, que les forces de sécurité soudanaises n’assumaient pas leur responsabilité à cet égard. La défaillance du Gouvernement du Soudan oblige la communauté internationale à s’en mêler, a-t-il estimé. Le Conseil de sécurité doit être ainsi prêt à en tirer les conséquences. Le représentant a souligné que la France appuyait la proposition d’un déploiement d’une force internationale capable d’améliorer vraiment la sécurité de la population civile. Elle attend du Gouvernement soudanais qu’il mette en œuvre les engagements pris à Addis-Abéba en décembre dernier, a-t-il ajouté. Le Conseil de sécurité ne peut plus attendre longtemps, car ce qui est en jeu c’est le sort des populations du Darfour, a-t-il également déclaré.
S’agissant des situations au Tchad et en République centrafricaine, le représentant a affirmé que ces deux pays avaient besoin au plus vite du soutien de la communauté internationale. Le déploiement à la frontière de l’est du Tchad d’une force de l’ONU, souhaité par le Président Bozizé, est absolument nécessaire, a-t-il dit. La communauté internationale a trop longtemps sous-estimé la gravité de la crise qui affecte le pays du fait de la violence au Darfour, a-t-il, en outre, souligné.
Mme ROMY TINCOPA (Pérou) a elle aussi fait état de la préoccupation de son pays quant à la détérioration de la situation humanitaire au Darfour et au règne de l’impunité. Face à cette situation, elle a regretté que le Conseil se retrouve piégé dans des discussions d’ordre technique. Nous discutons, mais les conséquences des retards dus à ces multiples discussions se mesurent en pertes humaines. La représentante a également convenu avec M. Holmes que toute solution au Darfour aura des conséquences importantes sur les autres pays dont la situation est à l’examen aujourd’hui. Elle a demandé à M. Holmes ce que le Conseil de sécurité pouvait faire pour que l’accord sur la fourniture de l’aide humanitaire qui vient d’être conclu entre les Nations Unies et le Gouvernement soudanais soit appliqué. Et quelles sont aussi les prévisions d’OCHA compte tenu de l’approche de la saison des pluies qui entravera davantage l’acheminement de l’aide humanitaire? a-t-elle aussi demandé.
M. RICARDO ALBERTO ARIAS (Panama) a affirmé qu’il fallait trouver, ici, des mécanismes permettant aux différents organes des Nations Unies d’agir de façon coordonnée. Le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l’homme doivent, à cet égard, agir de concert. Il a estimé que les déclarations des chefs d’État et de Gouvernement faites lors du Sommet mondial, en septembre 2005, établissant un lien entre la sécurité, le développement et les droits de l’homme, et insistant sur la responsabilité de protéger, ne devaient pas rester lettre morte.
M.HASAN KLEIB (Indonésie) a indiqué que la situation qui prévaut au Darfour et dans l’est de la RCA préoccupait gravement son gouvernement. La crise humanitaire au Darfour devient de plus en plus difficile à régler, s’est-il inquiété. Il s’est néanmoins félicité de la signature d’un communiqué conjoint entre OCHA, au nom de l’ONU, et le Gouvernement soudanais afin de faciliter l’accès humanitaire. Cette assistance doit être traitée à titre prioritaire tout comme doit l’être le règlement politique de la crise, a estimé le représentant indonésien. Il a demandé un complément d’information sur la manière dont l’ONU pouvait intervenir dans l’est du Tchad, en attendant le déploiement d’une mission de protection.
M. ALDO MANTOVANI (Italie) a affirmé que la protection des civils sur le terrain était une toute première priorité. Le représentant a, à cet égard, appuyé le rôle des Nations Unies en la matière, et a appelé à une coopération des autorités soudanaises. Il a également mis l’accent sur la nécessité de traiter des problèmes, sous un angle régional, le Conseil de sécurité ne devant pas, à ses yeux, détourner son attention de ce qui se passe dans le Sud. Il a, par ailleurs, demandé notamment au Secrétaire général adjoint s’il était confiant s’agissant de la situation au Tchad.
M. MUTLAQMAJED AL-QAHTANI (Qatar) a dit son inquiétude face aux obstacles que rencontrent les travailleurs humanitaires au Darfour. Il est clair que les gouvernements des pays concernés de la région aujourd’hui doivent poursuivre leurs efforts, en coopération avec OCHA, pour protéger les travailleurs humanitaires et les populations, a-t-il estimé. Nous avons cependant bon espoir, au vu des résultats obtenus à la suite des multiples discussions engagées avec le Gouvernement soudanais, a dit le représentant qatari. Il s’est félicité de la réunion tenue à Khartoum et visant à relancer l’application de l’Accord de paix pour le Darfour. « Nous ne devons laisser passer aucune occasion pour consolider la paix au Darfour », a-t-il recommandé, en estimant qu’aucune option militaire ne pouvait être une solution à une crise, quelle qu’elle soit. Les trois États (RCA, Tchad et Soudan) mentionnés ce matin par le Coordonnateur des secours d’urgence ont la responsabilité de la protection de leur population civile, et nous les appelons à traduire en justice les auteurs des crimes commis, afin de mettre fin à l’impunité, a insisté le représentant. Il a demandé où en étaient les efforts que mènent Jan Eliasson, au nom de l’ONU, et Salim Ahmed Salim, au nom de l’Union africaine. Il a ensuite demandé des précisions à M. Holmes concernant la stratégie en trois phases préconisée par la communauté internationale, mais qui selon lui n’est pas conforme à l’Accord général de paix Nord-Sud pour le Soudan.
M. EMYR JONES PARRY (Royaume-Uni) a souligné que la situation qui prévaut au Soudan, et particulièrement au Darfour, demeurait désespérée. Pour faire la différence dans la situation humanitaire actuelle, le Gouvernement du Soudan, et surtout les rebelles, doivent prendre maintenant des mesures concrètes, a-t-il affirmé. Le représentant du Royaume-Uni a mis l’accent en particulier sur la nécessité de respecter l’embargo sur les armements. Il faut d’autre part mettre fin aux attaques lancées contre les agents humanitaires et contre la MUAS, a-t-il réclamé. Le Royaume-Uni estime d’autre part que le Gouvernement soudanais doit mettre fin aux attaques aériennes lancées contre les rebelles ou les populations, a-t-il dit, plaidant en faveur du déploiement au Darfour d’une force hybride ONU/Union africaine le plus tôt possible. S’agissant des situations au Tchad et en République centrafricaine, il a souligné l’urgence d’y assurer de façon adéquate la protection des civils.
Reprenant la parole après les interventions des membres du Conseil, M. JOHN HOLMES a insisté sur la gravité de la situation qui prévaut dans les trois pays africains dont il revient et sur la nécessité d’agir pour y venir en aide aux populations affectées. Il a appuyé l’approche visant à trouver une solution politique sans laquelle il sera très difficile de progresser, a-t-il estimé. Parallèlement, nous devons poursuivre nos efforts en faveur du déploiement d’une force renforcée au Darfour, a-t-il plaidé. « Il est important que nous continuions d’appuyer la Mission de l’Union africaine au Soudan (MUAS) dont les opérations se heurtent à un grand nombre de difficultés, en attendant le déploiement du module de protection renforcée et le déploiement d’une mission hybride ONU/Union africaine », a recommandé M. Holmes. S’agissant du communiqué conjoint du 18 mars, il a précisé que ce qui était important n’était pas tant la signature de cet accord que son application effective. Il est aussi important de soutenir le comité de suivi d’application de cet accord, a-t-il indiqué au Conseil de sécurité. Il a aussi insisté sur le fait que certains des conflits, dont il avait observé les conséquences lors de son voyage, avaient une dimension nationale tout en reconnaissant cependant que le conflit qui se déroule au Darfour avait des répercussions visibles dans les pays voisins du Soudan.
M. Holmes a indiqué qu’il avait l’intention, au cours des prochains mois, de se rendre au Somalie, dans le nord de l’Ouganda, et en République démocratique du Congo (RDC). Ce déplacement s’impose rapidement, car les problèmes persistent dans ces régions. Le Coordonnateur des secours d’urgence a aussi dit qu’il comptait se rendre dans la région du Sahel pour y évaluer les effets des catastrophes naturelles et de la pauvreté. Il a indiqué qu’il n’avait pas l’intention de se rendre au Zimbabwe, tout en n’excluant pas qu’un membre du Bureau de coordination des affaires humanitaires et des secours d’urgence (OCHA) s’y rende. S’agissant de la force hybride ONU/Union africaine et de l’approche en trois phases, il a estimé que des progrès avaient été, à cet égard, réalisés et a émis l’espoir d’organiser, la semaine prochaine, une réunion avec les responsables soudanais afin de clarifier les concepts du module d’appui renforcé et de la force hybride.
Parlant de sa visite en RCA, il a parlé de l’appui apporté par le Président centrafricain à une éventuelle force de paix et a indiqué qu’un bureau serait ouvert dans le nord du pays afin de mieux y évaluer les besoins humanitaires. M. Holmes a, par ailleurs, indiqué être conscient des conséquences qu’auront les précipitations de la saison des pluies dans les trois pays qu’il a visités, en insistant sur la nécessité pour les opérations d’assistance de disposer de tout l’appui nécessaire. « Dans l’est du Tchad, nous avons mis l’accent sur la mise en place d’un plan d’action, étalé sur 90 jours, pour les opérations menées par les agences humanitaires avant la venue de la saison des pluies. En RCA, il est fondamental que les personnes qui vivent dans la brousse aient accès au cours des semaines à venir aux outils agricoles pour pouvoir procéder aux semailles et espérer plus tard avoir de bonnes récoltes », a indiqué M. Holmes. Le Programme alimentaire mondial (PAM) et l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont commencé à distribuer ces entrants, a-t-il précisé. Nous sommes en train également de mettre en place une stratégie globale pour les trois prochaines années, afin d’aider les réfugiés soudanais et les communautés d’accueil qui se trouvent débordées par l’afflux massif de réfugiés, a ajouté John Holmes. Quant à la situation prévalant au Tchad, M. Holmes a dit qu’il y appuyait le déploiement d’une force internationale, car sans elle, il ne sera pas possible de protéger les populations.
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