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SG/SM/10739-ENV/DEV/904

LA CONFÉRENCE DE NAIROBI DOIT FAIRE SAVOIR CLAIREMENT QUE LES DIRIGEANTS DU MONDE PRENNENT LE CHANGEMENT CLIMATIQUE AU SÉRIEUX, DÉCLARE KOFI ANNAN

15/11/2006
Secrétaire généralSG/SM/10739
ENV/DEV/904
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LA CONFÉRENCE DE NAIROBI DOIT FAIRE SAVOIR CLAIREMENT QUE LES DIRIGEANTS DU MONDE PRENNENT LE CHANGEMENT CLIMATIQUE AU SÉRIEUX, DÉCLARE KOFI ANNAN


On trouvera ci-après le texte intégral de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, à la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique, à Nairobi, le 15 novembre:


Je remercie le Gouvernement et le peuple kényans d’avoir accueilli cette conférence internationale.  Vous avez réservé un accueil chaleureux à des milliers de personnes et créé d’excellentes conditions pour l’examen des questions d’importance cruciale dont nous allons nous occuper.  Merci de donner une nouvelle fois la preuve que vous appuyez fermement les Nations Unies.


Nous tous, qui sommes ici présents, tenons à améliorer la condition humaine.  Nous voulons tous voir le jour où chacun, et pas seulement un petit nombre de favorisés, pourra vivre dans la dignité et envisager l’avenir avec espoir.  Nous voulons tous créer un monde d’harmonie entre les êtres humains et entre eux et l’environnement naturel dont dépend la vie.


Cette vision, dont les probabilités de réalisation ont toujours été minces, est aujourd’hui gravement compromise par le changement climatique.  Même les progrès réalisés ces dernières années risquent d’être réduits à néant. 


Le changement climatique ne concerne pas seulement l’environnement, comme un trop grand nombre de personnes le croient encore.  C’est une menace généralisée.


C’est une menace pour la santé, puisque dans un monde plus chaud, les maladies infectieuses, comme la malaria et la fièvre jaune, se propagent davantage et plus vite. 


Il pourrait mettre en péril l’approvisionnement alimentaire mondial, des températures et des périodes de sécheresse prolongées rendant les régions fertiles impropres à l’élevage et à la culture.


Il pourrait mettre en danger le sol même sur lequel vit près de la moitié de la population mondiale –par exemple, des villes côtières, telles que Lagos ou Le Cap, risquent d’être inondées par une élévation du niveau de la mer causée par la fonte des calottes glacières et des glaciers.


     
C’est ce qui nous attend, et ce n’est pas tout.  Des milliards de dollars de dégâts causés par des catastrophes provoquées par des intempéries.  La destruction d’écosystèmes vitaux tels que les forêts et les récifs de corail.  Des ressources en eau qui disparaissent ou qui sont polluées par l’intrusion d’eau salée.


Le changement climatique constitue aussi une menace pour la paix et la sécurité.  Par exemple, des modifications du régime des pluies peuvent accroître la rivalité à laquelle donne lieu l’accès aux ressources et, partant, entraîner des tensions et des migrations potentiellement déstabilisantes, en particulier dans des pays fragiles ou des régions instables.  C’est une tendance que l’on peut déjà constater et il se pourrait bien qu’elle se précise.


Ce n’est pas de la science-fiction.  Il existe des scénarios plausibles fondés sur des modèles scientifiques clairs et rigoureux.  Les quelques sceptiques invétérés qui cherchent encore à semer le doute doivent être pris pour ce qu’ils sont: des esprits décalés, à court d’arguments et sur le point d’être dépassés.  En fait, le consensus scientifique non seulement fait de plus en plus d’adeptes, mais se fait aussi plus alarmiste.  Un grand nombre de chercheurs, connus pour être circonspects, déclarent désormais que les tendances au réchauffement se rapprochent dangereusement d’un point de non-retour. 


Les économistes pourraient bien en venir à penser de même.  Au début du mois, dans une étude qu’il a consacrée à la question, Sir Nicholas Sterne, citoyen britannique et économiste en chef de la Banque mondiale, a présenté ces changements comme « la plus grande et la plus préjudiciable défaillance du marché à ce jour ».  Il a prévenu que le changement climatique pourrait réduire de 20% les échanges commerciaux dans le monde et provoquer des désordres économiques et sociaux comparables à ceux des deux guerres mondiales et de la Grande Dépression.


Mais tout n’est pas perdu, nous pouvons encore réagir.  Nous avons commencé à utiliser les combustibles fossiles de façon plus propre et plus efficace.  L’énergie provenant de sources renouvelables est de plus en plus largement disponible à des prix compétitifs.  On pourrait faire encore beaucoup mieux en intensifiant la recherche et en mettant davantage les résultats en pratique – le niveau actuel est, hélas, dangereusement bas.


Sous l’impulsion du Protocole de Kyoto, les apports financiers internationaux générés par le carbone pourraient rapporter 100 milliards de dollars par an aux pays en développement.  Les marchés des produits énergétiques à faible teneur en carbone devraient prendre un essor considérable.  Mais il nous faut trouver davantage de solutions « vertes » pour faire face à l’intensification de la demande en énergie.  Et il nous faut aussi prendre les mesures d’incitation appropriées pour compléter ce qui a été fait jusqu’ici sous la pression des circonstances.


Le changement climatique offre de véritables possibilités de faire progresser le développement et de mettre nos sociétés sur la voie d’un développement plus durable.  De faibles émissions ne sont pas nécessairement synonymes d’une faible croissance et n’empêchent pas un pays de se développer.  Cessons donc d’être négatifs.  Ne laissons plus personne dire que nous ne pouvons pas nous permettre d’agir.  Il est de plus en plus évident qu’il sera beaucoup moins coûteux de réduire les émissions maintenant que de s’adapter plus tard aux conséquences.  Et qu’on ne dise plus qu’il faut attendre d’en savoir plus.  Nous savons déjà qu’une économie fondée sur des niveaux élevés d’émission revient à soumettre le climat mondial à une expérience dont les conséquences nous échappent.


Mais, alors même que nous cherchons à réduire les émissions, nous devons en même temps faire beaucoup plus pour nous adapter au réchauffement de la planète et à ses effets.  Ce sont les pays les plus pauvres du monde, dont beaucoup se trouvent en Afrique, qui pâtiront le plus des conséquences du changement climatique.  Les populations démunies sont déjà les plus exposées à la pollution, aux catastrophes et à la dégradation des ressources naturelles et des sols.  Elles dépendent directement de l’agriculture, de la sylviculture et de la pêche pour leur subsistance.  Pensez, par exemple, aux femmes et aux filles qui doivent chercher à grand-peine du combustible et de l’eau faute de services énergétiques essentiels.  Ou à ces innombrables populations africaines qui ont été victimes ces dernières années de catastrophes provoquées par des dérèglements climatiques.  Les inondations au Mozambique, les périodes de sécheresse au Sahel et, ici, au Kenya, sont encore présentes dans nos mémoires.  Pour ces populations, s’adapter est une question de survie pure et simple.  Intégrer les risques que présente le changement climatique dans les stratégies et programmes visant à atteindre les objectifs du développement énoncés dans la Déclaration du Millénaire doit devenir une de nos premières priorités.


Le message est clair.  Le changement climatique mondial doit prendre place parmi les menaces –conflit, pauvreté, prolifération des armes meurtrières– qui ont monopolisé l’attention des politiques jusqu’ici.  Et les Nations Unies offrent au monde les moyens dont il a besoin pour y faire face. 


Les initiatives régionales et nationales ont leur mérite.  Mais la Convention-cadre des Nations Unies est le dispositif dans lequel une réponse vraiment mondiale est formulée.  Le Protocole de Kyoto a désormais pris pleinement effet et le Mécanisme pour un développement propre qu’il prévoit est devenu une source de financement de plusieurs milliards de dollars pour le développement durable.


Ce mécanisme montre de façon exemplaire comment, sous l’impulsion de l’Organisation des Nations Unies, une collaboration peut être instaurée entre les pouvoirs publics et le secteur privé.  Je suis heureux d’annoncer que six organismes des Nations Unies ont lancé, à la présente conférence, un plan, appelé « le Cadre de Nairobi », qui vise à aider les pays en développement, en particulier en Afrique, à participer au Mécanisme pour un développement propre.  J’encourage les pays donateurs à faire en sorte que cette entreprise soit couronnée de succès.  Je suis heureux de constater aussi que le PNUD et le PNUE mettent en route aujourd’hui une initiative visant à aider les pays en développement, y compris là encore en Afrique, à introduire le changement climatique dans les plans de développement national – sous le nom de « protection contre les effets du changement climatique » – dans des domaines tels que l’équipement. 


Les organismes des Nations Unies continueront à mettre en œuvre leurs connaissances spécialisées.  Mais c’est avant tout aux États qu’il importe d’agir –c’est-à-dire, pour le moment, ceux qui sont le plus responsables de l’accumulation de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.  Ils doivent faire beaucoup plus pour faire baisser le niveau de leurs émissions.  Le Protocole de Kyoto a été un progrès décisif, mais beaucoup trop modeste.  Et quand on étudie les possibilités d’aller plus loin, on constate un manque effrayant de volonté politique. 


Cependant, on ne peut laisser les émissions continuer d’augmenter de façon débridée dans les pays en développement.  Nombre d’entre eux ont pris des mesures notables pour faire face au changement climatique.  Les pays dont l’économie se développe rapidement, comme la Chine, ont réussi à dissocier la croissance économique de l’utilisation de l’énergie et ont ainsi réduit l’intensité de leurs émissions.  Mais il faut encore faire davantage. 


Les entreprises doivent aussi jouer leur rôle.  Les changements dans leur attitude et dans la façon dont les investissements privés sont dirigés seront au moins aussi importants pour gagner la bataille du climat que l’action directe des pouvoirs publics.


Et les citoyens ont aussi un rôle à jouer.  Une simple ampoule électrique consommant peu d’énergie utilisée à la cuisine n’a peut-être l’air de rien, mais si on la multiplie par 2 millions, les économies sont considérables.  Le pouvoir des électeurs pourrait être tout aussi décisif si les mesures de lutte contre le changement climatique influaient davantage sur leur choix que cela n’est le cas aujourd’hui.


Un changement de cap est encore possible pour chacune de nos sociétés.  Au lieu d’être économiquement sur la défensive, faisons preuve d’un plus grand courage politique.  La Conférence de Nairobi doit faire savoir de façon claire et crédible que les dirigeants politiques du monde prennent le changement climatique au sérieux.  Il ne s’agit pas de savoir si ce changement a bien lieu, mais si nous sommes capables de changer nous-mêmes assez vite face à l’urgence de la situation.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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