En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/10411

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SOULIGNE « LA NÉCESSITÉ DE DÉSAPPRENDRE NOS PRÉJUGÉS COLLECTIFS » À L’OCCASION DE LA CÉRÉMONIE DE REMISE D’UN PRIX À SÉVILLE

10 avril 2006
Secrétaire généralSG/SM/10411
Department of Public Information • News and Media Division • New York

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SOULIGNE « LA NÉCESSITÉ DE DÉSAPPRENDRE NOS PRÉJUGÉS COLLECTIFS » À L’OCCASION DE LA CÉRÉMONIE DE REMISE D’UN PRIX À SÉVILLE


(Publié le 19 avril, retardé à la traduction.)


On trouvera ci-après le texte de l’allocution que le Secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, a prononcée à l’occasion de la remise du prix Seville Nodo between Cultures, ce jour à Séville (Espagne):


Merci de cette marque de reconnaissance pour l’action menée par l’ONU en faveur du dialogue entre les civilisations.  Merci de me décerner ce premier prix « Nodo ».  C’est pour moi un insigne d’honneur que d’avoir été retenu au nombre des candidats, aux côtés d’humanistes comme l’archevêque Desmond Tutu, Shireen Ebadi, Amin Maaluf et le professeur Marquez Villanueva. 


Il ne pouvait y avoir de meilleur choix pour cette cérémonie que cette ville de Séville, qui plonge ses racines dans les traditions orientales et occidentales, qui plus est s’y trouver pendant la Semaine sainte.  Pendant l’essentiel de son histoire, Séville a prospéré dans une mosaïque de peuples et a contribué à la riche civilisation de la péninsule ibérique.  À l’image des Nations Unies, la ville est, comme le nom de votre fondation l’indique, un véritable nœud, reliant l’est et l’ouest, le nord et le sud. 


Il y a 1 000 ans, à l’époque où l’Europe était encore prisonnière de l’obscurantisme, la péninsule ibérique s’enrichissait des contacts entre cultures et traditions chrétienne, islamique et juive.  Ces échanges donnaient parfois lieu à des désaccords, voire des heurts, mais étaient aussi source d’enrichissement.  Les idées éclairées de l’époque ont traversé les générations, au profit de l’humanité tout entière. 


Malheureusement, tant de siècles plus tard, notre ère « des lumières » est en proie à la montée de l’extrémisme et de l’intolérance.  Vous vous souvenez des récentes manifestations parfois violentes qui, dans de nombreuses régions du monde, ont eu pour effet de tendre les relations entre communautés et peuples de croyances et cultures différentes.  Il est à craindre que l’indispensable dialogue entre musulmans, chrétiens et juifs se ramène désormais à des échanges acrimonieux entre franges extrémistes, si, de part et d’autre, les modérés permettent aux extrémistes de les représenter et présument que les extrémistes de l’autre camp représentent la communauté. 


À l’évidence, il est grand temps de désapprendre nos préjugés collectifs.  Il nous faut au contraire encourager le dialogue permanent en partant du principe que la diversité – dans la manière de penser, les croyances ou la manière de faire –, est un atout précieux, pas une menace.  Il nous faut apprendre à dépasser les stéréotypes concernant l’Autre et à éviter les généralisations simplistes qui aggravent les malentendus et entravent la recherche de solutions aux véritables problèmes. 


Réunis en septembre dernier à New York, les dirigeants du monde ont souligné l’importance de cette démarche.  Dans le Document final du Sommet mondial de l’année dernière, ils ont tous estimé qu’« il importe de comprendre et de respecter la diversité religieuse et culturelle dans le monde entier ».  Déclarant qu’« afin de promouvoir la paix et la sécurité internationales, nous nous engageons à élargir partout le bien-être humain, la liberté et le progrès, et à encourager la tolérance, le respect, le dialogue et la coopération entre les différentes cultures, civilisations et populations ».  


L’Espagne joue un rôle de premier plan dans cette entreprise.  L’an dernier, le Premier Ministre Zapatero a lancé, avec son homologue turc, l’Alliance des civilisations aux Nations Unies.  Cette initiative vient à point nommé répondre à la nécessité de redoubler d’efforts, au sein des institutions et de la société civile, pour transcender les préjugés, les idées reçues et la polarisation, qui sont autant de menaces pour la sécurité internationale. 


L’objectif dernier de l’Alliance est de promouvoir les valeurs communes de tolérance, d’égalité et de dignité de la personne, dans le respect de l’état de droit. 


Naturellement, notre action s’inspire des mêmes valeurs.  Je vous suis reconnaissant d’avoir accédé à ma demande de verser la portion monétaire de ce prix au Fonds des Nations Unies pour la population.  Cet argent permettra plus précisément de financer un projet de lutte contre la violence sexuelle contre les femmes et les enfants en République démocratique du Congo.  Ma femme Nane s’est rendue sur place il n’y a pas longtemps et a rencontré les victimes de ces violences.  Sans pouvoir vous rendre compte de ses impressions, je puis vous dire qu’elle et moi sommes convaincus que la mise en œuvre de telles initiatives sur le plan local ne peut que donner corps à notre vaste campagne en faveur de l’égalité et de la dignité humaine dans le monde. 


Une merveilleuse œuvre d’art de l’artiste espagnol disparu Jose Vela-Zanetti, trône au Siège des Nations Unies à New York.  C’est une fresque qui dépeint « le combat de l’homme pour la paix » et figure l’histoire d’une famille des nations déchirée, mais aussi les membres de cette même famille en train de bâtir les Nations Unies dans l’espoir que celles-ci sauront restaurer la paix et la préserver à jamais pour tous les peuples. 


Comme les bâtisseurs de la fresque de Vela-Zanetti, nous serons toujours à l’œuvre, car il nous incombe de renforcer les liens entre les peuples du monde.  Dans cette entreprise, nous sommes tous autant de charnières entre nos civilisations, nos cultures, nos croyances et nos communautés. 


C’est dans cet esprit que j’accepte votre prix et vous remercie, une fois de plus, de l’honneur qui m’est ainsi fait, et, à travers ma personne, à tous, hommes et femmes au service des Nations Unies qui se dépensent sans compter au nom de la paix. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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