COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DÉVELOPPEMENT: LES MIGRANTS CONSTITUENT UNE PART ESSENTIELLE DE LA VIE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE NOMBREUX PAYS, SELON LES INTERVENANTS
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Commission de la population
et du développement
5e & 6e séances – matin & après-midi
COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DÉVELOPPEMENT: LES MIGRANTS CONSTITUENT UNE PART ESSENTIELLE DE LA VIE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE NOMBREUX PAYS, SELON LES INTERVENANTS
« L’importance du phénomène migratoire en El Salvador est telle que les migrants sont devenus une part essentielle de la vie politique et économique de notre pays », a déclaré aujourd’hui à la Commission de la population et du développement Mme Margarita Escobar, Vice-Ministre des affaires étrangères d’El Salvador.
Dans sa déclaration préliminaire au débat interactif organisé ce matin sur l’expérience des pays dans le domaine des politiques concernant la population, les migrations internationales et le développement, la Vice-Ministre a indiqué que les 3,5 milliards de dollars transférés par les migrants salvadoriens à leurs familles représentaient environ le quart du Produit national brut (PNB) d’El Salvador. Pour maximiser l’impact de ces fonds sur l’économie et favoriser la participation des migrants à la vie publique et à la gestion du processus de développement, le Gouvernement salvadorien met en place des stratégies de gestion transnationale de sa migration qui s’appuient sur le réseau de ses consulats à l’étranger, a indiqué Mme Escobar, en relevant le fait que les migrations avaient modifié non seulement l’économie, mais aussi la culture et l’échelle des valeurs des Salvadoriens. Partageant le point de vue du deuxième panéliste de cet échange interactif, M. Edward Taylor, Professeur d’économie de l’agriculture et des ressources naturelles de l’Université de Californie à Davis, Mme Escobar a suggéré que la présente session de Commission de la population et du développement recommande au Dialogue de haut niveau qui aura lieu en septembre sur la question des migrations, de soutenir une réduction des frais de transfert de fonds des travailleurs migrants et une simplification des procédures. Cependant, a-t-elle préconisé, en répondant aux questions de certaines délégations, les gouvernements doivent respecter le caractère privé de ces avoirs financiers et éviter la tentation d’en réguler l’utilisation.
En vue de soutenir un investissement judicieux de ces fonds, les gouvernements pourraient travailler avec les banques et les encourager à en conseiller les détenteurs et à leur donner un accès au crédit en vue de leur donner des conseils d’investissement judicieux, ont dit la Vice-Ministre et M. Taylor. Estimant que, dans le cadre de la mondialisation, les êtres humains sont devenus la principale exportation d’un grand nombre de pays et qu’ils pouvaient générer des ressources appréciables en soutien aux efforts de développement de leurs pays d’origine, Edward Taylor a dit qu’il fallait que les gouvernements créent des opportunités d’investissement en mettant en place des environnements politiques et macroéconomiques stables. Recommandant ensuite la création d’institutions de microcrédit et le renforcement des structures et des programmes d’éducation, le professeur d’économie agricole a estimé que ces deux facteurs étaient garants d’une augmentation de la productivité et d’une plus grande participation des groupes défavorisés à la vie économique des pays exportateurs de travailleurs migrants. Si on les joint aux envois de fonds, ces efforts pourraient apporter une solution au manque de capitaux et de capacités humaines dont souffrent la plupart des pays moins avancés, a indiqué M. Taylor.
Concernant la question des transferts de fonds des migrants, si toutes les délégations se sont accordées à reconnaître la nécessité d’en réduire les coûts, les avis semblaient partagés sur leur utilisation. Certaines délégations de pays développés, dont celle de l’Espagne, ont suggéré que le Dialogue de haut niveau débatte d’un cadre de recommandations sur l’usage de ces fonds à des fins de développement, tandis que des délégations de pays en développement, dont celles d’El Salvador, de la Thailande et du Sri Lanka, ont tenu à souligner le caractère et l’usage strictement privés de ces ressources sur lesquelles aucun gouvernement ne devrait prétendre avoir un droit de regard. La communauté internationale ne doit pas prétendre que les fonds et l’épargne privée des familles de migrants pourraient devenir un substitut à l’aide publique au développement, ont souligné ces délégations.
En prenant la parole sur les migrations internationales et le développement, la représentante des États-Unis a tenu à indiquer que la Commission de la population et du développement était « une instance technique et non politique », et que ses délibérations ne devraient pas être utilisées par des États pour régler des contentieux bilatéraux avec d’autres États. La protection des gens qui fuient la persécution est un des volets de la politique des États-Unis en matière de migration, a dit la représentante en indiquant que son pays avait accueilli 2,5 millions de personnes craignant pour leur vie depuis 1975. Aujourd’hui, a-t-elle ajouté, le Department of Homeland Security- Ministère de l’intérieur des États-Unis- traite chaque jour 30 000 demandes d’immigration légale, approuve 7 000 « cartes vertes » de résidents permanents, donne son assentiment à 3 000 dossiers d’acquisition de la nationalité américaine et accorde l’asile et le statut de réfugié à 200 personnes.
Après avoir entendu la dernière délégation présentant l’expérience de son pays en matière de population, de migrations internationales et de développement, la Commission a procédé à un bref examen du point de son ordre du jour relatif à l’« exécution du programme et du futur programme de travail du Secrétariat des Nations Unies dans le domaine de la population ».
Outre celles déjà citées, les représentants des pays suivants ont pris la parole : Uruguay; France; Norvège; Inde; Pologne; Lituanie; Bolivie; Suisse; Gambie; Mexique; Ghana; Italie; Canada; Zambie; Pérou; Bulgarie; Malaisie; Jamaïque; Algérie; Norvège. Sont également intervenus l’Observateur permanent du Saint-Siège ainsi que des représentants de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), de l’INSTRAW, de l’Association mondiale des anciens stagiaires et boursiers des Nations Unies (WAFUNIF), l’Union internationale pour l’étude scientifique de la population. M. Armindo Miranda, Fonctionnaire principal des questions de population à la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat des Nations Unies, a présenté un rapport du Secrétaire général.
La Commission poursuivra ses travaux demain, jeudi 6 avril, à 10 heures.
DÉBAT GÉNÉRAL CONSACRÉ À L’EXPÉRIENCE DES PAYS DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION: MIGRATIONS INTERNATIONALES ET DÉVELOPPEMENT
Déclarations
Mme NURY BAUZAN DE SENES (Uruguay) a déclaré que l’Uruguay était devenu un pays fournisseur de migrants qualifiés depuis la mise en place des mécanismes économiques et financiers de la mondialisation. L’Uruguay reçoit aussi des travailleurs originaires de ses pays voisins d’Amérique latine, et s’efforce de créer des règles d’accueil et de résidence conformes aux impératifs de respect des droits humains des migrants. Le racisme et les discriminations font à cet égard l’objet d’une attention particulière. L’égalité entre les sexes est quant à elle un domaine dans lequel l’Uruguay pense que la communauté internationale devrait faire face avec plus d’efforts, et l’Uruguay est à cet égard partisan de l’adoption de perspectives sexospécifiques au niveau mondial dans le traitement des questions touchant à la migration. La question des transferts d’argent des migrants à leurs familles doit recevoir une attention particulière de la Commission, a estimé la représentante. Elle a souhaité une baisse des coûts de ces transferts de fonds. Elle a ensuite indiqué que le Gouvernement uruguayen avait créé des mécanismes de communication et de collaboration avec la diaspora uruguayenne vivant à l’étranger. Ces migrants ont leur place dans le développement de notre pays, à qui ils apportent des expertises et des connaissances qui font parfois défaut dans le pays et qu’ils acquièrent dans leur pays d’accueil.
M. BUTOR (France), soulignant la complexité des phénomènes migratoires, a rappelé que beaucoup de données manquaient encore pour bien appréhender les différents aspects des migrations dans le monde, raison pour laquelle il était préférable de ne pas s’inscrire dans un cadre figé, immuable alors que les implications démographiques, économiques et sociales des migrations sont en constante évolution. La France a mis en place un suivi de l’information par une publication régulière de statistiques sur les migrations, notamment le rapport annuel de l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), le rapport annuel de la Direction de la population et des migrations (DPM) du Ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement, et le rapport annuel du Haut conseil de l’intégration. Des mesures ont été prises ces derniers mois pour favoriser l’accueil des étudiants et de la main d’œuvre étrangère, a poursuivi le représentant, assurant que la France, qui a pris des dispositions pour que ses politiques soient davantage axées sur le partenariat et la mobilité, reste très engagée dans la poursuite de la mise en œuvre des objectifs du programme du Caire. Poursuivant sur le lien qui pourrait exister entre migration et développement, le délégué de la France a insisté quant à la nécessaire cohérence des politiques en faveur de la lutte contre la pauvreté. Il a ensuite évoqué la possibilité de faciliter les envois de fonds afin de créer des effets de levier positifs en faveur du développement. Enfin, il a mentionné l’expérience française dans le domaine du codéveloppement, qui consiste à associer les migrants installés sur son territoire à des projets de développement économique de leurs pays d’origine.
Mme NAN KENNELLY (États-Unis) a d’abord tenu à faire remarquer, au sujet de l’intervention faite hier par une délégation, que les relations bilatérales n’avaient pas leur place à la Commission de la population et du développement qui est une instance technique et non politique. L’intervenante a rappelé que le Président Bush avait souligné que l’héritage de l’immigration avait enrichi l’histoire américaine. Elle a constaté que, des 200 millions de migrants dans le monde, 25% vivaient actuellement en Amérique du Nord et une personne sur cinq aux États-Unis. Elle a estimé que son pays, en tant que nation fondée sur l’immigration, avait une large expérience en matière d’action visant à répondre aux défis posés par les migrations. Toutefois, les États-Unis abordent ces questions avec humilité car il s’agit de phénomènes complexes, a-t-elle dit.
Les bénéfices des migrations ne peuvent être optimisés que lorsque ces mouvements sont gérés de manière efficace, a-t-elle ajouté. Nous encourageons les migrations légales mais les migrations irrégulières sont préoccupantes car elles placent les individus dans des situations à risques. La représentante a condamné les actes de racisme et de discrimination raciale contre les migrants, précisant que les États-Unis sanctionnaient ces actes.
La protection de ceux qui fuient la persécution est également une priorité des États-Unis, a-t-elle poursuivi notant que son pays avait accueilli plus de 2,5 millions de personnes dans de tels cas depuis 1975. La représentante des États-Unis a insisté sur l’importance de l’intégration des migrants, soulignant le rôle clef de la société civile dans ce processus. Elle a également mis l’accent sur l’importance de la scolarisation des enfants ainsi que sur la création de petites et moyennes entreprises par des migrants comme moyens d’intégration. Enfin, elle a fait part du travail du Département of Homeland Security qui, chaque jour, grâce à ses 250 bureaux locaux, traite 30 000 demandes d’immigrants, approuve 7 000 cartes vertes et permet à 3 000 personnes autres d’acquérir la nationalité et à 200 personnes d’obtenir le statut de réfugié.
M. TORILL WANVIK (Norvège) s’est associé à la déclaration faite par le représentant de l’Union européenne. Il a relevé que le défi de la mondialisation met en évidence la répartition inégale des coûts et bénéfices, risques et opportunités, et que ces inégalités sont particulièrement flagrantes sur le marché du travail. La Norvège est en train de développer des mesures pour permettre à ce marché d’être plus souple, notamment pour les immigrés en provenance des pays émergeant de conflit. Abordant le cas des femmes immigrées, le représentant a souligné leur plus grande vulnérabilité face au trafic humain et a prôné une prévention efficace. Pour cela, il a invité les États Membres qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Protocole pour prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Le représentant a aussi évoqué les effets négatifs des migrations sur la santé publique et sur le manque de personnel de santé qualifié dans les pays en développement.
M. AJAI MALHOTRA (Inde) a expliqué que son pays a une longue tradition en matière de migrations, terre d’accueil de nombreux étrangers qui connaît aussi une forte émigration. Il y a actuellement plus de 20 millions de personnes d’origine indienne vivant à l’étranger, y compris ceux qui sont toujours de nationalité indienne. L’Inde reconnaît que l’émigration offre des opportunités pour les ressortissants et profite au pays. Grâce à la bonne qualité de l’éducation en Inde, M. Malhorta a expliqué qu’il avait été possible de remplacer les émigrants qualifiés dans les domaines des technologies de l’information. Les émigrants qui retournent vivre en Inde constituent la principale source de croissance de l’industrie de service et d’informatique. Le représentant a fait part de l’espoir de son pays de voir chaque personne d’origine indienne intégrer la citoyenneté indienne. Évoquant les flux de règlements financiers en Inde, il a indiqué que l’Inde est le pays qui reçoit le plus de versements au monde. Enfin, il a salué le rôle positif de la diaspora dans les relations entre les pays d’origine et les pays de destination. En Inde, une journée des émigrés indiens a été proclamée pour honorer leur réussite.
M. KAZIMIERZ KUBERSKI, Sous-Secrétaire d’État au Ministère du travail et des politiques sociales de la Pologne, a déclaré que depuis son entrée dans l’Union européenne, la Pologne a poursuivi sa tradition d’exportateur de main d’œuvre saisonnière vers les pays d’Europe occidentale. En 2004, environ 600 000 travailleurs polonais se sont rendus dans les pays d’Europe de l’Ouest, notamment l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Irlande, les Pays-Bas, la France et la République tchèque. Avec 411 000 travailleurs, l’Allemagne est le premier pays d’accueil des migrants polonais.
Les professionnels polonais travaillant à l’étranger représentent 3,5% des 17 millions de travailleurs actifs que compte notre pays, a poursuivi le représentant, en relevant que le marché du travail de son pays souffrait régulièrement de la fuite des cerveaux. Tout en étant exportatrice de main d’œuvre, la Pologne reçoit aussi des migrants venus de l’étranger, a poursuivi M. Kuberski. Depuis 1990, le nombre d’étrangers travaillant en Pologne est allé croissant, a-t-il noté.
L’accession de la Pologne à l’Union européenne l’a obligée à adapter sa législation aux « acquis communautaires » européens, a dit le représentant. Une loi garantissant la protection des travailleurs migrants a ainsi été adoptée par le Parlement et est entrée en vigueur en septembre 2003. Plus de 50 millions de personnes ont visité la Pologne en 2005. Au cours de la même année, le Gouvernement a accordé 25 000 permis de résidence à court terme. 4 000 autres permis de résidence à long terme donnant accès à l’emploi ont été accordés durant la même période, a indiqué le représentant, en précisant que la plupart de ces permis avaient été accordés à des personnes d’origine ukrainienne, russe, bélarussienne et allemande.
Mme RITA KAZLAUSKIENE (Lituanie) a rappelé que son pays était confronté à différents défis liés aux migrations, notamment en raison du vieillissement de sa population et de la baisse du taux de fécondité. Elle a noté qu’environ 9% de Lituaniens avaient immigré ces 15 dernières années. Cela a permis, en partie, de réduire le taux de chômage dans le pays, a-t-elle ajouté. Toutefois, elle a aussi indiqué que la Lituanie faisait appel de plus en plus fréquemment à l’emploi d’étrangers en raison du manque de travailleurs qualifiés dans certains secteurs.
Elle a aussi souligné que dans le secteur privé particulièrement, on observait une tendance à la migration de retour en raison du développement de ce secteur et de l’amélioration des conditions de vie dans le pays. Enfin, elle a fait part de l’intention de la Lituanie de créer un outil institutionnel unique pour gérer ces flux migratoires et trouver des solutions adéquates aux problèmes qui se posent. Il n’existe pas de solution miracle, a-t-elle reconnu, mais d’une manière générale, les possibilités qu’offre la mondialisation auront certainement un impact positif sur le développement, a-t-elle conclu.
Dialogue interactif
Mme MARGARITA ESCOBAR, Vice-Ministre des affaires étrangères d’El Salvador, chargée des Salvadoriens vivant à l’étranger, a déclaré que 35% des Salvadoriens vivaient à l’étranger en tant que travailleurs migrants. L’importance du phénomène de la migration à El Salvador est telle que les migrants sont une part essentielle de la vie politique et économique du pays. Les Salvadoriens ont transféré 3,5 milliards de dollars vers leur pays en 2005, ce qui représente presque le quart des 16 milliards de dollars du produit national brut d’El Salvador, a relevé la Vice-Ministre. Les mouvements migratoires ne doivent pas seulement être considérés sous l’angle économique, mais aussi sous leur aspect humain. L’impact des migrations fait que les envois de fonds des migrants sont devenus une part essentielle de la vie du pays. L’origine nationale des migrants est visible. Il n’y a qu’à voir le nombre de constructions en matériaux solides qui sont érigées dans certaines régions d’El Salvador pour deviner quelles sont les principales zones exportatrices de main d’œuvre à l’étranger. Ainsi, le nord du pays semble mieux bâti que le reste du territoire parce que les gens de cette région ont une tradition de migration et peuvent transférer des fonds à leurs proches restés au pays. Mêmes les habitudes alimentaires de ces régions sont modifiées. Ainsi, dans le nord, les familles mangent de la pizza, une habitude acquise durant les longs séjours des membres de ces familles en Amérique du Nord. Le paysage culturel d’El Salvador est donc modifié par la migration.
Le Gouvernement d’El Salvador pense qu’il faudrait mettre en place des stratégies transnationales pour permettre aux pays d’origine, aux pays d’accueil et aux migrants eux-mêmes, de tirer le maximum d’avantages de la migration. « C’est pour cela que notre pays a créé le poste que j’occupe aujourd’hui et les structures qui en dépendent », a dit Mme Escobar. Elle a indiqué que le fonctionnement même de la société et des familles salvadoriennes était transnational, les hommes et femmes fournisseurs de revenus vivant à l’étranger pour pouvoir gagner l’argent qui est viré aux familles restées dans leur pays d’origine. La création d’un réseau de consulats à l’étranger peut faciliter le fonctionnement de cette structure. Les consulats permettent aux migrants de garder un contact officiel avec leurs familles et leur pays d’origine et d’être protégés dans leur pays d’accueil. Les consulats salvadoriens entretiennent des contacts avec les autorités des pays d’accueil et peuvent faire respecter les droits élémentaires des Salvadoriens migrants. Les consulats sont aussi le lieu où les Salvadoriens désirant participer à la gestion publique des affaires de leur pays d’origine peuvent se faire entendre, a dit la Vice-Ministre. La situation des Salvadoriens de l’étranger est suivie de près par le Président de la République lui-même, a poursuivi Mme Escobar. Les régions d’origine des migrants perdant leur population active durant les longues périodes où ces travailleurs sont dans les pays étrangers, le Gouvernement salvadorien s’efforce de pallier à cette absence en aidant ces expatriés à planifier et à mettre les projets pour lesquels ils transfèrent des fonds à El Salvador. Nous devons développer ce type de partenariat en vue de renforcer la participation des diasporas au développement local, a dit Mme Escobar.
Le représentant de la Bolivie a demandé quel genre de conseils le Gouvernement d’El Salvador donnait aux bénéficiaires des transferts de fonds pour en maximiser le bon usage en encourageant l’investissement et non pas la simple consommation. Le représentant de la Suisse a estimé que les demandes contradictoires des pays d’accueil et des pays d’origine pouvaient créer des dilemmes chez les migrants. Pendant que les premiers demandent à ces gens de s’intégrer, les seconds leur rappellent qu’il est de leur devoir de rentrer dans leur pays d’origine. Comment El Salvador aborde-t-il cette question? Le représentant de la France a demandé si El Salvador avait une fête spéciale, comme l’Inde pour célébrer ses travailleurs migrants.
Mme ESCOBAR a répondu que les transferts des migrants sont des fonds privés qu’aucun gouvernement ne devrait essayer de contrôler. Mais le gouvernement peut travailler avec les banques et les encourager à conseiller les propriétaires de ces fonds et à leur donner un accès au crédit. Les banques peuvent ainsi donner des conseils d’investissement aux migrants et à leurs familles. Répondant à la question de la délégation suisse, elle a reconnu que la mise en place d’une stratégie transnationale était parfois difficile. Sa réussite nécessite la création d’un cadre de coopération entre toutes les parties impliquées. El Salvador reconnaît le dilemme auquel fait face le migrant à qui son pays d’accueil demande de s’intégrer en abandonnant certaines des valeurs de sa société d’origine, alors qu’il en a besoin pour se réintégrer dans son pays de naissance. Il appartient au migrant de faire la part des choses, a-t-elle estimé. Quant à la célébration des migrants, El Salvador, comme d’autres pays, a organisé des évènements au cours desquels ses migrants sont reconnus, a dit Mme Escobar.
Dialogue interactif
M. J. EDWARD TAYLOR, Professeur d’économie de l’agriculture et des ressources naturelles de l’Université de Californie à Davis, s’est penché sur les manières dont les pays d’origine peuvent optimiser le phénomène des migrations. Il a affirmé qu’il fallait s’interroger sur les politiques à concevoir pour influencer l’impact qu’ont les migrations sur les économies des pays d’origine. Il a rappelé que les migrations internationales augmentaient et que les envois de fonds se multipliaient plus rapidement que ces mouvements. Les êtres humains sont devenus la plus grande exportation de nombreux pays, a-t-il insisté, en expliquant qu’il s’agissait là d’une importante source de revenu pour les pays en développement.
Soulignant certaines leçons que l’on pouvait tirer en observant les phénomènes migratoires ces 30 dernières années, M. Taylor a par exemple noté que la croissance des revenus n’empêchait pas les gens d’émigrer: au contraire, ils deviennent plus mobiles lorsque les revenus augmentent. Il a aussi indiqué que ce n’était pas les plus pauvres qui émigraient à l’étranger car ces mouvements étaient risqués et onéreux. Parmi les autres leçons à tirer, il a déclaré que l’impact des migrations ne concernait pas uniquement familles des migrants. Ainsi, il a pris l’exemple d’un village où une famille a un de ses membres à l’étranger et reçoit des fonds de celui-ci. Grâce à cet argent, cette famille consomme et dépense, souvent en achetant un bien à un voisin, en demandant un service à un autre et faisant ainsi participer d’autres ménages à ce phénomène. À leur tour, ces familles ont un meilleur revenu et dépensent. Leurs dépenses ont à leur tour un impact sur d’autres familles. Les dépenses d’une personne sont le revenu d’une autre, a-t-il insisté.
M. Taylor s’est ensuite demandé comment ces leçons pouvaient être traduites au niveau politique. Il a estimé qu’il fallait, entre autres, créer des opportunités d’investissements qui nécessitent un environnement macroéconomique et politique stable. Par ailleurs, il a souligné le rôle primordial du microcrédit afin de faire participer un grand nombre de personnes au développement. Il a aussi affirmé que l’éducation était la clef de l’augmentation de la productivité, permettant aux personnes de répondre aux nouvelles stimulations du marché et d’utiliser les envois de fonds en faveur du développement. Il faut d’abord augmenter les envois de fonds en réduisant les coûts de transaction, a-t-il poursuivi. Enfin, M. Taylor a estimé que les migrations, et particulièrement les envois de fonds, étaient une solution au dilemme des pays les moins avancés qui doivent se développer mais n’ont pas ressources pour investir. Les migrations ne sont pas la solution à tous les problèmes mais ne sont pas non plus une menace. Elles peuvent être utilisées comme un outil de développement, dans le cadre de politiques adéquates, a-t-il conclu.
Lors de la discussion interactive qui a suivi cet exposé, M. Taylor, interrogé sur la relation entre l’augmentation des revenus et la migration par le représentant de la Gambie, a indiqué que cette relation n’était pas causale mais que la corrélation entre ces deux éléments était très élevée. S’agissant de l’effet multiplicateur des envois de fonds pour les autres ménages, il a fait remarquer que pour chaque dollar envoyé par un travailleur migrant mexicain à son pays, par exemple, le revenu du village augmentait de deux dollars. Le représentant du Mexique a d’ailleurs fait part des initiatives mises en place par son pays pour augmenter l’impact des envois de fonds sur le développement. Se félicitant de celles-ci, M. Taylor a expliqué que le Gouvernement du Mexique accordait 2 dollars pour chaque dollar dépensé par un migrant en faveur d’un projet pour sa communauté. Cela contribue au développement rural et permet de maintenir des liens entre migrants et populations locales, a-t-il ajouté.
Répondant à une question de la représentante du Ghana qui souhaitait savoir qui des hommes ou des femmes renvoyaient plus d’argent dans leur pays d’origine, M. Taylor a indiqué qu’il s’agissait plutôt d’une différence d’objectif. Les envois de fonds effectués par des hommes servent plutôt à investir alors que les femmes envoient de l’argent lorsqu’un parent est malade, par exemple, a-t-il précisé. Enfin, le représentant de l’Italie a demandé s’il était possible de créer assez d’emplois dans les pays en développement pour absorber l’augmentation de la main d’œuvre. Selon M. Taylor, si cette question va au-delà des migrations internationales, elle signifie en tout cas que les migrations en provenance de ces pays vont augmenter dans les années à venir.
Déclarations
M. BRIAN GRANT (Canada) a déclaré que la gestion des migrations revenait aux gouvernements car ils étaient les seuls en mesure d’élaborer des lois et d’exercer l’autorité d’assurer le respect des droits des migrants. Il a toutefois noté que les gouvernements avaient besoin d’un soutien public. Il n’est pas suffisant de dire que les migrations sont une force positive pour que la population d’un pays voie ce phénomène positivement, a-t-il poursuivi. Il a ainsi insisté sur la construction d’un environnement de tolérance ainsi que sur la promotion des bénéfices des migrations. Rappelant que le Canada était un pays d’immigration qui a reçu cette année 250 000 nouveaux immigrants, il a indiqué que les politiques de son pays dans ce domaine étaient en constante évolution. Par ailleurs, il a regretté l’utilisation des termes « pays d’origine », « pays de transit » et « pays de destination », déclarant que tous les pays étaient des « pays de migration ». Cela veut dire que nous nous inquiétons de nos ressortissants installés à l’étranger et du bien-être des migrants installés chez nous, que nous nous efforçons de gérer les migrations de manière juste et transparente, a-t-il, entre autres, expliqué. Il a rappelé que tout État avait le droit de décider de l’entrée et de la présence de migrants sur son territoire et en outre, ce même État devait assurer le bien-être de tous ses citoyens, dont les migrants. Il a noté que les migrants avaient aussi des droits et responsabilités, en citant notamment l’obligation de respecter les lois. Enfin, il a appuyé le Programme d’action du Caire en tant que feuille de route pour la coopération internationale dans le domaine des migrations.
M. CELESTINO MIGLIORE, Observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, a constaté que les efforts pour contrôler et axer les phénomènes migratoires n’avaient pas toujours été fructueux. Il a ainsi souhaité que les délégations disposent d’informations fiables pour pouvoir élaborer une manière plus adéquate et plus humaine de traiter des défis que posent les migrations. Il a indiqué que les migrations étaient souvent considérées comme un problème à résoudre et s’est donc félicité de la tenue du Dialogue de haut niveau sur ce thème afin de changer cette perspective. Il a constaté que pour les pays de destination, les migrations sont généralement positives. Si ces migrations peuvent avoir à court terme des effets négatifs sur l’emploi, à moyen et long terme, elles créent aussi des emplois et génèrent des revenus fiscaux. S’agissant des pays d’origine, il s’est inquiété de la fuite des cerveaux, notant cependant que les liens maintenus avec ces États par les ressortissants installés à l’étranger permettent des transferts de technologies et de capitaux. L’Observateur permanent du Saint-Siège a de plus fait valoir qu’en raison des faibles niveaux de fécondité, les migrations représentaient les trois quarts de la croissance démographique des pays développés et d’ici à 2030, pourraient constituer la totalité de cette croissance. Il a donc estimé que les migrations n’étaient pas uniquement une question économique et que leur analyse devait trouver un équilibre entre les bénéfices de ces mouvements et leur impact social.
M. TENS C. KAPOMA (Zambie) a indiqué que la population de son pays augmentait annuellement de 2,4% et que cette croissance tenait un rôle central dans la formulation et la mise en œuvre des politiques et programmes nationaux. Il a rappelé que la Zambie avait crée un Comité technique interinstitutions sur la population en 1994 afin de répondre aux défis émergents liés à la population, tels le VIH/sida. Soulignant que son pays soutenait le Programme d’action du Caire, il a toutefois noté que les progrès réalisés dans sa mise en œuvre avaient été lents car ceux-ci n’avaient pas été pris en compte dans les plans nationaux précédents. S’agissant des migrations, il a constaté que la Zambie souffrait de la fuite des cerveaux dans le secteur de la santé mais avait adopté un plan stratégique pour y remédier. En outre, il a fait valoir que son pays avait une longue histoire en tant que pays d’accueil de réfugiés, en raison des luttes pour l’indépendance dans la période des années 60 aux années 80 puis des conflits dans la région. Il a fait remarquer que de nombreux réfugiés s’étaient installés durablement en Zambie et s’étaient intégrés dans les communautés locales. Afin de répondre aux migrations internationales forcées, la Zambie participe aux négociations de paix dans la région et a entrepris un exercice de rapatriement volontaire de réfugiés vers leur pays d’origine. La Zambie, a-t-il indiqué, a besoin d’un soutien continu de la communauté internationale pour faire face aux problèmes liés à la population visés dans les programmes nationaux.
Mme CARMEN MORENO, Directeur de l’Institut international de recherche et de formation pour la promotion de la femme (INSTRAW), a rappelé que les femmes ont toujours fait partie des flux migrateurs, traditionnellement en qualité d’épouses ou de filles d’immigrés. De nos jours, les femmes émigrent de plus en plus en tant que principal soutien de famille. Il apparaît que les offres d’emploi pour les immigrées concernent en priorité le travail d’employée de maison ou de garde d’enfants et que ces emplois attirent tant des personnes de milieux pauvres que des personnes d’origine relativement aisée dans leur pays. Mme Moreno a expliqué qu’une des priorités de l’INSTRAW est la recherche dans le domaine des versements financiers, afin de mettre en évidence le rôle des femmes immigrées pour soutenir leur ménage et le développement de leur communauté. Elle a considéré que ces versements, qui représentaient en 2004 le double de l’aide publique au développement, sont devenus un instrument essentiel pour réduire la pauvreté. Mme Moreno a enfin partagé les résultats d’une première étude de cas concernant la République dominicaine. Il apparaît notamment que 85% de Dominicains qui résident légalement en Espagne sont des femmes et que 54% des versements reçus en République dominicaine sont envoyés par des femmes. Une des conclusions significatives est que 100% des émigrées dominicaines qui ont quitté l’Espagne pour rentrer dans leur pays ont monté leur propre affaire.
M. LAURO SANCHEZ ACEVEDO, Sous-Secrétaire chargé des questions de population, de migrations, et des affaires religieuses au Ministère de l’intérieur du Mexique, a déclaré que le Mexique connaissait tous les types de flux migratoires. En 2005, 20 millions d’étrangers ont visité le Mexique. Au cours de la même période, 400 millions ont franchi la frontière entre le Mexique et les États-Unis, et plus d’un million et demi de Mexicains en situation illégale ont été refoulés à cette frontière durant la même période. Le Mexique pour sa part a refoulé 1,2 million de personnes originaires de pays d’Amérique latine qui voulaient se rendre illégalement aux États-Unis à travers son territoire.
Le Mexique appuie la négociation d’une plateforme multilatérale cohérente et juste sur le phénomène des migrations internationales. Cette plateforme doit sauvegarder les droits des migrants et de leurs familles, a dit M. Acevedo. Au niveau national, le Gouvernement mexicain a promulgué le texte d’une série de recommandations et de mesures concernant la régulation de la migration à laquelle le pays fait face sur ses frontières sud. « Nous estimons qu’il faut éliminer les mesures de répression et de déportation aux frontières qu’adoptent trop de pays d’accueil », a dit le représentant, en arguant que tant que l’économie mondiale fonctionnait sur des règles et des mécanismes créant des inégalités, il serait illusoire de mettre fin de manière arbitraire aux migrations. Le Mexique encourage la régularisation de ses ressortissants vivant en situation irrégulière aux États-Unis et appuie les propositions visant l’établissement de contrats de travail temporaires. Le Mexique estime que tous les pays doivent combattre sans la moindre réserve la traite des êtres humains et notamment des femmes, a souligné M. Acevedo.
M. LAMIN NYABALLY (Gambie) a déclaré que, selon le recensement de 1993, 14% de la population de son pays étaient des migrants et que le taux d’immigration s’élevait à 1,5% par an. Il a indiqué ces flux de migrants posaient d’importants défis, notamment parce que la plupart des migrants se divisaient en deux catégories: les migrants économiques et les réfugiés. Ces derniers sont arrivés en Gambie à la suite des conflits dans la région, a-t-il poursuivi, et se sont intégrés dans la société gambienne. Quant aux migrants économiques, il a expliqué que ceux-ci étaient principalement impliqués dans le commerce, l’éducation ainsi que dans les secteurs industriel et de la pêche. Il a observé que ces migrants avaient non seulement contribué à la croissance du pays mais avaient aussi permis, par la formation, de renforcer les capacités des Gambiens notamment dans le secteur tertiaire. S’agissant des ressortissants du pays vivant à l’étranger, il a expliqué que bien que leur nombre soit petit, leurs envois de fonds au pays étaient significatifs, ce qui permettait des investissements dans les secteurs de la santé, de l’éducation et des infrastructures. Il a estimé que les pays d’origine devaient créer un environnement favorable et minimiser l’émigration afin de retenir un nombre important de personnes qualifiées pouvant œuvrer au développement du pays. Enfin, il a souhaité une aide pour les pays qui ne pouvaient rassembler des données sur les migrations, élément essentiel selon lui de l’élaboration de politiques adéquates dans ce domaine.
Mme ROMY TINCOPA (Pérou) a déclaré que sa délégation espérait que le Dialogue de haut niveau prévu sur la migration en septembre prochain permettrait de trouver des solutions aux questions que posent avec acuité le développement des migrations internationales et leur impact sur le développement. Le Pérou soutient la mise en œuvre du Programme d’action du Caire en tant qu’élément essentiel de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Le Pérou regrette la montée de l’intolérance et la multiplication des abus contre les migrants dans un grand nombre de pays d’accueil développés, et il déplore l’extrême politisation du discours concernant la migration et la présence d’étrangers dans certains pays développés. Toute politique de gestion de la migration devrait reconnaître les droits des migrants et veiller à leur respect, a dit la représentante en déplorant les abus dont sont victimes de nombreuses femmes migrantes.
Mme KHUNYING LAXANACHANTORN LAOHAPHAN (Thaïlande) a indiqué que son pays était à la fois un pays d’origine, de transit et de destination. Elle a ainsi estimé, qu’avec une gestion adéquate, les migrations peuvent contribuer de manière significative au développement national. Elle a expliqué que son Gouvernement encourageait les travailleurs du pays à trouver des emplois à l’étranger et à tirer profit de la mondialisation. Il existe des programmes pour augmenter la compétitivité et les qualifications de ces travailleurs avant leur départ ainsi que des campagnes d’information sur ces opportunités, a-t-elle précisé. Par ailleurs, elle a estimé que les migrants en situation irrégulière devaient être régularisés de manière compatible avec la sécurité nationale. Ainsi, elle a fait valoir que, face aux 2,2 millions de migrants illégaux dans le pays, la Thaïlande avait depuis 2004 entrepris une politique de régularisation en encourageant les employés à se présenter aux autorités et en leur permettant de travailler temporairement dans le pays.
En juin 2005, a-t-elle ajouté, le Gouvernement thaïlandais a décidé de prolonger les permis de travail de plusieurs milliers de travailleurs s’étant enregistrés dans ce cadre. Par ailleurs, la représentante de la Thaïlande a souhaité une coordination plus étroite à tous les niveaux pour combattre le trafic d’êtres humains. Elle a estimé que la prévention des migrations illégales était plus efficace lorsqu’on traitait des causes profondes de départs, dont le manque de développement dans les pays d’origine et a donc, dans cette perspective, appelé à une coopération Nord-Sud et Sud-Sud plus efficace. Elle a aussi souhaité une plus grande cohérence des politiques migratoires au niveau mondial qui prendrait en compte les spécificités des régions. Enfin, elle a annoncé la tenue d’un atelier régional sur les migrations avec la participation de 33 pays, à Bangkok, du 26 au 28 avril prochain, en préparation du Dialogue de haut niveau de septembre.
Mme LILIANA ATANKOVA, Chef de l’Unité de la migration et de la liberté de déplacement de la main d’œuvre au Ministère du travail et des politiques sociales de la Bulgarie, a déclaré que la Bulgarie était en faveur d’une migration qui favorise la réalisation des OMD. La politique de migration de la Bulgarie s’inscrit dans sa volonté de s’intégrer sans heurt dans l’Union européenne. Le respect des droits des migrants et de leurs familles est au cœur des préoccupations de la Bulgarie, a dit Mme Atankova. Un groupe de travail interdépartemental veille à l’harmonisation des politiques des différents ministères et agences bulgares qui traitent des questions touchant au monde du travail et à l’accueil social des étrangers en Bulgarie. Le Gouvernement bulgare envisage aussi de signer des accords bilatéraux de sécurité sociale avec les pays européens. Il a déjà signé de tels accords, notamment avec l’Allemagne, la France, l’Italie et la Grèce, entre autres pays. La lutte contre l’immigration illégale a, pour sa part, été renforcée par la signature d’accords avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et d’autres agences, a dit Mme Atankova.
Mme YASOJA GUNASEKERA (Sri Lanka) a déclaré que le schéma des migrations internationales était lié à la mondialisation, aux opportunités et disparités qu’elle a engendrées. Plaidant pour une gestion efficace et humaine des migrations, elle a rappelé que les travailleurs migrants apportaient une contribution importante dans les pays de destination et ceux d’origine. Elle a précisé que, dans le cas du Sri Lanka, les ressortissants travaillant à l’étranger avaient permis, à travers les envois de fonds, d’alléger le fardeau de la dette et de réduire la pauvreté, particulièrement dans les zones rurales tout en faisant bénéficier leur pays d’origine d’un transfert des connaissances. Elle a fait savoir que le Gouvernement sri-lankais tentait d’encourager les investissements en faveur du développement et de la croissance des travailleurs rentrant au pays en offrant notamment des services de prêts notamment. S’agissant de la protection des migrants, elle a appelé les États à adhérer à la Convention relative à ce sujet afin que les droits des migrants soient respectés comme ceux de tout citoyen. Enfin, elle a espéré que le Dialogue de haut niveau de septembre prochain permette d’explorer des solutions pour répondre aux défis que posent les migrations. Les migrations doivent être gérées de sorte que la situation soit favorable à tous les pays, au Nord et au Sud.
Mme AMINAH ABDUL RAHMAN (Malaisie) a déclaré que son pays emploie un grand nombre de travailleurs migrants dans le secteur primaire et les secteurs des travaux publics de son économie. Quinze pour cent des ouvriers employés en Malaisie sont des étrangers travaillant sur des contrats à court ou moyen durée. Mais l’évolution qui survient en ce moment dans l’économie de la Malaisie fait que dans l’avenir le pays aura besoin de main d’œuvre qualifiée pouvant travailler dans le secteur des technologies modernes, a dit Mme Abdul Rahman. Les offres d’emploi s’orienteront vers de nouveaux secteurs, ce qui va amener la réduction des permis de travail accordés à la main d’œuvre peu qualifiée. La présence de fortes communautés de migrants a créé ces dernières années quelques tensions du fait que de nombreux migrants travaillaient en situation irrégulière, a poursuivi la représentante, en citant des cas d’abus commis par des employeurs sans scrupules. Les nouveaux textes visent à mieux réguler les recrutements. De son côté, la Malaisie a connu une grosse perte de travailleurs qualifiés, un certain nombre d’étudiants et de Malaisiens hautement qualifiés ayant parfois choisi d’émigrer ou de rester dans les pays où ils avaient fait des études. Pour les attirer et les encourager au retour, le Gouvernement de Malaisie a créé un programme qui les incite à accepter des postes disponibles dans leur pays et à apporter l’expertise qu’ils ont acquise à l’étranger, a indiqué Mme Abdul Rahman. La Malaisie offre aussi des débouchés aux scientifiques, universitaires et chercheurs étrangers dans ses entreprises de pointe et ses centres de recherche universitaire et scientifique et technologique, a indiqué la représentante.
M. EASTON WILLIAMS (Jamaïque) a indiqué que son pays était principalement un pays d’émigration avec, comme destination privilégiée, les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni. Il a précisé que les personnes qui émigraient étaient surtout des femmes âgées de 15 à 40 ans. Il a estimé que 70% des diplômés de niveau tertiaire émigraient chaque année. Compte tenu de cette histoire d’émigration, il a noté que le Gouvernement avait créé un ministère chargé spécialement de tisser des liens avec la diaspora jamaïcaine et faciliter son retour. Il a souligné que, ces dernières années, le Gouvernement avait mis en œuvre des mesures innovatrices pour mobiliser la diaspora en faveur du développement national, dont une fondation de la diaspora, une journée nationale de la diaspora ou encore un site Internet. Par ailleurs, il a affirmé que les envois de fonds augmentaient progressivement depuis les années 1990 et représentaient à l’heure actuelle 10% du PNB de la Jamaïque. Les envois de fonds sont aujourd’hui la plus importante source de devises étrangères, a-t-il poursuivi, en déclarant qu’ils avaient contribué largement à la réduction de la pauvreté depuis le début des années 1990.
M. DJIHED EDDINE BELKAS (Algérie) a déclaré que l’Algérie est frappée de plein fouet par les effets de la migration. En Afrique, les phénomènes migratoires sont causés par un certain nombre de facteurs, dont les conflits armés et le sous-développement. Les jeunes sont les plus affectés. Les plans de développement mis en place en Algérie visent la création de centaines de milliers d’emplois, en particulier dans les secteurs de l’agriculture, des grands projets d’infrastructure, et du bâtiment. Ces projets visent à consolider la croissance sur la période 2005-2009 et reçoivent des investissements de l’ordre de 60 milliards de dollars. En ce qui concerne la diaspora algérienne, des textes législatifs et réglementaires, dont la Constitution elle-même, lui reconnaissent un rôle dans l’architecture politique, économique, sociale et culturelle du pays d’origine. Les membres de la diaspora sont ainsi représentés au Parlement à travers l’élection de leurs députés et ont le droit de participer à la vie politique à travers ces représentants. L’Algérie a toujours été une terre d’accueil ouverte à la migration étrangère, a poursuivi le représentant, en indiquant que son pays avait 7 000 kilomètres de frontières avec ses voisins africains. La réglementation accorde au travailleur étranger en situation régulière des documents de résidence et un permis de travail, en respect de la législation nationale en vigueur.
M. IÑIGO DE PALACIO ESPAÑA (Espagne) a souligné que son pays avait une des proportions de migrants les plus élevées d’Europe, ceux-ci représentant plus de 10% de la population totale. Notant la présence de migrants qui travaillent de manière irrégulière et ses conséquences négatives dont les risques pour ces individus, il a fait valoir les mesures d’exception adoptées par son Gouvernement en 2005 visant à régulariser les relations de travail entre entreprises et travailleurs migrants sans permis de séjour ou de travail. Il a estimé qu’il s’agissait là d’intégrer les migrants dans la société et le marché du travail espagnol. Il s’est ainsi félicité que son pays ait, en 2005, régularisé la situation de plus de 600 000 travailleurs migrants. Par ailleurs, il a insisté sur le rôle de l’intégration et sur les efforts accomplis par son pays dans ce domaine, citant notamment la création d’un Fonds d’appui à l’accueil des immigrants. Il a considéré que la gestion efficace des flux migratoires au profit de tous les acteurs n’était pas possible sans une collaboration des pays d’accueil, de transit et de destination. C’est dans cette perspective que l’Espagne a signé des conventions bilatérales avec de nombreux pays, a-t-il précisé. S’agissant de l’impact des migrations dans les pays d’origine, il a fait observer que la coopération espagnole était axée sur le renforcement des institutions publiques dans les pays d’origine. Quant aux envois de fonds, il a réaffirmé que ces sommes étaient privées mais a jugé que certaines mesures pourraient permettre de mieux les canaliser et d’en augmenter l’impact en faveur du développement, énumérant entre autres la bancarisation de ces envois, la promotion des institutions de crédit et d’épargne destinées aux petites et moyennes entreprises ou encore l’offre de prêts garantis par ces transferts de fonds.
Mme HOPE P. WHITE-DAVIS (Association mondiale des anciens stagiaires et boursiers de l'Organisation des Nations Unies - WANUFIF) a critiqué le scepticisme affiché par les États-Unis au sujet de l’état actuel des migrations internationales et de la capacité des Nations Unies à y faire face. Selon elle, cette position démontre la volonté d’un État Membre d’affirmer son emprise sur les moyens de répondre aux flux migratoires, soutenu à cet égard par les approches restrictives qui prévalent dans plusieurs autres pays développés. Soulignant ensuite l’existence d’importants mouvements migratoires Nord-Nord et pas seulement Sud-Nord, la représentante a estimé que la prise en compte de cette tendance permettait d’apprécier dans toute son ampleur la complexité du phénomène des migrations internationales. Des méthodologies plus flexibles devraient donc être adoptées, a-t-elle poursuivi, et mettre l’accent sur la question centrale de la qualification, et ce, quelle que soit la nature des mouvements migratoires observés. La féminisation de ces mêmes flux est également un élément dont il faudrait tenir compte, dans la mesure où les femmes sont souvent marginalisées et discriminées. La WANUFIF a en conclusion attiré l’attention sur le statut des réfugiés, qui se pose aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement.
Mme MARY KRITZ, représentante de l’ONG Union internationale pour l’étude scientifique de la population, a noté que tout pays dans le monde était un pays d’accueil ou d’origine et que certains remplissaient ces deux caractéristiques à la fois. Elle a indiqué que si beaucoup de migrants quittaient leur pays pour améliorer leur situation économique, d’autres étaient très qualifiés et encouragés à partir par les pays qui avaient besoin de leurs compétences pour leur marché du travail. S’agissant des migrations illégales, elle a constaté qu’un grand nombre de pays élaboraient des politiques pour faire face à ce phénomène et s’interrogeaient sur les manières d’intégrer ces populations. Par ailleurs, elle a fait savoir que selon l’analyse de l’ONG qu’elle représente, le processus de développement était déstabilisateur et augmentait les pressions d’immigrer au lieu de les réduire. La mondialisation peut modifier les possibilités d’emploi ou les salaires, a-t-elle précisé. Félicitant les Nations Unies pour leur rôle de chef de file dans le domaine de la population, elle a indiqué que l’ONG qu’elle représentait continuerait à parrainer des activités scientifiques qui contribuent au dialogue sur les migrations internationales.
EXÉCUTION DU PROGRAMME ET FUTUR PROGRAMME DE TRAVAIL DU SECRÉTARIAT DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION (E/CN.9/2006/6)
Présentation de rapport
M. ARMINDO MIRANDA, Fonctionnaire principal des questions de population à la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat des Nations Unies, a présenté le rapport du Secrétaire général sur l’ «Exécution du Programme et futur programme de travail du Secrétariat dans le domaine de la population » (E/CN.9/2006/6). Ce rapport fait le point des différentes activités menées par les Nations Unies dans les domaines de la population, de la promotion de la santé génésique, et du contrôle des tendances démographiques en rapport avec la conception des politiques de développement. Le rapport met un accent particulier sur les actions entreprises dans le domaine de la lutte contre la pandémie du VIH/sida, a indiqué M. Miranda.
Déclarations
M. PETER WAY (États-Unis) a affirmé que la Division de la population continuait à jouer un rôle essentiel en tant que source d’expertise et de compétence neutre en matière de démographie. Il a noté que les rapports qu’elle produisait étaient très utilisés par les décideurs, les académiciens et le grand public. En outre, il a fait valoir qu’au cours de l’année écoulée, la Division avait organisé des réunions d’experts sur l’évolution de la « structure de la population, dont une réunion sur le vieillissement de la population et ses conséquences économiques et sociales ». Il s’est aussi félicité du Rapport 2005 sur la mortalité dans le monde ainsi que du Rapport sur les politiques de population 2005, élaborés par la Division, qui permettent de mieux comprendre les tendances démographiques actuelles et notamment l’impact du VIH/sida dans le monde. Enfin, il a salué les efforts faits par la Division pour augmenter la distribution des données notamment, par des CD-ROM et son site Internet.
M. HAUG (Suisse) a déclaré que les données sur les migrations et le développement contenues dans le rapport du Secrétaire général sont insuffisantes et ne permettent pas de cerner toute l’ampleur du phénomène. Néanmoins, la Suisse félicite la Division de la population pour le travail qu’elle a accompli et pour sa participation aux travaux de la Commission.
M. BRUNBURG (Norvège) a apporté l’appui de sa délégation à l’avis émis par la Suisse. Il a dit que la Norvège était particulièrement satisfaite du contenu du rapport publié sur la mortalité dans le monde.
M. BUTOR (France) s’est félicité de la qualité du travail fourni par la Division de la population, affirmant qu’elle ne cessait de progresser dans les services qu’elle offre et dans la manière de les distribuer. Il a tenu particulièrement à souligner cette situation, compte tenu de la difficulté à analyser et suivre les tendances démographiques en constante évolution. Il a particulièrement insisté sur la qualité de la synthèse sur les migrations internationales présentée au début de cette session. Il a aussi salué la récente publication sur le mode de vie des personnes âgées visant à sensibiliser tous les pays aux problématiques du vieillissement. Il a affirmé que la Division faisait figure d’autorité dans le monde entier en matière de démographie et a souligné sa volonté d’accessibilité et de transparence, notamment en affichant ses données sur son site Internet. Il a conclu en estimant que la Division devait bénéficier des moyens indispensables à la continuation de son action.
Mme KEIKO OSAKI, représentante de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a déclaré que la CESAP avait mené un certain nombre d’activités sur le thème de la population, du développement et de la pauvreté en 2005. Un séminaire s’est tenu sur cette question à Bangkok. En 2006, la CESAP prévoit la tenue d’un séminaire du même genre dans un pays d’Asie du Sud. La CESAP fournit des services et une expertise à de nombreux pays d’Asie-Pacifique sur la question des migrations internationales, a indiqué la représentante. La CESAP met toutes les données dont elle dispose à la disposition du grand public et des gouvernements sur son site Web et à travers des publications, a-t-elle poursuivi.
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