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DH/CT/673

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME: LA NORVÈGE INVITÉE À ATTÉNUER LES RÈGLES D’ISOLEMENT EN MILIEU CARCÉRAL

14/03/2006
Assemblée généraleDH/CT/673
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Comité des droits de l’homme

Quatre-vingt-sixième session

2341e & 2342e séances – matin & après-midi


COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME: LA NORVÈGE INVITÉE À ATTÉNUER LES RÈGLES D’ISOLEMENT EN MILIEU CARCÉRAL


Au second jour de sa première session de 2006, le Comité des droits de l’homme a examiné aujourd’hui, sous la présidence de Christine Chanet, experte de la France, le cinquième rapport périodique de la Norvège.  Le Comité avait demandé à la Norvège de se concentrer, au cours de cet examen, sur les questions relatives, entre autres, à l’autodétermination (en relation avec le pouvoir décisionnel du Sameting dans les domaines qui concernent les Sami), au cadre constitutionnel et juridique de l’application du Pacte, ou encore aux mesures antiterroristes et au respect des garanties énoncées dans le Pacte. 


Présentant au début de la séance le cinquième rapport soumis par son pays au Comité, le chef de la délégation norvégienne, Petter Wille, a également couvert, dans son exposé, les questions relatives à l’interdiction de la discrimination, à l’égalité entre les sexes et à l’égalité dans et devant la loi.  À ce sujet, les experts du Comité qui siègent à titre individuel sont revenus au cours du dialogue avec l’État partie sur l’isolement cellulaire des détenus en milieu carcéral. 


Évoquant les développements récents intervenus dans le domaine de l’égalité des chances, la délégation a annoncé l’entrée en vigueur de la législation sur la parité dans les entreprises, une législation qui demande, depuis le 1er janvier 2004 aux sociétés d’État et depuis le 1er janvier 2006 aux entreprises privées, de respecter un quota minimum de 40% dans les conseils d’administration et le personnel.  En revanche, le Comité a longuement interrogé la délégation norvégienne sur les discriminations constatées dans le milieu carcéral et dans les activités de la police selon que les détenus ou les suspects sont des nationaux ou des étrangers. 


La Présidente du Comité a, en fin de séance, recommandé à la Norvège, par le biais de sa Commission de réexamen, de reconsidérer certains cas à la lumière des demandes formulées par le Comité.  Pour les questions de violence domestique, elle a salué les mesures qui sont prises par la justice norvégienne qui prévoit que ce soit les hommes s’éloignent du domicile.  Elle a jugé difficile de comprendre les justifications apportées par la délégation concernant les mesures d’isolement cellulaire de détenus dont la sévérité ne s’explique pas toujours de façon légitime, reprenant en cela les positions des membres du Comité. 


Le Comité poursuivra ses travaux demain, mercredi 15 mars, à partir de 15 heures, pour examiner le troisième rapport périodique de la République démocratique du Congo. 



EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE ET DE LA SITUATION DANS CES PAYS


Examen du cinquième rapport périodique de la Norvège


Ce rapport est publié sous la cote CCPR/C/NOR/2004/5.


Il a été demandé à l’État partie de traiter, au cours de cet examen, les points suivants: droit à l’autodétermination (article premier en relation avec le pouvoir décisionnel du Sameting dans les domaines qui concernent les Sami); cadre constitutionnel et juridique de l’application du Pacte; mesures antiterroristes et respect des garanties énoncées dans le Pacte; interdiction de la discrimination, égalité entre les sexes, égalité dans et devant la loi; droit à la vie; interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants, et traitements des détenus; interdiction de l’esclavage; droit à la liberté et à la sûreté de la personne; liberté de pensée, de conscience, de religion et de conviction; liberté d’opinion et d’expression; et droits des minorités (établis par la loi sur le Finnmark).


Présentation par l’État partie


M. PETTER WILLE, Directeur général adjoint du Ministère des affaires étrangères, a indiqué que les remarques précédentes du Comité avaient permis à la Norvège d’améliorer les modalités d’application du Pacte.  Nous sommes soucieux de mieux utiliser les observations des instances internationales et de les partager avec toutes les administrations compétentes.  Pour cela, nous traduisons les conclusions du Comité en norvégien et les transmettons aux entités en charge des affaires sociales et à la société civile.  Évoquant les développements récents qui n’étaient pas couverts par le rapport, il a indiqué que des règles d’exemption avaient été prévues pour les élèves dont les parents considèreraient, de par leurs convictions religieuses, qu’ils ne veulent pas que leurs enfants soient élevés dans la foi chrétienne. 


Les élèves âgés de plus de 15 ans peuvent soumettre eux-mêmes ces demandes d’exemption, a-t-il dit, ajoutant que le Gouvernement avait demandé aux institutions d’enseignement de prévoir des mesures permettant à ces élèves de renforcer leurs connaissances dans leurs sphères de conviction religieuse.  Les écoles doivent prévoir, en concertation avec les familles, des programmes adaptés, a-t-il dit, avant d’annoncer une réforme de la loi sur l’éducation.


Le deuxième volet important est l’entrée en vigueur de la législation sur la parité dans les entreprises publiques, une législation qui demande, depuis le 1er janvier 2004 pour les sociétés d’État et depuis le 1er janvier 2006 aux entreprises privées, de respecter un quota minimum de 40% dans les conseils d’administration et le personnel des entreprises.  Cette règle ne s’applique pas encore aux entreprises privées, a-t-il dit, avant de préciser que le Gouvernement avait mis en place un Directoire chargé de l’intégration et de la diversité, une structure effective depuis le 1er janvier 2006.


Abordant ensuite les questions présentées par le Comité, M. Wille a insisté sur les mesures prises par les autorités norvégiennes pour renforcer les pouvoirs décisionnels des populations sami. 


Sur la prévention de la discrimination ethnique, la loi adoptée en 2005 est entrée en vigueur le 1er janvier 2006, accompagnée d’un tribunal qui prend en compte différents motifs de discrimination: travail, logement, etc.  La loi couvre également le harcèlement et interdit les représailles contre les personnes qui dénonceraient des cas de discrimination, a-t-il dit. 


Il a ajouté que toutes les agences gouvernementales avaient l’obligation d’embaucher au moins un descendant d’immigré, ceci dans le cadre de politiques inclusives, a précisé M. Wille.  Il a ensuite indiqué que les municipalités devaient prévoir des programmes adaptés destinés aux immigrés et aux réfugiés, ainsi qu’à leur famille, afin de les préparer au marché du travail, sachant que ces programmes ne pouvaient durer plus de deux ans. 


Il a également mentionné le programme deuxième chance, sur l’insertion des immigrants chômeurs de longue durée, programme qui prévoit des plans de formation, notamment linguistiques, et des plans individuels.  La législation sur le logement a également été modifiée afin de prévenir, à la demande de l’Ombudsman, l’exclusion et la discrimination des immigrants dans ce domaine. 


L’État prévoit des prestations à cette fin, ils représentent 20% des bénéficiaires de ces prestations contre 4% pour les Norvégiens.  Cette politique a permis de faire baisser le nombre d’immigrants sans abri, a-t-il dit.


Le représentant a ensuite fait état brièvement des progrès réalisés dans l’adoption de mesures pour mettre fin à la discrimination à l’égard des femmes.  Il a évoqué à ce titre, outre la loi sur la parité dans les entreprises et institutions publiques, une série de mesures sur l’intégration des femmes handicapées et des femmes appartenant à des minorités ethniques. 


Abordant les questions relatives au droit à la vie, à l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants et au traitement des détenus, le représentant de la Norvège a indiqué que concernant les ressources destinées aux institutions psychiatriques, le Ministère de la santé de la Norvège avait mis en place un cadre de suivi des malades dès qu’ils quittent les hôpitaux.  Ce système comprend un réseau de centres qui soutiennent les médecins dans l’évaluation des risques que pourraient courir les patients une fois sortis des formations hospitalières.  Le système veille à assurer aux malades un suivi psychiatrique efficace.  Le Gouvernement norvégien est d’autre part en train de financer des études sur les causes de l’augmentation des suicides dans le pays. 


Répondant à la question posée par le Comité, relative à la situation des demandeurs d’asile, le représentant a dit que la Norvège accorde à la plupart de ceux-ci tous leurs droits fondamentaux.  Une allocation en argent et des services sociaux leur sont fournis tant que leur dossier de demande d’asile est en cours d’examen.  Mais si l’asile leur est refusé, ils sont alors considérés comme des étrangers en situation illégale. La Norvège ne les expulse cependant pas vers leur pays d’origine, où ils pourraient subir des sévices, a dit le représentant.  La Norvège compte dans l’avenir construire des centres d’hébergement pour les résidents illégaux en attendant leur départ de son territoire.


Revenant à la question qui demandait si la Norvège avait pris des mesures afin de garantir l’accès des demandeurs d’asile à des recours utiles, le représentant a dit qu’une assistance juridique gratuite pouvait être fournie, si de besoin, aux personnes ayant soumis une demande d’asile.  Le Gouvernement finance le travail d’un avocat à hauteur de cinq heures de travail d’assistance juridique au cours de chaque procédure.  La Norvège ne sépare pas les délinquants adultes des délinquants juvéniles, a ensuite indiqué le représentant en réponse à une question soumise par le Comité sur les conditions de détention des délinquants.  Une séparation peut cependant avoir lieu au cas par cas, a-t-il dit.


Abordant le thème de la protection de la population contre certaines informations, il a dit qu’il n’y avait pas en Norvège de mesures spécifiques contre la pornographie ou d’autres types d’informations qui pourraient être jugées tendancieuses.  Il est essentiel de protéger la liberté d’expression, a-t-il indiqué.


Dans l’intensification de la lutte contre certains délits pénaux graves, par exemple les actes terroristes, les tribunaux ont désormais le pouvoir de donner autorisation à la police de poser des systèmes d’écoute et de surveillance des suspects, a poursuivi le représentant.   La loi sur les méthodes que peut utiliser la police stipule que les mesures prises doivent être justifiées par le niveau de la menace à laquelle on fait face.  Concernant les lois sur l’immigration et leurs dispositions antiterroristes, un étranger peut être expulsé s’il enfreint les dispositions nationales contre le phénomène du terrorisme.  Cependant, la décision d’expulsion peut faire l’objet d’un recours, a précisé le représentant.  La personne expulsée en cas de soupçon d’acte de soutien au terrorisme ne peut cependant être transférée vers un pays où elle pourrait être torturée, a-t-il précisé.


La Norvège a un cadre juridique de lutte contre les actes de racisme, a par ailleurs dit le représentant.  Un  juriste spécialement formé assiste tout procureur saisi d’une affaire ayant trait à un acte de racisme ou de discrimination raciale.


Évoquant la détention, particulièrement la réclusion cellulaire, M. Wille a précisé que les instances judiciaires étaient habilitées à imposer des restrictions aux contacts des détenus avec des personnes extérieures.  Cependant, en dépit des dispositions de l’article 186 du Code de procédure pénale, des assouplissements ont été prévus.  En effet, l’article 186 prévoit que le détenu puisse, sur décision du Tribunal et pour une durée n’excédant pas deux semaines, sauf décision contraire du Tribunal, être mis partiellement ou totalement au secret.  La période peut être renouvelée pour une période de quatre semaines et, dans les cas très graves, elle ne peut excéder 12 semaines, et huit semaines pour les détenus de moins de 18 ans.  En 2005, il y a eu 3 033 récidivistes sur les 12 002 nouveaux prisonniers en Norvège, dont 402 se sont vus imposer un isolement complet ou partiel.  Il s’agit d’empêcher les prisonniers d’avoir une influence négative sur les autres prisonniers, de commettre des actes de violence, des actes criminels ou des actes de destruction, a-t-il dit, et en fonction également de la structure du bâtiment où ils sont détenus. 


Cependant, sur les 402 prisonniers mis au secret, plus de 390 décisions ont été prises à la demande des prisonniers.  Les prisonniers bénéficient de soins de santé adaptés, y compris de santé mentale, et de formations professionnelles.  Pour ce qui est des suicides commis dans les cellules de sécurité, il a indiqué que seuls un à deux suicides sur les cinq recensés dans les prisons, sont constatés dans les cas d’isolement.  Des efforts ont été faits par la Direction de la police pour prévenir les suicides lors des gardes à vue.  Des directives prévoient que la police surveille constamment la personne arrêtée en attendant qu’un médecin l’examine. 


S’agissant des mesures prises pour sensibiliser les responsables de l’application des lois à leurs obligations en matière de droits de l’homme –l’intervenant a demandé au Comité de fournir des informations sur les mauvais traitements de détenus et de suspects par la police dont est accusée la Norvège.  Les policiers reçoivent une  formation aux techniques d’investigation et d’interrogatoire. 


La question d’une différence de traitements entre les détenues qui allaitent, selon qu’elles sont norvégiennes ou étrangères, a été abordée par une représentante du Ministère de la justice et de la police. Elle a indiqué que les femmes étrangères bénéficiaient de modalités de reports de peines.  S’agissant de la protection de violence dans la famille, elle a fait état d’un plan d’action. 


Un autre plan d’action envisage la prise en charge des victimes de sévices, de même qu’un traitement pour les auteurs de ces violences.  Le travail de la police touchant des cas de violence domestique doit être renforcé également, a-t-elle dit.  De même, selon une réforme du Code pénal, une personne qui maltraite sa compagne ou son compagnon, ou son ancien compagnon ou compagne, peut encourir jusqu’à trois ans de prison.  Si la victime décède des suites de ces violences, la peine passe à six ans de prison.  D’autres dispositions interdisent le mariage forcé ou préviennent la cohabitation entre des personnes ayant vécu des cas de violence domestique. 


Dialogue avec les experts


Après les déclarations des représentants norvégiens, M. ROMAN WIERUSZEWSKI, expert de la Pologne, et rapporteur sur la Norvège, a regretté que la Norvège n’ait pas actualisé les réponses que sa délégation a apportées aux questions posées par le Comité.  Il s’est cependant félicité que la Norvège ait remis son cinquième rapport périodique dans les délais impartis.  Nous ne pourrons évaluer l’impact des mesures prises contre le racisme et la  discrimination que dans quelques années, a relevé l’expert, étant donné qu’elles viennent d’être récemment mises en place.  Il a ensuite demandé à la délégation norvégienne si son gouvernement comptait adhérer à une convention sur la protection des peuples autochtones des pays scandinaves.  D’autre part, a-t-il fait remarquer, les États ne devraient pas employer les mesures de lutte contre le terrorisme dans leurs politiques de lutte contre l’immigration illégale.  Quel est l’avis de la Norvège sur ce point?  La Norvège a-t-elle d’autre part pris des mesures visant à éviter que les personnes jugées en situation illégale ne soient pas brutalisées lors de leur expulsion, a dit l’expert en évoquant le cas d’un jeune originaire du Kosovo qui aurait subi des violences lors de son expulsion par voie aérienne du territoire norvégien.  Relevant que la Norvège avait créé un système d’Ombudsman, il a ensuite voulu savoir si pour le gouvernement norvégien ce système, était censé remplacer le ministère des droits de l’homme dont la création avait été envisagée.  L’expert a ensuite demandé à la délégation norvégienne de donner des informations sur les nombreux cas de discrimination contre les étrangers constatée dans l’accès au logement.  D’autre part, la Norvège a-t-elle pu diversifier la composition de ses forces de police dont les minorités ont longtemps semblé exclues?  Quelles sont les mesures prises pour mettre fin aux actes discriminatoires contre les femmes sur les lieux de travail?


M. AHMED TAWFIK KHALIL, expert de l’Égypte, s’est félicité des réponses apportées par la Norvège aux questions qui lui étaient posées, notamment en ce qui concerne le traitement des étrangers en situation irrégulière.  Cependant, a-t-il dit, quels sont les critères sur lesquels les tribunaux norvégiens peuvent soumettre un individu à la surveillance policière.  Sur quoi se basent les soupçons portés sur un individu dans les cas de soutien à des actes terroristes?  La formation des policiers norvégiens met-elle suffisamment l’accent sur le respect des droits de l’homme? a ensuite demandé M. Khalil.


M. NISUKE ANDO, expert du Japon, a posé une série de questions, la première relative à la situation des personnes vivant dans des institutions psychiatriques et, à ce titre, M. Ando s’est demandé pour quelles raisons le Gouvernement ne dispose pas de données statistiques sur ces institutions.  Par ailleurs, comment les institutions locales de soins psychiatriques appliquent-elles les normes nationales.  Évoquant la mise au secret, il a demandé s’il existait une durée maximale de cette procédure.  D’après les renseignements dont nous disposons, la mise au secret, durant la garde à vue des suspects pendant un à trois jours, ne relève que de la décision de la police, a-t-il dit, s’interrogeant en outre sur le processus de décision sur la mise à disposition de soins psychiatriques pour les prisonniers. 


M. EDWIN JOHNSON, expert de l’Équateur, a souhaité obtenir des précisions sur des mesures spécifiques qui auraient été prises pour remédier à la différence de traitements entre les femmes détenues selon qu’elles sont étrangères ou norvégiennes.  « Quelles sont les statistiques dont vous disposez? » a-t-il demandé, évoquant ensuite la violence domestique et demandant quelles mesures d’ordre judiciaire avaient été prises à ce sujet.


M. ABDELFATTAH AMOR, expert de la Tunisie, déplorant que les documents ne soient pas mis à disposition des experts à temps dans d’autres langues que l’anglais, a voulu savoir si les dispositions des conventions sont inopposables aux dispositions constitutionnelles.  Rappelant celles des conventions de Vienne, il a rappelé que les lois internes n’étaient pas opposables aux conventions internationales, ceci à propos de l’allégation selon laquelle les responsables de l’application des lois ne réagissent pas  d’une manière appropriée aux cas de discrimination raciale.  L’expert a également demandé des éclaircissements sur le paragraphe 48 du rapport qui concerne l’euthanasie, de même que sur le paragraphe 76 sur les mutilations génitales.  Quel est le degré d’importance de ce phénomène en Norvège? a demandé M. Amor, constatant que le rapport est discret sur cette question. 


M. WALTER KÄLIN, expert de la Suisse, s’est dit « impressionné » par les efforts faits par la Norvège pour répondre aux dispositions du Pacte, et l’a félicitée pour l’appui qu’elle apporte aux organes de traité.  Il a ensuite évoqué le respect du Pacte sous l’aspect de son extraterritorialité.  Si un pays a des troupes ou des forces de police sur un théâtre d’opérations extérieures, ses forces doivent appliquer à la population locale les dispositions du Pacte, a dit M. Kälin.  Qu’a fait la Norvège à cet égard?  Concernant la lutte contre le terrorisme, il a estimé que la définition qu’en donnaient les juridictions de la Norvège semblait très étroite.  Selon la législation norvégienne, le gel d’avoirs dans la lutte contre le terrorisme doit se baser sur des critères de légalité.  Cette exigence s’applique-t-elle aussi aux personnes ou entités placées sur la liste des sanctions de l’ONU?  Revenant au cas du jeune Kosovar décédé lors de son expulsion du territoire norvégien, M. Kälin a voulu savoir si le Gouvernement norvégien avait adopté des mesures spéciales pour éviter la répétition de ce genre de drame.  La Norvège ayant pris des mesures extrêmement restrictives sur la question des rapatriements, envisage-t-elle de les revoir pour les adapter aux réalités de certains pays d’origine des demandeurs d’asile, où les conditions sont trop dures pour permettre aux expulsés de mener une vie décente?  On sait par exemple, a dit M. Kälin, qu’un somalien expulsé de Norvège aurait peu de chances de survie en Somalie.  La Norvège a-t-elle prévu ce cas de figure?


Sir NIGEL RODLEY, expert du Royaume-Uni, a fait part de sa désapprobation face au système d’isolement cellulaire complet mis en place par la Norvège pour maintenir certaines personnes au secret.  La possibilité qu’un tribunal puisse maintenir sans limite de temps un suspect au secret, sans visite, même familiale, semble violer certaines dispositions du Pacte, a estimé Sir Rodley.  Les suicides constatés parmi les détenus placés en cellule de sécurité semblent dus à cette situation.  Ensuite, a dit l’expert, sur quoi se base le Gouvernement norvégien pour décider de la séparation ou non de certains détenus majeurs et mineurs dans ses prisons?  Sur quels critères un enfant et ses parents peuvent-ils être séparés? 


Répondant aux membres du Comité, les membres de la délégation de la Norvège ont dans un premier temps indiqué qu’un projet de convention sur le statut des Sami était étudié par la Finlande, le Danemark et la Norvège, convention qui devrait être signée par ces trois pays et les parlements sami une fois que chacune des délégations aura présenté ses observations.  Répondant ensuite à la question relative aux statistiques sur les malades mentaux, le représentant a jugé difficile d’établir le lien de cause à effets entre leur situation psychiatrique et les violences et délits commis.  En revanche, des informations sont disponibles sur les fonctionnements des établissements psychiatriques qui sont régis par des directives nationales. 


Sur la question de l’application extraterritoriale du Pacte, un représentant de la Norvège a indiqué que les forces norvégiennes, même déployées dans des opérations à l’étranger, restaient soumises au droit norvégien.  Les ordres donnés aux soldats norvégiens qui contreviennent aux lois nationales ne doivent pas être suivies.  Sur la question relative aux conditions de reconduite aux frontières des étrangers demandeurs d’asile, la représentante du Ministère des affaires sociales a assuré qu’un texte était actuellement à l’étude pour mieux organiser ce type de procédure.  En revanche, le suivi du dossier des demandeurs du droit d’asile reconduits chez eux n’intervient que dans de rares cas. 


Un nouveau projet de Code pénal envisage d’y intégrer la question de la propagande de guerre, a fait valoir le représentant du Ministère de la justice.  Il a d’autre part expliqué que toute mesure de surveillance, d’écoute téléphonique, de pose de micros par la police devaient être autorisées préalablement.  Par ailleurs, il a signifié que le délai maximum de mise au secret, sauf autorisation spécifique du Tribunal, ne pouvait dépasser 12 semaines.  Pour les personnes suspectes détenues dans un commissariat, elles doivent être présentées devant un tribunal dans les 48 heures, a dit le représentant, indiquant qu’un amendement souhaitant porter à trois jours ce délai n’avait pas été considéré. 


Sur le lien entre le Pacte et la Constitution norvégienne, le représentant a indiqué que dans la pratique, il n’y avait jamais eu de conflit, même si, dans les dispositions de la Constitution norvégienne, il est établi que celle-ci, en cas de conflit, prend le pas sur les conventions internationales.  Mais la Constitution est ancienne et nous nous efforçons de l’interpréter de manière à ce qu’elle n’entre pas en conflit avec les conventions, en particulier sur les droits de l’homme. 


Poursuivant ses réponses aux questions des experts membres du Comité, un représentant du Ministère de la justice norvégien a indiqué que malgré les efforts des autorités le nombre d’étudiants originaires de groupes ethniques minoritaires n’avait pas augmenté ces dernières années dans les écoles de police norvégiennes.  Conscient de la nécessité de diversifier l’origine des membres de ses forces de police et de sécurité, le Gouvernement mène en ce moment des études en vue d’identifier les raisons qui semblent décourager l’intérêt que pourraient porter les ressortissants autochtones et originaires des minorités aux carrières de la police, de l’armée, et des métiers de sécurité.  Concernant les conditions de détention dans ses prisons, la Norvège prévoit de lancer la construction de nouvelles structures pénitentiaires, a poursuivi le représentant, tout en indiquant que le Gouvernement s’efforçait aussi d’améliorer la qualité des soins médicaux fournis aux prisonniers.  Répondant aux inquiétudes exprimées sur la question de la mise au secret de certains prisonniers, il a estimé que ces mesures se justifiaient parfois par le besoin d’assurer la sécurité dans les prisons.  Les détenus violents sont systématiquement isolés.  La Norvège se propose cependant de revoir les procédures d’isolement afin de les rendre plus souples.


Répondant à une question sur l’euthanasie, le représentant de la Norvège a dit que pour des raisons éthiques, le Parlement norvégien avait décidé de ne pas autoriser cette procédure dont le poids et l’impact moral ne peuvent pas encore réellement être mesurés.  En ce qui concerne la situation des personnes mineures emprisonnées, le représentant a indiqué qu’il ne disposait pas des statistiques relatives à leur distribution géographique.  Cependant, nous pensons que la majorité de ces jeunes purgent leurs peines de prison dans la région d’Oslo, a-t-il dit. 


Le fait que le nom d’une personne figure sur les listes de sanctions financières de l’ONU destinées à lutter contre le financement du terrorisme est pris en compte par les juridictions norvégiennes, a ensuite affirmé le représentant.  Le gel des avoirs d’un individu peut donc être décidé en Norvège sur cette seule base.  Concernant l’expulsion des personnes dont une demande d’asile a été rejetée, la délégation norvégienne a indiqué que ces dernières avaient accès de manière temporaire aux centres d’accueil ouverts par le Gouvernement au profit des demandeurs d’asile dont les dossiers sont encore en examen.  Cependant, les dispositions de cette mesure prendront fin quand la construction de nouveaux centres de transit, destinés aux personnes en voie d’expulsion, sera achevée.  Pour éviter le genre d’accident survenu au jeune Kosovar décédé à l’issue de son expulsion, la Norvège a décidé de retarder l’expulsion des étrangers en situation irrégulière dont l’état de santé se révèle défaillant et qui, au terme d’une expulsion ne pourraient pas recevoir dans leur nouveau lieu d’accueil, les soins dont ils ont besoin.  Les ressortissants tchétchènes et afghans sont exclus de ces mesures parce que le Gouvernement estime qu’ils ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être traités comme des réfugiés, car Tchétchènes et Afghans peuvent vivre sans danger et recevoir des soins convenables dans la majorité des régions de la Fédération de Russie ou de l’Afghanistan, a expliqué la délégation norvégienne.


Poursuivant ses réponses, la délégation a assuré que la parité entre les sexes constituait une priorité pour le nouveau Gouvernement norvégien.  Les efforts de lutte contre les mutilations féminines, notamment l’excision, continuent de façon concertée.  De nouvelles dispositions ont été incluses dans la loi, depuis 2004, afin de s’assurer que les responsables des groupes tels que les crèches, les personnels hospitaliers et autres acteurs sociaux concernés, respectent la loi qui leur impose de rapporter des cas d’excision sous peine d’être emprisonnés pour une durée de 12 mois.


En début du second tour de questions, Mme ELISABETH PALM, experte de la Suède, a souhaité qu’on lui fournisse des précisions sur la durée de la détention des personnes arrêtées par la police, avant d’aborder la discrimination raciale, demandant s’il y avait eu un changement de système au sein de la police pour prévenir la discrimination fondée sur le faciès.  M. RAJSOOMER LALLAH, expert de Maurice, a questionné les membres de la délégation norvégienne sur la législation antiterroriste qui peut, dans certain cas, se révéler une porte ouverte à la violation des droits de l’homme.  M. KHALIL, expert de l’Égypte, s’est demandé si la définition du terrorisme pouvait également couvrir des manifestations de rue violentes et des incendies d’immeubles, auquel cas, cette législation est sévère.  M. JOHNSON, reprenant la parole, a jugé que les réponses données au sujet des actes discriminatoires frappant des femmes détenues sur la base de leur nationalité n’étaient pas acceptables. 


Répondant sur l’isolement carcéral, la délégation de la Norvège a rappelé que dans le cas des suspects détenus par la police, l’objectif est de les transférer dans les 24 heures en milieu carcéral.  Le processus est suivi de près par l’administration puisque des rapports hebdomadaires sont soumis, a-t-il dit, admettant que des retards ont été enregistrés dans la construction de nouvelles prisons, les installations actuelles étant occupées à 98%.  Nous n’avons pas eu de plainte de discrimination de la part des minorités ethniques pour le traitement par les agents de police, a poursuivi le délégué, indiquant que des personnels de la police sont aujourd’hui originaires de communautés immigrées. 


Pour la façon dont les choses fonctionnent en pratique, au titre de la lutte contre le terrorisme, il a assuré que les mesures prises l’étaient dans les limites autorisées par le Code pénal.  Les droits de la personnes sont protégés, même pour les personnes mises sur écoute téléphonique, dans la mesure où une commission parlementaire suit ces questions de près et des sauvegardes sont assurées par le truchement d’un avocat.  Il a assuré que la loi sur le terrorisme ne s’applique que dans les situations où l’intention délictuelle ou criminelle est établie.  Pour ce qui est de la question portant sur la différence de traitement entre les détenues norvégiennes et étrangères allaitant leurs enfants, l’État partie a affirmé qu’il continuait de rechercher des solutions car il n’est pas acceptable qu’un enfant pour être allaité doive être sur un lieu de détention. 


Sur les questions ayant trait au trafic d’êtres humains et à la traite des femmes et des enfants, unreprésentant de la Norvège a indiqué que toutes les victimes de trafic d’êtres humains qui se présentent aux autorités et prouvent qu’elles ont subi ce type de malversations peuvent recevoir un permis de résidence.  Les critères d’attribution de ce permis sont cependant en train d’être réexaminés afin d’en accélérer les procédures, a indiqué le représentant.  La Norvège est un pays de destination de trafics de femmes et d’enfants, a-t-il ensuite reconnu en indiquant que le trafic de femmes vers son pays y avait pour finalité leur exploitation sexuelle.  En 2005, les autorités ont pu intercepter une trentaine de femmes aux frontières norvégiennes et à l’intérieur du pays.  Pour faire face à ces violations de la dignité de la personne humaine, une étude visant à identifier l’origine de ces trafics a été lancée afin de permettre une meilleure lutte contre le phénomène. 


Deux cas graves de trafic, dont un à Oslo, ont fait l’objet de procès publics.  Un homme a été condamné à une peine de prison de cinq ans pour avoir fait venir six femmes d’Estonie et avoir créé un réseau d’exploitation sexuelle.  Le second cas concerne un homme originaire de Géorgie, condamné à une peine de 10 années de prison, pour avoir soumis à un trafic sexuel 11 femmes originaires de Russie méridionale et de Géorgie.  Plusieurs de ses complices ont également été arrêtés, et les juges ont estimé que même si les femmes étaient consentantes, pour des raisons clairement économiques, la responsabilité pénale des trafiquants et du proxénète n’en restait pas moins engagée.


Concernant l’incitation à la haine ethnique et raciale, de nouvelles dispositions punissent désormais la diffusion de messages haineux sur l’Internet ou sur des supports qui ne sont pas théoriquement accessibles au grand public, a poursuivi le représentant norvégien.  La peine pénale contre ce genre de crime a été portée de deux à trois ans de prison par la nouvelle législation, a-t-il indiqué.


Reprenant les questions, M. ANDO et M. KHALIL ont de nouveau insisté sur les questions de détention provisoire et de l’amendement visant à prolonger jusqu’à 72 heures le délai de garde à vue.  M. WIERUSZEWSKI a demandé quels moyens étaient octroyés à la minorité sami pour exercer ses droits et promouvoir et perpétuer sa culture.  M. MICHAEL O’FLAHERTY, expert de l’Irlande, revenant sur le trafic de personnes humaines, a jugé exemplaires certaines mesures prises en Norvège, s’interrogeant toutefois sur la notion de « période de réflexion ».  Par ailleurs, il a demandé des précisions sur la situation de la population Rom de Norvège, sur la taille de ce groupe et ce qui est mis en œuvre pour l’aider. 


M. AMOR, évoquant les caricatures de Mahomet, a mis en avant la dignité de la liberté d’expression qui ne peut s’accommoder de l’extrême, de l’insulte aux droits et aux croyances d’autrui.  Rappelant que des journaux norvégiens avaient reproduit ces caricatures, il a souhaité connaître la position du Gouvernement et de la délégation de la Norvège.  M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI, expert de l’Inde, a interpellé la délégation sur l’éducation en matière de droits de l’homme, souhaitant savoir si cette éducation est de caractère obligatoire.  Par ailleurs, quelles sont les mesures prises pour protéger les populations Rom, en particulier les femmes et les enfants? 


Répondant aux questions et aux observations des membres du Comité, la délégation norvégienne a indiqué que des propositions ont été faites pour que des modifications soient apportées au deuxième article de la Constitution norvégienne.  Le fait que la Norvège ait une église d’État, dont tous les membres du Gouvernement doivent être membres, ne crée pas de polémique ouverte dans le pays.  Ce fait ne semble pas poser d’obstacle au respect des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a estimé l’État partie.


Parlant du Centre norvégien pour les droits de l’homme, le représentant a dit que c’était une institution nationale chargée de soutenir l’application des législations relatives aux droits de l’homme.  Passant à l’intégration des immigrants, il a indiqué qu’un institut avait été créé pour évaluer le niveau atteint par les immigrants dans l’accès au logement, à l’école, et à d’autres services sociaux.  Ces statistiques servent à élaborer des mesures visant l’amélioration de la situation. 


S’agissant de la question des caricatures du Prophète Mahomet, un seul journal norvégien les a publiées, et le gouvernement l’a appelé à faire preuve de plus de responsabilité et de tact.  Le Gouvernement a aussi indiqué que la publication de ces caricatures n’engageait pas la responsabilité du Gouvernement, qui défend à la fois la liberté d’expression des Norvégiens tout en veillant au respect de certaines règles de civilité et de bienséance. 


La Norvège n’a pas encore de mesures spéciales visant à lutter contre le trafic des êtres humains, a ensuite dit le représentant.  Les législations policières ordinaires sont employées dans ce domaine.  L’asile accordé aux personnes victimes de trafics humains n’est pas un droit automatique en soi.  Une période de réflexion de 45 jours est auparavant accordée aux victimes.  Pour en bénéficier, il faut que la victime souhaite elle-même se soustraire aux trafiquants.  Le délai peut être prolongé si la victime en a besoin pour répondre aux enquêtes de police et dénoncer ses tourmenteurs, a précisé le représentant norvégien.


Composition de la délégation: M. Petter Wille, Claire Hubert (Ministère des affaires étrangères); Morten Ruud, Hilde Indreberg (Ministère de la justice et de la police); Anita Vardøy, Geir Elias Karlsen, Hidegunn Heinum (Ministère du travail et de l’inclusion sociale); Wenche dahl Elde (Département de la santé et des affaires sociales).


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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