DH/4896

L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES DISCUTE DES MOYENS D’AMÉLIORER L’APPLICATION DE SES RECOMMANDATIONS

24 mai 2006
Conseil economique et socialDH/4896
Department of Public Information • News and Media Division • New York

Instance permanente des Nations Unies

sur les questions autochtones

12e & 13e séances – matin & après-midi


L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES DISCUTE DES MOYENS D’AMÉLIORER L’APPLICATION DE SES RECOMMANDATIONS


L’Instance permanente sur les questions autochtones a poursuivi aujourd’hui ses travaux en s’intéressant, notamment, au suivi des 294 recommandations qu’elle a formulées au cours de ses trois premières sessions.


Les recommandations adoptées par l’Instance concernent ses domaines d’activité, ses méthodes de travail ainsi que des thèmes spéciaux.  Il s’agit notamment de favoriser l’acquisition de données et de connaissances sur les situations et les problèmes des peuples autochtones; de promouvoir la participation accrue et effective des peuples autochtones; de créer, populariser et diffuser du matériel, des outils et des directives ayant pour but l’éducation et la sensibilisation; et d’infléchir les paradigmes et la conception du développement qui tiennent compte des paradigmes autochtones.


La Présidente de l’Instance, Mme Victoria Tauli-Corpuz, a indiqué que certaines recommandations nécessitaient des ressources financières considérables, dont sont dépourvus les organismes, programmes et fonds des Nations Unies et ne sont donc pas encore appliquées.  Elle a encore déploré le fait que les fonctionnaires, cadres supérieurs et organes qui prennent les décisions souvent cruciales connaissent mal les besoins des peuples autochtones; la prise en compte de ces besoins spécifiques restant non prioritaires pour nombre d’institutions des Nations Unies et de gouvernements. 


Aux yeux des intervenants, il faut maintenant permettre à l’Instance de mieux s’acquitter de sa mission en développant notamment les activités des organismes des Nations Unies se rapportant aux questions autochtones et en diffusant davantage d’informations sur les défis que ces peuples relèvent quotidiennement pour assurer leur survie.  Même les gouvernements participent davantage aux travaux de l’Instance, il leur a été rappelé qu’ils ont la responsabilité première de mettreen œuvre la deuxième Décennie internationale des populations autochtones, lancée le 1er janvier 2005.


L’Instance permanente se réunira demain, jeudi 25 mai, à 10 heures.  Elle continuera d’entendre les participants sur le suivi des recommandations et la deuxième Décennie.  La séance plénière de l’après-midi sera consacrée aux travaux futurs de l’Instance.


PRIORITÉS ET THÈMES ACTUELS


Enfants et jeunesse autochtones; femmes autochtones; collecte de données; consentement préalable, libre et éclairé


Suite du dialogue avec les représentants de gouvernements et d’organisations non gouvernementales


Le Réseau des peuples Jumma du Bangladesh, dont une fraction s’est réfugiée au Japon du fait des violences perpétrées par les populations bengalis non autochtones, a évoqué la question relative à la reconnaissance du statut de réfugié politique de ces peuples.  Beaucoup d’entre eux se sont vus refuser un statut de réfugié politique au Japon.  L’un des dirigeants du mouvement a été arrêté lorsqu’il s’est rendu au bureau d’immigration japonais.  Au vu des nouvelles lois adoptées dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, de nombreux réfugiés au Japon ont dû partir.  Le mouvement se bat également pour que le Gouvernement japonais revoie ses politiques d’aide au développement au Bangladesh.  L’association Yupo Abe a indiqué qu’en dépit de la loi japonaise de 1947 qui accorde une protection adéquate aux droits des Ainu, peuple autochtone du Japon, le Gouvernement japonais ne les reconnaît pas en tant que tel.  L’association demande donc la promulgation d’une loi nationale, comprenant leur  droit à l’autodétermination.  Elle souhaite également que le Gouvernement japonais  établisse des points focaux nationaux pour créer un bureau tripartite qui réunirait le Gouvernement japonais, la communauté Ainu et le Bureau de pays des Nations Unies.


Mme VIRGINIA BARAHONA (Chili) a elle aussi souligné la nécessité de reconnaître les droits des populations autochtones, notamment par le biais de la Constitution chilienne.  Une proposition en ce sens sera soumise en juin 2006 à la Présidente du Chili.  Elle a aussi souligné qu’un renforcement du multiculturalisme au sein des institutions publiques était en cours.  La représentante a précisé qu’un programme de protection des terres autochtones avait été mis en place depuis 1993 et s’était accompagné de la restitution de 400 000 hectares.


En ce qui concerne le consentement préalable, libre et éclairé, le Conseil national des femmes autochtones CONAMI du Brésil a souhaité que le Fonds des Nations Unies pour la femme (UNIFEM) renforce le principe de la participation des femmes autochtones dans les différentes instances des Nations Unies.


La représentante des Bédouins du Néguev s’est insurgée contre la « judéisation » des terres ancestrales de son peuple.  Elle a condamné les déplacements forcés pratiqués par Israël dans la région depuis 60 ans.  Nos droits fondamentaux sont bafoués, nos modes vie sont menacés et, dans ce contexte, femmes et enfants sont les premières victimes.


De leur côté, des représentants de la cause Khmers Krom se sont élevés contre la politique de répression que pratique le Gouvernement vietnamien à leur encontre.  Ce dernier, ont-ils dit, rejette toute information qui ferait la lumière sur la disparition des Kmers Krom, à commencer par leurs moines bouddhistes.  C’est pourquoi, nous recommandons au Rapporteur spécial de se rendre au plus vite sur place pour rendre compte des violations des droits religieux et humains au sens large, dont sont victimes chaque jour les membres de notre peuple.  Si aucune action n’est entreprise dans ce sens, il ne sera pas possible d’attendre de notre pays qu’il réalise, conformément aux principes de justice censé le guider, les Objectifs du Millénaire pour le développement.


Le représentant de Organización nacional indígena de Colombiaa notamment évoqué le problème des enfants qui sont recrutés à des fins militaires.  Le groupe demande au Gouvernement colombien de revoir sa législation en matière de service militaire obligatoire, et de respecter ses dispositions originales qui prévoient d’exempter les populations autochtones du service militaire.


Enfin, en ce qui concerne le domaine de l’éducation des enfants, le représentant de Action pour la promotion des droits des minorités autochtones en Afrique centrale/Indigenous Information Network/African Indigenous Women (Collectif) a rappelé que les enfants pygmées en République démocratique du Congo étaient affectés par de nombreux problèmes, à savoir, l’éloignement des écoles, l’absence ou l’inadéquation de matériel scolaire, les discrimination de la part des enfants non autochtones, les disparités entre filles et garçons.  Il a exhorté l’Instance permanente à faire tout son possible afin que la réalisation des objectifs en matière d’éducation primaire soit atteinte.


Dialogue sur le suivi des recommandations des trois premières sessions de l’Instance permanente


La Présidente de l’Instance,Ms. Victoria Tauli-Corpuz, (Philippines) a rappelé que l’un des objectifs principaux de cette session est d’obtenir des informations et des données sur les populations autochtones par le biais de documents transmis par les ateliers et autres relais d’information sur le terrain.  Par l’établissement de bases de données et la mise en ligne sur Internet de ces informations nous visons la sensibilisation des gouvernements et de l’opinion afin de les sensibiliser à la cause autochtone.  Cela permettra aussi d’accroître la participation de ces communautés à tous les niveaux de prise de décisions.  Au cœur de notre mission, a ajouté la Présidente, il faut engager une véritable révolution conceptuelle en matière de développement.  Il faut redéfinir le sens du développement durable en privilégiant les droits de l’homme et la défense des libertés fondamentales.


La Présidente a énuméré les facteurs propices à la mise en œuvre des recommandations de l’Instance.  Parmi eux, la participation active de chaque institution, l’application des recommandations pertinentes ainsi que la mise en œuvre des partenariats créés entre l’Instance et d’autres organismes.  Un autre facteur important est l’appui financier des membres du Groupe de soutien interorganisations.  De même, il est indispensable de sonder régulièrement les dirigeants autochtones qui collaborent étroitement avec certains organismes des Nations Unies.


La Présidente a indiqué que certaines recommandations nécessitaient des ressources financières considérables dont ne disposent pas les organismes, programmes et fonds du système des Nations Unies et ne sont donc pas encore appliquées.  Elle a encore déploré le fait que les fonctionnaires, cadres supérieurs et organes appelés à prendre des décisions souvent cruciales connaissent mal les besoins des peuples autochtones, ceux-ci n’étant, en outre, pas prioritaires pour nombre d’organismes des Nations Unies.


De nombreuses organisations ont, de leur côté, noté que l’Instance et son secrétariat avaient un rôle important à jouer dans le renforcement des partenariats entre les institutions des Nations Unies et les peuples autochtones.  Toutefois, ont-elles relevé, il est encore difficile pour les populations autochtones d’identifier clairement quelles sont les institutions pertinentes adaptées à telle ou telle situation.  Pour remédier à cela, le représentant des Aborigènes d’Australie a recommandé à l’Instance, à son secrétariat et au Groupe d'appui interorganisations de préparer un document regroupant les informations de base relatives aux activités de chaque institution de l’ONU.  Un tel document devrait être présenté à la sixième session de l’Instance et être mis en ligne sur son site Internet.  De manière générale, les intervenants ont souhaité que l’Instance base davantage ses propres recommandations sur la défense des droits de l’homme.  Cela faciliterait les efforts en la matière, engagés au niveau national, en collaboration avec les acteurs de la société civile, les ONG et les organisations autochtones.


En ce qui concerne les travaux de la Commission du développement durable (CDD), le représentant du IndigenousCaucus on Sustainable Development a relevé que celle-ci discutait actuellement des changements climatiques, de la pollution atmosphérique et du développement durable, des thèmes qui revêtent une importance particulière pour les populations autochtones.  La coopération entre le Secrétariat de la CDD et l’Instance permanente devrait être renforcée, a–t-il ajouté.


Concernant le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones, le représentant de l’Assemblée des Premières nations du Canada a soulevé le problème de l’indemnisation des terres –dont sa nation n’avait pas bénéficié- en déclarant qu’il fallait tenir compte du droit international et des pactes internationaux.  Il a également expliqué qu’il y avait un fossé entre les droits nationaux et le droit international.


S’agissant de la deuxième Décennie internationale des peuples autochtones, des remarques ont été faites concernant l’éducation en faveur du développement durable et les activités traditionnelles, deux volets trop négligés sur le terrain.  Responsabilisation des autochtones, conscientisation, renforcement de systèmes de communication, développement des technologies de l’information, formation accrue d’éducateurs autochtones: telles sont les composantes qui devront être consolidées à l’avenir, ont estimé les orateurs.


Le représentant du Réseau des autochtones d’Asie a émis le souhait que la deuxième Décennie soit celle de la revitalisation des cultures et de la promotion des valeurs humanitaire.  À cette fin, les gouvernements ont une responsabilité particulière en ce qui concerne la mise en œuvre des OMD axés sur la défense des libertés et droits fondamentaux.  De même, pour faire de la deuxième Décennie un succès le plus complet possible, les droits à l’autodétermination et la protection de l’environnement des territoires autochtones doivent être respectés.


Le représentant de l’Assemblée des Premières nations du Canada a ainsi recommandé à l’Instance de demander à l’ECOSOC de tenir rapidement une réunion regroupant organisations autochtones, institutions financières et institutions des Nations Unies pour réfléchir à l’impact des grands projets de développement sur l’environnement traditionnel.


Concernant la question de la justice, l’experte du Guatemala et membre de l’Instance, Mme Otilia Lux de Coti, a déclaré que l’administration de la justice devait être renforcée et que l’impunité politique ainsi que l’impunité économique.  Elle a été rejointe en cela par l’experte de l’Équateur et membre de l’Instance, Mme Nina Pacari Vega qui a souligné que l’administration de la justice devait avoir une plus grande place dans les initiatives visant à mettre un terme aux violations des droits de l’homme.  Celle-ci a cité à titre d’exemple la décision prise l’année dernière par la Cour interaméricaine concernant les droits électoraux des peuples autochtones.  La Présidente de l’Instance, Mme Tauli-Corpuz, a attiré l’attention des participants sur le taux de surreprésentation des autochtones dans les prisons qui ne disposent ni de l’appui juridique pour les défendre ni d’interprètes.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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