DH/4893

PAUVRETÉ, MALADIES, ACCULTURATION: LA MARGINALISATION DES PEUPLES AUTOCHTONES AU CŒUR DU DÉBAT DE L’INSTANCE PERMANENTE

19 mai 2006
Conseil economique et socialDH/4893
Department of Public Information • News and Media Division • New York

Instance permanente des Nations Unies

sur les questions autochtones

8e séance – après-midi


PAUVRETÉ, MALADIES, ACCULTURATION: LA MARGINALISATION DES PEUPLES AUTOCHTONES AU CŒUR DU DÉBAT DE L’INSTANCE PERMANENTE


L’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones a achevé cet après-midi son dialogue avec les représentants de communautés autochtones, d’organisations non gouvernementales et d’États.  Entamée mardi, cette discussion a permis d’entendre des points de vue divers et parfois divergents quant à la redéfinition des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) à travers le prisme des communautés autochtones elles-mêmes, thème spécial de cette cinquième session.  Aujourd’hui, il a été question, en particulier, de la marginalisation et des difficultés auxquelles font face ces peuples défavorisés dans les grands pays développés.


De nombreux intervenants ont rappelé que les peuples autochtones constituaient, de part le monde, les plus pauvres des pauvres et les communautés les plus marginalisées.  Et ce, alors qu’ils habitent certaines des terres les plus riches du monde, a regretté le représentant de Peace Campaign Group.  Il a estimé que cette situation résultait du fait que les autochtones ne possèdent pas le contrôle sur leurs ressources naturelles et du non-respect des engagements pris par les États à l’égard de l’Instance permanente.  En exemple, il a cité la politique de son pays, le Bangladesh, où le Gouvernement prive, petit à petit, les peuples autochtones de leurs moyens d’existence. 


D’autres représentants, dont celui de la Confédération nationale des autochtones de l’Équateur, ont rappelé que les peuples autochtones ne partageaient pas la vision du développement des agences multilatérales tout en insistant sur l’importance de faire participer ces communautés à l’élaboration des politiques qui les affectent.  Les pratiques actuelles du développement ne doivent pas détruire nos terres, a insisté le représentant de Regional Organization of Threatened Societies.  Il a déclaré que les peuples autochtones luttaient non seulement pour leur identité culturelle mais aussi pour leur survie et leur autosuffisance économique et a plaidé pour que l’on s’attaque aux causes profondes de leur pauvreté.  Le représentant du World Adivasi Council a, lui, souligné les conditions des peuples autochtones tiers-monde qui continuent à se détériorer dans tous les domaines.  Il n’est pas suffisant de donner de l’aide et de l’assistance, a-t-il argué, cela doit être suivi de près par des normes internationales, notamment pour s’assurer que l’aide parvienne bel et bien à ceux qui en ont besoin.


Plusieurs intervenants ont, eux, souligné la situation particulière des peuples autochtones résidant dans les pays développés et particulièrement aux États-Unis.  Malgré leurs conditions de vie difficiles et leur pauvreté, ceux-ci sont en fait défavorisés en terme d’aide internationale puisqu’ils résident dans des pays riches, ont-ils indiqué.  Le représentant de Mount Arafat Embassy Clan Yamassee Native Americans a ainsi demandé que des facilités financières leur soient directement fournies par les agences de développement. 


Illustrant les difficultés des peuples autochtones vivant aux États-Unis, le représentant de la Red Xicana Indigena and White Mountain Apache Rainbow Center a indiqué que, dans ce pays, les réserves étaient prises pour cible par les cartels internationaux, installés dans les villes frontalières.  Notant l’augmentation importante de la consommation de stupéfiants et de l’utilisation de méthadone ces dernières années dans la population autochtone, il a affirmé que cette « épidémie » était entre autres liée au manque d’espoir et à l’isolement des jeunes.  Les traumatismes coloniaux durent pendant des générations, a-t-il estimé en citant comme conséquence la hausse du taux de suicides, de dépressions et de la toxicomanie.  Pour sa part, le représentant de Kamakakuokalami Center for Hawaiian Studiesa rappelé que le fossé entre riches et pauvres, très exacerbé aux États-Unis, étaient encore plus large en ce qui concerne les autochtones.  Il a expliqué que Hawaii souffrait d’un dépeuplement de ses îles, de nombreux autochtones partant pour fuir la pauvreté.  Il a déploré que seul 1% de la population parlait encore la langue autochtone depuis l’institution de normes éducatives américaines.  Il a demandé une autodétermination dans le domaine de l’éducation afin de la préserver.  Soulignant en outre les conditions de santé catastrophiques de ces communautés, il a aussi souhaité des financements adéquats dans ce domaine afin de parvenir aux OMD.


La représentante de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a d’ailleurs souligné l’inquiétante situation des autochtones en matière de santé.  Elle a constaté qu’ils avaient, dans plusieurs pays, une espérance de vie plus basse que les autres nationaux, ainsi qu’une mortalité infantile et maternelle plus élevée.  Elle a toutefois noté que les indicateurs de santé concernant les peuples autochtones étaient insuffisants.  L’OMS a donc comme priorité de renforcer la collecte de données systématiques et leur analyse.  De plus, elle a fait valoir que pour réaliser les OMD relatifs à la santé, il était nécessaire de répondre aux besoins spécifiques de ces populations et d’adapter les services qui leur sont offerts.  Suite à cette intervention, la représentante de Southern Diaspora Research and Development Centera appelé l’OMS à renforcer les services de santé pour les mères autochtones, surtout en milieu rural.  Elle a aussi demandé à l’Organisation de poursuivre le processus d’officialisation et décriminalisation de la médecine traditionnelle. 


Nombre de participants à cette discussion ont par ailleurs insisté sur les questions d’éducation et des connaissances traditionnelles.  Ils ont demandé que des mesures soient prises pour permettre aux peuples autochtones de maintenir et de renforcer leurs méthodes pédagogiques ancestrales afin de transmettre leurs valeurs et leur savoir.  La représentante de la Fundación para la promoción del conocimiento indígena a, elle, indiqué que la perte du savoir traditionnel avait des effets négatifs sur la biodiversité.  Elle a notamment mis en lumière le rôle des femmes dans les transferts de ces connaissances autochtones.  Il faut les incorporer dans l’exécution de projets visant à protéger et revitaliser ce savoir car elles en sont bien souvent les gardiennes, a-t-elle relevé.


Enfin, l’Instance a également entendu des interventions soulignant les conditions d’isolement de plusieurs populations autochtones à travers le monde.  Le représentant de la Confédération des associations amazighes du Maroc a notamment mis en avant l’exemple de ce peuple autochtone d’Afrique du Nord.  Il a indiqué que celui-ci était victime d’une marginalisation totale et que son identité était occultée par les gouvernements.  Se félicitant des décisions prises au Maroc pour reconnaître les droits de ce peuple, il a toutefois fait valoir que la situation restait fragile et ne serait pas stabilisée si la langue amazighe n’était pas introduite dans les dispositions constitutionnelles.  Il a aussi regretté que les agences de développement ne puissent accomplir leur mission dans les pays qui ne reconnaissent pas ces peuples.  Cette non-reconnaissance contribue donc largement à la pauvreté extrême des peuples autochtones, a-t-il conclu. 


L’instance permanente sur les questions autochtones poursuivra ses travaux lundi, 22 mai, à 10 heures. 


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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