MALGRÉ LES CONTRAINTES POSÉES PAR LE CONFLIT AU LIBAN, LE CHEF DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE SUR L’ASSASSINAT DE RAFIK HARIRI FAIT ÉTAT DE PROGRÈS
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Conseil de sécurité
5539e séance – matin
MALGRÉ LES CONTRAINTES POSÉES PAR LE CONFLIT AU LIBAN, LE CHEF DE LA COMMISSION D’ENQUÊTE SUR L’ASSASSINAT DE RAFIK HARIRI FAIT ÉTAT DE PROGRÈS
En dépit des contraintes posées par sa délocalisation temporaire à Chypre, rendue nécessaire par le conflit au Liban, la Commission internationale indépendante des Nations Unies chargée d’enquêter sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre libanais, Rafik Hariri, a été en mesure d’accomplir des progrès, a déclaré son Chef, Serge Brammertz. Celui-ci était venu présenter les conclusions de son cinquième rapport périodique*, qui portait sur la période allant du 15 juin au 15 septembre 2006.
Si la Commission a pris du retard et rencontré des problèmes d’ordre logistique pour entendre les témoins et obtenir des informations en raison du conflit au Liban, ces problèmes ont été réduits au maximum. De ce fait, la Commission a accompli des progrès dans tous les domaines d’enquête et continue d’explorer systématiquement toutes les pistes éventuelles de façon approfondie. Par ailleurs, la Commission, a indiqué Serge Brammertz, continue de travailler en étroite collaboration avec les autorités libanaises sur toutes les questions se rapportant à son mandat. Il a en effet rappelé que la résolution 1686 (2006) avait élargi le mandat de la Commission en relation avec l'assistance technique qu'elle fournit aux autorités libanaises concernant 14 autres cas.
Pendant la période à l’examen, la Commission a ainsi accru les ressources qu'elle consacre à cette assistance technique en se concentrant sur trois domaines prioritaires. Le premier porte sur l’enquête et l’analyse des restes pour chaque cas afin d'établir la nature et la localisation des engins explosifs utilisés. Le deuxième domaine concerne l'analyse des communications à Beyrouth au moment des attentats et le troisième s’intéresse aux entretiens, lorsque les personnes interrogées peuvent fournir des informations sur les cas individuels.
La représentante du Liban a ensuite rappelé qu’en coopération avec le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Nicolas Michel, le Gouvernement libanais continuait d’œuvrer à l’établissement d’un tribunal de caractère international compétent pour juger les responsables d’assassinats politiques au Liban. Nous espérons, a-t-elle ajouté, que cette future juridiction bénéficiera du soutien du Conseil de sécurité.
Pour sa part, la délégation syrienne a souligné la coopération accordée par son Gouvernement à l’enquête, qualifiée de satisfaisante par M. Brammertz dans son rapport. Se félicitant ensuite des efforts déployés par la Commission, dans le cadre de son mandat élargi, pour enquêter sur les attentats perpétrés au Liban depuis le 1er octobre 2004, le représentant syrien a estimé qu’il aurait été dès lors bienvenu que le Conseil de sécurité autorise la Commission à enquêter aussi sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis pendant l’agression israélienne en juillet dernier. Il a donc émis l’espoir que le Conseil envisagerait d’élargir le mandat de la Commission à ces crimes.
* Rapport publié sous la cote S/2006/760 et établi en application des résolutions 1595 (2005), 1636 (2005), 1644 (2005) et 1686 du Conseil de sécurité.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT
Exposé
M. SERGE BRAMMERTZ, Chef de la Commission d’enquête internationale indépendante chargée d’enquêter sur l’assassinat de Rafik Hariri et de 22 autres personnes, présentant son dernier rapport sur l'évolution des activités d’enquête menées par la Commission ces trois derniers mois, a fait observer que cette période était marquée par la situation de conflit et d’instabilité en matière de sécurité au Liban. Cette situation a amené la Commission à transférer provisoirement ses activités à Chypre le 21 juillet. Les opérations ont repris dès l’arrivée à Chypre. Le retour progressif du personnel international à Beyrouth a déjà commencé, a-t-il indiqué.
En dépit des problèmes d’ordre logistique, pour entendre les témoins et obtenir des informations en raison du conflit au Liban, la Commission a réalisé des progrès dans son enquête sur l'assassinat de Rafik Hariri, ainsi que dans l'assistance technique fournie aux autorités libanaises concernant certains autres crimes. Les analyses d'ADN ont permis d'obtenir des résultats cruciaux. Certains des restes humains expertisés semblent correspondre à ceux de la personne qui a fait exploser l'engin. D'autres analyses sont en cours pour déterminer l'identité de cette personne. La quantité minimale d'explosifs utilisée serait de 1 200 kilos, la dernière estimation à ce stade étant plus proche de 1 800kg. Par ailleurs, Serge Brammertz a indiqué que la Commission pensait avoir trouvé une explication scientifique au fait que certains témoins aient entendu deux déflagrations alors que tout indique qu'il n'y a eu qu'une seule explosion.
La Commission continue par ailleurs d'étudier le modus operandi des auteurs de l'attentat. Il s'avère ainsi que Rafik Hariri était l'objet d'une surveillance et il n'est pas exclu que des tentatives d'assassinat aient été tentées auparavant. Il est probable que l'équipe de tueurs savait que des contre-mesures électroniques avaient été mises en place pour protéger les déplacements de Rafik Hariri et qu'ils aient choisi une méthode qui ne pouvait être affectée par ces mesures. En outre, la réduction des mesures de sécurité après qu'il eut quitté son poste de Premier Ministre a entraîné un certain nombre de vulnérabilités. La Commission a opté pour placer parmi ses enquêtes prioritaires l'analyse des communications entre un certain nombre d'individus. Grâce à ce travail, la Commission comprend mieux les aspects préparatoires de l'attentat, notamment les activités et la localisation des six détenteurs des cartes SIM qui semblent avoir fait partie de l'équipe de terroristes. Ce travail est en cours et c'est l'un des domaines où est effectuée une analyse comparative avec 14 autres cas.
Serge Brammertz a en effet rappelé que la résolution 1686 (2006) avait étendu le mandat de la Commission en relation avec l'assistance technique qu'elle fournit aux autorités libanaises concernant 14 autres cas. La Commission a accru les ressources qu'elle consacre à cette assistance technique en se concentrant sur trois domaines: enquête et analyse des restes humains pour chaque cas afin d'établir la nature et la localisation des engins explosifs utilisés; le deuxième domaine concerne l'analyse des communications à Beyrouth au moment des attentats afin de déterminer les numéros de téléphone communs à ces attaques pour pouvoir les lier avec d'autres numéros pertinents; le troisième point concerne les entretiens lorsque les personnes interrogées peuvent apporter des informations sur les cas individuels. Serge Brammertz a noté que ces 14 cas n'avaient pas été exécutés par 14 groupes séparés n'ayant aucun lien entre eux et il a dit sa conviction que d'autres liens seraient mis au jour au fur et à mesure de l'avancement de l'enquête.
La Commission, a-t-il souligné, a continué à avoir des échanges étroits avec les autorités judiciaires et gouvernementales libanaises, ainsi qu'avec l'officier de liaison nommé par les Forces de sécurité. La Commission les remercie de leur soutien et pour le travail accompli, si l'on prend en considération les circonstances particulièrement difficiles qui ont marqué la dernière période concernée par le rapport. La Commission demande l'assistance pleine et entière ainsi que l'appui complet des États sur les plans technique, légal et judiciaire. Serge Brammertz a indiqué qu'entre le 15 et le 15 septembre, 39 nouvelles requêtes formelles d'assistance avaient été envoyées à une douzaine d'États Membres et organisations internationales. La majorité ont répondu avec célérité et de manière positive que ce soit en fournissant une assistance technique de médecine légale, un soutien technique, l'analyse des communications téléphoniques ou en facilitant des contacts avec des témoins.
Conformément à l'accord conclu entre la Commission et la République arabe syrienne, la collaboration de la Commission avec Damas s'est poursuivie. Au cours de la période concernée, 11 requêtes formelles d'assistance ont été soumises à la Syrie, concernant la recherche d'informations et de documents au sujet de certains individus et groupes. Damas a également fourni des informations sur les propriétés et l'impact d'explosifs lors d'expériences de déflagration contrôlée. Des réunions ont ensuite eu lieu avec des experts syriens pour en discuter les résultats. Pour Serge Brammertz, le niveau d'assistance fourni par la Syrie au cours de la période considérée demeure généralement satisfaisant.
La Commission est satisfaite des progrès effectués jusqu'ici dans les investigations, a indiqué M. Brammertz, qui a rappelé qu'on ne pouvait parvenir à des résultats qu’avec la coopération de tous les États. À cet égard, a-t-il estimé, trois domaines sont particulièrement cruciaux. Il s’agit d’abord des demandes d'assistance. Plus de 70 demandes ont été envoyées aux États et d'autres sont à venir. Une réponse rapide de leur part est essentielle. M. Brammertz a également cité la protection des témoins et le renforcement de la capacité institutionnelle de la Commission. À cet égard, il a fait remarquer que le recrutement durable de personnel compétent demeure une préoccupation, rappelant que la Commission devrait s’acquitter de son mandat actuel avant le 30 juin 2007.
Déclarations
Mme CAROLINE ZIADE (Liban) s’est félicitée des progrès accomplis dans les différentes phases de l’enquête sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre, Rafik Hariri, et de 22 autres personnes, et a souhaité qu’elle se poursuive aussi longtemps que nécessaire. Dans ce cadre, et avec la coopération du Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Nicolas Michel, le Gouvernement libanais continuera d’œuvrer à l’établissement d’un tribunal de caractère international, dont nous espérons qu’il bénéficiera du soutien du Conseil de sécurité. Le Liban y voit l’espoir qu’il n’y aura plus d’assassinat politique comme ceux dont nous avons été victimes trop longtemps. Le pays tient à faire toute la lumière sur ce crime odieux et sur ceux qui se sont ensuivis, a souligné la représentante.
M. BASHAR JA’AFARI(République arabe syrienne) a déclaré que sa délégation avait pris note des éléments du rapport de M. Serge Brammertz, de son expertise et du professionnalisme dont il a fait preuve dans ses méthodes d’enquête. Il a ensuite rappelé les efforts que son pays avait déployés pour coopérer pendant l’enquête sur tous les fronts et fournir les informations demandées dans les délais impartis. La coopération de la Syrie se fonde sur notre volonté de faire la vérité sur les circonstances de l’attentat qui a entraîné la mort de Rafik Hariri, a souligné le représentant. Évoquant ensuite les principales conclusions du rapport, il a attiré tout particulièrement l’attention sur les aspects techniques des travaux de la Commission, qu’il s’agisse des lieux du crime ou des moyens qui ont rendu possible son exécution.
L’une des difficultés auxquelles était confrontée l’enquête, a fait observer le représentant syrien, était l’exploitation dont elle faisait l’objet par des parties intéressées afin d’en tirer des conclusions hâtives et infondées. Des pressions continuent ainsi d’être exercées sur mon pays, alors que le rapport indique qu’il reste beaucoup à faire pour conclure l’enquête, a précisé le représentant. En Syrie, nous estimons que cette enquête doit être menée de façon objective, neutre et indépendante. Aussi, le Gouvernement coopère-t-il à cette fin depuis le début, notamment en donnant suite, avec diligence, aux demandes d’entretien avec ses responsables et en prenant les dispositions logistiques et sécuritaires qui s’imposent. La Syrie a en outre estimé qu’il fallait examiner tous les éléments de preuve avec soin et conformément aux règles du droit international, comme les faux témoignages qui ont été présentés à des fins politiques bien connues. Les faux témoins, a-t-il insisté, doivent être poursuivis.
Se félicitant ensuite des efforts déployés par la Commission d’enquête, dans le cadre de son mandat élargi, pour constituer des preuves sur les attentats perpétrés au Liban depuis le 1er octobre 2004, la Syrie a estimé qu’il aurait été, dès lors, bienvenu que le Conseil de sécurité l’autorise à enquêter aussi sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, commis lors de l’agression israélienne en juillet dernier. Nous espérons donc que ce mandat sera élargi à ces crimes, a souligné le représentant. Exprimant enfin sa satisfaction devant les dispositions prises pour préserver le secret de l’enquête, la délégation syrienne a estimé qu’il faudrait allouer à la Commission d’enquête les moyens nécessaires pour lui permettre de s’acquitter de son mandat. La Syrie, pour sa part, continuera d’apporter son concours à la Commission, a assuré l’Ambassadeur Ja’Afari.
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