LES MIGRATIONS INTERNATIONALES APPELLENT UN DÉBAT À L’ÉCHELLE MONDIALE DÉCLARE KOFI ANNAN
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LES MIGRATIONS INTERNATIONALES APPELLENT UN DÉBAT À L’ÉCHELLE MONDIALE DÉCLARE KOFI ANNAN
On trouvera ci-après la déclaration faite par le Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, devant les participants au Dialogue de haut niveau de l’Assemblée générale sur les migrations internationales et le développement, le 14 septembre:
Les migrations sont une expression courageuse de la volonté qu’ont les individus de surmonter l’adversité pour vivre mieux. Durant la décennie écoulée, la mondialisation a multiplié le nombre de ceux qui souhaitaient partir ailleurs et s’en donnaient les moyens.
Cette nouvelle ère de mobilité, en même temps qu’elle a ouvert des horizons aux sociétés du monde entier, a été source de nouveaux problèmes. Elle a aussi montré à quel point les liens entre les migrations internationales et le développement étaient étroits.
Il y a quelques années seulement, nombreux étaient ceux qui pensaient qu’il serait impossible de débattre de la question des migrations à l’Organisation des Nations Unies. Les gouvernements, disaient-ils, n’oseraient jamais soulever dans une instance internationale une question à laquelle leurs citoyens étaient si sensibles.
Or, vous voilà ici aujourd’hui et j’ai le sentiment que les choses sont en train de changer.
De plus en plus nombreux sont ceux qui s’intéressent aux moyens par lesquels les migrants peuvent contribuer à transformer tant leur pays d’adoption que celui où ils ont vu le jour. De plus en plus nombreux aussi sont ceux qui comprennent que les gouvernements peuvent œuvrer de concert pour faire en sorte qu’il y ait trois gagnants : les migrants, leur pays d’origine et les sociétés qui les accueillent.
Il est indéniable que les migrations internationales ont des aspects négatifs – la traite, la contrebande, le mécontentement social – et sont souvent la conséquence de la pauvreté ou de conflits politiques. Votre présence ici montre toutefois que vous êtes vous-mêmes disposés à relever les défis que posent les migrations en choisissant la voie du dialogue et de la coopération plutôt que celle des affrontements et de l’isolement.
Votre présence ici est aussi un hommage à l’énergie contagieuse et au pragmatisme visionnaire de mon Représentant spécial, M. Peter Sutherland, dont les efforts ont rassuré et inspiré chacun d’entre nous et auquel j’exprime ma profonde reconnaissance.
Alors que vous vous apprêtez à entamer vos travaux, permettez-moi d’avancer trois raisons qui expliquent pourquoi le présent dialogue est d’actualité.
Tout d’abord, et pour employer des termes simples, nous sommes tous concernés. Les pays qui contribuent activement aux migrations internationales et ceux qui sont largement touchés par ce phénomène n’ont jamais été aussi nombreux. Il est en outre plus difficile désormais de classer les pays en « pays d’origine » et « pays destinataires » car bon nombre d’entre eux peuvent être rangés dans ces deux catégories. Des pays qui à d’autres égards sont très différents se heurtent, contre toute attente, à des problèmes de migration analogues.
En outre, de plus en plus nombreux sont les indices qui témoignent du caractère bénéfique des migrations. Avec des transferts de fonds qui, d’après les estimations, auraient atteint les 167 milliards de dollars en 2005, les migrants originaires des pays en développement envoient à leur famille des sommes d’argent dont le total dépasse celui de l’ensemble de l’aide internationale. Or, ces sommes sont loin d’être les seuls apports des migrants qui mettent aussi à profit leurs compétences et leur savoir-faire pour transférer des technologies, des capitaux et des savoirs institutionnels. Les migrants introduisent de nouveaux modes de réflexion sur les questions sociales et politiques. Ils forment un lien humain dynamique entre les cultures, les économies et les sociétés. Grâce à leur action, nous sommes aujourd’hui mieux armés pour faire face aux problèmes que posent les migrations et tirer parti des possibilités que celles-ci nous offrent.
Enfin, les gouvernements commencent maintenant à considérer les migrations internationales comme une source de possibilités et non comme une perspective effrayante. Vous vous attachez à amplifier les aspects constructifs et mutuellement bénéfiques des migrations, à mettre en commun vos expériences, à développer des idées pratiques et à créer des partenariats.
Pour toutes ces raisons – et aussi parce que les gens n’émigrent pas seulement dans les pays voisins ou au sein d’une même région, mais vont parfois s’installer à l’autre bout du monde – les migrations internationales appellent un débat à l’échelle mondiale.
Bien entendu, le phénomène des migrations suscite des discussions passionnées. Il peut priver les pays de leurs éléments les meilleurs et les plus talentueux, diviser les familles, créer des tensions sociales et parfois être exploité par des éléments criminels et terroristes. La réponse à bon nombre de ces problèmes passe toutefois par une participation et un débat constructifs.
C’est pourquoi j’estime que le dialogue que vous allez engager aujourd’hui ne devrait pas s’achever demain. Je me félicite tout particulièrement de constater que bon nombre d’entre vous ont souscrit à ma proposition de créer un forum mondial sur les migrations et le développement et m’ont demandé de participer à la mise en place de cette instance. Je tiens notamment à exprimer ma gratitude au Gouvernement belge qui a offert d’accueillir le premier forum de ce type l’an prochain.
Je suis convaincu qu’un tel forum peut encourager les gouvernements à coopérer de manière concrète et en s’appuyant sur des données probantes. Il peut vous aider à formuler les problèmes de manière à vous permettre d’aller ensemble de l’avant, de rechercher des terrains d’entente et de trouver des moyens de resserrer les liens de coopération existants.
Bien entendu, il n’a jamais été convenu que la question des migrations internationales devrait faire l’objet de négociations officielles et normatives. Rares sont ceux qui souhaitent la création d’une commission intergouvernementale sur les migrations à vocation normative. Si je comprends bien le raisonnement des pays qui lui accordent leur soutien, le forum devrait être le contraire de tout cela. Il devrait être une structure informelle et à caractère consultatif, à laquelle chaque gouvernement serait libre de participer et qui surtout ne prendrait aucune décision contraignante.
Il permettrait de nouer des liens de confiance et de regrouper les idées les plus intéressantes proposées par les pays, à savoir : faciliter les transferts de fonds; mobiliser les diasporas; rechercher de nouveaux moyens de lutte contre la pauvreté; créer des partenariats pour l’éducation; etc.
Enfin, il montrerait que les gouvernements ont maintenant la volonté d’aborder avec sérieux et de manière constructive cette question aussi complexe qu’explosive.
Le forum devrait être dirigé et supervisé par les États. Néanmoins, le système des Nations Unies et moi-même sommes prêts à lui accorder notre soutien. J’ai décidé de proroger le mandat de mon Représentant spécial sur les migrations au-delà de la date à laquelle le présent dialogue doit s’achever. Je suis convaincu que le Représentant spécial sera un lien essentiel entre le forum proposé et l’ensemble des entités qui composent le système des Nations Unies. Je suis en outre disposé à créer, au cas où vous le jugeriez utile, un fonds de contributions volontaires pour appuyer les travaux du forum.
L’ONU se prépare à faire face par d’autres moyens également aux problèmes des migrations internationales. Au printemps dernier, j’ai créé le Groupe des migrations mondial, qui, outre l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), regroupe des bureaux, des fonds, des programmes et des institutions des Nations Unies traitant des différents aspects des migrations internationales et du développement. Vous n’ignorez sans doute pas les travaux importants menés par les membres de ce groupe – travaux qui vont notamment du soutien aux migrations des travailleurs à l’assistance fournie aux pays en développement pour les aider à mieux communiquer avec les communautés de migrants à l’étranger, des analyses démographiques de premier plan aux recherches sur les transferts de fonds, des efforts visant à défendre les droits des migrants à la lutte contre la traite. Le Groupe des migrations mondial s’emploie à assurer une meilleure coordination et une plus grande cohérence entre ses membres.
Ce dialogue de haut niveau sera couronné de succès car il s’engage à une époque où les problèmes de migrations internationales et de développement font l’objet d’un examen soutenu et approfondi. Les politiques de migration ont en effet été pendant trop longtemps fondées sur des intuitions et des anecdotes et mues par des intérêts politiques. Il est temps maintenant de regarder la réalité en face et d’en tirer les conclusions voulues pour aboutir à une vision commune de la façon dont les migrations internationales pourraient bénéficier à tous.
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