LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SALUE DEVANT LE COMITÉ EXÉCUTIF DU HCR LES ENGAGEMENTS DU SOMMET MONDIAL EN FAVEUR DE LA COMMUNAUTÉ HUMANITAIRE
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LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SALUE DEVANT LE COMITÉ EXÉCUTIF DU HCR LES ENGAGEMENTS DU SOMMET MONDIAL EN FAVEUR DE LA COMMUNAUTÉ HUMANITAIRE
On trouvera ci-après le texte du message délivré aujourd’hui par le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, devant le Comité exécutif du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Palais des Nations à Genève:
C’est avec grand plaisir que je me joins à vous aujourd’hui, en ce lieu où j’ai passé quelques-unes des années les plus formatrices de ma vie professionnelle. Au HCR, je sais que je suis entouré d’amis, ainsi que de gens exceptionnellement dévoués à l’ONU.
Je suis heureux de pouvoir m’adresser au Comité exécutif à un moment aussi crucial pour le monde et pour la communauté humanitaire. Notre dernière rencontre remonte à cinq ans, une éternité si l’on pense à tout ce qui s’est passé depuis. Le Comité lui-même a continué de s’agrandir, et je saisis cette occasion pour souhaiter la bienvenue à la Roumanie, ainsi qu’à mon propre pays, le Ghana, membres depuis la session de l’année dernière.
C’est aussi la première fois que le Comité se réunit depuis que mon ami Antonio Guterres a pris ses fonctions. Antonio et moi avons collaboré très étroitement sur la question du Timor oriental et sur d’autres dossiers. Vous avez déjà, j’en suis sûr, constaté son dynamisme et l’ampleur de ses compétences, et donc compris pourquoi j’ai voulu l’intégrer à notre équipe. Je vous signale aussi qu’il a été sélectionné selon une nouvelle procédure de nomination des hauts responsables qui témoigne de notre volonté d’accroître la transparence partout dans le système des Nations Unies.
Permettez-moi aussi d’exprimer ma reconnaissance à Kamel Morjane pour le rôle qu’il a joué en sa qualité de Haut Commissaire adjoint. Je lui souhaite tout le succès possible au poste de Ministre de la défense qu’il occupe à présent en Tunisie, et suis sûr de parler ainsi en votre nom à tous.
Enfin, je tiens à rendre ici un hommage vibrant aux membres du personnel du HCR. Ils ont récemment traversé beaucoup d’épreuves et continuent d’affronter bien des difficultés, notamment sur le plan de leur sécurité. Mais ils tiennent bon et se serrent les coudes. Le HCR est en de bonnes mains, à tous les niveaux, et mérite que vous continuiez de lui apporter votre appui politique et financier.
Je crois qu’il serait bon que je vous parle aujourd’hui de ce que les résultats du Sommet mondial du mois dernier signifient pour la communauté humanitaire, et pour le HCR en particulier. Ensuite, je donnerai la parole à ceux qui ont des questions ou des observations à formuler.
Vous vous souviendrez que dans mon rapport intitulé « Dans une liberté plus grande », j’ai engagé les dirigeants politiques à se montrer audacieux. Je crois que vous conviendrez qu’ils n’ont pas répondu à nos attentes dans tous les domaines où nous pensions que des progrès s’imposaient. Mais ils ont pris des engagements exceptionnels, notamment sur des questions qui intéressent directement la communauté humanitaire et le Comité exécutif.
D’un point de vue général, ils sont convenus que l’ONU devrait jouer un rôle dans le renforcement du système d’intervention humanitaire, ce qui permet d’espérer que les secours arriveront à coup sûr, et plus rapidement, aux victimes des guerres et des catastrophes naturelles.
Ils ont également pris des engagements précis.
Leur décision la plus novatrice est sans doute celle qui porte sur la création d’une Commission de la consolidation de la paix, laquelle viendra combler une lacune institutionnelle criante. Comme nous le savons tous, trop de pays sombrent à nouveau dans la violence lorsque les efforts de consolidation de la paix ou de stabilisation manquent de vigueur ou cessent trop tôt. La nouvelle Commission est censée remédier à ce problème. Elle réunira tous les intéressés pour que les efforts internationaux soient plus cohérents. Et elle veillera à ce que la communauté internationale ne se détourne pas des pays auxquels la presse a cessé de s’intéresser. Le retour des réfugiés et des déplacés est toujours une étape déterminante après un conflit. Et l’opération n’a pas que des aspects logistiques, loin de là. Souvent, il s’agit d’un facteur clef pour le maintien de la paix et la relance économique. Je constate avec satisfaction que le Haut Commissaire est déterminé à ce que le HCR participe activement aux travaux du Bureau d’appui à la consolidation de la paix qui épaulera la Commission. Les États Membres ont demandé que la Commission et le Bureau d’appui entament leurs travaux à la fin de l’année au plus tard.
Le fait que tous les membres de l’Organisation aient expressément reconnu leur responsabilité de protéger les populations civiles menacées de génocide, de crimes de guerre, de nettoyage ethnique ou de crimes contre l’humanité est un autre pas extrêmement important qui a été franchi au Sommet. La plupart des déplacements de population des 15 dernières années ont été déclenchés par des crimes de ce type.
Certains pays avaient des réserves quant à cette notion et craignaient qu’elle ne serve de paravent à des interventions injustifiées. Mais leur opposition s’affaiblit, comme en témoignent les formules sans équivoque utilisées dans la déclaration issue du Sommet.
Je sais que la communauté humanitaire a elle aussi des inquiétudes, qu’elle craint elle-même d’être utilisée comme paravent par des États qui enverraient des secours pour masquer leur peu d’empressement à s’attaquer aux véritables causes des conflits. Je sais aussi qu’elle craint de voir les interventions militaires nécessaires à l’exercice de la responsabilité de protéger porter atteinte à l’impartialité de son action.
Nous n’échapperons pas à ces contradictions. Mais elles doivent passer au second plan par rapport aux réels progrès qui ont été accomplis. Les participants au Sommet ont déclaré inacceptable l’inaction de la communauté internationale, surtout lorsque les gouvernements nationaux ne veulent ou ne peuvent pas agir. Certes, les interventions musclées doivent n’être qu’un dernier recours. Les efforts doivent porter sur des interventions plus précoces et non violentes visant à éviter que les conflits ou les troubles politiques ne dégénèrent. Nous devons aussi faire tout notre possible pour que, le moment venu – et il viendra certainement – l’engagement solennel pris par les chefs d’État et de gouvernement soit honoré.
Un pas en avant a aussi été accompli en ce qui concerne les déplacés. Les Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays ont été acceptés, ce qui devrait contribuer à une meilleure protection de ceux qui comptent parmi les plus vulnérables de la terre. Toutefois, l’apport d’une aide humanitaire efficace à ceux qui en ont besoin est encore loin d’être une chose assurée, comme je l’ai vu moi-même au Darfour cette année.
Avec l’appui du Coordonnateur des secours d’urgence et du système des coordonnateurs de l’action humanitaire sur le terrain, je suis déterminé à faire en sorte que les organismes des Nations Unies s’acquittent de leurs responsabilités. S’il faut pour cela modifier la répartition des tâches, créer de nouveaux partenariats ou réaménager le dispositif institutionnel, nous le ferons. L’aide aux déplacés n’est pas un à-côté, et ne doit pas être considérée comme telle.
Je me félicite que le HCR ait pris l’engagement d’en faire plus pour protéger les déplacés et de prendre la tête des opérations visant à leur fournir des abris d’urgence, ainsi que de la coordination des activités menées dans les camps. C’est une étape décisive dans les efforts que nous déployons pour rendre plus systématique une action souvent trop aléatoire, comme l’Assemblée générale nous le demande régulièrement. Les responsabilités du HCR vis-à-vis des personnes réfugiées à l’étranger ne s’en trouveront aucunement diminuées. J’engage vivement le Comité exécutif à mesurer l’importance de ce que fait le Haut Commissariat pour réformer le système d’intervention humanitaire et à l’aider à trouver les moyens financiers et matériels de mener à bien cette entreprise.
Le Fonds central autorenouvelable d’urgence est un de ces moyens. Je suis heureux que les participants au Sommet aient décidé de le renforcer. Déjà, les annonces de contributions s’élèvent à plus de 150 millions de dollars, et j’espère que ce montant continuera d’augmenter. Mais il ne s’agit pas que de réunir des fonds : il s’agit aussi d’être mieux à même de réagir rapidement et efficacement à une échelle suffisante pour répondre aux besoins. Grâce au renforcement du Fonds et aux mécanismes qui y sont associés, les organismes des Nations Unies devraient avoir la garantie de disposer des ressources nécessaires dans les trois ou quatre jours suivant une catastrophe, sans devoir attendre les résultats des appels accélérés, qui, comme nous le savons, sont parfois nettement insuffisants. En cas de crise, il faut faire vite ; le tsunami qui s’est abattu l’an dernier sur l’Asie du Sud-Est et les ouragans qui ont frappé la côte sud des États-Unis n’en sont que les preuves les plus récentes. Certes, le HCR a son propre fonds d’urgence, mais il pourra faire appel au Fonds central pour financer des activités sortant du cadre de l’intervention classique en faveur des réfugiés.
J’appelle aussi votre attention sur la décision, prise au Sommet, de créer à titre permanent un nouveau Conseil des droits de l’homme et de renforcer le Haut Commissariat aux droits de l’homme. Si les États Membres donnent à ce conseil des structures et un mandat appropriés, il sera plus efficace que l’actuelle Commission sur le plan de la protection, du renforcement des capacités et de l’assistance technique, ce qui permettra de prévenir le type de crise qui déclenche des déplacements en masse. Je continuerai d’encourager les États Membres à mener à bien les négociations et à régler les questions pratiques avant la prochaine session de la Commission, qui se tiendra en mars. Si le Haut Commissariat reçoit effectivement les ressources financières qu’il mérite, il disposera de moyens d’action nettement accrus. Les deux Hauts Commissaires, celui qui s’occupe des réfugiés et celui qui s’occupe des droits de l’homme, pourraient alors se concerter non seulement sur le plan des politiques, mais aussi sur celui des opérations, et leurs activités pourraient dès lors se renforcer mutuellement.
Les résultats obtenus en matière de développement – renforcement des mesures d’aide et d’allègement de la dette, et appui à des projets à effets rapides – contribueront aussi à la prévention des conflits et favoriseront la stabilité dans les lieux où travaillent les organismes humanitaires.
Des décisions ont été prises en vue d’améliorer la cohérence et la coordination des activités du système des Nations Unies, ce qui aura aussi des conséquences à la fois au niveau de l’action humanitaire sur le terrain et au niveau des organes directeurs qui arrêtent les orientations de cette action.
Une attention considérable a été accordée à la gestion de l’ONU. Le vaste plan de réformes qui a été adopté comprend des mesures visant à ce que la responsabilité et l’efficacité soient renforcées, à ce que ceux qui signalent des irrégularités ou des abus soient mieux protégés, et à ce que les fonctionnaires connaissent leurs obligations déontologiques et se conforment tous à un même code. Toutes ces dispositions auront bien évidemment des incidences sur le HCR, comme en auront celles qui seront prises pour renforcer les contrôles dont il fait l’objet et l’indépendance dont il jouit.
Enfin, il y a la question des migrations internationales, qui a été abordée au Sommet et à laquelle vous serez sans aucun doute appelés à consacrer beaucoup d’énergie au cours des prochaines années. Les migrations sont un des grands sujets de préoccupation de notre temps. Les gouvernements et les organisations internationales doivent s’attacher à tirer parti de tous les avantages qu’elles présentent, tout en s’attaquant aux difficultés qu’elles peuvent occasionner. Hier, la Commission mondiale a publié un rapport qui contient d’importantes recommandations sur les moyens de mieux gérer les migrations, dans l’intérêt des États tout autant que des migrants. Je les étudierai de près et vous engage à faire de même, surtout en prévision du dialogue de haut niveau qui doit avoir lieu l’an prochain. Cette semaine, le Haut Commissaire vous a parlé, à juste titre, de la difficulté de préserver le droit d’asile quand les nouveaux arrivants sont tous perçus comme des candidats à l’immigration. Mais le HCR a aussi de vastes compétences en matière de gestion des migrations, et s’efforce notamment de donner aux migrants les moyens de s’intégrer plus aisément dans les groupes qui les accueillent. J’espère qu’il continuera de participer au débat sur la question.
La volonté déclarée de renforcer le système humanitaire fait naître l’espoir d’une action plus rapide et plus systématique en faveur des victimes des guerres et des catastrophes naturelles.
Mais il ne faudrait pas croire que les organismes humanitaires, si importants soient-ils, peuvent régler les crises à eux seuls : encore faut-il que les États s’acquittent de leurs responsabilités, s’attaquent aux causes fondamentales des déplacements et consentent le travail politique nécessaire.
Le nombre de réfugiés a peut-être diminué, mais le nombre de personnes dont s’occupe le HCR a augmenté. Le Sommet aussi a laissé bien du travail à faire, tant pour les États Membres que pour le Secrétariat. Je suis déterminé à mettre en œuvre tout ce qui est en mon pouvoir, et à continuer de pousser les gouvernements à se mettre d’accord sur les questions qui les ont fait achopper dans leurs négociations. Je compte aussi sur la poursuite de notre collaboration.
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