SG/SM/10123

L’ONU A, COMME LE BLACK CAUCUS, LA FERME VOLONTÉ DE DÉFENDRE LES DROITS DES AFRICAINS ET DE FAIRE AVANCER LEUR CONTINENT, DIT KOFI ANNAN À WASHINGTON D.C.

26/09/2005
Secrétaire généralSG/SM/10123
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L’ONU A, COMME LE BLACK CAUCUS, LA FERME VOLONTÉ DE DÉFENDRE LES DROITS DES AFRICAINS ET DE FAIRE AVANCER LEUR CONTINENT, DIT KOFI ANNAN À WASHINGTON D.C.


On trouvera ci-après l’allocution prononcée par le Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, à Washington D.C. le 23 septembre, à l’occasion de la 35e conférence législative annuelle du Comité d’experts sur les affaires étrangères du Black Caucus du Congrès des États-Unis:


C’est avec un grand plaisir que je me joins à vous pour cette conférence annuelle.


Le Black Caucus du Congrès des États-Unis contribue à dynamiser la vie politique de ce pays.  Né de la lutte pour les droits civiques, il s’est fait la voix des Afro-Américains, exprimant leurs aspirations et celles de tous les Américains qui rêvent d’une société dans laquelle ils puissent vivre libres, dignes et égaux.  Le Caucus a également porté cette noble cause sur la scène internationale, devenant ainsi un moteur de la paix et du développement dans le monde.  Je vous remercie pour votre engagement, l’exemple que vous donnez, cette énergie que vous déployez.


La lutte qui a abouti à la création de ce Caucus a été la toile de fond de ma jeunesse, lorsque j’étudiais dans le Minnesota il y a de cela plus de 40 ans.  Dans mon enfance, j’avais assisté à la marche de mon pays vers l’indépendance.  Je savais donc quels changements spectaculaires sont possibles si le dynamisme et la détermination y sont.


Plus tard, lorsque je suis entré au service de l’ONU, j’ai pu constater que la lutte pour le progrès et contre la discrimination est véritablement un combat mondial.


Il est vrai que nous sommes toujours aux prises avec ces problèmes aujourd’hui.  Malgré tous nos efforts, la pauvreté et l’inégalité sont encore monnaies courantes un peu partout dans le monde.  Et ce sont les plus faibles qui sont les plus désemparés lorsqu’une catastrophe survient.  Les activités que l’ONU mène de par le monde – et dont une grande partie ne pourrait être accomplie sans le soutien des États-Unis – nous permettent d’en être témoins chaque jour.  Vous en avez été témoins, vous aussi, en particulier ces dernières semaines, depuis que l’ouragan Katrina a dévasté la côte sud de votre pays.


Une fois de plus, je présente mes condoléances à tous ceux qui ont perdu des êtres chers ou des biens dans l’ouragan.  Le spectacle de tant de vies perdues et de tant de ravages a profondément affligé la communauté internationale.


Le peuple des États-Unis s’est toujours montré généreux lorsqu’il s’est agi d’aider les victimes de catastrophes survenues dans d’autres parties du monde, et le monde l’a aujourd’hui payé de retour.  Plus de la moitié des Membres de l’ONU ont offert leur assistance.  Même ceux qui n’avaient que peu à donner ont tenu à donner ce qu’ils avaient.


L’ONU elle-même a participé aux efforts humanitaires déployés pour venir en aide aux victimes, et ce de diverses manières.  L’UNICEF a fourni deux avions entiers de matériel éducatif et de jeux.  Les experts de l’Organisation mondiale de la santé ont aidé leurs homologues américains du Centre for Disease Control à recenser les déplacés et de l’aide qu’ils avaient reçue; et des logisticiens ont été déployés dans toute la région, notamment à Baton Rouge, Denton, Little Rock et Arlington, ou encore sur le navire USS Iwo Jima, notamment pour coordonner la réception et la distribution de l’aide internationale.


En bref, les organismes des Nations Unies ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour aider, et tous nos vœux de courage accompagnent les Américains dans les efforts qu’ils continuent de déployer pour surmonter les effets de la catastrophe et reconstruire la région.  Nous suivons avec attention les conséquences que pourraient avoir l’ouragan Rita, et nous prions pour ceux qui s’apprêtent à l’affronter.


La solidarité qui nous a rapprochés au lendemain de l’ouragan Katrina est également bien visible depuis longtemps dans nos activités d’aide à l’Afrique.  L’ONU a, comme le Black Caucus, la ferme volonté de défendre les droits des Africains et de faire avancer leur continent.


Nous avons soutenu la décolonisation et nous avons directement facilité l’accession à l’indépendance de plusieurs pays d’Afrique.


Nous avons participé à la lutte contre l’apartheid et contre la discrimination et le racisme en général.


Lorsque les Africains ont réclamé la démocratie, l’ONU les a aidés à organiser des élections.


Aujourd’hui, alors que les Africains demandent à pouvoir participer aux échanges économiques mondiaux dans des conditions équitables, l’ONU se tient à leurs côtés.


Nous n’avons jamais cessé de plaider la cause de l’Afrique, même lorsque les conflits semblaient insolubles et les obstacles au développement insurmontables.


Le fait est que, si elle n’apportait pas son soutien à ceux qui en ont besoin, l’ONU ne serait pas fidèle à ses idéaux.


Certes, nous avons aussi connu des revers.  Mais ils n’ont fait que renforcer notre détermination de répondre encore mieux aux besoins et aux aspirations des Africains.


Non pas que l’Afrique soit faite d’un bloc.  Au contraire, sa remarquable diversité humaine et naturelle rend toute généralisation hasardeuse.  Mais l’on peut quand même dire aujourd’hui que l’Afrique avance bien sur divers fronts.


L’Union africaine continue de renforcer ses capacités de maintien de la paix et de médiation, et trouve ses marques en tant qu’instrument de progrès commun.


Bon nombre de pays africains connaissent une croissance économique relativement forte et soutenue.


Le secteur privé est mieux accepté comme partenaire.


Et la société civile se mobilise comme jamais auparavant.


Dans le même temps, les conflits au Soudan, en Côte d’Ivoire et ailleurs continuent d’imposer un lourd tribut aux populations, tout comme l’épidémie de sida.  L’Afrique subsaharienne est à la peine du reste du monde en développement pour ce qui est de la réalisation des objectifs du Millénaire.


Le soutien de la communauté internationale demeure donc indispensable, si nous voulons consolider les acquis durement gagnés et éviter de nouvelles crises.


Ce soutien était un des grands points de l’ordre du jour du Sommet mondial qui s’est tenu la semaine dernière.


Vous vous souviendrez peut-être que j’ai avancé cette année, dans mon rapport intitulé « Dans une liberté plus grande », toute une série de propositions, et que j’ai engagé les dirigeants du monde entier à faire preuve de courage.  Ils ne sont pas allés aussi loin que je l’avais espéré, mais ont pris plusieurs engagements remarquables.  Dans l’ensemble, les résultats sont assez positifs pour que l’on puisse affirmer que le verre est au moins à moitié plein.  C’est particulièrement vrai s’agissant de l’Afrique.


Voyez ce qui s’est produit pour les objectifs du Millénaire.  La Déclaration qui les contient a transformé de simples vœux pieux en un ensemble concret de buts à atteindre.  Le Président Bush, se joignant au reste de la communauté internationale, a affirmé son soutien sans équivoque à ces objectifs.  En outre, le Sommet a mis en route d’autres processus que nous appelions de nos vœux depuis plusieurs années, y compris une augmentation de 50 milliards de dollars de l’aide annuelle d’ici à 2010, un allégement de la dette de 18 pays lourdement endettés et l’adoption par de nombreux donateurs de plans précis aux termes desquels ils consacreront 0,7 % de leur revenue national brut à l’aide internationale d’ici à 2015.  Les États Membres se sont également engagés à prendre des initiatives à effets immédiats, par exemple de distribuer des moustiquaires, qui permettent de sauver des vies directement et à peu de frais.


Je sais que les membres du Black Caucus travaillent dur depuis longtemps sur ces questions.  Je vous remercie de vos efforts, et en particulier d’avoir appelé à mettre fin aux subventions agricoles et aux entraves au commerce qui ne font qu’appauvrir les agriculteurs et les producteurs africains.  Cependant, vous conviendrez certainement qu’il nous reste encore beaucoup à faire, en particulier dans le domaine du commerce.  Pour cela, notre objectif doit être le cycle des négociations de Doha, et en particulier la rencontre ministérielle qui doit avoir lieu à Hong Kong au mois de décembre.  Vous pouvez compter sur moi pour défendre une solution qui aide les pays en développement à prendre pleinement part à l’économie mondiale dans des conditions équitables, comme je compte sur vous pour en faire autant.


Autre succès remarquable du Sommet : tous les Membres de l’ONU ont clairement admis qu’ils ont la responsabilité de protéger les populations civiles contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité.  Je défends cette idée depuis de longues années avec à l’esprit la démission du monde et de l’ONU au Rwanda.  Et plus récemment aussi, j’aurais voulu que le monde réagisse plus rapidement et plus énergiquement face à l’horreur des massacres, des viols et des pillages commis au Darfour.


L’inaction internationale est inacceptable, surtout quand les gouvernements concernés n’ont pas la volonté ou les moyens d’agir eux-mêmes.  L’idéal serait certes que l’ONU n’ait jamais à exercer cette nouvelle responsabilité; mais il est fort à craindre que, tôt ou tard, nous serons à nouveau mis à l’épreuve.  Lorsque ce jour viendra, j’espère que les États Membres tiendront la promesse qu’ils viennent de faire solennellement aux êtres humains guettés par les pires dangers.


Le Sommet a aussi approuvé de nombreuses autres propositions qui présentent un intérêt direct pour l’Afrique. 


Il a décidé d’apporter des améliorations aux principaux fonds dont nous disposons pour les interventions humanitaires d’urgence.  Des contributions de 150 millions de dollars ont déjà été annoncées, et nous attendons d’autres annonces encore.


Le Sommet a aussi approuvé la création d’un Fonds des Nations Unies pour la démocratie, qui permettra d’aider les pays souhaitant adopter ou renforcer un régime démocratique.  Plus de 12 pays représentant toutes les régions du monde, depuis les États-Unis jusqu’au Sénégal en passant par Maurice, ont déjà versé ou annoncé pour plus de 40 millions de dollars de contributions à ce fonds. 


Les dirigeants du monde se sont engagés à redoubler d’efforts dans la lutte contre le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme.  Il est possible de faire reculer sérieusement ces maladies.  Il ne suffira cependant pas pour cela de débloquer plus de fonds; il faudra aussi mobiliser les autorités, lutter contre la stigmatisation, mieux planifier et coordonner les actions entreprises et investir réellement dans l’autonomisation des femmes et des filles. 


Les États Membres ont aussi comblé une lacune criante dans les institutions internationales en décidant de créer une commission de la consolidation de la paix.  En effet, trop de pays à peine sortis d’un conflit ou de convulsions politiques retombent rapidement dans la violence parce que rien n’est fait pour consolider la paix ou même stabiliser la situation.  Vous conviendrez, je crois, qu’Haïti s’est retrouvée dans cette catégorie après l’intervention internationale qui y a été menée au milieu des années 90.  La nouvelle commission, qui mobilisera tous les acteurs, veillera à ce que la communauté internationale adopte une approche plus cohérente pendant la période suivant immédiatement un conflit et investisse de façon plus soutenue dans le relèvement à long terme des pays concernés.  J’éprouve un plaisir particulier à souligner que la Tanzanie et l’Afrique du Sud étaient au nombre des pays qui ont soutenu le plus activement la création de la Commission. 


Les États Membres se sont par ailleurs intéressés de près à l’Organisation elle-même.  Comme les habitants des autres régions du monde, les Africains doivent pouvoir avoir confiance dans l’Organisation, dans la façon dont elle est gérée, dans son intégrité.  Cette confiance a manifestement souffert des révélations sur l’administration du programme pétrole contre nourriture en Iraq.  Je suis résolu non seulement à remédier aux problèmes qui sont apparus, mais encore à rendre notre gestion plus transparente et plus responsable, afin qu’à l’avenir nous montrions l’exemple en nous hissant à la hauteur de nos idéaux.


Comme le dit justement le titre que vous avez donné cette année à votre conférence, « L’Afrique compte ».  Elle compte parce qu’il s’agit d’une simple question de solidarité humaine.  Elle compte parce que les problèmes d’une partie du monde deviennent souvent une source de problèmes ailleurs.  Pour le dire franchement, c’est ce que nous avons pu constater en Afghanistan.  Un État en faillite, à des milliers et des milliers de kilomètres d’ici, est devenu un havre idéal pour des terroristes.  Le résultat fut le 11 Septembre.  Pourtant, l’Afghanistan était très loin, un État en ruines, et beaucoup d’entre nous pensaient que ce pays n’avait rien à voir avec nous. 


Et l’Afrique compte parce que priver le monde de la contribution qu’une Afrique pacifique et prospère pourrait lui apporter, c’est freiner le développement et la paix sur toute la planète.  Les États d’Afrique s’attaquent à leurs problèmes avec une énergie et une volonté renouvelées : nous devons œuvrer et investir avec eux pour édifier cet avenir meilleur qui pourrait être le leur.


Tout au long de cette année, nous avons vu de près ce que pourrait être cet avenir.  Le mois dernier, au Niger, j’ai certes vu des souffrances terribles, mais j’ai vu aussi la société civile se mobiliser pour acheminer l’aide et sortir le pays de la crise.  Il y a deux mois, au Soudan, j’ai certes vu l’interminable calvaire des victimes du conflit, mais j’ai vu aussi d’anciens ennemis opter résolument pour la paix et la réconciliation.  Il n’y a pas eu de retour en arrière malgré la disparition tragique de John Garang, un homme que vous connaissiez bien et qui symbolisait l’espoir pour des millions de Soudanais.


Ailleurs aussi, on trouve des raisons d’espérer: au Burundi, où le premier président élu depuis plus de 10 ans a pris ses fonctions le mois dernier.  Dans les dispensaires, où des associations se mobilisent pour soigner les malades du sida.  Dans les petites et moyennes entreprises, qui bénéficient d’investissements privés et de réformes bienvenues.  Nous devons soutenir tous ces efforts et aider à ce qu’ils se multiplient.


Le Sommet de la semaine dernière n’était donc pas tant un aboutissement qu’un commencement.  Nous avons énormément de pain sur la planche, en particulier pendant l’année qui vient, non seulement parce que les États Membres ont pris un certain nombre d’engagements assortis d’échéances fixes, mais aussi parce que j’ai la ferme volonté, pendant le temps qui me reste comme Secrétaire général, de veiller à ce que les réformes et les progrès deviennent irréversibles en Afrique et ailleurs.


Je sais que, vous aussi, vous ferez votre part.


L’ONU a besoin de vous pour que les médias américains s’intéressent à l’actualité africaine et accorde à l’Afrique l’attention qu’elle mérite.  C’est en effet par votre voix que les événements d’Afrique sont rapportés ici, aux États-Unis. 


Nous avons besoin de vous dans votre rôle premier, qui est celui de législateurs.  Je sais que le Congrès est intervenu pour appuyer les objectifs du Millénaire pour le développement, sous la forme d’une résolution introduite par la Représentante Betty McCollum.  Nous remercions tous ceux et toutes celles qui ont soutenu cette initiative.


Nous vous sommes également reconnaissants du soutien que le Congrès continue d’accorder aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, alors que la note monte encore avec la création de nouvelles missions ou le renforcement de celles qui existaient en Haïti, en Côte d’Ivoire, au Soudan et en République démocratique du Congo, et que vous-même devez faire face à des dépenses considérables et imprévues sur le plan intérieur.


Nous vous remercions de l’appui que vous accordez aux organismes d’aide humanitaire et de développement des Nations Unies, ainsi qu’à d’autres agences qui font un travail crucial en Afrique.


Et nous vous remercions de votre fidélité en ces temps difficiles.  J’aurai grand plaisir à travailler avec vous tout au long de l’année qui vient, dans un esprit de coopération toujours plus étroite.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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