SG/SM/10010

DANS UN MONDE INTERDÉPENDANT, LES CONFLITS VIOLENTS EXIGENT UNE INTERVENTION PLUS ÉQUITABLE, OÙ QU’ILS ÉCLATENT, DIT KOFI ANNAN À LA CONFÉRENCE DE LA SOCIÉTÉ CIVILE

19/07/2005
Communiqué de presseSG/SM/10010
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

DANS UN MONDE INTERDÉPENDANT, LES CONFLITS VIOLENTS EXIGENT UNE INTERVENTION PLUS ÉQUITABLE, OÙ QU’ILS ÉCLATENT, DIT KOFI ANNAN À LA CONFÉRENCE DE LA SOCIÉTÉ CIVILE


On trouvera ci-après un message du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, M. Kofi Annan, adressé à la Conférence mondiale sur le rôle de la société civile dans la prévention des conflits armés et la consolidation de la paix, dont a donné lecture à New York le 19 juillet son Conseiller spécial, M. Stephen Stedman:


Je regrette de ne pouvoir être avec vous en personne pour cette importante réunion qui témoigne de l’évolution intervenue au cours des dernières décennies. L’Organisation des Nations Unies a été fondée, il y a 60 ans, dans le but principal de préserver les générations futures du fléau de la guerre. Au cours des six dernières décennies, nous avons réussi à régler certains conflits dévastateurs. Mais tout dernièrement, l’Organisation des Nations Unies s’est attachée de plus en plus à les prévenir. Tout au long de mon mandat de Secrétaire général, j’ai soutenu cette tendance à s’acquitter du mandat consacré par le paragraphe 1 de l’Article premier de la Charte : « Prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d’écarter les menaces à la paix ».


Aussi est-ce avec une profonde gratitude que j’accepte aujourd’hui le Programme d’action mondial pour la prévention des conflits violents du Partenariat mondial dans sa version achevée. Je suis heureux de constater l’intérêt et l’engagement qu’il a suscités. Vos conférences régionales des trois dernières années, qui ont abouti à cette conférence mondiale, donnent effet à une importante recommandation de mon rapport de 2001 sur la prévention des conflits armés.


Votre venue à l’Organisation des Nations Unies coïncide avec un moment particulier: –une année marquant notre soixantième anniversaire mais également une année où nous tournons nos regards vers l’avenir. En septembre, plus de 170 chefs d’État et de gouvernement se réuniront dans cette même salle pour ce qui devrait être le plus grand sommet du monde et l’occasion rare, puisque donnée une seule fois à chaque génération, de se pencher sur certains des problèmes les plus pressants de l’heure.


Comme vous en conviendrez sans nul doute avec moi, de tous ces problèmes, celui qui se pose avec le plus d’acuité, c’est la prévention des conflits armés. Ce choix se justifie d’autant plus aujourd’hui que les menaces sont indissociables. Pauvreté, maladie et guerre se conjuguent pour lancer un cycle de mort à travers le monde. La violence civile, les violations des droits de l’homme et la misère mettent les États faibles à la merci de la criminalité transnationale organisée, du terrorisme et de la traite des être humains, du trafic de drogues et d’armes.


(à suivre)

C’est pourquoi il est impératif de parvenir à une coopération internationale soutenue pour faire face à ces menaces. Or, il nous faudra pour cela nous engager sur plusieurs fronts.


Premièrement nous devons faire du développement la base indispensable de nos efforts de prévention des conflits violents. Autrement, les États n’auront pas les moyens d’exercer leur souveraineté de manière responsable, de se dégager de situations endémiques de conflits et de construire une paix durable. La réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement doit donc faire partie intégrante de notre mission.


Je me réjouis des récents engagements pris par l’Union européenne et le Groupe des Huit, et compte sur les dirigeants qui participeront au Sommet mondial en septembre pour consolider ces progrès.


Les organisations de la société civile ont un rôle de plus en plus important à jouer, faisant en sorte que les États puissent absorber l’aide au développement et l’utiliser à bon escient, surtout lorsque les institutions étatiques sont gravement compromises par un conflit. L’un des défis majeurs est donc de trouver un juste milieu entre la fourniture de services essentiels et le renforcement des moyens d’intervention à long terme de l’État.


Deuxièmement, nous devons œuvrer de concert dans le sens d’une plus grande efficacité à l’échelle mondiale pour réduire l’accumulation et la prolifération des principaux instruments à l’origine de la plupart des conflits violents : les armes légères. Il est essentiel en l’occurrence de mieux appliquer les embargos sur les armes, de renforcer les programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, et de mettre en place des dispositifs efficaces pour réglementer le marquage et le traçage et combattre le courtage illicite. Je salue le remarquable esprit d’initiative et de coordination dont ont fait preuve les organisations de la société civile dans ce domaine et les exhorte à continuer de faire progresser ce consensus.


Troisièmement, nous devons renforcer les moyens d’action de l’Organisation des Nations Unies, des organisations régionales et de la société civile dans le domaine de la diplomatie préventive et de la médiation. Au cours des 15 dernières années, l’ONU a marqué d’importants progrès dans ce dernier domaine. C’est ainsi qu’elle a pu mettre un terme à plus de guerres civiles par le biais de la médiation que l’on n’avait réussi à le faire lors des deux siècles précédents. Cela tient dans une large mesure au fait que l’ONU a su faire preuve de volonté politique, offrir des perspectives de négociation, assurer une coordination stratégique et fournir des moyens concrets d’appliquer les accords de paix. J’espère qu’au sommet de septembre les dirigeants s’accorderont pour renforcer ces progrès.


Pourtant, de toute évidence, notre bilan en matière de prévention est mitigé. Les Secrétaires généraux de l’ONU ont su bien tirer parti du rôle unique que leurs bons offices leur permettent de jouer pour empêcher les conflits interétatiques, en dépit de la modicité des ressources disponibles. Mais, comme nous le savons tous pertinemment, l’ONU n’a pas toujours pu empêcher l’éclatement de conflits internes.


(à suivre)


Je compte sur la société civile pour nous servir de partenaires en nous aidant à désamorcer des conflits latents. Comme nous le montre l’expérience, c’est en coopérant avec les acteurs bilatéraux et intergouvernementaux et les uns avec les autres que nous pourrons être le plus efficace.


Quatrièmement, nous devons veiller à ce que les accords de paix que nous aidons à rendre possibles aboutissent, éviter qu’ils ne tournent court, remplacés par un regain de violence. Trop souvent, lorsque les soldats de la paix quittent un pays, ce dernier disparaît du radar du Conseil de sécurité. Le système des Nations Unies et la communauté internationale en général travaillent de manière dispersée et sans ressources adéquates pour consolider la paix sur place. L’expérience nous a récemment montré que près de la moitié des pays qui sortent d’un conflit basculent à nouveau dans la violence au bout de cinq ans. Les conséquences tragiques ne sont que trop manifestes – en Angola, en République démocratique du Congo, en Haïti, au Libéria et au Rwanda. Si les accords de paix avaient été bien appliqués dès le départ, ne serait-ce que dans deux de ces pays ravagés par la guerre – l’Angola et le Rwanda –, nous aurions pu éviter des millions de morts.


J’espère que l’institution de la Commission de consolidation de la paix, chargée de conseiller en matière de stratégies globales et d’orienter l’action dans ce sens, aidera à empêcher de pareilles tragédies à l’avenir. En tant qu’organisations de la société civile, vous avez un rôle primordial à jouer. Vous êtes on ne peut mieux placés pour faciliter le règlement des conflits locaux, mobiliser l’opinion publique en faveur des règlements de paix, favoriser le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des ex-combattants, défendre la cause des droits de l’homme, et raffermir la confiance prônant l’apaisement et la réconciliation.


Quand la prévention des conflits échoue, on y voit souvent un manque de « volonté politique ». Or cela décrit peut-être plus la situation que cela ne l’explique. Ce qui manque véritablement, c’est la pleine reconnaissance de notre interdépendance croissante et des conséquences qui peuvent en découler. Les conflits violents font peser de multiples menaces non seulement dans le pays où ils éclatent mais bien au-delà. Aucun de nous ne peut se permettre d’attendre passivement d’en arriver là. Nous devons tous nous sentir concernés dès l’instant où la menace d’un conflit se profile à l’horizon. Seulement il nous faut être clairs: ce nouveau consensus en matière de sécurité exigera de nous une réaction beaucoup plus équitable face à des conflits violents – où qu’ils éclatent.


C’est ce que la société civile n’a cessé de nous rappeler au fil des ans et qui est d’une valeur inestimable. Je compte sur vous pour poursuivre votre action dans les années à venir et pour nous aider à mener à bien notre mission commune. C’est dans cet esprit que je souhaite le plein succès de vos travaux.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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