L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES MET L’ACCENT SUR LES LIENS ENTRE DÉVELOPPEMENT CULTUREL ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Communiqué de presse DH/4839 |
Instance permanente sur
les questions autochtones
3e et 4e séances – matin & après-midi
L’INSTANCE PERMANENTE SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES MET L’ACCENT SUR LES
LIENS ENTRE DÉVELOPPEMENT CULTUREL ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Ses membres souhaitent que les Objectifs du Millénaire pour le
développement soient adaptés aux spécificités culturelles des peuples autochtones
L’Instance permanente sur les questions autochtones a poursuivi aujourd’hui, au Siège des Nations Unies à New York, les débats de sa quatrième session sur le thème « Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et peuples autochtones ». Cette journée a été l’occasion pour de nombreux intervenants de souligner l’importance d’impliquer plus avant les populations indigènes dans la définition de projets visant à réaliser les OMD, mais aussi d’adapter ces derniers aux spécificités culturelles et traditionnelles des autochtones.
Au cours de cette journée qui a vu l’intervention des représentants d’une dizaine de communautés autochtones, il a notamment été souhaité que les Documents stratégiques de réduction de la pauvreté (DSRP) soient adaptés aux spécificités de ces populations et que les pays fassent l’effort de collecter des statistiques et de mesurer l’impact des actions menées en direction des autochtones. Le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a présenté ses efforts pour sensibiliser les autorités gouvernementales mexicaines à la nécessité de prendre en considération les réalités des autochtones dans la formulation de politiques.
Dans le cadre du dialogue avec les organismes des Nations Unie ce matin, Mme Nina Pacari Vega (Quichua, Équateur) a souligné l’importance de constitutions qui tiennent compte de la situation multiculturelle des pays et qui reconnaissent des sociétés différenciées. Dans leur ensemble, les membres de l’Instance ont défini le développement culturel et la prise en compte des spécificités identitaires comme un préalable incontournable au développement économique des peuples autochtones. Si Ida Nicolaisen (Danemark) et Liliane Muzangi (République démocratique du Congo) ont estimé qu’il ne pouvait y avoir de développement sans respect des droits de l’homme et de l’identité culturelle, MM. Hassan Id Balkassm (Amazigh, Maroc) et Willie Littlechild (Cri, Canada) ont demandé spécifiquement des moyens d’assurer le respect des droits culturels et linguistiques des enfants.
Par ailleurs, le représentant de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), première commission régionale à avoir soumis un rapport à l’Instance, a déclaré essentiel que les États reconnaissent le multiculturalisme qui les constitue, en encourageant l’éducation bilingue des peuples autochtones et des politiques de santé intégrant leurs connaissances traditionnelles. Il a souligné le défi qui constitue la modification d’une logique d’État-nation vieille de trois siècles, incapable de prendre en considération les droits collectifs.
Le représentant de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a déclaré que la préservation des savoirs, expressions et cultures traditionnelles était indispensable à la réalisation des OMD. C’est dans ce contexte et dans un souci de protection intellectuelle, a-t-il précisé, que l’OMPI a créé un Comité des savoirs traditionnels. En outre, il a estimé que le Conseil économique et social (ECOSOC) restait l’instance de référence pour coordonner les efforts des organismes des Nations Unies en matière de développement.
Enfin, le représentant de l’Australie a défini la croissance durable comme le préalable à l’élimination de la pauvreté, en estimant urgent de permettre aux peuples autochtones l’accès à l’éducation et à la formation.
Outre les membres de l’Instance, les représentants des organismes des Nations Unies et des communautés autochtones sont également intervenus les représentants des pays suivants: Canada, Grèce, Fédération de Russie, Australie, République démocratique populaire lao, Norvège, Finlande, Brésil et Espagne.
L’Instance poursuivra ses travaux demain matin, mercredi 18 mai, à partir de 10 heures en salle de conférence 2.
OBJECTIFS DU MILLÉNAIRE POUR LE DÉVELOPPEMENT ET PEUPLES AUTOCHTONES (EN COURS)
Débat interactif entre les membres de l’Instance et les représentants des organismes des Nations Unies
Répondant aux questions des membres de l’Instance, le représentant de la Banque mondiale a déclaré que la Banque avait octroyé des dons aux peuples autochtones depuis l’avènement des OMD en 2000. Il a souligné l’importance des consultations et du consentement préalables et libres, selon lesquelles les gouvernements doivent avoir l’appui général des communautés avant toute intervention, notamment en ce qui concerne le développement d’industries extractives. Le représentant de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a insisté sur l’importance de la contribution des Documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DSRP), en regrettant qu’ils laissent souvent de côté les questions autochtones. La représentante du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a souligné l’importance du rapport sur le développement humain paru en 2004.
La représentante du Fonds international de développement agricole (FIDA) a souligné l’ampleur du travail à réaliser en matière de sensibilisation par tous les partenaires de l’Instance permanente afin que les attentes des autochtones soient prises en compte dans toutes les politiques. Présentant les activités du FIDA pour promouvoir les causes des peuples autochtones, elle a rappelé que la marginalisation et la pauvreté allaient de pair. Depuis sa création, il y a 27 ans, a-t-elle précisé, le FIDA a consacré 20% de ses ressources pour appuyer les peuples autochtones en Asie et en Amérique latine. En 2004, le Conseil d’administration a appuyé huit projets pour les peuples autochtones, dont deux au Soudan et en RDC, des projets qui doivent bénéficier à 200 000 foyers. Elle a déclaré que la première tâche du Secrétariat de l’Instance consistera à préparer, avec ses partenaires du Groupe d’appui et les États Membres, un projet cadre de sensibilisation aux OMD d’un point de vue autochtone.
Le représentant de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) a estimé qu’il souhaitait transmettre devant l’Instance une bonne et une mauvaise nouvelles. La mauvaise nouvelle est que la CEPALC n’est pas dotée d’un mandat lui permettant d’assurer un suivi des OMD en liaison avec les peuples autochtones. La bonne nouvelle est que même si la CEPALC n’a pas ce mandat, certaines personnes ont obtenu des ressources nécessaires afin de s’engager dans le suivi des peuples autochtones, à partir de l’an 2000. La CEPALC dispose d’une bonne banque de données grâce aux recensements en Amérique latine et grâce aux liens avec les gouvernements et les pays. Ayant comparé les indices entre les populations générales et les populations autochtones, elle peut affirmer que les peuples autochtones sont deux fois plus pauvres en moyenne que le reste des populations. Ces données doivent être intégrées dans les politiques publiques, a recommandé le représentant qui a plaidé pour des systèmes nationaux incluant la variable « peuples autochtones ». Par exemple, dans les statistiques sur l’emploi, il n’y a aujourd’hui aucune information consolidée sur les peuples autochtones, les initiatives restent très dispersées et les peuples autochtones restent invisibles sur certains points. Ceci est pourtant nécessaire pour atteindre le premier des OMD.
Le représentant de la CEPALC a conclu en estimant que la pauvreté avait aussi une connotation liée à la privation d’identité, la notion d’appartenance à une terre et à une langue. Les propositions d’avancement social doivent donc selon lui être articulées avec la notion de citoyenneté. Il faut rendre compatible l’exercice des droits du citoyen avec les conditions de vie des peuples autochtones.
La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a expliqué que celle-ci concentrait ses activités sur l’objectif 1 des OMD, à savoir l’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim. C’est à cet effet que le Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture a été adopté en 2001 et est appliqué depuis son entrée en vigueur en juin 2004. Il peut être consulté en annexe du rapport de la Conférence de la FAO et sur le site www.fao.org/index_fr.htm. L’objectif de ce traité est de parvenir à conserver et utiliser sur le long terme les ressources du sol pour nourrir les populations et pour l’agriculture. L’autre objectif est le partage juste et équitable des ressources, pour assurer une nourriture saine et sure. Le traité reconnaît les contributions apportées en la matière par les peuples autochtones.
La représentante a également rappelé que les Directives volontaires à l’appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale ont été adoptées à la 127e session du Conseil de la FAO en novembre 2004. Ceci constitue une avancée essentielle vers un meilleur accès aux ressources agricoles pour les personnes les plus pauvres et souffrant de la faim, incluant notamment les peuples autochtones. L’application de ces directives devrait favoriser la réalisation de l’objectif 1 des OMD.
Entamant le dialogue, Yuri Boychenko (Fédération de Russie) et Qin Xiaomei (Chine), membres de l’Instance, ont souligné l’importance de mesurer l’impact des politiques entreprises en direction des peuples autochtones. Nina Pacari Vega (Quichua, Équateur) a souligné quant à elle l’importance des constitutions qui prennent en compte l’état pluriculturel des pays et qui reconnaissent des sociétés différenciées. Il faut aller au-delà des OMD de 2015, a-t-elle insisté, et nous assurer que nous aurons des politiques multiculturelles après 2015. Dans le même ordre d’idées, Ida Nicolaisen (Danemark) a déclaré que les revendications des autochtones étaient incomplètes, si elles se cantonnaient aux questions économiques. Même si la question des ressources, notamment de la terre, est une question déterminante, celle des références culturelles est incontournable. Par ailleurs, elle a demandé si les institutions et États envisageaient de favoriser l’emploi des autochtones dans une optique de réalisation des OMD. Liliane Muzangi Mbella (République démocratique du Congo) a déclaré qu’il ne pouvait y avoir de développement sans respect des droits de l’homme et sans considération de l’identité culturelle. Elle s’est félicitée de la décision du Gouvernement de la RDC de solliciter la Cour pénale internationale (CPI) pour constater les exactions commises contre les autochtones durant les longues années de guerre.
Répondant aux questions et commentaires, le représentant du FIDA a assuré que le Fonds se souciait de l’impact de ses interventions sur la vie des communautés autochtones. Il a ajouté qu’il était difficile pour une petite organisation comme le FIDA d’encourager les gouvernements à changer de direction. Le représentant de la Banque mondiale a souligné les efforts de la Banque pour recruter plus d’autochtones. Nous réussissons en Amérique latine, a-t-il ajouté, où le nombre des autochtones ne cesse d’augmenter dans les bureaux de la Banque.
Le représentant de la CEPALC a insisté sur l’importance de traduire les instruments juridiques en politiques ciblées et efficaces. Il a souhaité une recommandation de l’Instance sur la capacité de traduire les ambitions en résultats pratiques en faveur du développement des populations autochtones. Il a déclaré qu’il était essentiel que les États nationaux reconnaissent le pluriculturalisme et que cette caractéristique multiculturelle se retrouve dans les politiques sectorielles. À cet égard, il a déclaré qu’il était essentiel que l’éducation des populations autochtones se fasse dans deux langues et que les politiques de santé tiennent compte des connaissances traditionnelles des autochtones. Il a souligné le défi que présente la modification d’une logique d’État-nation vieille de trois siècles, incapable de prendre en considération les droits collectifs. Il est temps, a-t-il ajouté, que ces États-nations réalisent qu’une société multiculturelle est une société où vivent plusieurs groupes qui, chacun de leur côté, viennent enrichir l’ensemble. Répondant à des questions de Wilton Littlechild (Cri, Canada) et Parshuram Tamang (Tamang, Népal) sur le droit à l’alimentation, le représentant de la FAO a indiqué qu’il interviendrait au cours de la semaine après avoir consulté les spécialistes de la pêche au siège de la FAO à Rome.
La représentante du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a attiré l’attention elle aussi sur les inégalités persistantes entre les peuples autochtones, en tant que groupes, et le reste de la population. Le PNUD a émis une note sur la politique d’engagement à l’égard des peuples autochtones en 2001 afin d’établir un cadre de partenariats avec ces derniers. Selon le PNUD, l’effet de la pauvreté sur les peuples autochtones sont bien la marque de leur exclusion et de la discrimination à laquelle ils sont soumis, car ils n’ont pas accès aux ressources productives et aux services sociaux de base. Accès à la propriété foncière, santé et éducation, protection de la propriété culturelle et intellectuelle, autant d’éléments essentiels qui manquent aux peuples autochtones et qui doivent être abordés dans le cadre des stratégies de réduction de la pauvreté. Dans un avenir rapproché, grâce à des programmes de développement en Asie du Sud-Est, le PNUD va remettre des rapports sur les peuples autochtones dans cette région. Les OMD doivent faire partie d’un tout selon la représentante du PNUD. Le PNUD a sensibilisé les peuples autochtones aux OMD mais nous reconnaissons qu’il faut faire d’avantage et s’assurer que les ONG participent plus au débat et aux actions en la matière. Plusieurs campagnes sont nécessaires. Mais des actions ont déjà été menées, souvent décentralisées pour que les politiques nationales correspondent aux besoins locaux.
La représentante du PNUD a terminé son intervention en se demandant comment mieux intégrer la question des peuples autochtones dans les actions pour la réalisation des OMD? La question, selon elle, est de savoir comment assurer une meilleure circulation de l’information et comment assurer un meilleur suivi. Nous espérons que cette Instance nous donnera un plan d’action concret, a-t-elle conclu.
Le représentant de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a déclaré que la préservation des savoirs, expressions et cultures traditionnelles était indispensable à la réalisation des OMD. C’est dans ce contexte que l’OMPI avait créé un Comité chargé de la propriété intellectuelle relative aux savoirs traditionnels et au folklore et dont le mandat a été élargi en 2003. Il a ajouté que ce comité fonctionnait depuis sa création dans le cadre d’un processus décisionnel transparent et inclusif, permettant l’intervention d’une centaine d’organisations accréditées. Il a précisé que l’OMPI avait encouragé des arrangements pratiques pour inclure les représentants locaux au sein des délégations des États Membres. L’OMPI a ainsi encouragé les États Membres à financer la participation des représentants locaux aux sessions du Comité. Toutes les sessions futures, y compris celle de juin, seront précédées d’une table ronde présidée par un autochtone. Il a également suggéré la création d’un fonds volontaire pour renforcer la participation des populations autochtones aux travaux de ce comité. Il a souligné l’importance d’une base juridique pour lutter contre les abus à l’égard des savoirs traditionnels, qui prévoit une possibilité de plainte au cas où le respect du principe de consultation préalable n’est pas respecté. Il a indiqué que l’OMPI avait également élaboré un kit à l’intention des communautés autochtones au sujet de la protection des savoirs traditionnels, un kit qui peut être téléchargé sur le site www.wipo.int.
La représentante du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a déclaré que la pauvreté était bien plus que le manque de revenus. C’est aussi le manque d’accès aux services de base. Elle a noté que le peu de données qui existent sur les peuples autochtones montrent que ces derniers sont les pauvres parmi les plus pauvres, et que le travail de l’UNICEF est de s’attaquer aux racines de la pauvreté donc à la discrimination. Ne prendre en considération que l’indicateur du revenu équivaut à ne pas tenir compte des enfants; l’éducation étant essentielle pour justement ne pas tomber dans la pauvreté. Près d’un milliard d’enfants souffrent de graves privations des droits de l’homme et les enfants autochtones sont les plus touchés, mais cette réalité n’apparaît pas dans les statistiques sur les revenus.
Les actions de l’UNICEF visent à réduire les privations en attirant l’attention des gouvernements sur l’importance du respect des droits humains des hommes, des femmes et des enfants, a poursuivi la représentante. Elle a cité en exemples plusieurs programmes de l’UNICEF au Mexique qui visent à obtenir des données sur les enfants. Ces enquêtes seront l’objet d’une prochaine publication sur le respect des droits des peuples autochtones du Mexique. Un autre projet a été entrepris par l’UNICEF avec l’Université autonome de Mexico. Il s’agit d’un programme de recherche sur les enfants et le respect des droits des enfants autochtones mexicains. La représentante de l’UNICEF a conclu son intervention en déclarant que les enfants sont la promesse d’une société plus juste et équitable et que leurs droits doivent être respectés.
Prenant la parole après ces présentations, Nina Pacari Vega (Quichua, Équateur) a déploré que l’on tente en quelque sorte de faire entrer les peuples autochtones dans un musée, qu’ils soient considérés comme des reliques. Elle a demandé que les peuples autochtones soient considérés comme de vraies populations à la culture bien vivante, bien présente, qui ne doit pas disparaître. Il faut plus de coordination entre les organismes. Allant dans le même sens, l’anthropologue Ida Nicolaisen (Danemark) a encouragé l’OMPI à renforcer ses capacités, à faire plus d’études sur la culture et les systèmes de savoirs des peuples autochtones.
En réponse, le représentant de l’OMPI a estimé que les OMD devaient prendre en compte également la culture, le savoir traditionnel. C’est de cette manière que le Comité intergouvernemental de l’OMPI sur la question contribue à la réalisation des OMD. Le représentant de l’UNESCO a affirmé que l’Organisation s’inquiétait de protéger les savoirs traditionnels. Une coopération interinstitutions et avec les ONG serait précieuse, selon lui, afin que le savoir autochtone soit préservé et que la transmission entre les générations puissent se faire. Le représentant de l’OMPI a affirmé que la coordination entre l’OMPI et l’UNESCO était déjà bien réelle. Il a également rappelé que la coordination générale était confiée à l’ECOSOC.
Aqqaluk LYNGE (Inuit, Groenland) a rappelé que la pauvreté existait aussi dans les pays riches parmi les peuples autochtones. Par exemple, chez les Inuits, les problèmes de santé liés aux changement de modes de vie sont très sérieux: diabète et maladies cardiovasculaires notamment, ont fait leur apparition en une génération.
En réponse aux questions de plusieurs membres de l’Instance, le représentant du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCR) a estimé que la mise en place de directives contraignantes permettant la défense des droits des peuples autochtones pouvait être envisagée comme l’un des objectifs pour la deuxième Décennie internationale des populations autochtones. S’adressant aux représentants des peuples autochtones, il a ajouté « vous avez un rôle à jouer en tant qu’experts dans une telle initiative ». Il a suggéré que l’Instance rassemble ceux qui travaillent sur le patrimoine culturel. Le représentant du Haut Commissariat a émis le souhait d’avoir une réunion avec deux membres de l’Instance pour émettre des suggestions sur ce qui se fait en partenariat entre le Haut Commissariat et le PNUD pour aider les peuples autochtones à défendre leur patrimoine.
M. JOHN SINCLAIR (Canada) a indiqué que les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) obligeaient à examiner le dénuement des peuples autochtones et les disparités persistantes dont ils souffrent, non seulement au sein des pays en développement mais aussi dans les nations plus développées. Il a estimé qu’il y avait une convergence entre les stratégies internationales adoptées pour atteindre les OMD et l’orientation de la politique nationale de son pays. Ainsi, il a cité les éléments principaux de la stratégie canadienne pour effacer les disparités socioéconomiques entre autochtones et non autochtones, tel le renforcement de partenariats avec les groupes autochtones pour faciliter la prestation de programmes, l’accès à l’éducation et la formation, la préservation et la revitalisation des cultures et langues autochtones, ou encore, améliorer les politiques et processus traitant des droits ancestraux. Il a souligné que le Canada avait établi, avec la participation active des peuples autochtones, une série d’initiatives pour s’attaquer aux causes de la pauvreté et l’inégalité et a invité les membres de l’Instance permanente à s’en inspirer lorsqu’ils formuleront des recommandations dans ce même but.
Par ailleurs, il a indiqué que la table ronde Canada-Autochtones avait été lancée, il y a un an, pour renouveler les relations entre les peuples autochtones du pays et réduire l’écart socioéconomique dont ils sont l’objet et avait donné lieu à un dialogue sans précédent axé sur la collaboration entre le Gouvernement et les organisations autochtones. De plus, il a noté qu’une réunion sur la question autochtone rassemblera cet automne les dirigeants autochtones, le Premier Ministre du Canada et les premiers ministres de toutes les provinces et territoires. Enfin, il a affirmé que le développement reposait de plus en plus sur les relations réciproquement respectueuses et productives établies entre les États et les peuples autochtones.
Mme ERICA-IRENE A. DAES (Grèce) a estimé que pour parvenir à éliminer la pauvreté, il faut prendre en considération les particularités des populations autochtones, leur culture unique. Le contrôle permanent effectué par les autochtones sur leur environnement doit être placé au cœur de leur capacité de développement. Adopter une stratégie de développement fondée uniquement sur les produits manufacturiers aurait tendance à saper le tissu social de ces communautés. La protection et le développement des connaissances autochtones sont des mesures prioritaires pour que ces communautés luttent contre la pauvreté. Un autre aspect essentiel est l’utilisation durable de la nature. Il faut pour cela l’appui des populations autochtones elles-mêmes. Nous n’avons pas le droit de les ignorer, mais au contraire leur demander de nous guider. La Grèce a suggéré de mettre en place de grandes orientations pour assurer le développement des autochtones qui serait conforme à leur développement culturel fondamental tout en tenant compte des réalités de l’économie mondialisée et du développement.
La représentante d’une série d’ONG du Pacifique a estimé qu’il fallait adopter une nouvelle définition de la pauvreté extrême qui prendrait en considération les peuples autochtones. Il est essentiel selon elle d’adopter une approche des droits de l’homme qui englobe pleinement les droits économiques et sociaux. Elle a toutefois regretté que le Fonds monétaire international ainsi que la Banque mondiale se refusent à adopter une telle approche qui ne pourra être effective tant que les financiers du monde refusent d’honorer les droits de l’homme les plus élémentaires, a-t-elle ajouté. En ce qui concerne la question de l’exclusion des peuples autochtones, elle a estimé que la mise en œuvre des OMD par le biais de la mondialisation se répercutait de manière négative sur ceux-ci. La représentante de l’ONG a affirmé que les Églises du Pacifique, un des groupes pour lesquels elle intervenait, s’étaient réunies en 2001 pour examiner les causes de la pauvreté dans la région, et avaient alors souligné le rôle de la mondialisation croissante. Elle a estimé que la libéralisation économique augmentait les disparités et la concurrence entre gouvernements pour obtenir des fonds publics et a espéré que les OMD ne seront pas un autre moyen de renforcer la mondialisation.
M. KONDRATYEV (Fédération de Russie) s’est félicité que dans l’Instance, les peuples autochtones se trouvent sur un pied d’égalité avec toutes les délégations, et que les représentants des populations autochtones participent aux discussions. Il a affirmé que le développement et le respect des droits des peuples autochtones est au cœur des préoccupations de la Fédération de Russie. Une base législative a notamment été établie pour garantir le respect de leur développement économique, social, identitaire et la mise en valeur de leur habitat et de leurs ressources. Mais il faut multiplier les actions sur le plan local, a-t-il estimé. Par exemple, parmi les réalisations, il a cité un programme de constructions d’écoles, d’hôpitaux et de logements pour les petits peuples autochtones du nord. Ces programmes respectent les structures identitaires locales. Un volet est consacré aux enfants, traitant notamment de la santé et de l’éducation.
La représentante de la CAPAJ et de l’organisation Land is life a rappelé que les terres étaient une source d’aliments précieuses qui devaient être préservées. Elle a expliqué que la région andine possédait avant des stocks alimentaires qui suffisaient à tous. De plus, elle a affirmé que les peuples autochtones connaissaient la manière de s’occuper de l’environnement rural et qu’ils devaient, à ce titre, avoir un droit de veto sur les mauvaises pratiques dans ce domaine. Elle a estimé que les institutions des Nations Unies devaient établir de nouveaux critères pour s’attaquer aux causes de la pauvreté dans les communautés autochtones. Nous demandons que l’Instance permanente recommande à la FAO, au PNUD, à l’UNESCO et aux autres institutions clefs de travailler avec la participation des peuples autochtones, notamment pour établir un nouveau cadre de référence afin de mesurer la pauvreté. Elle a aussi souhaité des solutions novatrices pour surmonter la pauvreté, en tenant compte du fait que les peuples autochtones sont les mieux placés pour en définir les causes et doivent en conséquence être écoutés.
Mme SHIRLEY MAC PHERSON (Australie) a estimé qu’il fallait une croissance économique durable pour éliminer la pauvreté. L’approche adoptée pour atténuer la pauvreté extrême peut être différente en fonction des pays mais il doit y avoir un cadre global commun comprenant des lignes directrices. Ces dernières années, les gouvernements ont encouragé la concurrence en limitant les monopoles et facilité l’implantation d’entreprises étrangères. Ces mesures permettent une croissance économique durable mais doivent s’accompagner de mesures spécifiques pour les peuples autochtones. En Australie, le taux de chômage a décru considérablement depuis les années 90, le taux de propriété foncière s’est élevé, et le nombre de personnes par logement a diminué. Mais il est vrai que la majorité des peuples autochtones en Australie vit en deçà du seuil de pauvreté. Cela dit, les politiques sociales sont aujourd’hui plus équitables. Pour que les peuples autochtones bénéficient de la croissance économique, il faut qu’ils aient accès à l’éducation et à la formation. L’Australie estime qu’il faut aider les peuples autochtones à acquérir les moyens de bénéficier de la croissance. Ainsi, a conclu Mme Mac Pherson, les progrès vers la réalisation des OMD seront réels.
La représentante du Forum international des femmes autochtones a souligné la participation effective des ces femmes dans la mise en œuvre du Plan de Beijing. Elle a demandé que des mécanismes soient mis au point pour assurer la protection des droits de femmes autochtones et des peuples autochtones.
M. ALOUNKÈO KITTIKHOUN (République démocratique populaire lao) a rappelé que la population lao comprenait 49 groupes ethniques, égaux devant la loi. Il a rappelé que chaque groupe vivait en harmonie avec les autres. L’objectif de développement à long terme est d’atteindre une croissance économique durable et équitable et le développement social tout en préservant l’identité culturelle, économique, sociale et politique du pays. Le pays est allé de manière constante vers une économie de marché tout en renforçant la vie sociale et spirituelle des communautés. L’objectif du pays est de sortir, d’ici à l’an 2020, du groupe des pays les moins avancés. Le Gouvernement lao a défini à cet effet une série de priorités. Il s’efforce notamment de maintenir un niveau approprié de croissance économique pour le moyen et le long termes, compte tenu des tendances démographiques. Il s’applique aussi à développer les systèmes de santé et de formation, à faciliter l’accès à l’électricité, à encourager les petites et moyennes entreprises et l’artisanat, à développer et promouvoir tous les secteurs économiques et notamment le secteur privé y compris en attirant les investissements étrangers. Le Gouvernement veut également renforcer les cadres juridiques et les autorités de régulation et améliorer les institutions financières. Le représentant a aussi fait savoir que son pays est attaché à deux programmes: l’élimination de la culture du pavot et les opérations de déminage. Nous espérons que la communauté internationale donnera son soutien à notre pays, a-t-il dit, afin que toutes ces actions puissent profiter également à nos peuples autochtones.
M. JOHAN L. LØVALD (Norvège) a affirmé qu’aucun État ne pourra réaliser les OMD tant qu’il méprisera les droits fondamentaux, y compris le principe de non-discrimination. Il a craint que les peuples autochtones ne soient laissés à la traîne dans les efforts de certains pays pour atteindre les OMD. Si l’on n’atteint pas ces populations, les efforts pour réaliser ces objectifs seront vains dans plusieurs pays, a-t-il poursuivi. Il a aussi souligné que les stratégies de réduction de la pauvreté ne prenaient pas toujours en compte ces groupes. Il a indiqué que les peuples autochtones avaient leurs propres concepts de développement basés sur leurs croyances, leurs valeurs, leurs besoins et priorités. Cette perspective doit aussi être respectée, a-t-il déclaré, et les stratégies pour atteindre les OMD doivent se baser sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui reconnaissent ces priorités de développement. Il a indiqué que la Déclaration du Millénaire n’abordait pas spécifiquement la pauvreté des populations autochtones ou les obstacles aux droits économiques, culturels et sociaux pour ces groupes. Toutefois, il a estimé que certains droits spécifiques aux peuples autochtones, comme la promotion de l’éducation bilingue, pouvaient être abordés dans le contexte des OMD. Il a déclaré qu’il était crucial d’inclure les représentants de ces peuples dans le processus de prise de décisions sur les sujets qui affectent leurs vies. Les peuples autochtones doivent être pleinement impliqué dans l’élaboration, le suivi et l’évaluation des stratégies nationales, a-t-il insisté. Enfin, il a affirmé que les recommandations de l’Instance permanente devaient être intégrées dans les plans nationaux et internationaux pour atteindre les OMD de même que dans les stratégies de lutte contre la pauvreté.
La représentante du Conclave asiatique a estimé que les OMD ne tenaient pas assez compte de la situation des peuples autochtones qui sont marginalisés. En outre, les peuples autochtones sont vulnérables aux catastrophes naturelles qui aggravent leur pauvreté. Le Conclave asiatique recommande que les questions des droits des peuples autochtones soient incluses dans les programmes des gouvernements et des organisations des Nations Unies. Il recommande que les peuples autochtones participent à l’élaboration et à la mise en œuvre de ces programmes. Les droits de propriété concernant les terres doivent être précisés, le contrôle sur les ressources naturelles doit l’être également. Les Documents de stratégie de lutte contre la pauvreté devraient tenir compte de l’élément peuples autochtones et devrait avoir une approche fondée sur les droits de ces derniers. Les institutions des Nations Unies et les gouvernements devraient allouer des crédits aux peuples autochtones afin de réduire la pauvreté. Il faut développer les indicateurs compte tenu de l’avis des peuples autochtones eux-mêmes. Le PNUD doit consulter les peuples autochtones pour préparer le Comité de concertation et de suivi. Les institutions et les gouvernements doivent impliquer les peuples autochtones dans les efforts de reconstruction après des catastrophes comme les tsunamis.
M. JARL-HǺKAN ROSENGREN (Finlande) a estimé qu’il était indispensable que les voix des autochtones soient entendues et prises en considération. Il a estimé que la discrimination et l’absence de droits fondamentaux constituent la cause principale de la représentation disproportionnée des autochtones parmi les pauvres. Le plein respect du principe de non-discrimination est une tâche ardue, a-t-il poursuivi, en insistant sur le rôle de l’éducation et de la sensibilisation. Il a souligné que les barrières linguistiques continuaient à être une raison de discrimination et a mis de l’avant les politiques de coopération de son pays en matière linguistique. Enfin, il a jugé essentielle la participation des peuples autochtones à l’élaboration des politiques et décisions en matière de réduction de la pauvreté. Il a suggéré que les donateurs encouragent la participation de représentants autochtones aux réunions internationales notamment, citant l’exemple de son propre pays. Enfin, il a indiqué qu’il fallait tout particulièrement favoriser la participation des femmes et des jeunes autochtones dans les processus de prise de décisions.
La représentante de l’Association des femmes autochtones du Canada a estimé que les droits collectifs des peuples autochtones et plus spécifiquement des femmes autochtones devaient être reconnus. Les femmes autochtones sont le pilier de leurs communautés a-t-elle estimé, car elles sont notamment pourvoyeuses de soins. La représentante de l’association a alors demandé à l’Instance d’étudier les effets de la discrimination raciale et sexuelle dont sont victimes les femmes autochtones. Tous les gouvernements et organisations des Nations Unies doivent appliquer les recommandations du rapport de la troisième session de l’Instance, a-t-elle estimé. La pauvreté entraîne la violence à l’encontre des femmes autochtones et les conflits. Les femmes, par tradition, sont des « faiseuses de paix ». Il faut les protéger autant que possible a-t-elle conclu.
Soulignant la diversité de son pays et son vaste espace, M. PEREIRA GOMES (Brésil) a indiqué que le Brésil avait reconnu 600 terres autochtones, soit plus de 12% du territoire. Il a rappelé que le droit des autochtones à la terre avait été reconnu par le Gouvernement. Toutefois, a-t-il précisé, une bonne part de la population autochtone vit dans des conditions très difficiles, notamment avec un taux de mortalité infantile deux fois plus élevé. Il a souligné les efforts de son pays pour pallier à ces problèmes, en particulier en ce qui concerne la sécurité alimentaire et la santé spécifiquement, par le biais de centres médicaux et de campagnes de vaccination. Il a aussi souligné les efforts en matière d’éducation, affirmant que le Brésil compte 150 000 enfants autochtones inscrits dans les écoles de leur village ou leur région. Il a aussi fait remarquer qu’une politique universitaire récente favorisait l’octroi de bourses aux étudiants autochtones. Il a affirmé que son pays était pleinement engagé dans la réalisation des OMD et a déclaré que 21 nouveaux pays appuyaient l’initiative du Brésil, de la France, du Chili et de l’Espagne concernant la lutte contre la pauvreté.
Le représentant du Caucus autochtone des Caraïbes et des Antilles s’est exprimé au nom de 10 îles des Caraïbes et de la diaspora en Amérique, en Europe et dans l’océan Indien. Il a invité la communauté internationale à reconnaître que les peuples autochtones de la région ont été très actifs pour assurer leur propre développement. Il a suggéré que des investissements soient apportés pour permettre à ces peuples de poursuivre ces initiatives. Les États devraient reconnaître les droits des peuples autochtones à la propriété en ce qui concerne les territoires qu’ils occupent et leur mise en valeur. Les États doivent aussi reconnaître leur droit à la sécurité alimentaire et à une alimentation saine et suffisante, objectif atteignable grâce aux nouvelles technologies et aux ressources marines. Le représentant a également estimé que l’Instance devrait mobiliser un soutien pour les peuples autochtones des Antilles et des Caraïbes, compte tenu de leur vulnérabilité aux catastrophes et aux effets de la pauvreté. Le caucus demande à l’Instance de renouveler son appel au PNUD pour mettre en place des actions de grande ampleur pour aider au développement des communautés autochtones de la région. Le caucus propose à l’Instance d’organiser dans les Caraïbes un atelier sur la pauvreté des peuples autochtones en janvier 2006. L’objectif sera notamment de s’entendre sur la définition à donner à la pauvreté extrême et à la faim.
M. SORIANO ORTIZ (Espagne) a centré son intervention sur la politique de coopération de son pays, indiquant qu’un nouveau plan directeur pour 2005-2008 dans ce domaine venait d’être approuvé et s’inscrivait pleinement dans la conception définie par la Déclaration du Millénaire et ses objectifs. Il a expliqué que l’Agence espagnole de coopération avait préparé cette nouvelle stratégie avec les peuples autochtones dans un processus participatif. Il s’agit de reconnaître leurs droits et de s’abstenir d’imposer nos propres modèles de développement, a-t-il ajouté. Il a déclaré que cette stratégie reconnaissait les liens des autochtones avec leur environnement ainsi que leur savoir dans ce domaine. Enfin, il a souhaité que cette stratégie puisse contribuer au droit des peuples autochtones à articuler eux-mêmes leurs propres besoins et les mesures à mettre en application.
La représentante de l’Association des peuples autochtones d’Argentine a tout d’abord estimé que les organismes génétiquement modifiés introduits de plus en plus dans les terres argentines provoquaient des changements cruciaux au sein des communautés autochtones. Les semences ont un prix très élevé et sont donc difficilement accessibles. De plus, l’introduction d’OGM dans la nourriture traditionnelle entraîne des problèmes de la santé chez ces populations. Par ailleurs, elle a conseillé de modifier la notion de zones protégées. Des projets d’études de développement sont régulièrement menés sans le consentement préalable des peuples autochtones. Et ceci met en danger l’équilibre des peuples autochtones, leurs savoirs traditionnels et aggrave la pauvreté. La représentante de l’Association a également pointé le fait que les migrations vers les centres urbains s’amplifient car les peuples autochtones ne peuvent plus vivre dans leurs zones habituelles, la pauvreté et les conditions de vie s’y aggravant. La représentante a conclu en demandant de mettre en œuvre la déclaration sur les restrictions de l’emploi des OGM et de convoquer un séminaire international sur la préservation des savoirs des peuples autochtones.
La représentante de la Rongmei Women Organization de la région sud de l’Himalaya, a rappelé que les peuples autochtones étaient particulièrement touchés par la pauvreté dans le Nord-Est de l’Inde. Elle a encouragé l’Instance Permanente à demander instamment aux gouvernements de reconnaître le droit des peuples autochtones à l’identité et à l’autodétermination; d’envisager des mesures de protection des peuples autochtones contre l’impact négatif de la libéralisation des marchés, la mondialisation et la privatisation; d’assurer aux peuples autochtones l’accès aux ressources naturelles, notamment par le biais de mesures législatives; d’éviter tout éloignement et toute expulsion des peuples autochtones de leurs terres ancestrales; de demander au Gouvernement indien de prendre en compte les problèmes des peuples autochtones dans leurs efforts de réalisation des OMD, notamment en ce qui concerne l’éradication de la pauvreté.
Le représentant de la Fédération de Kampuchea Krom a tenu à expliquer qui étaient les Kmers Krom qui vivent au Viet Nam. Il a rappelé que ce sont surtout des fermiers et des ouvriers qui se trouvent souvent tout en bas de l’échelle sociale et qui ne se considèrent pas comme vietnamiens. Leurs ressources sont limitées et l’absence de reconnaissance dont ils sont victimes entraîne encore plus de difficultés. Le représentant a déclaré que les droits sur les terres sont contrôlés par le Gouvernement vietnamien, qui fait souvent preuve d’abus de pouvoir; les terres sont confisquées par la force et des dizaines de milliers se retrouvent à la rue, certains sont emprisonnés ou ont disparu. Le représentant a demandé à l’Instance de recommander des mesures pour éliminer la pauvreté et la faim au sein du peuple des Kmers Kroms.
Le représentant de Yamasee Native American s’est interrogé sur les garanties relatives aux différents traités sur les droits des autochtones et les manières de renforcer ces textes. Il a affirmé que les peuples autochtones, en vertu de leur statut, devraient bénéficier d’un compte de crédit international qui permettrait à tous les autochtones d’établir et de maintenir leur propre économie, leurs coutumes, leurs traditions et leur héritage, sans restriction financière pour la subsistance de leur famille. Étant donné que les gouvernements, les sociétés et les églises nous ont arrachés nos terres, la seule solution c’est un crédit, a-t-il insisté. Par ailleurs, il a estimé que les peuples autochtones avaient droit à une voix au Conseil de sécurité puisque les décisions qui y sont prises affectent aussi ces peuples. Nous ne pouvons pas être mis à l’écart, a-t-il estimé, cela serait équivalent à un génocide et un apartheid de la part des Nations Unies.
La représentante du Indigenous Land Rights Fund, représentant les peuples autochtones du Botswana, a estimé que les OMD ne seront pas réalisés pleinement si l’on ne tient pas compte de l’identité et des spécificités des peuples autochtones. Perdre sa terre, c’est perdre l’esprit. Elle a affirmé que le Gouvernement du Botswana avait chassé de leurs terres les peuples autochtones, les bushmen. Ils sont en train de mourir à un rythme accéléré car privés de leurs ressources, a-t-elle déploré. Elle a demandé à l’Instance de recommander toutes les mesures nécessaires pour défendre les droits de ces peuples autochtones et les sauver.
Le représentant de l’organisation Défense des peuples autochtones des Amériques et du Centre de promotion des communautés rurales du Pérou, a déploré que les peuples autochtones soient traités aux Nations Unies comme des observateurs alors que leur diversité, leur puissance culturelle et leur identité avaient été blasphémées. Les Nations Unies ne peuvent pas continuer à nous manipuler comme elles le font, a-t-il insisté. Rappelant que la culture et les terres autochtones avaient été exterminées, il a regretté le manque d’actions. Nous sommes des gens pragmatiques et nous ne vivons pas d’excuses et de philosophie, a-t-il plaidé; nous voulons des actes et la mise en œuvre des décisions prises depuis trois ans. Il a exhorté les fonctionnaires de l’ONU à développer une vision pour les OMD et à ne pas rester enterrées dans des bureaux. Nous ne devons pas laisser les autres parler pour nous, a-t-il lancé, ils n’ont jamais eu faim et ne connaissent pas notre situation. Il a affirmé que les peuples autochtones possédaient les solutions qui leur convenaient et qu’il fallait maintenant agir. Nous ne sommes plus des sauvages, a-t-il insisté, et il faut respecter nos droits de l’homme. Il a conclu en demandant à tous de pousser les Nations Unies à agir.
Le représentant de la Zo Reunification Organization, Asie du Sud, a rappelé que le peuple zo avait été victime de la colonisation. Aujourd’hui, faute d’infrastructures, aucun projet de développement n’a été envisagé. L’État a besoin de routes asphaltées, de moyens de communication, d’électricité. Il a également demandé à la communauté internationale que dans le cadre des OMD, les contraintes administratives ne soient pas un obstacle. Les projets de développement ont souvent un effet néfaste sur les peuples autochtones. Il a souhaité que dans le processus de réalisation des OMD, les injustices sociales dont souffrent les peuples autochtones soient corrigées et que ces derniers soient protégés de toute forme d’exploitation. Les peuples autochtones doivent pouvoir se développer comme ils l’entendent.
Le Chef des tribus Cowichan, du peuple hul’qumi’nem, appartenant à l’Assemblée des Premières Nations, a insisté sur le fait que son peuple n’avait jamais cédé ou vendu ses terres. Pourtant, il a déploré le fait que du temps de la colonisation, son peuple a été exproprié et s’est retrouvé dépendant socialement du Canada. Les tribus Cowichan se battent aujourd’hui pour obtenir un traité qui reconnaisse leur droit à leur terre. Cette expulsion des terres ancestrales a pleinement contribué à l’appauvrissement de ces tribus. Le problème est structurel selon le représentant. Il a donc réclamé un processus de négociation avec le Gouvernement du Canada qui prenne en compte les intérêts du peuple hul’qumi’nem et ses relations très profondes avec sa terre. Il a affirmé que par le biais de l’Instance permanente, son peuple va continuer de faire pression sur les autorités gouvernementales afin d’amorcer les changements indispensables au mieux-être de son peuple. Il a conclu en demandant aux Nations Unies et aux membres de l’Instance de le rejoindre dans ces objectifs.
La représentante de l’Assemblée des Premières Nations indiennes a accusé les entreprises et notamment les industries minières sous contrôle de multinationales, de ravager l’environnement. Elle a affirmé que les peuples autochtones d’Amérique du Nord sont obligés de vivre dans la pauvreté à cause des problèmes d’accès à l’eau. Nous mourons de soif, nous n’avons plus d’eau saine, a-t-elle affirmé. L’Amérique du Nord est riche et pourtant il existe de nombreuses zones de pauvreté. Dans de nombreuses zones du désert où la pluie est rare, l’eau était sacrée et aujourd’hui il ne nous reste qu’à prier! Elle a demandé avec urgence la nomination d’experts pour la protection de l’eau en collaboration avec les peuples autochtones pour lutter contre la privatisation, la pollution de l’eau et les injustices qui affectent les droits des peuples autochtones. Nous demandons à l’Instance de s’engager au forum mondial sur l’eau en 2006 pour défendre l’accès à l’eau des peuples autochtones. Elle a demandé également que l’Instance permanente fasse tout pour éviter que l’eau soit privatisée. Nous avons soif, nous buvons de l’eau pleine de mercure, nos enfants sont contaminés, a-t-elle ajouté. Or, l’accès à l’eau est un droit!
La représentante du Comité de la santé autochtone a insisté sur l’importance de l’accès à l’eau potable, d’un logement adéquat et de l’assainissement afin d’avoir des conditions de vie acceptables. Elle a estimé que le non-respect des droits des peuples autochtones, partout dans le monde, était la cause principale de la pauvreté dont ils souffraient. Elle a notamment cité l’exemple du récent tsunami, affirmant que les autochtones n’avaient pas bénéficié de la distribution de l’assistance de manière équitable. La pauvreté n’est pas une chose naturelle, a-t-elle insisté, c’est le produit d’un paradigme de développement qui ne reconnaît pas les droits de l’homme comme un paramètre non négociable. Enfin, elle a regretté que les recommandations des années précédentes n’aient pas été suivies d’effets, notamment en ce qui concerne les centres de savoir autochtones de l’OMS.
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