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DH/1107

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME LES TRAVAUX DE SA SOIXANTIÈME ET UNIÈME SESSION

14/03/2005
Communiqué de presse
DH/1107


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTAME LES TRAVAUX DE SA SOIXANTIÈME ET UNIÈME SESSION


(Publié tel que reçu)


La Commission des droits de l'homme a entamé, ce matin, sa soixantième et unième session en adoptant son ordre du jour et son programme de travail, et en entendant des déclarations de son Président, M. Makarim Wibisono d'Indonésie, du Président sortant, M. Mike Smith, et de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Louise Arbour, qui a notamment affirmé que l'obligation de respecter et d'assurer l'application des droits de l'homme incombe aux États; c'est donc la capacité des États qui doit être renforcée et reconnue.


Mme Arbour a ajouté que les progrès réalisés pour faire face aux défis que représentent les violations à grande échelle des droits de l'homme doivent faire l'objet d'une évaluation, et elle s'est prononcée en faveur de la mise en place d'un mécanisme de reddition des comptes.  Qu'il s'agisse de faire face à des situations de violations à grande échelle ou de violations sporadiques des droits de l'homme, l'approche en matière de diplomatie des droits de l'homme, à la fois aux plans bilatéral et multilatéral, demeure insatisfaisante, sporadique et sélective.  La Commission devrait être en tête des efforts pour mettre au point des approches plus efficaces qui permettent une analyse dépassionnée et des appels concrets et précis pour l'adoption de mesures appropriées, ainsi qu'un suivi soutenu et constructif pour contribuer à régler les questions qui suscitent des préoccupations collectives et sont de la responsabilité de tous.  Mme Arbour a par ailleurs plaidé en faveur de la suppression du schisme dans la façon dont sont traités les droits civils et politiques d'une part et les droits sociaux et culturels d'autre part.  Nous n'avons pas été à la hauteur de la tâche qui nous incombe, à savoir la protection des droits de l'homme, a regretté Mme Arbour, avant de lancer un appel à la Commission pour que les réformes à apporter en vue d'un renforcement des droits de l'homme passent par le respect de la voix de ceux qui jusqu'à ce jour n'étaient pas perçus comme détenteurs de ces droits.


Dans sa déclaration d'ouverture, le Président de la Commission, M. Makarim Wibisono, a notamment rappelé que le monde avait été témoin, au cours des dernières années, de défis croissants du fait de conflits et de désastres sans précédents.  C'est pourquoi il faut, plus que jamais, renforcer l'esprit de dialogue et de concertation entre les pays.  À cet égard, la Commission a un rôle unique à jouer par le biais de débats constructifs sur les questions des droits de l'homme, dans une atmosphère ouverte et positive.  Il s'est dit convaincu qu'une des façons les plus efficaces pour résoudre les questions spécifiques des droits de l'homme résidait dans le renforcement de la coopération internationale et non dans la condamnation.  Le Président a renouvelé l'appel lancé par ses prédécesseurs aux délégations en leur demandant de s'abstenir de formuler des déclarations diffamatoires, notamment sur le sujet sensible de la religion. 


Le Président sortant, M. Mike Smith, a salué les propositions tendant à intégrer davantage le Haut Commissaire aux droits de l'homme aux débats du Conseil de sécurité concernant les droits de l'homme, s'agissant en particulier des mandats de maintien de la paix en cours de réalisation.  M. Smith a par ailleurs appuyé l'idée visant à renforcer l'universalité de la représentation au sein de la Commission.


Au titre de l'organisation des travaux, la Commission a par ailleurs entendu des déclarations de la République de Corée (au nom du Groupe des États d'Asie), du Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), de l'Égypte, de la Chine (au nom des pays partageant des positions communes) et de Cuba.  Les interventions ont notamment porté sur la nécessité, lors des négociations sur les projets de résolution qui seront examinés au cours de la session, d'assurer la participation de toutes les délégations, notamment en évitant de tenir les négociations simultanément ou en parallèle.


La Commission entamera cet après-midi, à 15 heures, son débat de haut niveau.  Elle doit entendre dans ce cadre des déclarations de la Vice-Premier Ministre de l'Espagne, des Ministres des affaires étrangères du Luxembourg (au nom de l'Union européenne), de la Suisse, de la Belgique, de l’Autriche, du Pérou, du Kirghizistan et du Canada, ainsi que le Ministre de la justice du Soudan, le Vice-Ministre des affaires étrangères du Costa Rica et le Secrétaire d'État aux affaires étrangères de la France.


Déclarations d'ouverture


M. MAKARIM WIBISONO, Président de la soixante et unième session de la Commission des droits de l'homme, a rappelé que le monde s'est heurté, au cours des dernières années, à des défis croissants du fait de conflits et de catastrophes sans précédents.  C'est pourquoi il est plus important que jamais de renforcer l'esprit de dialogue et de concertation entre les pays.  Le Président s'est dit encouragé, à cet égard, par l'évolution positive de la situation au Moyen-Orient.  Il a néanmoins ajouté que les actes terroristes constituaient une violation des principes fondamentaux des droits de l'homme, y compris le droit à la vie, et, qu'en tant que tel, il était nécessaire de les combattre vigoureusement.


Selon le Président, la Commission a un rôle unique à jouer par le biais de débats constructifs sur les questions des droits de l'homme, de l'intolérance religieuse au racisme, du droit au développement aux droits des femmes et des enfants, et ce, dans une atmosphère ouverte et positive.  Elle doit prêter main forte au processus d'édification et de renforcement d'une compréhension internationale plus constructive.  Il s'est par ailleurs dit pleinement conscient des résultats remarquables obtenus par la Commission au fil des ans.  Il faut aller plus loin, a-t-il dit, et respecter le mandat de la Commission des droits de l'homme, un défi qui, selon lui, ne se termine jamais et suscite des divergences de vues et de perspectives entre les pays.  Nous devons étudier ces divergences, en les considérant davantage comme une source d'inspiration qui doit enrichir la qualité des discussions, plutôt que comme un obstacle à la recherche de solutions appropriées, a-t-il suggéré, se déclarant convaincu qu'une des façons les plus efficaces pour résoudre les questions spécifiques des droits de l'homme résidait dans le renforcement de la coopération internationale et non dans la condamnation.


Selon le Président, tous les gouvernements font réellement tout leur possible pour mettre en œuvre les droits de l'homme dans le cadre de leurs programmes nationaux, que ce soit en tentant d'éliminer la pauvreté, en améliorant l'éducation et la santé, en renforçant l'état de droit ou les institutions démocratiques conformément aux particularités et les pratiques locales.  Il a en outre souligné que le rôle de la société civile était capital, que ce soit au niveau national ou au niveau international.  Il a renouvelé l'appel lancé par ses prédécesseurs aux délégations en leur demandant de s'abstenir de formuler des déclarations diffamatoires, notamment sur le sujet sensible de la religion.  Nous devrions nous respecter les uns et les autres, et tenir compte de nos différences et des problèmes particuliers auxquels sont confrontés les pays face à la marche du progrès, a-t-il souligné.  Notre détermination ne devrait pas faiblir pour ce qui est d'obtenir des résultats positifs, a conclu M. Wibisindo, précisant que ces résultats avaient un profond impact sur la communauté internationale et les peuples à travers le monde.


MME LOUISE ARBOUR, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a souligné que le développement économique et social, l'amélioration du bien-être et de la sécurité individuels et collectifs, ne sauraient être réalisés ou maintenus sans le plein respect des droits de l'homme.  À cet égard, les États, collectivement et individuellement, devraient s'acquitter de leurs responsabilités à cet égard.  L'obligation de respecter et d'assurer l'application des droits de l'homme incombe aux États; c'est donc la capacité des États qui doit être renforcée et reconnue.  Les progrès réalisés pour faire face aux défis que représentent les violations à grande échelle des droits de l'homme doivent faire l'objet d'une évaluation, a estimé Mme Arbour, qui s'est prononcée en faveur de la mise en place d'un mécanisme de reddition des comptes.  Qu'il s'agisse de faire face à des situations de violations à grande échelle ou de violations sporadiques des droits de l'homme, l'approche en matière de diplomatie des droits de l'homme, à la fois aux plans bilatéral et multilatéral, demeure insatisfaisante, inconstante et sélective.  La Commission devrait être en tête des efforts visant à mettre au point des approches plus efficaces qui permettent une analyse dépassionnée et lancer des appels concrets et précis pour l'adoption de mesures appropriées, ainsi qu'un suivi soutenu et constructif pour contribuer à régler les questions qui suscitent des préoccupations collectives et sont de la responsabilité de tous.


Il faut en outre, a poursuivi la Haut-Commissaire, assurer que les droits économiques et sociaux doivent être réalisés pour tous, de même que le droit au développement dans le respect de la dignité humaine.  Sur ce point, Mme Arbour s'est dite frappée par la façon dont les différents droits de l'homme sont considérés séparément.  Or, selon elle, ces droits doivent être envisagés selon une vision intégrée de l'être humain.  C'est pourquoi elle a plaidé en faveur de la suppression du schisme dans la façon dont sont traités les droits civils et politiques d'une part et les droits sociaux et culturels d'autre part. 


La justice, a ajouté Mme Arbour, est le garant de la paix en ce sens qu'elle permet aux individus de ne plus rechercher la vengeance individuelle et de s'en remettre à l'État dans un cadre normatif établi.  Il faut alors renforcer la paix par la justice et par le respect des droits de l'homme.  Cependant, le corpus de droits créé par la communauté internationale restera lettre morte si ces droits ne sont pas appliqués.  Nous n'avons pas été à la hauteur de la tâche qui nous incombe, à savoir la protection des droits de l'homme, a regretté Mme Arbour, avant de lancer un appel à la Commission pour que les réformes à apporter en vue d'un renforcement des droits de l'homme passe par le respect de la voix de ceux qui, jusqu'à ce jour, n'étaient pas perçus comme détenteurs de ces droits.


M. MIKE SMITH (Australie), Président de la soixantième session de la Commission des droits de l'homme, a assuré le Président de la soixante et unième session de son appui sans réserve au cours de la présente session.  M. Smith a par ailleurs salué l'action de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme qui, depuis son entrée en fonctions, a su déterminer avec finesse les cas dans lesquels le Haut Commissariat peut intervenir dans le débat sur les problèmes actuels avec un impact maximum.  M. Smith a rappelé que la précédente session de la Commission des droits de l'homme a adopté 120 résolutions, déclarations du Président et décisions, entendu quelques 2000 interventions, témoignant selon lui du fait que la Commission est devenue un espace où toute la communauté des droits de l'homme peut se rencontrer, échanger et générer un soutien mondial aux initiatives en matière de droits de l'homme.


M. Smith a rappelé qu'en 2004, 17 mandats de mécanismes spéciaux ont été pourvus, permettant l'arrivée de nouveaux talents et d'assurer une meilleure représentation régionale.  Il s'est dit confiant en l'intégrité des personnes nommées.  Il a rappelé que la Commission est soumise à la pression du temps et souligné qu'il est important que cet organe puisse disposer du temps nécessaire pour aborder la totalité des questions inscrites à son ordre du jour.  Sur la question de la réforme des Nations Unies, M. Smith s'est félicité de la volonté du Groupe de personnalités de haut niveau du Secrétaire général sur la réforme d'intégrer davantage le Haut Commissaire aux droits de l'homme aux débats du Conseil de sécurité concernant les droits de l'homme, particulièrement s'agissant des mandats de maintien de la paix en cours de réalisation.  M. Smith a par ailleurs appuyé l'idée visant à renforcer l'universalité de la représentation au sein de la Commission.  Il a enfin souligné que le principal défi que doit relever la Commission consiste à intervenir avec un maximum d'impact sur la jouissance des droits de l'homme.  Il a estimé que la seule façon de promouvoir les droits de l'homme sur le long terme est de s'assurer que les questions relatives aux droits de l'homme soient prises en compte par chaque organe des Nations Unies.


Déclarations sur l'organisation des travaux


M. CHOIO HYUCK (République de Corée), au nom du Groupe des pays d'Asie, a souligné que le renforcement de l'efficacité des travaux de la Commission est un processus continu qui exige des efforts persistants.  Aussi, a-t-il exprimé l'espoir que des progrès puissent être réalisés lors de la présente session.  Les pays asiatiques soulignent l'importance du dialogue, de la concertation et du consensus comme moyens de renforcer l'efficacité de la Commission et d'éviter toute manifestation contre-productive de son travail, en particulier dans le cadre du point 9 de l'ordre du jour (consacré à la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise).  Il a renouvelé l'appel du groupe asiatique en faveur de consultations mieux organisées, plus larges et transparentes.  Compte tenu des contraintes rencontrées par les petites délégations, les consultations parallèles, en revanche, devraient être réduites au minimum, a-t-il souhaité.  Il faut également que les participants contribuent à une bonne gestion du temps de manière à ce que suffisamment de temps puisse être alloué à chacun des points inscrits à l'ordre du jour.  Une bonne atmosphère de dialogue et de coopération entre les États membres et les organisations non gouvernementales est en outre essentielle pour assurer une participation efficace de ces dernières aux travaux de la Commission, a souligné le représentant.


M. MASOOD KHAN (Pakistan), au nom des États membres de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), a déploré la tendance croissante aux déclarations diffamatoires à l'égard de l'Islam dans l'enceinte de la Commission des droits de l'homme et a plaidé en faveur du respect et de la compréhension mutuels.  La politisation accrue de la Commission est source de grave préoccupation pour les États membres de l'OCI, a-t-il ajouté.  Il a en outre déploré le détournement de l'ordre du jour par l'adoption de résolutions ciblant certains pays.


M. Khan s'est en outre prononcé en faveur d'une rationalisation des méthodes de travail de la Commission et a exhorté les auteurs des projets de résolution à éviter les consultations simultanées afin de permettre la participation de toutes les délégations, y compris les plus petites.  Les documents doivent quant à eux être disponibles dans les délais impartis.  Tout en reconnaissant le rôle important que jouent les organisations non gouvernementales au sein de la Commission, le représentant a demandé que seuls leurs véritables représentants participent aux travaux de cet organe.  Il a par ailleurs regretté qu'une part importante du budget du Haut Commissariat aux droits de l'homme soit financée par des contributions volontaires spéciales car ce système, selon lui, nuit à son indépendance et à sa flexibilité. Il a enfin déploré la faible représentation des pays en voie de développement au sein du Haut Commissariat.


MME MAHY ABDEL LATIF (Égypte) a invité la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mme Louise Arbour, à être, au cours de la présente session, la représentante de toutes les cultures existantes à travers le monde.  La représentante égyptienne a appuyé la déclaration faite par le Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique.  Il importe, a-t-elle déclaré, que prévale un climat de dialogue afin d'assurer le succès des débats et d'assurer la promotion et la protection des droits de l'homme sans discrimination.  Il importe également, a-t-elle poursuivi, qu'un seul individu représente une seule organisation non gouvernementale.  À cet égard, elle a souligné l'intérêt qu'il y aurait à élaborer un code de conduite concernant la participation des ONG aux débats de la Commission. Enfin, elle a appelé de ses vœux l'élaboration d'un calendrier des manifestations et réunions parallèles à la Commission, mis à jour de façon régulière.


M. SHA ZUKANG (Chine), au nom du groupe des pays partageant des positions communes, a souligné que le monde avait subi des mutations profondes dans tous les domaines, y compris celui des droits de l'homme.  Il faut que le système mis en place par les Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme réponde à ces mutations, a-t-il ajouté.  La Commission ne peut pas être crédible si sa politique est perçue comme une politique de deux poids deux mesures.  Elle est devenue, a-t-il poursuivi, le lieu où l'on condamne et montre du doigt les pays en développement, en particulier dans le cadre des délibérations au titre du point 9 de l'ordre du jour, dont l'intention d'origine n'était que de traiter des situations de violations massives, flagrantes et systématiques des droits de l'homme.  Ces dernières années, au titre de ce point de l'ordre du jour, certains pays ont eu recours à un nombre record de résolutions ciblant des pays en développement, ce qui révèle un manque de transparence, l'application d'une politique de deux poids deux mesures et des motivations politiques, a considéré le représentant chinois.  Ces facteurs ont entraîné une intense politisation des travaux de la Commission, contribuant à la perte de crédibilité et d'objectivité de cet organe.  Il faut d'urgence réviser complètement les mécanismes spéciaux, a poursuivi le représentant chinois.  Tout en se félicitant de la participation constructive des organisations non gouvernementales, il a rappelé que personne ne peut se placer au-dessus des règles.  En effet, a-t-il ajouté, certaines ONG ont abusé de leur statut consultatif pour promouvoir des intérêts autres que les droits de l'homme.  Le rôle des ONG doit être précisé de façon à garantir que leur participation renforce la capacité de la Commission à traiter des questions des droits de l'homme de manière plus efficace, a insisté le représentant.


M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ-PALACIOS (Cuba) a estimé que la Commission est un navire qui coule car elle souffre d'une perte progressive de crédibilité et de prestige en raison d'un fonctionnement reposant sur l'application d'une politique de deux poids deux mesures.  Les pays en développement ne sont pas responsables de cet état de fait.  Ces derniers ont pourtant toujours été accusés des pires maux à la Commission, qui est devenue un véritable tribunal d'inquisition gouverné par les riches.  C'est pourquoi, selon le représentant, il est important que le navire puisse reprendre la mer ; mais, pour cela, il faut reconstruire toute l'embarcation sur la base d'autres codes de principes et de valeurs.  La Commission doit être refondue de fond en comble car les problèmes qu'elle connaît ne sont pas techniques mais essentiellement dus à la domination de la superpuissance qui est en son sein.  Il faut se débarrasser du mensonge et combattre l'impunité des puissants, a conclu le représentant cubain.


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