En cours au Siège de l'ONU

CS/8443

LE CONSEIL PREND NOTE AVEC INTÉRÊT DE LA PROPOSITION DE CRÉER UNE COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX

12/07/2005
Communiqué de presse
CS/8443


Conseil de sécurité

5225e séance – matin


LE CONSEIL PREND NOTE AVEC INTÉRÊT DE LA PROPOSITION DE CRÉER UNE COMMISSION DE CONSOLIDATION DE LA PAIX


Les délégations soulignent la nécessité de prévenir les futurs conflits en s’attaquant à leurs causes profondes par des moyens légitimes et avec impartialité


« Le Conseil de sécurité considère que la création d’une Commission de consolidation de la paix pourrait grandement contribuer à rapprocher le maintien de la paix et de la sécurité internationales des activités d’assistance humanitaire et d’aide au développement économique », a déclaré cet après-midi M. Petros Molyviatis, Ministre des affaires étrangères de la Grèce, assumant la présidence du Conseil, à l’issue de l’examen du rôle du Conseil dans les crises humanitaires.   


Par ces mots, le Président du Conseil de sécurité résumait la déclaration qu’il a lue, au nom des autres membres du Conseil, à la fin d’un débat qui a permis aux délégations d’exprimer leurs points de vue sur les défis, les enseignements tirés de l’expérience acquise dans le règlement de ces crises, et les voies à suivre pour les éviter ou en limiter les impacts, qui sont dévastateurs sur les populations civiles.  Après avoir rappelé aux délégations que cette réunion du Conseil de sécurité coïncidait avec la triste célébration du 10 anniversaire des massacres de Srebrenica, le Secrétaire général, M. Kofi Annan, a exhorté le Conseil à éviter la répétition de ce genre d’atrocités en donnant désormais aux missions de maintien et de consolidation de la paix des mandats robustes et sans ambiguïté, accompagnés de ressources adéquates. 


Souhaitant que la communauté internationale prenne des mesures préventives contre les violations graves des droits de l’homme, les massacres de populations innocentes, et les situations de génocide, le Secrétaire général a appelé les États Membres à accepter le principe de la responsabilité de protéger, qui devrait être mis en application quand un État refuse ou s’avère incapable d’assurer la protection de ses populations.  Le rétablissement de l’état de droit et la création de structures endogènes de soutien à la réconciliation et à la justice, sont des préalables indispensables à une paix durable, a dit le Secrétaire général en souhaitant une plus grande implication des acteurs locaux dans les programmes de consolidation de la paix afin qu’ils s’en approprient le processus.  Abondant dans ce sens, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, a dit que la mise en place de structures nationales fonctionnelles et crédibles était vitale, la consolidation de la paix dans un pays ne pouvant se faire sans institutions durables qui permettent de jeter les bases de la reconstruction sociale et de la prospérité économique en vue de contribuer à éliminer les causes profondes de nombreux conflits.  Le lien entre développement et sécurité doit être reconnu, et l’ONU doit mieux intégrer les partenaires au développement dans sa planification des opérations de maintien de la paix, a recommandé M. Guéhenno.


Un certain nombre de délégations, dont celles des États-Unis et des pays de l’Union européenne, au nom desquels le représentant du Royaume-Uni prenait la parole, ont apporté leur soutien à la création d’une Commission de consolidation de la paix, proposée par le Secrétaire général, sur recommandation du Groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement.  Le représentant des États-Unis a encouragé le Conseil de sécurité à examiner le plus vite possible cette proposition et à l’entériner, de façon à créer cette commission dont la communauté internationale a besoin.  L’ONU, a-t-il rappelé, ne dispose pas à l’heure actuelle de mécanisme formel d’appui à la reconstruction post-conflit.  D’autres délégations, comme celle du Brésil, se sont félicitées de la création d’un Fonds des Nations Unies pour la démocratie, et de la proposition faite par le Secrétaire général de créer au sein de l’Organisation une « unité d’appui à la création et au renforcement de l’état de droit ».


Tout en souhaitant une amélioration et un renforcement des instruments  dont disposent les Nations Unies pour intervenir en faveur du rétablissement de la paix, d’autres intervenants, dont l’Inde et le Venezuela, ont cependant émis des doutes sur la mise en place d’une Commission de consolidation de la paix, et sur les motivations ayant justifié cette proposition.  Pour le représentant de l’Inde, les questions justifiant cette proposition devraient être débattues par l’Assemblée générale, où tous les États Membres sont équitablement représentés, afin de préserver le caractère apolitique, sans ingérence militaire, et stratégiquement non interventionniste, des opérations humanitaires.  Quant à la représentante du Venezuela, elle a estimé qu’aucune forme d’ingérence, même sous des aspects humanitaires ou de protection de civils, n’était acceptable.  Aucun modèle de construction politique, économique et sociale ne doit être imposé de l’extérieur aux pays sortant de crises, ont soutenu ces délégations.  Chaque situation devrait être examinée séparément et des programmes taillés sur mesure et tenant compte des réalités de chaque pays devraient proposés aux parties au conflit et à la société civile, a estimé la représentante de l’Indonésie.


LE RÔLE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DANS LES CRISES HUMANITAIRES: DÉFIS, ENSEIGNEMENTS TIRÉS DE L’EXPÉRIENCE, VOIES À SUIVRE


Déclarations


M. PETROS G. MOLYVIATIS, Ministre des affaires étrangères de la Grèce et Président du Conseil de sécurité, a affirmé que pour prévenir la résurgence des souffrances humanitaires et des conflits, il était nécessaire de prendre en considération trois domaines.  Tout d’abord, la promotion de l’état de droit, qui implique notamment la réforme du système judiciaire et législatif du pays concerné et la nécessité de mettre un terme à la culture de l’impunité.  À cet égard, la Cour pénale internationale (CPI) peut jouer un rôle dans la défense des principes de la justice internationale et de la réconciliation nationale, comme elle l’a fait en se saisissant de la situation au Darfour.  Par ailleurs, la mise en œuvre des programmes de DDR des anciens combattants est d’une importance cruciale dans le cadre de la consolidation de la paix, a poursuivi le représentant.  Enfin, la réforme du secteur de la sécurité permettrait d’atteindre la stabilité à long terme si elle est associée aux deux autres volets précédemment évoqués.  En conclusion, M. Molyviatis a ajouté que les efforts de consolidation de la paix nécessitaient d’intégrer totalement les composantes humanitaires dans les accords de paix et dans les opérations de maintien de la paix.


Le Secrétaire général de l’ONU, M. KOFI ANNAN, a déclaré que le débat d’aujourd’hui coïncidait avec le 10e anniversaire des massacres de Srebrenica.  Le souvenir de ces événements révoltants nous rappelle que, chaque fois que le Conseil de sécurité prend la responsabilité de protéger des civils, il doit établir un mandat qui ne laisse place à aucune ambiguïté et prévoir des ressources qui permettent d’accomplir la tâche prescrite.  Toutes les crises dont s’occupe le Conseil comportent un volet humanitaire, a dit le Secrétaire général.  En effet, c’est souvent l’ampleur des souffrances humaines qui pousse la communauté internationale à intervenir.  Notre tâche devrait être de prévenir de telles souffrances.  J’estime que les États Membres devraient admettre que, chaque fois qu’un État en particulier ne peut pas ou ne veut pas protéger ses citoyens contre des violences extrêmes, tous les États ont la responsabilité collective de le faire -responsabilité qui doit être assumée par ce Conseil, a invité le Secrétaire général.  C’est pourquoi il est important de prévenir des futurs conflits en s’attaquant à leurs causes profondes. 


Le Secrétaire général a rappelé que dans quelques jours, une grande conférence de la société civile sur la prévention se tiendra ici, au Siège de l’Organisation.  Il a émis l’espoir que le Conseil reprendra bientôt l’étude de la question, en tenant compte des travaux de cette conférence et en s’attachant en particulier aux modalités pratiques.  M. Annan a ensuite évoqué des actions de nature très diverse en matière de consolidation de la paix,  Il a souligné l’importance de l’état de droit qui est une chose qui ne peut pas être imposée de l’extérieur.  Les acteurs locaux doivent véritablement comprendre que seule la confiance en l’état de droit peut garantir une sécurité durable, en permettant à des gens appartenant à différents groupes ou communautés de s’en remettre, pour leur protection, aux forces de l’État et non à des milices rivales.  Et pour que ce soit possible, les tribunaux et autres institutions doivent être fondés non sur un modèle importé mais sur la culture et les traditions de la société locale.  Le rôle de la communauté internationale est d’accélérer ce processus et de l’appuyer par une assistance technique, tout en s’assurant que tous les acteurs nationaux y participent, et en agissant de manière coordonnée.  Les différents organismes du système des Nations Unies, notamment les institutions financières internationales, doivent collaborer étroitement les uns avec les autres, et avec les donateurs bilatéraux et les États qui fournissent des contingents.  La prise en charge de cette coordination est l’une des tâches qui devrait être assumée par la nouvelle Commission de la consolidation de la paix.  En tant qu’organisme consultatif, la Commission n’empiéterait pas sur l’autorité du Conseil et ne réduirait en rien ses responsabilités, a expliqué le Secrétaire général.  Il a assuré les États que ce serait toujours à eux, au sein du Conseil, qu’il appartiendra d’élaborer et d’adopter les mandats dans le cadre desquels l’Organisation des Nations Unies travaille dans les pays déchirés par la guerre. (Pour la version intégrale du discours, voir notre communiqué SG/SM/10000-SC/8444)


M. JEAN-MARIE GUÉHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a d’abord commencé par la bonne nouvelle selon laquelle le nombre total de conflits armés est en baisse constante.  Les 28 pays touchés actuellement représentent le niveau le plus bas grâce entre autres au renforcement de l’action du Conseil rendue possible par la fin de la guerre froide.  Le Secrétaire général adjoint a estimé que la Commission de consolidation qu’il est proposé de créer pourrait encore améliorer les chances de réussite en coordonnant l’action internationale.  Ne nous faisons pas d’illusions, a-t-il prévenu, la tragédie de Srebrenica rappelle la façon dont une situation grave peut devenir un acte de barbarie en quelques jours ou en quelques heures.  Les menaces de massacres ou d’épuration ethnique restent réelles dans un contexte d’opération de maintien de la paix.  Une mauvaise interprétation des évènements peut conduire à un désastre, a-t-il insisté.  Il a rappelé, dans ce contexte, la proposition du Secrétaire général de créer une capacité de réserve stratégique pouvant intervenir dans des conflits imprévus.  Quelle que soit la robustesse d’une opération de maintien de la paix, elle ne peut rien sans la volonté politique des acteurs nationaux et internationaux.  Insistant sur la place centrale des acteurs nationaux, le Secrétaire général adjoint a souligné qu’une assistance internationale dans le domaine de la primauté du droit, de la sécurité ou encore du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion (DDR) ne peut remplacer le leadership politique. 


Beaucoup reste à faire dans le domaine des institutions nationales.  Un pays ne peut espérer consolider sa paix, développer des institutions durables ou assurer la prospérité économique si ses citoyens continuent d’avoir peur de se mouvoir ou n’ont pas accès aux services sociaux et juridiques.  Formulant quelques suggestions, il a d’abord noté que les efforts en matière de sécurité et de justice ont eu trop tendance à se fonder sur les accords de paix qui n’accordent pas l’attention requise à l’identification des menaces internes ou externes qui continuent de peser sur l’État et la sécurité humaine ni au développement nécessaire d’une architecture de sécurité capable de répondre à ces menaces.  Le Secrétaire général adjoint a également estimé que trop souvent l’action de la communauté internationale en matière de sécurité et justice manque de cohérence.  Aucun cadre commun n’existe et les acteurs internationaux montrent souvent des réticences à annoncer les projets, ce qui conduit à des doubles emplois regrettables. 


Poursuivant, Jean-Marie Guéhenno, a reconnu qu’au sein du système de l’ONU, aucun accord n’existe sur une approche unique.  Cette situation a conduit à l’absence d’une stratégie cohérente parmi les divers maillons de la chaîne d’activités.  De plus, a-t-il aussi remarqué, les approches internationales en appui à la réforme de la sécurité recourent souvent à des modèles et normes étrangers qui se révèlent irréalistes par rapport aux réalités sur le terrain.  Enfin, a-t-il ajouté, les approches existantes semblent être applicables aux pays en développement plutôt qu’aux pays sortant des conflits.  Le Secrétaire général adjoint a donc conseillé à la communauté internationale de voir s’il est toujours réaliste de chercher à réformer le système de défense, de police ou des tribunaux d’un pays tout en voulant rétablir la sécurité, garder le processus politique vivace, faciliter le retour des personnes déplacées, mener des élections et restaurer les services de base.  Des priorités doivent être arrêtées en tenant dûment compte des besoins sur le terrain. 


Pour l’ONU, le défi est de remplir les différents mandats de la manière la plus cohérente possible, en reconnaissant le lien entre développement et sécurité.  L’ONU doit aussi essayer d’intégrer plus avant ses partenaires au développement dès la planification d’une opération de maintien de la paix.  Dans le même temps, elle doit aussi rechercher à intégrer plus avant les capacités dont le système dispose, ce qui exige la définition de responsabilités claires pour chaque activité spécifique, la création d’un répertoire des bonnes pratiques, et une coordination effective qui implique l’ONU, les efforts bilatéraux et autres.  L’ONU doit aussi clairement distinguer les domaines où elle a un avantage comparatif et ceux exigeant une implication des pays hôtes et des partenaires bilatéraux et multilatéraux.  Ce serait, par exemple, le domaine de la réforme de la défense dans lequel l’Organisation a des capacités limitées.  Pour illustrer les efforts en cours, le Secrétaire général a invoqué l’expérience récente en matière de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR).  Désormais, l’ONU est bien placée pour rationaliser les activités, renforcer son efficacité et diminuer les doubles emplois.  Les efforts en matière de sécurité et de justice pourraient s’inspirer de ces résultats, a estimé le Secrétaire général adjoint.


M. RONALDO MOTA SARDENBERG (Brésil) a rappelé le ferme engagement de son pays en faveur d’un système de sécurité collective plus efficace dans le domaine du maintien de la paix et de la stabilité.  Selon lui, une attention particulière devrait être accordée à la promotion des institutions démocratiques, au dialogue et à la réconciliation nationale, ainsi qu’à la prise en considération des causes économiques et sociales des conflits.  C’est la raison pour laquelle le Brésil soutient depuis des années une meilleure coordination entre le Conseil, les autres organes des Nations Unies et les autres acteurs internationaux.  Par ailleurs, la création d’une Commission de la consolidation de la paix pourrait aider à surmonter les fossés institutionnels qui se posent dans les domaines économique et social.  Le représentant a ensuite exprimé son appui à l’établissement du Fonds des Nations Unies pour la démocratie.  Rappelant en outre la nécessité de réformer le secteur de la sécurité, elle a attiré l’attention sur le sous-financement dont souffrent les programmes de DDR, notamment en ce qui concerne la phase finale de réinsertion.  Enfin, au regard du bilan mitigé du Conseil de sécurité dans tous ces domaines, M. Sardenberg a rappelé qu’une participation élargie aux travaux du Conseil permettrait aux États Membres en mesure de le faire de proposer de nouvelles approches, de redynamiser les institutions existantes ou d’en créer de nouvelles.


M. ABDELOUAHAB OSMANE (Algérie) a rappelé que les crises des 15 dernières années avaient montré combien la transition entre la phase de l’intervention et celle de la réhabilitation, du relèvement et de la reconstruction pouvait être fragile et inadéquate.  Pour y parer, il a appelé au lancement de stratégies intégrées, qui comprennent un large appui aux interventions sociales et économiques pour éviter une reprise du conflit, ainsi que des réformes dans les secteurs de la sécurité et de la justice transitionnelle, la réduction des armes légères, le désarmement et la démobilisation des anciens combattants et la protection des populations civiles.  Le rétablissement et le renforcement de l’état de droit, la bonne gouvernance, la promotion et la protection des droits de l’homme, l’impunité, le respect du droit humanitaire international et la propagation de la culture de la paix et de la tolérance restent fondamentaux, a ajouté le représentant.  Il est nécessaire, a-t-il estimé, de mettre l’accent sur la dimension du développement dans les processus de consolidation de la paix dans les pays en crise ou sortant d’un conflit.  Il a en outre rappelé que la mise en œuvre d’une approche globale de la prévention des conflits restait le moyen le plus efficace d’éviter les drames humanitaires qu’ils engendrent.  À cette fin, a-t-il ajouté, la communauté internationale doit apporter un appui coordonné et multidimensionnel aux pays vulnérables.  La Commission de la consolidation de la paix pourrait ainsi se révéler l’organe idoine pour mettre en œuvre des stratégies visant à traiter de manière cohérente et intégrée les situations pré-conflits ou post-conflits, y compris dans ses dimensions humanitaires.


M. CÉSAR MAYORAL (Argentine) a déclaré que le grand nombre d’acteurs impliqués dans les programmes de maintien de la paix et de retour à la stabilité compliquait généralement la conduite des tâches à accomplir à cet égard.  L’Argentine pense que le Conseil devrait mieux coordonner les interventions des différents acteurs, afin de simplifier la manière dont la communauté internationale apporte son soutien au retour à la normale dans les zones en conflit.  Le rétablissement de l’état de droit et des institutions politiques sous un angle de promotion de la démocratie est essentiel.  C’est à travers ce genre de démarche que l’on peut soutenir les efforts de réconciliation et de reconstruction de structures sociales susceptibles de former la base d’une paix à long terme.  L’Argentine pense que le Secrétariat devrait élaborer un manuel de bonnes pratiques en la matière, en se basant sur l’expérience acquise dans les différentes missions de maintien de la paix, a estimé le représentant.  La création de centres régionaux de formation de Casques bleus de l’ONU permettrait de former un réservoir de contingents de troupes connaissant leurs régions d’origine, ce qui faciliterait les interventions onusiennes.  L’Argentine appuie la création d’une Commission de consolidation de la paix, comme cela est recommandé par le Secrétaire général.


M. OSWALDO DE RIVERO (Pérou) a estimé que le Conseil de sécurité doit remplir trois rôles liés à la prévention des conflits, à la réaction des conflits, par le biais de mesures diplomatiques et coercitives et voire même l’intervention militaire, et à la réconciliation nationale et au rétablissement de la démocratie.  Une leçon est à tirer des crises.  Elles sont toujours, a-t-il souligné, la conséquence des conflits qui sont causés avant tout par l’exclusion sociale.  Il a donc conseillé au Conseil de sécurité de faire appel au Conseil économique et social et aux institutions de Bretton Woods pour identifier à temps les pays qui courent le risque de devenir des États déliquescents.  Le Conseil doit devenir une instance d’alerte rapide, a-t-il insisté avant d’avancer une autre idée, celle consistant pour les membres permanents, à renoncer à l’exercice du droit de veto face aux crises qui donnent lieu à des violations graves des droits de l’homme.  La prévention ne vaut rien sans une capacité de déploiement, a reconnu le représentant en appelant les États qui sont en mesure de le faire, de mettre à la disposition de l’ONU des bataillons autonomes de réserve qui pourraient être déployés rapidement.  Le représentant a conclu en jugeant extrêmement important que les efforts de reconstruction que le Conseil peut déployer réserve une place de choix au renforcement de la capacité d’exportation des économies visées.


M. NIRUPAM SEN (Inde) a déclaré que la question débattue aujourd’hui par le Conseil de sécurité relevait d’abord de l’Assemblée générale étant donné ses dimensions multiples touchant à la fois à la mise en œuvre du droit humanitaire, à l’état de droit, au renforcement des capacités et à la sortie des crises.  L’Inde est contre toute discussion ayant trait au soit disant « droit d’intervention humanitaire » derrière lequel se cache une idéologie de militarisme humanitaire qu’elle condamne.  Nous pensons qu’en cas de graves crises humanitaires ou de génocide, la volonté politique des grandes puissances est l’ingrédient qui pourrait résoudre toute crise qui pointe à l’horizon, mais à ce jour, cette volonté a toujours fait défaut.  L’Inde est contre les interventions dites humanitaires, estimant qu’elles ne sont en fait que des actions guidées par des intérêts politiques, et que ceux qui mènent ces interventions deviennent en réalité parties aux conflits qu’ils prétendent résoudre.  L’humanitarisme doit retourner à ses véritables racines et demeurer neutre, transparent et apolitique, a insisté le représentant en rappelant les termes de la résolution 46/182 de l’Assemblée générale qui traite de ces questions.  L’Inde pense que l’instrument le plus puissant contre les crises et les conflits est le développement économique et social, et c’est dans cette direction que la communauté internationale devrait orienter ses efforts.


M. ANDREY DENISOV (Fédération de Russie) a souligné que chaque situation de crise est unique et qu’il n’existe pas de modèle unifié de consolidation de la paix.  Chaque cas concret exige une identification claire de l’éventail optimal des instruments disponibles, et ce, en stricte conformité avec la Charte de l’ONU qui délègue au Conseil le rôle principal dans toutes les étapes d’une opération de maintien de la paix.  Le représentant a dit que son Gouvernement était disposé à renforcer le rôle directeur de l’ONU dans la prévention des conflits et la résolution des crises humanitaires. 


Mme ELLEN MARGRETHE LØJ (Danemark) a souligné, elle aussi, les trois piliers de toute stratégie de consolidation de la paix que sont la primauté du droit, la réforme du secteur de la sécurité et le DDR.  Elle a aussi reconnu que chaque conflit exige des stratégies spécifiques.  Le Conseil, a-t-elle dit, doit se pencher sur les besoins et y répondre avec précision.  Il doit toujours être prêt à réexaminer une situation pour y adapter les mandats qu’il a conférés.  Pour la représentante, la Commission de consolidation de la paix qu’il est proposé de créer viendrait, à point nommé, combler les lacunes liées au lien entre la sécurité et sa durabilité qui, elle, exige la recherche de solutions aux questions du développement.  La complexité de ce lien, les nombreux intérêts et les divers acteurs exigent une coordination que pourrait offrir une telle commission, a-t-elle conclu.


M. LAURO L. BAJA (Philippines) a rappelé qu’il n’existait pas de solution unique ou rapide aux divers problèmes qui se posent en matière de consolidation de la paix.  Évoquant le rôle que le Conseil de sécurité devrait jouer dans la gestion des crises humanitaires, il a affirmé que celui-ci devrait faire preuve d’innovation institutionnelle dans le renforcement de la coordination des institutions humanitaires et maintenir son appui aux organisations régionales.  Le Conseil devrait en outre axer son assistance sur les groupes vulnérables, a poursuivi le représentant.  Par ailleurs, le Conseil devrait également s’assurer que l’état de droit, les programmes de DDR et la réforme du secteur de la sécurité sont pris en considération de manière cohérente et à cette fin, établir des objectifs précis dans les mandats des opérations de maintien de la paix.  Enfin, rappelant que le Conseil de sécurité avait reconnu le lien existant entre sécurité et droits de l’homme, le représentant des Philippines a réaffirmé la nécessité d’intégrer la composante des droits de l’homme dans les mandats du maintien de la paix.  L’action du Conseil dans tous ces domaines pourrait être renforcée par la création d’une Commission de la consolidation de la paix, a conclu M. Baja.


M. ISIKIA SAVUA (Fiji) a estimé que le Conseil de sécurité devrait mettre en place un réseau d’informations et de renseignements qui lui permettrait de se doter de plans pouvant lui permettre de faire face à tous les scénarios de crises, tout en facilitant son processus de prise de décisions.  Ce réseau permettrait au Conseil de faire des prévisions sur l’évolution des situations dans les points chauds du globe et les zones à risque.  Une bonne planification basée sur une information juste donnerait d’autre part au Conseil la possibilité de mieux gérer les ressources financières dont dispose l’ONU.  Enfin, le Conseil devrait rapidement procéder à une évaluation du « droit de protéger », dont l’usage semble justifié par le genre de crises que l’on a observé à ce jour, a dit le représentant.  Fiji soutient le point de vue selon lequel la conduite des programmes de démobilisation, désarmement et réintégration (DDR), devrait être assurée d’une manière plus importante par les pays qui sortent de conflits en tenant compte de leurs propres réalités et cultures.  Fiji soutient l’implication des organisations régionales dans les processus de retour à la paix dans une zone de la région concernée, a indiqué le représentant en faisant remarquer que ce genre de démarche était un gage potentiel de succès. 


Mme MONA JUUL (Norvège) s’est interrogé sur « l’espace humanitaire » à l’intérieur des missions intégrées.  Elle a ainsi regretté la réticence à accepter les missions intégrées et le sentiment, fort dans les instances humanitaires de l’ONU ou autres, que l’intégration est synonyme de subordination.  Elle a tout de même reconnu que si une forte intégration peut accroître la cohérence des actions des organismes de l’ONU, elle risque parfois de compromettre la position de l’Organisation dans une coordination humanitaire plus large, comme cela a été le cas au Libéria.  La représentante a aussi fait part d’un sentiment croissant que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires devrait rester en dehors de la structure d’une mission en situation de fortes tensions ou de conflit en cours.  Aucun modèle unique n’est applicable à toutes les missions, a-t-elle ainsi admis.  Les mandats, la planification et la conception des missions doivent être souples.  La forme doit dépendre de la fonction et le succès réside dans la continuité et la complémentarité entre les différentes parties de l’opération de l’ONU et des acteurs externes.  Les besoins de la populations locale doivent être pris en considération à toutes les phases et il est logique que toutes les activités inclues dans le mandat d’une mission soient financées par des contributions obligatoires, a conclu la représentante dont le pays a financé une étude sur les missions intégrées. 


M. ZHANG YISHAN (Chine) a déclaré que l’ONU doit jouer un rôle central dans la prévention des crises humanitaires.  Le Conseil devrait réfléchir à la manière dont pourrait être assuré le développement durable des pays à risques, afin de prévenir de nouveaux conflits dans les situations de crises.  Dans ses efforts, le Conseil de sécurité doit cependant respecter la souveraineté des pays où il intervient, de manière à ne pas s’aliéner les populations et les parties au conflit, a estimé le représentant.  La communauté internationale doit respecter l’histoire, les traditions, la culture et la structure juridique des pays où elle intervient.  Elle ne doit pas venir imposer des modèles de gouvernance étrangers dont les bases n’ont aucune réalité dans le pays qu’elle prétend vouloir aider.  Le Conseil de sécurité doit, notamment en Afrique, tenir compte des réalités de ce continent, afin de soutenir et d’accompagner ses propres organisations.  La Chine soutient la création d’une Commission de consolidation de la paix, afin de favoriser la stabilisation des zones sortant de conflit.  Notre délégation appuiera la déclaration présidentielle préparée par la délégation de la Grèce, a dit le représentant.


M. AUGUSTINE P. MAHIGA (République-Unie de Tanzanie) a exhorté le Conseil à se montrer plus attentif aux premiers signes d’une crise humanitaire, car les prévenir revient à s’attaquer aux menaces à la paix et à la sécurité.  En tant que pays des Grands Lacs, la Tanzanie sait trop bien comment une crise humanitaire causée par un conflit dans un autre pays peut influer sur le développement d’un autre, a poursuivi le représentant, en arguant que la solution au fardeau des réfugiés que subit son pays dépend d’une paix et d’une sécurité durables dans la région.  Pour toutes ces questions, le représentant a estimé que la Commission de la consolidation de la paix qu’il est proposé de créer viendrait à point nommé pour définir une démarche holistique.  Le Conseil, a-t-il dit, a un rôle important à jouer en collaboration avec le Conseil économique et social et les fonds et programmes des Nations Unies.  Il doit y avoir un transfert de responsabilités entre le Conseil et les autres acteurs ainsi qu’une coordination adéquate au sein des entités des Nations Unies ainsi qu’avec la société civile, les gouvernements nationaux, les organisations régionales et les agences bilatérales et multilatérales.


M. KENZO OSHIMA (Japon) a déclaré que le retour à l’état de droit était un facteur essentiel de consolidation de la paix.  Cette dimension doit donc être soigneusement inscrite dans tous les mandats des missions de maintien de paix de l’ONU, a dit M. Oshima.  Le rôle de l’ONU dans la réforme du secteur de la sécurité doit lui aussi être soigneusement étudié et énoncé.  Le Japon pense que la réforme du secteur de la sécurité devrait être adaptée à chaque situation et à chaque réalité au cas par cas.  L’ONU a été réticente, à juste titre, à participer à l’assistance militaire dans les pays qui sont sortis de conflit.  Le Japon pense que l’ONU doit effectivement laisser cet aspect du problème à des arrangements bilatéraux, bien que certains estiment le contraire en arguant que la réforme des forces armées est liée aux programmes de DDR.  Le Conseil de sécurité pourrait débattre de cette question beaucoup plus en profondeur, a dit le représentant.  Nous savons que le DDR et la réforme du secteur de la sécurité posent des problèmes à l’ONU, et qu’ils sont étroitement liés.  Nous espérons que ces questions seront débattues avant la création de la Commission de consolidation de la paix.  La consolidation de la paix se heurte à l’absence d’experts juridiques et techniques sur le terrain.  La délégation japonaise demande au Secrétariat d’améliorer les procédures de recrutement de ces experts et de faciliter la nomination et le développement de ces personnels qualifiés dont le rôle sur le terrain est important.


M. RASTAM MOHD ISA (Malaisie) a estimé que toute action du Conseil de sécurité visant une intervention humanitaire ne trouve aucun fondement ni dans la Charte de l’ONU et ni dans le droit international.  Le Conseil doit donc faire une distinction claire, a-t-il dit, entre les crises découlant d’une situation de conflit et les autres provenant de phénomènes comme les catastrophes naturelles.  Quand il agit, le Conseil doit le faire en se fondant sur des informations crédibles, fiables et vérifiables et s’assurer de leur conformité avec la Charte et le droit international.  Le Conseil, a insisté le représentant, doit se laisser guider par les principes de souveraineté, d’indépendance et d’intégrité territoriale des États.  Dans ce contexte, le représentant a jugé essentiel de renforcer les capacités d’alerte rapide du Secrétariat de l’ONU.  La manière dont le Conseil assume son rôle, a-t-il encore dit, peut certainement être améliorée par le dialogue et les discussions en cours dans les autres organes de l’ONU tels que le Conseil économique et social et l’Assemblée générale.  Ceci est d’autant vrai qu’il est de plus en plus urgent de trouver une démarche tenant compte des liens entre développement, paix, sécurité et droits de l’homme.


M. FERMIN TORO JIMÉNEZ (Venezuela) a déclaré que l’ONU devait respecter la souveraineté de ses États Membres.  Le Venezuela tient à ce que la différence entre maintien de la paix et consolidation soit toujours respectée, a indiqué le représentant en appelant le Conseil de sécurité à mieux définir ses mandats selon la nature de l’opération envisagée.  Dans la consolidation de la paix, le droit des peuples à déterminer leur propre destin doit toujours être strictement respecté, et le Conseil doit cesser de s’ingérer dans les affaires intérieures des États sous le prétexte qu’il aide au renforcement de la paix ou à la protection des populations.  Le Venezuela élève des objections aux propositions relatives au soit disant « droit de protéger les populations ».  Les vraies sources des conflits doivent être identifiées et reconnues.  En Afrique par exemple, de nombreux conflits ne sont pas dus aux prétendues « parties au conflit », mais à des situations de néocolonialisme qui perdurent, et dont les vrais auteurs ne veulent pas voir la fin.  Dans ce contexte, le représentant a fait référence à la situation en Haïti, dénonçant les crises impérialistes de l’Administration Bush.  La justification d’une opération de maintien de la paix sur la base du prétendu « droit de protéger » est un outil dont vont continuer à se servir les États de la « communauté internationale » qui sont en fait le club des puissances qui pendant longtemps a assujetti le reste du monde dans son propre intérêt, a-t-il dit. 


M. GHEORGHE DUMITRU (Roumanie) a affirmé que la logique de prévention devrait être la priorité du Conseil de sécurité, principalement dans les situations de menace à la paix et à la sécurité susceptibles de provoquer des conséquences dévastatrices pour les civils.  À cette fin, la Roumanie estime que toutes les situations à risque devraient être étroitement surveillées par les différents organes des Nations Unies, en particulier le Conseil, afin de préparer une réponse appropriée en cas d’escalade.  Aussi, est-il nécessaire d’accorder l’attention requise aux conflits latents, qui favorisent l’apparition de zones illégales où se produisent des violations graves et systématiques des droits de l’homme.  Par ailleurs, avant d’entreprendre une action, les Nations Unies doivent collecter le plus d’informations possibles pour déterminer les causes sous-jacentes des crises humanitaires, et leurs institutions, notamment le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), peuvent jouer un rôle important à cet égard.  Le Conseil de sécurité doit en outre exercer toute son influence politique pour faire traduire en justice les responsables de crises humanitaires et le soutien de la Cour pénale internationale (CPI) est essentielle sur ce point, a précisé le représentant.  Enfin, la Roumanie a rappelé la nécessité de renforcer la coopération entre le Conseil et les organisations régionales.


M. REED JACKSON FENDRICK (États-Unis) a rappelé que le Groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement avait relevé que l’ONU ne dispose pas d’un mécanisme explicitement conçu pour éviter l’effondrement des États et leur descente vers les guerres et les conflits.  L’ONU ne dispose pas non plus de mécanisme de soutien à la reconstruction et à la consolidation de la paix.  Étant donné que la communauté internationale et les Nations Unies se retrouvent toujours impliquées dans la recherche de solutions aux différents conflits, il serait normal que le Conseil de sécurité se penche sur les leçons apprises à ce jour dans les zones où il a aidé, de manière plus ou moins appropriée, des sociétés à sortir d’hostilités et de dissidences civiles violentes, a dit M. Fendrick.  Au vu de l’expérience acquise en matière d’intervention de maintien de la paix, il est temps que le Conseil de sécurité agisse rapidement sur la recommandation du Groupe de haut niveau concernant la création d’une Commission de consolidation de la paix, a estimé le représentant.  Toute société fonctionnelle et jouissant d’une bonne économie dispose généralement d’institutions représentatives qui opèrent sur la base de la règle du droit.  Il est donc indispensable de rétablir la confiance en l’État de droit dans les pays sortant de conflit pour leur éviter de retomber dans la violence.  Les États-Unis savent que la sécurité est une condition sine qua non de la durabilité de l’état de paix, a indiqué M. Fendrick.  La reconstruction de structures de sécurité, bien qu’indispensable, doit toutefois se faire dans le cadre de la reconstruction sociale dans son ensemble, a dit le représentant.  Il ne faudrait pas en effet que le rétablissement des services de sécurité dans les pays sortant de crise se traduise par la création de gardes prétoriennes au service des nouvelles structures de pouvoir, a-t-il souligné.


M. ÉDOUARD AHO GLELE (Bénin) a estimé que le travail du Conseil doit viser quatre points dont le premier est le renforcement de l’autorité du droit international humanitaire.  En la matière, il a jugé que la création d’un Conseil des droits de l’homme, allant de pair avec le renforcement des moyens d’action du Bureau du Haut Commissaire aux droits de l’homme seraient une contribution importante.  Le représentant a cité comme deuxième élément l’accès sûr et sans entrave de l’assistance humanitaire aux victimes et à toutes les populations affectées.  Comme troisième point, il a cité la nécessité de traiter des crises humanitaires en temps utile.  Il a ajouté que les divergences de vue au sein du Conseil sur l’appréciation des situations et sur le choix des moyens d’action entament sa crédibilité.  Enfin, au titre de quatrième point, le représentant a cité la nécessité de promouvoir un règlement politique des conflits dont résultent les crises humanitaires.  En la matière, il a jugé que la coopération du Conseil avec les organisations régionales est un instrument adéquat.  Il a terminé en mettant l’accent sur l’inadéquation du financement des volets réintégration et réhabilitation des programmes DDR et de la réforme du secteur de la sécurité.  La mobilisation d’un financement adéquat et la prise en compte de la dimension régionale liée à la mobilité transfrontière des ex-combattants contribueront dans une large mesure à parer la résurgence des conflits armés et les situations humanitaires désastreuses qui en résultent.


Mme ADIYATWIDI ADIWOSO ASMADY (Indonésie) a déclaré que la plupart des conflits étaient dus à l’absence de développement économique et social.  Pour résoudre les crises de manière durable, le Conseil devrait donc travailler avec  d’autres organes de l’ONU spécialisés dans les questions de développement.  La prévention des conflits serait facilitée par l’enracinement de l’état de droit, sans lequel la démocratie elle-même ne saurait exister, a dit la représentante.  Cependant, la promotion de ces valeurs par le Conseil doit tenir compte des réalités de chaque zone et de chaque pays et respecter leurs spécificités, comme l’a relevé le Secrétaire général, a-t-elle ajouté en insistant sur le respect des cultures traditionnelles et politiques locales et sur celui de la souveraineté des États.  Il est d’autre part important de mener à bien les programmes de DDR afin notamment de récupérer les armes utilisées pendant les crises, de manière à ce qu’elles ne circulent pas librement dans la région et n’y causent pas d’autres tensions.  L’Indonésie tient à ce que l’action internationale ne se substitue pas aux initiatives locales, mais qu’elle les complète.


M. ALLAN ROCK (Canada) a estimé qu’en ce jour qui marque le 10e anniversaire des massacres de Srebrenica, les membres devraient réaffirmer leur volonté collective de prendre des mesures pour améliorer la capacité du Conseil de cerner rapidement les crises humanitaires et d’intervenir avec célérité.  Dans ce contexte, il a exhorté le Conseil à mettre la situation dans le nord de l’Ouganda à son ordre du jour.  Selon lui, il importe d’autre part de reconnaître que les crises humanitaires ne découlent pas seulement d’un conflit armé mais sont parfois provoquées par les politiques erronées et malveillantes des gouvernements envers leur propre population.  Il a demandé au Conseil de prendre note de la plus récente crise humanitaire, qui sévit actuellement au Zimbabwe où le Canada croit que la situation mérite toute l’attention du Conseil.  Les outils et les pouvoirs nécessaires pour que la communauté internationale puisse exercer sa responsabilité de protéger les populations civiles n’ont pas besoin d’être réinventés –ils existent dans la Charte des Nations Unies, a affirmé le représentant.  Ce qu’il faut, cependant, c’est un cadre pour guider cette immense responsabilité.  La responsabilité de protéger fournit un tel cadre.


La ferme déclaration d’appui à cette norme émergente faite par les dirigeants en septembre jettera les bases normatives d’interventions plus efficaces de la part du Conseil de sécurité.  Afin d’assurer la mise en œuvre efficace de cette norme, le Canada appuie également la recommandation du Secrétaire général que le Conseil adopte une résolution incluant des lignes directrices sur l’usage de la force.  La nécessité d’intervenir en cas de conflit ne va pas sans l’obligation de mettre fin à la culture de l’impunité et la Cour pénale internationale donne le meilleur espoir à ce sujet.  Le Canada demande au Conseil de continuer à exercer ses pouvoirs en vertu du Statut de Rome pour renvoyer à cette Cour les situations pertinentes.  Selon le représentant, la Commission de consolidation de la paix proposée jouera un rôle crucial pour renforcer les capacités des Nations Unies, des pays donateurs et des organisations régionales de relever les défis que présentent les États en déroute ou fragiles.  La situation en Haïti offre à une telle commission une excellente occasion de se pencher, pour la première fois, sur cette question.  Le Canada souscrit pleinement à sa création et à la mise en œuvre de ses activités.  L’attitude du Canada face au cycle des conflits évolue elle aussi.  Le Canada est en train d’établir une démarche pangouvernementale plus cohérente au moyen d’un nouveau Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction (GCSR) qui s’efforcera de relever les défis que présentent toutes les facettes d’un conflit, depuis les activités de prévention jusqu’à l’appui à la paix ainsi que la reconstruction après le conflit et la consolidation de la paix.


M. EMYR JONES PARRY (Royaume-Uni) a déclaré, au nom de l’Union européenne, que le Conseil de sécurité n’est qu’un acteur sur la scène internationale.  Mais c’est un acteur important.  Il devrait être vigilant sur l’évolution de la situation dans les régions où des crises humanitaires menacent et devrait intervenir avant que toute crise n’atteigne un niveau critique.  La communauté internationale a un intérêt légitime à assurer la protection  des populations, et dans ce cadre, l’Union européenne soutient la notion de « droit et de responsabilité de protéger ».  Le Haut Commissariat aux droits de l’homme devrait participer à l’examen de cette question et à celui de la création d’une Commission de consolidation de la paix.  Le Conseil devrait toujours s’assurer que les dirigeants de toutes les parties aux conflits assurent un accès humanitaire aux populations, a estimé le représentant.  Le Conseil doit également s’assurer que les responsables de crimes de guerre et de violations graves du droit humanitaire ne restent pas impunis.  L’état de droit, le DDR et la réforme du secteur de la sécurité sont les trois composantes essentielles de la consolidation de la paix, a-t-il poursuivi en demandant au Conseil de renforcer son action dans ces domaines.  L’ONU est malheureusement loin de disposer des capacités de promouvoir l’état de droit, a-t-il regretté.  Cependant, nous nous réjouissons de la proposition du Secrétaire général de créer une unité d’appui au renforcement de l’état de droit, a poursuivi le représentant.  Quant au DDR, il ne peut réussir qu’en promouvant de manière générale l’état de droit et la réforme du secteur de la sécurité.  L’Union européenne appuiera vigoureusement la création d’une Commission de consolidation de la paix, a indiqué M. Jones Parry.


M. JEAN-MARC DE LA SABLIÈRE (France) a rappelé que la nécessité d’intervenir dans les crises humanitaires et dans les conflits qui les engendrent a donné naissance à des débats nouveaux.  C’est ainsi qu’un consensus émerge aujourd’hui sur la notion de « responsabilité de protéger », qui réaffirme la responsabilité première des États à protéger les populations civiles sur leur territoire.  Ceci étant posé, a poursuivi le représentant, il convient de garder à l’esprit que chaque situation de crise est, par définition, exceptionnelle.  La réponse à apporter au drame du Darfour n’est pas identique à celle qui s’impose en Haïti ou au Libéria, a poursuivi le représentant, pour qui la palette d’action est large et son utilisation dépend des circonstances. 


Pour adapter sa réponse au problème posé, le Conseil de sécurité a pris l’habitude de diversifier les sources d’information.  Ainsi lorsqu’il a accueilli le mois dernier le Coordonnateur humanitaire, Jan Egeland, à l’occasion de son exposé sur la protection des civils et le Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial, le Conseil a reçu des éclairages précieux en complément des interventions des représentants spéciaux du Secrétaire général.  Le représentant a affirmé que le Haut Commissaire aux droits de l’homme est aussi une source précieuse d’information.  Il a conclu en rappelant que le Conseil n’est pas l’unique acteur des Nations Unies à pouvoir répondre aux crises humanitaires, soulignant le rôle joué à cet égard par les agences des Nations Unies, les États, les ONG et la société civile.


Reprenant la parole, les États-Unis ont, par la voix de leur représentant, regretté les propos malencontreux et imprécis du représentant du Venezuela qui ont mal caractérisé les efforts des États-Unis pour maintenir la paix et la sécurité internationales.  Le représentant des États-Unis a surtout regretté que de tels propos n’érodent la valeur de réunions aussi importantes.


Déclaration du Président du Conseil de sécurité


Le Conseil de sécurité réitère les buts et principes énoncés dans la Charte des Nations Unies et tient compte du fait que sa responsabilité principale en vertu de la Charte consiste à maintenir la paix et la sécurité internationales.


Il demeure profondément préoccupé par les répercussions humanitaires, politiques et économiques catastrophiques des conflits armés et insiste sur le fait que la prévention du déclenchement et de l’escalade des conflits armés et des crises humanitaires est un impératif politique et moral absolu et favorise la paix et le développement ainsi que les relations amicales entre tous les États.


Le Conseil considère qu’il importe d’aider à prévenir les futurs conflits en s’attaquant à leurs causes profondes par des moyens légitimes et avec impartialité.


Il souligne à nouveau qu’il importe de promouvoir et de rétablir d’urgence la justice et l’état de droit dans les sociétés qui sortent d’un conflit, en favorisant la réconciliation nationale, le développement démocratique et le respect des droits de l’homme. Il estime qu’il est essentiel de mettre fin à l’impunité dans les accords de paix, et que cela peut contribuer aux efforts pour surmonter les effets des exactions commises dans le passé et parvenir à la réconciliation nationale afin d’empêcher de nouveaux conflits. Il rappelle qu’il a à maintes reprises insisté sur la responsabilité qui incombe aux États de mettre fin à l’impunité et de traduire en justice les responsables de génocides, de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de graves violations du droit international humanitaire.


Le Conseil est conscient en outre de l’importance croissante des aspects civils de la gestion des conflits dans le règlement des situations de crises complexes et la prévention de la reprise des conflits, et reconnaît l’importance de la coopération entre civils et militaires dans la gestion des crises. Lorsqu’il approuve une opération des Nations Unies, le Conseil devrait tenir compte du rôle essentiel de la police militaire et civile dans la stabilisation des situations de crise et dans le maintien de la sécurité. Dans le même temps, le Conseil reconnaît que le Représentant spécial du Secrétaire général assisté de conseillers civils pourrait jouer un rôle de coordination essentiel lorsqu’il s’agit de fournir une aide humanitaire, de rétablir l’ordre public et d’assurer le fonctionnement des institutions publiques, le relèvement, la reconstruction et la consolidation de la paix au service du développement durable à long terme.


Le Conseil souligne qu’il faut assurer un financement rapide et adéquat des priorités de l’action de consolidation de la paix à tous les stades du processus de paix, et consacrer des investissements financiers durables à cette entreprise lors des phases de relèvement à moyen et à long termes. Il note que les activités de consolidation de la paix doivent être mises en route promptement afin de répondre aux besoins immédiats et recommande la mise en place de moyens qui puissent y être affectés sans retard.


Le Conseil prend note avec intérêt de l’importante proposition du Secrétaire général tendant à la création d’une Commission de consolidation de la paix, et souscrit à l’objectif de rendre l’ONU mieux à même de coordonner son action avec celle des donateurs et des pays fournisseurs de contingents et de mener des activités de consolidation de la paix, en particulier du début des opérations de maintien de la paix à la phase de stabilisation, de reconstruction et de développement. Il considère que cette commission pourrait grandement contribuer à rapprocher le maintien de la paix et de la sécurité internationales des activités d’assistance humanitaire et d’aide au développement économique.


Le Conseil sait que, dans les sociétés qui sortent d’un conflit, la consolidation de la paix est fondée sur le principe selon lequel la protection des civils, la promotion de l’état de droit et de la justice transitionnelle, le désarmement, la démobilisation, le rapatriement, la réinsertion et la réadaptation des ex-combattants, la réforme du secteur de la sécurité et l’introduction de réformes économiques et sociales démocratiques constituent des éléments intégrés et que leur prise en charge par le pays joue un rôle important qui devrait être soutenu par la communauté internationale, y compris par les organisations régionales.


Le Conseil insiste sur le fait que la réforme du secteur de la sécurité est un élément essentiel de tout processus de stabilisation dans les situations d’après conflit indissociable de la promotion de l’état de droit, de la justice transitionnelle, de désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion des ex-combattants et de la protection des civils, entre autres, et reconnaît la nécessité d’une préparation plus adéquate, notamment de la mobilisation des ressources suffisantes en matière de planification, et d’approches plus cohérentes de la part de l’Organisation des Nations Unies et de la communauté internationale face à ces questions.


Le Conseil considère qu’il faudra accorder l’attention voulue à la réforme du secteur de la sécurité, en s’inspirant des pratiques optimales dans ce domaine. Il souligne également qu’il convient d’examiner sérieusement la promotion de l’état de droit, le processus de désarmement, de démobilisation et de rapatriement et la réforme du secteur de la sécurité, leur interdépendance et la disponibilité de ressources suffisantes, avant d’approuver le mandat d’une opération de l’ONU.


Liste des intervenants:


Le Ministre des affaires étrangères de la Grèce, le Secrétaire général de l’ONU, le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, le Brésil, l’Algérie, l’Argentine, le Pérou, l’Inde, la Fédération de Russie, le Danemark, les Philippines, Fiji, la Norvège, la Chine, la République-Unie de Tanzanie, le Japon, la Malaisie, le Venezuela, la Roumanie, les États-Unis, le Bénin, l’Indonésie, le Canada, le Royaume-Uni et la France.  Pour l’examen de cette question, le Conseil était saisi d’une lettre datée du 6 juillet 2005, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent de la Grès auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2005/434).


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