En cours au Siège de l'ONU

CS/8284

LE REPRÉSENTANT SPÉCIAL DU SECÉTAIRE GÉNÉRAL POUR L’AFGHANISTAN, M. JEAN ARNAULT, INVITE LE CONSEIL DE SÉCURITÉ À SOUTENIR LE PROCESSUS ÉLECTORAL AFGHAN

10/01/2005
Communiqué de presse
CS/8284


Conseil de sécurité

5108e séance – matin


LE REPRÉSENTANT SPÉCIAL DU SECÉTAIRE GÉNÉRAL POUR L’AFGHANISTAN, M. JEAN ARNAULT, INVITE LE CONSEIL DE SÉCURITÉ À SOUTENIR LE PROCESSUS ÉLECTORAL AFGHAN


Le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan, M. Jean Arnault, a souligné ce matin, dans un exposé au Conseil de sécurité, l’importance des élections législatives et locales prévues pour avril-mai 2005.  Il a vu dans le bon déroulement de l’élection présidentielle du 9 octobre 2004 et dans la formation récente d’un gouvernement représentatif de la diversité ethnique du pays des signes encourageants, mais il a appelé la communauté internationale à se garder de toute euphorie.  Enumérant les défis qui restaient à relever, M. Arnault a rappelé que l’industrie des stupéfiants, qui représente 60% du PNB du pays, constituait l’une des principales menaces à l’édification d’un État afghan démocratique et vivant en paix.  Il a pris acte des avancées du processus de désarmement, dont il a espéré qu’il pourrait être achevé d’ici à juin 2006.  Il a cependant prévenu que l’insécurité persistante dans certaines régions risquait d’entraver le processus électoral et a souhaité que soient identifiées les forces à démanteler avant la tenue du scrutin.  Le Représentant spécial a souligné la responsabilité première des Afghans dans l’amélioration de la situation, mais il a également insisté sur la nécessité d’un soutien accru de la communauté internationale.  Il a indiqué à cet égard qu’il lancerait prochainement un appel pour le financement des élections législatives et locales, dont il a estimé le coût à entre 120 et 160 millions de dollars.


Avant d’entendre l’exposé de M. Arnault, le Conseil de sécurité, à la demande de son Président pour le mois de janvier, M. Cesar Mayoral (Argentine), a observé une minute de silence à la mémoire des victimes du tsunami dévastateur, qui a tué plus de 150 000 personnes dans l’océan Indien.


Lors de cette première séance de l’année 2005, le Conseil a accueilli cinq nouveaux membres, à savoir l’Argentine, le Danemark, la Grèce, le Japon et la République-Unie de Tanzanie, qui succèdent à l’Angola, au Chili, à l’Allemagne, au Pakistan et à l’Espagne.


Exposé


M. JEAN ARNAULT, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan, a estimé que l’élection présidentielle du 9 octobre et la nomination récente du Gouvernement présentait une occasion de faire avancer les priorités du processus de Bonn. 


Il s’est félicité de la composition du Gouvernement, qui répond aux exigences de la Constitution afghane, quant au niveau d’éducation de ses membres et au respect de la diversité ethnique du pays, avec, sur 27 membres, 10 Pachtounes, huit Tadjiks, cinq Hazaras, deux Ouzbeks, un Turkmène et un Balouche.  Trois femmes sont également présentes dans l’équipe.  M. Arnault a noté que la composition du Gouvernement afghan n’avait pas échappé à certaines critiques, mais il a estimé que le vote de confiance dont il avait bénéficié permettrait d’accroître son autorité et son efficacité et de lui donner une véritable dimension nationale, à la différence de la Loya Jirga de 2002, considérée par certains comme une somme de factions.


Parmi les nombreuses tâches qui l’attendent, le Gouvernement devra en premier lieu préparer les élections parlementaires, qui doivent se tenir entre le 21 avril et le 21 mai 2005, a expliqué le Représentant spécial.  Compte tenu de l’absence de tradition électorale en Afghanistan, il a été jugé préférable de les dissocier du scrutin présidentiel qui, à cet égard, a été conçu comme une sorte de répétition générale.  M. Arnault a indiqué que la composition de la Commission électorale indépendante, nommée par le Président en consultation avec les partis politiques, et notamment la cinquantaine de nouvelles formations enregistrées depuis l’année dernière, devait être connue dans un avenir proche.  Il a également souligné l’importance de la participation des Afghans eux-mêmes au processus électoral, à travers le déploiement d’observateurs nationaux dans l’ensemble du pays.


Pour permettre aux élections de se tenir dans les délais impartis, d’importantes décisions doivent être prises, sur la participation des réfugiés et des populations nomades, sur la délimitation des districts, qui doit être achevée au plus tard dans deux semaines, sur les chiffres de population par province, sur la préparation des listes de votants et sur la révision du code électoral.  Le Représentant spécial a également rappelé la nécessité de mieux définir les pouvoirs des futurs conseils de districts et de province, organes élus, chargés notamment d’élire les membres de la Chambre haute du Parlement, qui constituent une innovation dans le système politique afghan.  Estimant le coût des élections parlementaires et locales à 120 ou 130 millions de dollars, auxquels il faudra ajouter 30 millions si le scrutin est également organisé en Iran et au Pakistan, M. Arnault a indiqué qu’il lancerait un appel à la communauté internationale pour le financement des scrutins aussitôt que les dates seraient connues.


Concernant la sécurité du processus, le Représentant spécial a fait remarquer que tandis que la police et l’armée afghanes joueront un rôle clef pendant les élections de 2005 comme elles l’ont fait l’année dernière, les forces internationales seront indispensables pour assurer la sécurité et soutenir les efforts des forces nationales.  La Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) et les forces de la coalition ont déjà fait connaître leur disponibilité à cet égard.  En outre, M. Arnault a particulièrement insisté sur la sécurité des personnels de l’ONU, dont il a rappelé qu’ils avaient été la cible d’attaques et d’enlèvements par le passé.


Après son exposé détaillé sur la préparation des élections, M. Arnault a développé d’autres aspects de la situation en Afghanistan à commencer par l’industrie des stupéfiants, dont il a rappelé qu’elle était l’un des principaux obstacles à l’édification d’un État afghan démocratique et vivant en paix.  L’économie de l’opium, a-t-il précisé, représente 60% du PNB du pays.  La culture de l’opium englobe 56% des terres cultivées, elle concerne 356 000 familles et a augmenté de 35% en 2003.  Il s’est félicité de la création d’un ministère chargé de la lutte contre les stupéfiants, érigée en priorité nationale par le Président Karzai, qui a convoqué le mois dernier une conférence nationale.  En application des mesures prises dans le cadre de cette réunion, un nombre significatif de paysans a abandonné la culture de l’opium au profit du blé, a-t-il dit.  Le Représentant spécial a invité la communauté internationale à soutenir le programme national afghan d’élimination des drogues, en encourageant les cultures de substitution et en contribuant, par une présence militaire internationale, à la lutte contre les trafiquants de drogue et les laboratoires clandestins.


M. Arnault a par ailleurs souligné l’importance du processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) pour la préparation des élections locales, qui pourraient être compromises par des réseaux d’intérêts politiques et de groupes armés.  À l’heure actuelle, 33 000 miliciens ont été désarmés, menant ainsi presqu’à son terme le programme de cantonnement des armes lourdes.  Compte tenu du taux réel de désarmement et de la force véritable des milices, il est possible de conclure que sur les 40 000 noms inscrits sur les listes des milices, seuls 20 à 30 000 existent vraiment.  Si l’élan en la matière est maintenu et les obstacles levés, le programme de DDR devrait être achevé en juin 2005, conformément au calendrier fixé par la Conférence de Berlin.  Les activités de réintégration devraient quant à elles se poursuivre jusqu’en 2006. 


Après avoir donné plus de détails sur ce processus, le Représentant spécial a souligné qu’il a particulièrement réussi dans le nord du pays.  La disposition de la loi sur les partis politiques selon laquelle les unités liées aux organisations politiques doivent adhérer au processus DDR avant l’inscription de leur organisation sur les listes électorales a produit de très bons résultats.  Ainsi, pratiquement toutes les divisions militaires qui opéraient sous le contrôle du général Dostum ont intégré le processus de DDR et ouvert la voie du processus électoral à leur parti.  Le Représentant spécial a néanmoins relevé des obstacles, notamment dans la ville de Kaboul où les Divisions 1 et 8 font traîner les choses.  Hier, s’est-il réjoui, le programme DDR de l’ONU a pu enfin commencer les opérations de cantonnement dans la vallée de Panshjir.  Soulignant l´importance d’un financement adéquat du programme DDR, il a indiqué qu’un grand nombre de forces irrégulières échappaient toujours au programme et continuaient d’opérer à travers le pays.  Certaines d’entre elles, a-t-il ajouté, sont à l’origine de l’insécurité et des violations des droits de l’homme dans certaines régions du pays et leurs activités sont bien souvent liées à la production et au commerce illicites des drogues. 


Le succès des élections législatives dépendra, pour une large part, de la capacité à démanteler ces forces, a prévenu le Représentant spécial avant d’indiquer que le programme DDR de l’ONU, la FIAS et les forces de la coalition avaient presque achevé le processus de localisation de ces forces dans le pays.  Sur cette base, le Gouvernement afghan et la communauté internationale devraient mettre au point un plan de désarmement et de réintégration et à cet égard, le Représentant spécial a souligné l’importance d’identifier les forces qui doivent être absolument démantelées avant les élections législatives.  Il a aussi mis l’accent sur le fait qu’en matière de désarmement, les critères doivent être définis clairement, y compris les sanctions.  Des schémas incitatifs devront être mis en place, a-t-il poursuivi, en jugeant important d’établir rapidement un lien avec les programmes de reconstruction et les projets générateurs d’emplois.  Il est essentiel de décentraliser la gestion des mesures incitatives pour adapter les projets aux besoins et conditions de chaque province, voire de chaque district, et d’exploiter pleinement les chances de réintégration.


L’élection présidentielle, a conclu M. Arnault, a montré la détermination avec laquelle les Afghans adhèrent à la vision d’un pays en paix respectant l’état de droit et protégé de la violence extrémiste et des divisions politiques et ethniques.  Les progrès vers un tel État sont réels, a-t-il souligné, en appelant néanmoins la communauté internationale à ne pas se montrer trop euphorique.  Les progrès, a-t-il dit, dépendent du niveau de l’assistance internationale sur les plans militaire, économique et politique.  De même, l’économie des stupéfiants est devenue un véritable obstacle à l’édification d’un État afghan.  Contrôler une telle économie demandera des efforts supplémentaires de la part des Afghans mais aussi de la communauté internationale, a-t-il prévenu.


*   ***   *


À l’intention des organes d’information. Document non officiel.