En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/9660

TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU, KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS UNIES, LE 30 DÉCEMBRE 2004

30/12/2004
Communiqué de presse
SG/SM/9660


TRANSCRIPTION DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’ONU, KOFI ANNAN, AU SIÈGE DES NATIONS UNIES, LE 30 DÉCEMBRE 2004


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais):


J’aimerais tout d’abord vous remercier de votre présence aujourd’hui.  Nous traversons une situation qui est difficile pour tous et je suis ici pour vous présenter les efforts déployés par l’ONU suite à la catastrophe des tsunamis.  Je tiens tout d’abord à exprimer mes condoléances à toute la population de la région et à tous ceux qui ont perdu des êtres chers.  À mesure que le nombre des victimes augmente, nous continuons à prier pour ceux qui recherchent des membres de leur famille, pour les survivants, plus particulièrement les pauvres, et pour les millions de personnes que la catastrophe a rendues vulnérables.


J’ai eu l’occasion de parler aux dirigeants des pays affectés non seulement pour leur présenter mes condoléances mais aussi pour voir comment les Nations Unies et la communauté internationale peuvent travailler avec eux ainsi que pour souligner la nécessité de coordonner les efforts nationaux, régionaux, internationaux.


Il s’agit d’une catastrophe mondiale sans précédent qui exige une réaction sans précédent.  Au cours des derniers jours, cette catastrophe a vivement marqué la conscience de l’opinion publique partout dans le monde.  Nous essayons de saisir l’ampleur de cette catastrophe.


Nous devons également nous pencher sur le long terme, puisque les effets de cette catastrophe se feront sentir pendant longtemps encore.


Les derniers chiffres sont éloquents: au moins 115 000 personnes ont perdu la vie dans la région; 500 000 sont blessées, 1 million sont déplacées; et au moins 5 millions ont besoin d’une aide immédiate.


La réaction a été positive.  À ce jour, des contributions totalisant un demi milliard de dollars ont été promises ou versées, de même que des contributions en nature.  Plus de 30 pays ainsi que des millions de personnes dans le monde ont déjà répondu à l’appel.


Comme Jan Egeland vous l’a dit ces derniers jours, et comme je l’ai répété précédemment, la coordination de la réponse est aujourd’hui absolument essentielle.  La façon dont la communauté internationale et les pays touchés collaboreront aujourd’hui sera déterminante pour l’efficacité avec laquelle nous ferons face à la catastrophe sous tous ses aspects, aussi bien à court terme qu’à long terme.


J’ai rencontré ce matin les chefs des institutions de l’ONU et ceux au sein du Comité permanent pour les affaires humanitaires.  J’ai également rencontré le Groupe nouvellement créé qui réunit l’Australie, l’Inde, le Japon et les États-Unis; j’ai également rencontré ce matin les Représentants permanents des 12 pays les plus touchés.  Cet après-midi, je rencontrerai les représentants de l’Union européenne pour voir avec eux quelle suite donner à nos efforts.


Avant tout, j’aimerais assurer les populations de la région que la famille des Nations Unies tout entière est à leurs côtés, prête à les aider.  Avec eux, nous nous emploierons à reconstruire leurs vies, leurs foyers et leurs communautés qui ont été dévastés par la catastrophe. 


Question (interprétation de l’anglais): Il y a un groupe-clé.  Il y a les Nations Unies.  Il y a toutes sortes de groupes qui interviennent dans la coordination des secours.  Qui prend la tête de la coordination de l’action humanitaire?  Êtes-vous surpris par la décision des États-Unis de créer ce groupe spécial?  Quels sont les goulets d’étranglement pour apporter de l’aide?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je vous remercie de votre question.  Je me suis entretenu hier et ce matin avec le Secrétaire d’État Powell, alors que la création du Groupe était annoncée.  Le Groupe-clé va appuyer l’effort des Nations Unies.  Nous nous attendons à ce qu’il s’étoffe.  Un certain nombre de pays ont annoncé leur attention de le joindre.  Je pense qu’avoir un véritable effort international sera une bonne chose.  Il est clair qu’ils ont l’intention de conjuguer leurs efforts aux nôtres et nous allons avoir une véritable action internationale.  En fait, M. Jim Wolfensohn a aussi participé aux réunions que nous avons eues ce matin.  Car outre les efforts à court terme, nous aussi commencé à nous pencher sur le relèvement et la reconstruction à long terme. 


Pour ce qui est des difficultés logistiques, beaucoup est fait.  Les transports et les communications avec la région touchée s’améliorent.  Nous vous donnerons également des renseignements sur les capacités militaires qui ont été déployées dans la région et qui utilisent Bangkok comme centre de coordination.


Question (interprétation de l’anglais): Est-ce que les Nations Unies ne manquent pas de ressources humaines à envoyer en Asie compte tenu des effectifs déployés au Darfour et en Afghanistan, par exemple?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Laissez-moi d’abord vous répondre que nous ne travaillons pas seuls.  Nous travaillons avec nos principaux partenaires.  En Asie, nous travaillons avec les sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les organisations non gouvernementales et les autorités locales.  La réaction initiale des gouvernements sur le terrain a été excellente et les sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ont été très actives; donc, nous travaillons en partenariat avec elles.  Mais vous avez raison.  Les ressources humaines vont être exploitées au maximum de leurs capacités et nous allons devoir les compléter.  Ce n’est pas seulement une question de ressources humaines, c’est aussi une question de ressources financières et techniques.  Nous espérons que la réponse sera soutenue dans tous les secteurs et qu’il ne s’agira pas de prendre à Pierre pour donner à Paul.  


Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, il semble qu’il y a eu quelques petits différends sur la réaction des pays riches et sur ce que cette réaction aurait dû être.  Ma question est donc la suivante: êtes-vous satisfait de la réaction des pays riches face à la crise?  Avez-vous l’impression que les pays riches font ce qu’ils doivent faire et vous donnent ce dont vous avez besoin?


Lors de la vidéoconférence, une autre question a été posée: la crise est-elle si gigantesque que la réponse de la communauté internationale aurait dû être plus importante?  Qu’en pensez-vous?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je voudrais dire qu’à ce stade, la réponse a été très bonne.  Nous avons assisté à une bonne réaction de la part des Gouvernements, qui ont fourni une première aide, indiquant qu’ils feraient plus.  Non seulement ils ont annoncé et versé des contributions en espèce, mais ils ont fourni des contributions en nature.  De plus, des avions et du matériel ont déjà été envoyés sur le terrain.  Je pense que tout cela nous sera très utile.  Les Gouvernements de la région sont également très activement impliqués dans ce processus.  Je suis donc satisfait de la réponse obtenue jusqu’à présent.


Ce que je voudrais souligner, c’est que nous devrons faire face à la situation sur le long terme.  Il faut aider les populations à reconstruire leur vie.  Il faut aider les pauvres qui ont tout perdu à retrouver des moyens de subsistance et travailler avec les gouvernements pour que cela soit possible.


Pour ce qui est de l’ampleur de la crise, oui, effectivement, nous en avons parlé et en plus, nous avons reconnu qu’elle était si gigantesque qu’aucune institution ne pouvait à elle seule ou qu’aucun pays ne pouvait en venir à bout.  Nous avons réalisé que nous devions unir nos efforts, que nous devions les coordonner, afin que l’impact sur le terrain soit l’impact le plus important possible.  Je pense que tout le monde semble être conscient de cela.  On aura besoin de beaucoup d’argent, de beaucoup d’efforts et encore une fois, de longue haleine.


Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, cette catastrophe est une catastrophe de grande envergure et le Premier Ministre italien a souhaité que l’on convoque un sommet d’urgence du G-8.  D’autres souhaiteraient que l’Organisation des Nations Unies saisisse le taureau par les cornes et organise un sommet beaucoup plus important.  Il y a, par exemple, les pays comme ceux du Golfe qui pourraient contribuer beaucoup, étant donné les ressources dont ils disposent. 


Je voudrais poser une question sur le Soudan.  Demain, il y aura une signature et je voudrais savoir ce que vous en pensez.  Est-ce que cette signature permettra de régler la catastrophe du Darfour qui vient au deuxième rang des catastrophes?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Nous allons lancer un appel d’urgence le 6 janvier.  Cet appel s’adressera à tous les gouvernements ayant la capacité d’y contribuer.  Il y aura une deuxième conférence d’annonces de contributions le 11 janvier.  Donc l’appel n’est pas limité à un groupe quelconque de pays.  Il est destiné à tous les pays, à tous les gouvernements et à tous les individus.  D’ailleurs, les individus ont fait preuve d’énormément de générosité.


Pour ce qui est de votre question sur le Darfour.  Vous étiez à Nairobi avec moi lorsque le Conseil de sécurité s’est réuni à Nairobi.  Si l’accord est conclu et signé demain, je pense que cela aura un impact positif sur le pays.  Nous nous attendons à ce que, une fois que l’accord sera signé, une conférence nationale soit organisée, qu’un dialogue national soit noué et à ce que cela donne une nouvelle dynamique à la recherche d’une solution au Darfour.  Certains des accords et certaines des solutions qui ont été trouvés pour le conflit nord-sud pourraient s’appliquer au Darfour.  Et en ce sens, je pense que cela pourrait faciliter les négociations sur la crise du Darfour.


Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, quelle est votre position au sujet des appels en faveur d’un moratoire sur la dette ou l’allègement de la dette des pays sinistrés


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je pense que cette question est une question qui sera discutée un petit peu plus tard.  À ce stade, nous ne nous sommes pas encore concentrés sur cette question.  Mais c’est une question qui est à examiner sur le court et sur le long terme.  Et toutes ces questions seront examinées par conséquent plus tard.


Question (interprétation de l’anglais): Vous avez dit que les gouvernements avaient déjà annoncé des contributions de 500 millions de dollars…


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Non, en fait, 250 millions de dollars viennent de la Banque mondiale.  C’est M. James Wolfensohn qui l’a annoncé.  Il a indiqué qu’elle était prête à fournir d’autres contributions.


Question  (interprétation de l’anglais): Lorsque vous allez faire cet appel le 6 janvier, qui sera de six mois si j’ai bien compris, est-ce que vous pensez que cet appel dépassera le milliard de dollars?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je pense qu’il y a une évaluation en cours.  Je ne sais pas si Jan a des chiffres plus précis.


M. Egeland(interprétation de l’anglais): Non, nous ne savons pas exactement.  Je pense qu’il s’agira d’une centaine de millions.  En revanche, l’appel d’urgence portera sur une assistance humanitaire de six mois.  Et au-delà de cet effort, comme l’a indiqué le Secrétaire général, il faudra commencer à discuter des efforts de reconstruction qui seront considérables.  Les dégâts se chiffrent par des milliards de dollars.  Encore une fois, ce sont les pays eux-mêmes qui devront s’acquitter de la majorité des coûts.


Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, je voudrais vous poser deux questions.  Comment est-ce que vous évaluez la réponse du monde islamique à cette catastrophe?  Ma deuxième question porte sur les derniers chiffres concernant des enfants victimes du séisme.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je n’ai pas les détails de ces chiffres mais Jan a peut-être une réponse précise à vous fournir.


M. Egeland(interprétation de l’anglais): Un tiers des victimes sont des enfants.  Je parle ici des morts, des blessés et également des personnes touchées.  Disons que plus d’un tiers des personnes touchées en général sont des enfants.


Le monde islamique a bien réagi pour venir en aide aux victimes du tsunami.  J’examine la dernière liste des contributions, des annonces de contributions.  Ce sont des pages et des pages de pays dont certains qui contribuent traditionnellement.  Ce sont des pays arabes, des pays d’Amérique latine et des pays d’Europe de l’Est.  Et il y a surtout des pays asiatiques, pays voisins qui aident énormément.  Comme cela a été dit ce matin, l’Inde et la Malaisie ont fourni une contribution supplémentaire qui n’a pas encore été enregistrée sur nos listes.



Question (interprétation de l’anglais): Avez-vous l’intention de cous rendre dans la région?  Réfléchissez-vous à un tel voyage?  Et allez-vous réactualiser la déclaration que vous avez faite lors de votre conférence de presse de fin d’année, au sujet de l’année qui a été particulièrement difficile?  Et pouvez-vous nous dire, lorsque vous regardiez les image –de la catastrophe-, je suppose, alors que vous étiez en vacances, avez-vous pensé revenir plus tôt et simplement que regardiez-vous?  Et au sujet du rôle des Nations Unies.  Après avoir été dénigrée pendant toute l’année, considérant ce qui vient de se passer, malheureusement, à la suite de cette horrible catastrophe, l’Organisation a-t-elle une opportunité?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Lors de la dernière conférence de presse, j’avais parlé de cette année comme ayant été une année particulièrement horrible.  Mais je ne pensais pas qu’une telle catastrophe allait avoir lieu avant la fin de l’année parce que l’année a été assez horrible comme cela.  Mais là, nous assistons à une véritable catastrophe, surtout pour les pays touchés.


Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, j’ai eu des contacts avec tous les dirigeants de la région, j’ai eu des contacts réguliers avec mon équipe ici et cela explique également la raison pour laquelle je suis rentré maintenant.


Je pense que l’Organisation des Nations Unies a un rôle important à jouer et nous allons jouer un rôle de chef de file, en travaillant avec toute la communauté internationale.  Nous devons surtout compter sur la générosité de principaux donateurs.  Et comme je l’ai indiqué tout à l’heure, jusqu’à présent, la réponse a été très bonne.  Et je souhaiterais que cette réaction continue.


Je n’ai pas prévu de voyage immédiat dans la région, mais cela n’est pas exclu.


Question (interprétation de l’anglais): Je voudrais revenir sur la question qui a été posée.  Je suppose qu’un grand nombre de personnes se posent la question suivante: pourquoi est-ce que vous avez attendu trois jours alors que vous étiez en vacances dans le Wyoming pour revenir à New York, et faire face à une crise très grave?  Et deuxièmement, quel signal ce retard de 72 heures envoie aux pays auxquels vous demandez d’avantage d’aide?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Premièrement, nous agissons.  Il n’y avait pas d’inertie.  Nous vivons dans un monde où vous pouvez travailler de n’importe où.  Vous savez dans quel monde nous vivons, vous n’avez pas besoin d’être physiquement ici à New York pour contacter les dirigeants du monde entier.  Vous ne devez pas être physiquement à New York pour contacter les responsables de certaines institutions avec lesquelles nous collaborons.  


Je suis revenu ici parce que nous en sommes arrivés à un niveau où il fallait que j’aie des réunions avec toutes les personnes que j’avais contactées.  Donc nous avons réagi immédiatement et je n’ai pas besoin d’être assis dans mon bureau pour réagir et je pense que c’est la même chose pour vous dans votre profession.



Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, compte tenu de l’ampleur de cette catastrophe, est-ce que l’Organisation des Nations Unies n’aurait pas dû établir une coalition des donateurs et de pays touchés au lieu que ce soient les États-Unis qui le fassent?  Et je voudrais reprendre les deux questions qui ont été posées.  Est-ce que vous, en tant que Secrétaire général, vous ne devriez pas vous rendre dans la région pour fournir un appui moral aux communautés touchées?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Pour ce qui est de la réponse de la communauté internationale, je pense qu’il est important qu’une initiative ait été lancée.  Nous étions nous-même en train de discuter d’une initiative éventuelle mais je me félicite de l’initiative qui a été prise par l’Administration américaine et le Président Bush. Et comme je l’ai indiqué tout à l’heure, nous avons discuté avec d’autres pays qui se joindront au groupe de base qui a été formé et qui complètera les efforts déployés par l’ONU.  Nous sommes donc particulièrement satisfaits de cette initiative.    


Concernant la visite d’une mission dans la région, cela n’est pas exclu, mais je voudrais également rappeler qu’il faut être prudent.  Lorsque vous avez une urgence d’une telle ampleur, il faut en priorité aider les personnes sur le terrain, en leur fournissant des abris, de la nourriture et des médicaments.  Et lorsque nous les encombrons par des visites de personnalités éminentes, nous empêchons les secours d’agir, et nous devenons plus un problème, un obstacle, qu’une véritable assistance.


Donc je pense qu’il faut aller dans la région, mais au bon moment.  Et ceux qui vont dans la région doivent s’assurer qu’ils ne constituent pas un obstacle, parce qu’il y a un travail essentiel qui est en train d’être réalisé, un travail qui exige des efforts considérables, malgré le peu de matériel, vous savez que dans un certain nombre de ces endroits il n’y a plus de logements, et tous les logements essentiels doivent être donnés aux personnes qui en ont le plus besoin.  Donc il faut qu’il y ait une mission dans la région, mais au bon moment.


Question  (interprétation de l’anglais): Je voudrais poser une question au Secrétaire général et peut-être à M. Egeland.


Le bilan continue de s’alourdir et je voudrais savoir quel est le processus qui est en place.  Comment est-ce que les Nations Unies calculent le nombre de morts?


Le Secrétaire général  (interprétation de l’anglais): Certaines informations sont communiquées par les Gouvernements et les autres institutions sur le terrain, mais je suis sûr que certains des Gouvernements ont été eux-mêmes surpris par le bilan, parce que j’ai eu des contacts avec certains dirigeants il y a de cela trois jours et le bilan était différent.  Nous avons maintenant des chiffres qui ont doublé, qui ont même triplé dans certains cas.  Et on continue à constater qu’il y a de plus en plus de morts, et au fur et à mesure que vous avez accès à d’autres zones et à d’autres côtes, le bilan ne fait que s’alourdir.


M. Egeland(interprétation de l’anglais): Les chiffres ne sont encore que des estimations.  On parle maintenant de 115 000 morts, et ce chiffre a déjà été révisé à la hausse aujourd’hui.  L’Indonésie nous a fait savoir que son chiffre officiel est maintenant de 75 000 morts, le Sri Lanka ajoute maintenant 24 000 morts à la liste des 60 000 personnes portées disparues.  L’Indonésie et le Sri Lanka totalisent à eux deux plus de 100 000.


Les Nations Unies essayent de surveiller toutes les informations qui proviennent de la zone.  Nous reconnaissons que nous accusons un certain retard parce que nous dépendons des sources locales et il y a un grand nombre de bateaux de pêcheurs, un grand nombre de villages de pêcheurs pour lesquels nous n’avons pas de chiffres.  Il s’agit de victimes méconnues de cette catastrophe.  En Somalie, il y a des centaines de bateaux de pêche qui ont disparu.  Il y en aura probablement beaucoup d’autres dont on n’entendra jamais parler.  Et à cela il faut parler de la côte d’Aceh, de la côte de Sumatra –et là encore il y a des communautés où encore personne ne s’est encore rendu, et nous espérons que cela sera possible dans quelques heures.


Nous avons besoin de capacités logistiques et ce dont nous avons discuté avec le Groupe c’est de disposer de plus de capacités.  Il est important d’avoir un groupe de base, parce que certains des pays membres de ce Groupe disposent de capacités dans la région.  Nous avons besoin d’hélicoptères, de fret aérien et de contrôle de fret aérien, afin de pouvoir mieux travailler.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je voudrais également dire qu’à la fin de la journée, lorsque les choses se seront calmées un peu, nous aurons analysé les chiffres, il est possible que les chiffres que nous vous donnons maintenant seront modifiés.  Mais nous travaillons sur les estimations que nous avons reçues jusqu’à présent.  Et vous savez, dans la plupart des situations d’urgence, c’est toujours la même chose, le bilan final est toujours différent.


Question: En français s’il vous plaît, Monsieur le Secrétaire général.


Vous insistez sur le long terme, et on se souvient que le 26 décembre 2003 un autre tremblement de terre avait causé à Bam en Iran 40 000 morts et fait près de 100 000 sans-abri.  Et à l’époque les donateurs avaient fait des promesses, mais il y a deux jours, le Président iranien Khatami a indiqué que sur un milliard de dollars, seulement 17 millions ont été effectivement versés.  Dans le cas des tsunamis, que comptez-vous faire pour que les annonces de contributions ne subissent pas le même sort?


Et ensuite, l’Afrique aussi est frappée par la catastrophe –je pense notamment à la Somalie et à une partie de la Tanzanie.  Je sais que des efforts sont déployés dans la région, mais avez-vous l’intention de fournir plus d’assistance aux victimes africaines?


Le Secrétaire général: En effet, tout l’argent qui a été promis pour faire face à la crise en Iran n’a pas été versé.  C’est pourquoi dès le début j’ai expliqué que nous travaillerons pour le long terme parce que l’on a énormément à faire.  J’espère que cette fois-ci, la communauté internationale va accepter cette logique.  Et les efforts que nous sommes en train de faire impliquent les pays africains également.  Ce matin, le représentant de la Somalie est venu en discuter avec nous [inaudible].  Une équipe se trouve sur place en Somalie, donc nous sommes également en train d’aider les pays africains.


Question  (interprétation de l’anglais): Une conférence internationale sur la prévention des catastrophes naturelles aura lieu le mois prochain à Kobe au Japon.  Quelles sont les mesures que vous aimeriez voir prises à Kobe, notamment en ce qui concerne les systèmes d’alerte rapide des tsunamis?



Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Eh bien, ce sera l’occasion pour la communauté internationale d’examiner la question des systèmes d’alerte rapide et bien sûr l’occasion pour expliquer l’absence d’un tel système dans l’océan Indien pour prévenir les tsunamis.  Il faudrait mettre en place un système spécial d’alerte rapide dans l’océan Indien, notamment pour prévenir les tsunamis.  Bien sûr, maintenant c’est une priorité à l’ordre du jour.  Je pense que la catastrophe fera prendre conscience à tous les pays et participants que la prévention est essentielle, et il faut non seulement mettre en place des systèmes d’alerte rapide, mais aussi se doter de mécanismes de prévention et de planification contre ces catastrophes naturelles comme l’ont déjà fait d’autres pays.  Le Japon, par exemple, est aujourd’hui capable de planifier la réaction en cas de catastrophe.  Il faut tirer parti de l’expérience acquise.


À ce stade, je ne prévois pas d’assister à la Conférence de Kobe.


Question  (interprétation de l’anglais): M. Egeland a soulevé la question de l’Objectif du Millénaire qui consisterait à consacrer 0,7% du PNB à l’aide publique au développement.  Est-ce qu’il convient de parler de cela dans le contexte de la situation actuelle?


Par ailleurs, M. Brahimi a publiquement fait un certain nombre de commentaires que votre porte-parole a considérés comme ne reflétant pas votre position sur les questions israélo-palestiniennes vraiment?  Et deuxièmement, est-il maintenant temps de le laisser partir?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je vais commencer par répondre à votre première question.  Ou souhaitez-vous que je commence par la deuxième? Bon, eh bien, je vais commencer par la deuxième question.


Je ne souhaitais pas parler d’autre chose que de cette grande catastrophe. Mais, je dirai que M. Brahimi, qui est un diplomate très expérimenté et qui a bien servi la communauté internationale, a parfois exprimé son point de vue.  J’ai fait une déclaration là-dessus, il y a deux semaines, et je n’ai rien à ajouter à cette déclaration.


La déclaration a été publiée et Fred peut vous en donner un exemplaire.  Et cette déclaration reste ma position.


Pour ce qui est des 0,7%, la plupart des gouvernements établissent une distinction entre l’aide au développement et les secours d’urgence.  L’aide au développement vise à faciliter le développement à long terme et les secours d’urgence visent à faire face aux besoins immédiats.  Donc quand nous parlons de financement du développement, nous parlons des efforts de développement à long terme.  Et je souhaite que les gouvernements réagissent aux situations d’urgence en dégageant des ressources supplémentaires, et non pas en utilisant des ressources qui devraient normalement être consacrées au développement à long terme.


Question (interprétation de l’anglais): Monsieur le Secrétaire général, comment réagissez-vous au fait que certains utilisent les Nations Unies comme un enjeu politique au milieu d’une situation de catastrophe?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Comme vous l’avez entendu ce matin, nous sommes devant une tâche tellement considérable que, pour le moment, c’est la seule chose dont nous nous préoccupons.  Je pense que tant que nous nous concentrons sur cette tâche et que nous collaborons efficacement avec nos partenaires pour coordonner cet effort, je pense, que ceux qui cherchent à nous attaquer, renonceront, pour le moment, à leurs attaques et se joindront à ce travail constructif.


Question (interprétation de l’anglais): Pensez-vous que cette catastrophe affectera la lutte internationale contre le terrorisme et lui retirera la place qu’elle occupe sur la scène internationale?  Compte tenu de l’ampleur des activités terroristes dans les pays comme l’Indonésie, ne craignez-vous pas que l’argent des donateurs, ou une partie n’aille là où il ne faut pas?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je pense qu’il est essentiel, comme je l’ai dit, non seulement de faire preuve de générosité et de coordonner les efforts, mais également de veiller à ce que les fonds parviennent bien à ceux qui en ont besoin et ne tombent pas entre des mains mal intentionnées.  C’est là notre responsabilité et celle des gouvernements qui participent à l’opération.  Je ne pense pas que le fait que nous devons réagir à la catastrophe du tsunami puisse écarter les préoccupations que nous nourrissons à l’égard du terrorisme.  Le terrorisme est une question qui ne disparaîtra pas en raison de l’attention que nous portons au tsunami.


Question  (interprétation de l’anglais): J’aimerai vous poser deux questions.  Je crois que nous voyons cette catastrophe comme une menace à la sécurité humaine.  Pensez-vous qu’une telle catastrophe aurait pu être empêchée ou aurait-il été possible d’en atténuer les conséquences?  L’autre question est la suivante: étant donné que vous mettez aujourd’hui l’accent sur les changements structurels de cet organe international, pensez-vous que cette catastrophe modifiera de manière ou d’une autre cette orientation?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Pour ce qui est de votre première question, nous sommes tous d’accord sur le fait que si un système d’alerte rapide avait été en place, il y aurait eu moyen d’atténuer les effets de la catastrophe mais cependant pas de manière significative en raison de la vitesse et du caractère soudain du raz-de-marée.  Toutefois, on aurait peut-être pu sauver des vies.


Pour ce qui est de l’effet de cette catastrophe sur les propositions de réforme qui sont aujourd’hui à l’étude, j’espère qu’il n’y en aura pas.  Je ne pense pas que ces propositions devraient en être affectées.  Je crois qu’il convient de souligner qu’en tant que communauté internationale, tous les États Membres des Nations Unies doivent œuvrer de concert.  Beaucoup de pays ont enregistré des victimes et les gouvernements réagissent de manière efficace.  La réaction au tsunami, mais également l’aide aux victimes, est internationale.  Cela souligne la nécessité pour nous de coopérer et de travailler ensemble. 


Question (interprétation de l’anglais): Pour en revenir à la question du long terme, est-ce que pour vous, il est clair que les principaux pays donateurs augmenteront leur budget d’aide publique au développement pour, comme l’avez dit, ne pas voler Pierre pour donner à Paul?  Deuxièmement, du point de vue politique, s’agit-il pour les pays développés, d’une chance de démontrer leur engagement à long terme en faveur du monde en développement et de maintenir l’accent sur la reconstruction?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Je souhaite voir les gouvernements répondre à cette crise sans pour autant diminuer les ressources destinées au développement parce que dans de nombreux pays, la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement a déjà pris du retard.  En fait, nous avons constamment dit que, pour réaliser ces objectifs, il faut une somme supplémentaire de 50 milliards de dollars par ans.  Si, au lieu de voir une augmentation du budget du développement, nous voyons une diminution ou une réaffectation des fonds vers d’autres situations d’urgence, ce sera alors une situation très difficile et il sera presque impossible de réaliser les objectifs de développement que les dirigeants du monde ont fixés eux-mêmes il y a cinq ans. 


Quant à l’occasion politique, je crois que c’en est une.  Je dirais que c’est une chance pour le monde développés de travailler avec les pays en développement et non seulement de travailler avec eux mais de travailler ensemble sur le long terme pour leur propre intérêt qui est d’éviter ce type de situations qui plonge des gens productifs dans la misère.  Je pense donc que travailler avec les pays en développement et s’assurer que les gens qui ont tout perdu soient capables de reconstruire leur vie, est dans l’intérêt de tous. 


Question (interprétation de l’anglais): Ce matin, une fonctionnaire de CARE USA a déclaré que personne ne veut admettre qu’il y a des limites à ce qu’on peut faire.  Elle a dit qu’on pourrait être dans une situation où tout ce qui peut être fait ne suffira pas.  Dans quelle mesure vous souscrivez à ces propos?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais): Cela peut être vrai parce que les besoins sont énormes.  Les gouvernements eux-mêmes font tout leur possible.  La région est mobilisée et, bien sûr, la communauté internationale, dans son sens le plus large, se mobilise aussi.  Et, il est concevable qu’on ne puisse pas être capable de répondre à tous les besoins de chaque personne et de chaque village côtier qui a été détruit.  Mais ce que nous ne pourrions pas nous pardonner, c’est de ne pas avoir au moins essayé, de ne pas avoir fait un effort véritable pour aider ces personnes à répondre à leurs besoins.  Je crois que notre humanité commune l’exige et nous devrions tous faire notre possible pour vraiment les aider.  Si nous ne réussissons pas, nous aurons au moins la satisfaction d’avoir tout essayer.


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