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SG/SM/9383-ECO/69

LE PACTE MONDIAL EST DEVENU LA PLUS IMPORTANTE INITIATIVE À PROMOUVOIR LE CIVISME MONDIAL DES ORGANISATIONS, DÉCLARE KOFI ANNAN À L’OUVERTURE DU SOMMET DE L’ONU

24/06/2004
Communiqué de presse
SG/SM/9383
ECO/69


LE PACTE MONDIAL EST DEVENU LA PLUS IMPORTANTE INITIATIVE À PROMOUVOIR LE CIVISME MONDIAL DES ORGANISATIONS, DÉCLARE KOFI ANNAN À L’OUVERTURE DU SOMMET DE L’ONU


Vous trouverez ci-après l’allocution du Secrétaire général, Kofi Annan, à l’ouverture du Sommet des dirigeants du Pacte mondial à New York, le 24 juin:


Je suis très heureux de vous accueillir si nombreux à ce Sommet du Pacte mondial.


C’est le rassemblement de dirigeants d’entreprises, de syndicats et de la société civile le plus important et de plus haut niveau qu’ait jamais accueilli l’Organisation des Nations Unies. Vous avez été en fait beaucoup plus nombreux à vouloir participer à ce Sommet que nous ne l’avions espéré dans nos moments d’enthousiasme le plus débridé. Nous présentons nos excuses à ceux qui n’ont pu trouver place que dans la salle auxiliaire et à ceux qui, et je le regrette, n’ont pu être accueillis faute de place.

Mes chers amis,


Nous faisons ensemble à un voyage historique.


Nous nous retrouvons en tant que parties prenantes au Pacte mondial, devenu désormais, et de loin, la plus importante initiative du monde à promouvoir le civisme mondial des entreprises. De toutes les initiatives comparables, le Pacte mondial est la seule qui soit fondée sur des principes universels ayant reçu l’aval des gouvernements du monde. Et plus qu’aucune autre, il engage les pays en développement, où sont basés la moitié des entreprises participantes et les deux tiers des réseaux nationaux – ainsi que les quatre cinquièmes de l’humanité.


Nous nous réunissons aujourd’hui dans un esprit de coopération et de concertation pour partager nos expériences en ce qui concerne la mise en œuvre du Pacte, mettre à profit les enseignements que nous en avons tirés et explorer de nouvelles idées pour l’avenir du Pacte.


Quelle est notre destination finale?


Nous voulons aller vers un monde uni par des liens communautaires solides au lieu des fragiles transactions commerciales d’aujourd’hui.


Nous voulons aller vers un monde où l’écart entre pays riches et pauvres se rétrécit au lieu de se creuser, où la mondialisation offre ses avantages à tous, et non à quelques-uns.


Nous voulons aller vers un monde où l’activité économique coexiste harmonieusement, en les consolidant, avec les droits de l’homme, des conditions de travail acceptables, un environnement viable et une bonne gouvernance.


Et nous voulons aller vers un monde où le droit prime partout, où la légitimité née de normes communes fait du pouvoir un instrument de perfectionnement pour l’humanité.


Ce voyage nous a donné jusqu’à présent beaucoup de raisons de nous réjouir. Il y a quatre ans, le lancement du Pacte mondial avait réuni ici à l’Organisation des Nations Unies moins de 50 sociétés. À l’heure actuelle, près de 1 500 entreprises de 70 pays y participent. Au nombre des participants, il y a aussi les principales fédérations syndicales, qui représentent plus de 150 millions de travailleurs du monde entier. Avec nous aujourd’hui, il y a aussi 50 dirigeants d’organisations non gouvernementales transnationales, du Nord et du Sud, de même que de hauts responsables d’une vingtaine de pays. Le nombre d’institutions centrales des Nations Unies participant au Pacte, est passé de trois à cinq, et leurs chefs de secrétariat sont eux aussi avec nous.


Je suis très heureux aussi de pouvoir annoncer que sur votre insistance, et à la suite de consultations prolongées avec tous les participants, très largement favorables à cette suggestion, le Pacte mondial comporte désormais un dixième principe, la lutte contre la corruption, traduisant la convention récemment adoptée sur le sujet par les Nations Unies. Votre sentiment, que je partage, était que la corruption corrode si profondément les bonnes pratiques commerciales et la bonne gouvernance, et donc la possibilité pour nous de suivre les neuf autres principes, qu’il fallait absolument ajouter le sujet aux engagements sur lesquels repose notre Pacte.


Mais avec ces quatre années sont venus aussi de nouveaux défis, auxquels nous espérons apporter un commencement de réponse aujourd’hui. Certains relèvent du Pacte lui-même, d’autres du contexte où nous intervenons.


Premièrement, il nous faut intégrer plus étroitement les engagements pris dans le Pacte aux stratégies et aux pratiques commerciales normales. L’excellente étude d’impact réalisée par McKinsey and Company, dont je leur suis profondément reconnaissant, a montré que près de la moitié des entreprises participantes avaient aligné leurs politiques sur les principes du Pacte. C’est une réalisation impressionnante, surtout quand on pense que pour certains d’entre vous, la participation au Pacte est récente. Mais cette proportion montre également qu’il y a encore beaucoup d’améliorations à apporter dans les opérations des entreprises, mais aussi dans les relations avec les fournisseurs et les distributeurs. Les milieux financiers peuvent jouer en la matière un rôle de premier plan, en modulant les stimulants offerts de manière à inciter chacun à faire ce qu’il faut, et j’attends avec le plus grand intérêt les mesures qui seront annoncées tout à l’heure à ce sujet.


Deuxièmement, il faut transposer ce que nous faisons à plus grande échelle partout où c’est souhaitable et possible. Il s’agit avant tout, pour cela, de préciser les liens et les synergies entre les activités relevant du Pacte au niveau mondial et au niveau local, donnant à davantage d’entreprises et de gens la possibilité d’intervenir efficacement au niveau local. C’est là, véritablement, l’objectif stratégique essentiel qui doit être maintenant celui du Pacte. Pour le réaliser, il faudra que les participants mettent en place des partenariats d’un genre nouveau, entre entreprises, et entre entreprises et autres parties prenantes, Organisation des Nations Unies comprise. Vous êtes nombreux à avoir connu des défis analogues dans vos propres institutions; nous espérons profiter de vos idées – et de votre disposition à assumer une ou deux pratiques expérimentales au sein du Pacte.

Troisièmement, l’exploitation de l’immense potentiel du Pacte ne saurait être pleinement viable que s’il a une structure de gouvernance permettant aux dirigeants de tous les secteurs participants d’intervenir activement, et traduisant la complexité et l’ampleur qui caractérisent le Pacte. J’en reparlerai en fin de journée.


Quatrièmement, nous devons constamment tenir compte de la délicate relation ente le Pacte mondial, initiative bénévole, et le domaine de la gouvernance publique. Il y a des circonstances où les initiatives bénévoles peuvent dispenser de toute réglementation, d’autres où elles guident vers des pratiques optimales. Mais s’il n’y a pas de législation ni de réglementation efficaces, et si les institutions publiques sont faibles ou corrompues, le Pacte ne saurait être qu’une solution pragmatique temporaire. Les lacunes et les échecs de la gouvernance sont un des principaux problèmes auxquels l’humanité se heurte à l’heure actuelle. À moyen terme, il faut donc que le Pacte mondial soit un moyen d’améliorer la gouvernance publique, aux échelons national comme mondial, pour être la source des changements heureux que nous espérons tous.


Enfin, mes chers amis, nous nous réunissons aujourd’hui dans un contexte international qui est globalement bien moins favorable qu’il ne l’était en juillet 2000. Les menaces à la globalisation semblent beaucoup plus réelles actuellement qu’elles ne l’étaient alors. Il est désormais incontestable que le terrorisme international est une menace à la paix, à la stabilité et à l’ouverture des frontières. On voit croître la peur des différences, qu’elles soient religieuses, ethniques ou culturelles. Le rôle de l’Organisation des Nations Unies, l’efficacité de sa Charte, et le système de sécurité collective sont bien fragilisés, et ce, à une époque où ils sont plus nécessaires que jamais.


Alors, devons-nous relâcher nos efforts parce que les temps sont troublés? Non. Ce sont précisément les temps où notre responsabilité – diriger l’humanité sur des chemins nouveaux – est d’autant plus marquée. Car si nous ne le faisons pas, sur qui d’autre pourrions-nous compter pour le faire?


Vous, les parties prenantes de cette initiative, avez des points de vue et des intérêts différents. Mais il n’y a guère eu dans l’histoire récente de moment où il aurait été plus crucial pour nous tous de protéger notre espace commun, en mettant à profit ce qui nous unit. Je pose à nouveau la question : si ce n’est pas nous qui le faisons, qui le fera?


En réalité, c’est peut-être le monde des affaires qui joue le plus gros en la matière. La mondialisation, c’est vous qui l’avez guidée. Elle vous a beaucoup apporté. Votre projet d’avenir, vos stratégies, votre organisation en sont la traduction. Et vous pouvez en espérer plus encore à l’avenir. Et pourtant notre fragile ordre mondial est bien menacé aujourd’hui. Pour en assurer l’avenir, ce sont vos ressources et vos capacités, votre force de persuasion et vos qualités de chef qui nous sont indispensables, ce sont les apports uniques par lesquels seule l’entreprise privée peut concourir à la création de biens publics, dans son propre pays et à l’étranger.


Ainsi donc, je vous demande à tous, entreprises, société civile, syndicats et gouvernements, d’œuvrer ensemble et d’œuvrer avec l’Organisation des Nations Unies pour atténuer les risques mondiaux auxquels nous devons tous faire face, et pour réaliser la promesse d’un monde plus juste et plus stable.


Le Pacte mondial ne saurait être qu’une petite partie de la solution. Mais le voyage même le plus long et le plus ardu se fait pas à pas. Prenons donc notre courage à deux mains, et voyons jusqu’où nous pourrons aller, aujourd’hui et au cours des semaines et des mois à venir. J’attends vos idées avec intérêt et compte sur vous pour continuer d’agir.

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