En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/9135-ECO/53

LE PACTE MONDIAL N’ATTEINDRA SES OBJECTIFS QUE SI LES GRANDES SOCIETES SE JOIGNENT A CETTE INITIATIVE, DECLARE KOFI ANNAN A DAVOS

10/02/2004
Communiqué de presse
SG/SM/9135
ECO/53


LE PACTE MONDIAL N’ATTEINDRA SES OBJECTIFS QUE SI LES GRANDES SOCIETES

SE JOIGNENT A CETTE INITIATIVE, DECLARE KOFI ANNAN A DAVOS


(Transmission tardive)


On trouvera ci-dessous le texte des observations formulées par le Secrétaire général, Kofi Annan, au cours d’un petit-déjeuner de travail avec des dirigeants d’entreprise à Davos, Suisse, le 25 janvier :


Je suis enchanté d’être parmi vous. Cette réunion de dirigeants d’entreprise, à Davos, revêt pour moi une signification particulière. C’est ici qu’il y a cinq ans, j’ai proposé pour la première fois un Pacte mondial et appelé les dirigeants d’entreprise à adopter dans leur domaine d’influence les principes universels des droits de l’homme, du droit du travail et de la protection de l’environnement.


Cet appel à l’action reposait sur plusieurs hypothèses :


Si une masse critique de dirigeants d’entreprise adoptent ces principes universels, les marchés mondiaux seront alors plus stables et moins exclusifs, grâce à la mise en place de repères sociaux et environnementaux particulièrement nécessaires.


Si le monde des affaires se montre désireux de collaborer avec les Nations Unies et d’autres partenaires, tels que le monde du travail et la société civile, nous parviendrons alors à trouver des solutions qu’aucun acteur ne saurait concevoir à lui seul; et s’il existe effectivement une volonté d’apprendre et d’engager le dialogue, nous pourrons alors passer de la confrontation à la coopération.


Si nous parvenons à conserver à ces principes leur simplicité et entretenir les aspirations qu’ils expriment, nous pourrons alors, grâce à des pratiques et des projets à caractère bénévole, leur conférer une nouvelle portée et compléter ainsi les cadres réglementaires.


Si le monde des affaires et la société civile se montrent désireux de travailler ensemble, nous pourrons alors mettre les gouvernements au défi d’assumer eux aussi leurs responsabilités.


Cinq ans plus tard, j’ai le plaisir d’annoncer que de nombreux dirigeants d’entreprise ont répondu à mon appel à l’action. Aujourd’hui, plus de 1 200 sociétés de plus de 70 pays participent au Pacte mondial – de même que des dizaines d’organisations du monde du travail et de la société civile.


Plus de la moitié des participants sont originaires du monde en développement et, notamment, de pays tels que l’Inde, le Brésil, la Chine, l’Égypte et l’Afrique du Sud. Plus de 50 réseaux locaux ont été mis en place, permettant ainsi un enracinement local de cette idée, grâce au dialogue, à l’apprentissage et à des projets. Aujourd’hui, le Pacte est véritablement mondial et particulièrement dynamique.


Le modèle de direction du Pacte, vitrine de l’engagement des dirigeants d’entreprise, a connu une évolution heureuse, tant au niveau de chacune des organisations qu’au plan collectif.


Au niveau des organisations, de nombreuses sociétés participantes ont pris des mesures pour intégrer les principes du Pacte dans leur stratégie et leurs opérations commerciales. En outre, nombre d’entre elles ont découvert qu’agir ainsi était commercialement rentable. Elles ont amélioré leur image, attiré et conservé du personnel qualifié et tiré des leçons utiles quant à l’évaluation et la gestion des risques.


De fait, les avantages que présente l’adoption d’un cadre éthique sont tels que j’ai depuis demandé à ma propre organisation de suivre l’exemple des entreprises! Dans des domaines comme la passation de marchés et les ressources humaines, l’ONU applique maintenant elle-même les principes du Pacte. De vous, le secteur privé, nous apprenons comment concrétiser le changement et concilier valeurs et performance.


Sur le plan collectif, le Pacte a offert une plate-forme utile au monde des affaires et du travail et à la société civile pour engager le dialogue, apprendre et collaborer. Il a inspiré des douzaines de projets et d’initiatives qui, tout en facilitant la réalisation des objectifs des Nations Unies, permettent de sauvegarder les investissements des entreprises. Il a également aidé à abattre les obstacles et passer outre les confrontations, car les différents groupes d’acteurs ont appris à s’écouter les uns les autres et agir de concert.


Le Pacte a également aidé à combler le fossé historique qui sépare l’ONU et le monde des affaires en offrant à un grand nombre d’organisations des Nations Unies une voie d’accès à des partenariats avec ce monde. Ce faisant, nous ne nous sommes pas seulement débarrassés des vieilles idéologies. Nous avons également redonné vie à l’Organisation et accru l’impact de nos efforts.


Nous sommes tous, je l’espère, d’accord sur le fait qu’il s’agit là d’un progrès appréciable. Mais plusieurs défis restent à relever.


Premièrement, le Pacte n’atteindra ses objectifs que si les grandes sociétés qui sont restées à l’écart, se joignent à cette initiative. Je sais que nombre d’entre elles craignent une éventuelle clause cachée ou des incertitudes quant à l’évolution future du Pacte.


Ce que j’ai à leur dire, c’est que le Pacte ne comporte pas de dispositions imprimées si petites qu’elles seraient illisibles. Je suis convaincu que ces dernières années nous avons montré que nous étions attachés à la mission fondamentale du Pacte, en tant qu’initiative volontaire accordant la priorité à la découverte de solutions concrètes.


Les lieux où les juristes peuvent discuter de la formulation sont multiples. Mais le Pacte n’en est pas un. Il s’agit d’avancer grâce au dialogue, à l’apprentissage et à des projets. Cette priorité exclusive accordée à l’aspect concret n’est pas toujours facilement comprise par ceux dont la profession est d’interpréter les nuances des mots. Mais je sais que les dirigeants d’entreprise comprennent l’importance de l’action.


Deuxièmement, nous savons que si nous voulons nous attaquer aux problèmes fondamentaux, tels que l’incapacité ou la réticence des dirigeants politiques à offrir un cadre de gouvernance honnête et efficace, il nous faut poser quelques questions délicates :


–     Les performances des entreprises peuvent-elles aider à surmonter les insuffisances des pouvoirs publics?


–     En quoi les performances des entreprises peuvent-elles avoir une influence positive sur la conception des politiques à suivre par les gouvernements?


–     De quelle façon pouvons-nous généraliser les solutions prometteuses et parvenir à un plus grand changement systémique?


–     Comment amener le monde des finances à se joindre à nous et admettre qu’un attachement à une évolution positive peut réduire les risques?


–     Dans quelle mesure devons-nous modifier la mission et le fonctionnement du Pacte afin de rendre notre entreprise plus efficace?


La mission du Pacte – assurer la transparence en conciliant les impératifs économiques et priorités environnementales et sociales – se justifie autant aujourd’hui qu’il y a cinq ans. Nous avons tous intérêt à faire en sorte que les affaires prospèrent dans le monde entier – en particulier dans les pays les plus pauvres où, contrairement à la croyance populaire, le problème ne vient pas des entreprises mais de leur absence.


C’est pourquoi j’ai décidé d’organiser au Siège des Nations Unies une réunion au sommet sur le Pacte le 24 juin de cette année. J’espère que, d’ici-là, vous serez plus nombreux encore à vous être associés à cette initiative. J’espère aussi que nous saurons progresser et passer à l’étape suivante du Pacte.


En tant que dirigeants d’entreprise, vous êtes confrontés aux problèmes de responsabilité sociale depuis des années. Quelle expérience en avez-vous tirée? Qu’est-ce qui fonctionne? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas et pourquoi? Quels nouveaux défis apparaissent, comment les percevez-vous? En quoi souhaiteriez-vous voir le Pacte mondial modifié, afin de tirer profit de ces expériences?


Il ne s’agit là que de quelques questions sur lesquelles j’apprécierais de connaître votre avis. Je me réjouis à l’avance des discussions que nous allons avoir.


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