En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/9121

TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE DU SECRETAIRE GENERAL, KOFI ANNAN, APRES SA REUNION AVEC LES REPRESENTANTS DE L’AUTORITE PROVISOIRE DE LA COALITION ET DU CONSEIL DE GOUVERNEMENT IRAQUIEN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 19 JANVIER 2004

19/01/04
Communiqué de presse
SG/SM/9121


TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE DU SECRETAIRE GENERAL, KOFI ANNAN, APRES SA REUNION AVEC LES REPRESENTANTS DE L’AUTORITE PROVISOIRE DE LA COALITION ET DU CONSEIL DE GOUVERNEMENT IRAQUIEN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 19 JANVIER 2004



Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Bonjour, Mesdames et Messieurs.


Comme vous le savez, je viens de rencontrer les hauts représentants du Conseil intérimaire de gouvernement iraquien et de l’Autorité provisoire de la Coalition.


Je souhaitais savoir comment le Conseil de gouvernement juge l’évolution de la situation en Iraq et ce que le pays attend de l’ONU dans le domaine de l’assistance. Nous avons abordé un large éventail de questions, dont le processus politique de transition, l’aide humanitaire, la sécurité ainsi que la remise en état et la reconstruction de l’Iraq.


J’estime que cette réunion a été pour nous tous l’occasion de mieux comprendre les positions des uns et des autres.


Je pense que c’est ce que nous avons fait. Tout le monde conviendra que la rencontre a donné lieu à un échange de vues franc et véritable, que nous nous efforcerons d’élargir à l’avenir.


En ce qui me concerne, je souhaiterais que l’ONU concentre ses efforts sur les domaines où elle dispose d’un avantage comparatif certain et que l’on s’intéresse surtout aux domaines considérés comme vitaux par les Iraquiens. Des précisions et des négociations supplémentaires sont encore nécessaires pour clarifier la façon dont l’ONU pourrait aider au mieux l’Iraq dans les différents domaines où notre aide a été sollicitée.


De leur côté, les représentants du Conseil de gouvernement et de l’Autorité provisoire de la Coalition ont indiqué qu’ils souhaitaient fermement que l’ONU envoie une mission technique d’évaluation en Iraq le plus rapidement possible. Cette équipe serait chargée de se prononcer sur la faisabilité d’élections dans les mois à venir et de formuler toute autre solution envisageable.


Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que la tenue des élections est fondamentale. En fait, deux élections sont prévues en 2005. Reste à savoir à présent si les conditions requises sont réunies sur le plan politique et en matière de sécurité pour organiser des élections générales dès le mois de mai de cette année.


Nous avons également parlé de l’élaboration et de la finalisation de la Loi fondamentale, de la nomination future d’un Représentant spécial du Secrétaire général ainsi que de l’accord de sécurité à conclure entre le Conseil de gouvernement et l’Autorité provisoire de la Coalition, tel que prévu dans l’accord du 15 novembre.


Il est clair que l’ONU aurait beaucoup à faire en Iraq, mais pour qu’elle puisse travailler, il faut absolument que la sécurité règne sur le terrain. L’Autorité provisoire de la Coalition et le Conseil de gouvernement ont indiqué qu’ils fourniraient toute la sécurité possible au personnel de l’ONU en Iraq.


Je voudrais encore une fois réitérer ici que l’unique objectif de l’ONU est d’aider le peuple iraquien. Nous souhaiterions qu’un consensus très large se dégage sur cette question. Nous souhaiterions que les Iraquiens eux-mêmes

puissent se prononcer et puissent dire ce qu’il faut faire pour que l’Iraq vive en paix avec ses voisins et pour que les Iraquiens puissent se prononcer sur le rôle éventuel de l’ONU.


Je pense que nous sommes tous d’accord sur ce point. L’ONU aura un rôle très important à jouer. Elle devra travailler avec le Conseil intérimaire de gouvernement à partir du mois de juillet. Elle devra travailler sur des questions clefs, des questions constitutionnelles et électorales. Nous avons également convenu qu’un partenariat serait nécessaire. Nous allons par conséquent jouer un rôle actif dans le domaine de la reconstruction, de la remise en état, et dans le domaine également des droits de l’homme et de l’humanitaire.


Pour ce qui est du rôle que pourrait jouer l’ONU entre maintenant et la fin juin, il a été décidé que des discussions techniques devraient encore avoir lieu, discussions techniques qui porteraient sur les questions électorales et sur les questions de sécurité. Et c’est sur la base de ces discussions que je serai mieux à même d’arrêter une décision quant à un rôle éventuel de l’ONU, quant à ce que peut faire l’ONU sur le terrain et quant à l’envoi éventuel d’une mission électorale de l’ONU en Iraq.


Question  (interprétation de l’anglais) : M. le Secrétaire général, il y a eu beaucoup de critiques à la suite de l’invasion de l’Iraq. L’Autorité provisoire de la Coalition et le Conseil de gouvernement vous demandent en quelque sorte de retirer les marrons du feu alors que l’ONU était opposée à cette invasion. Pensez-vous effectivement qu’il est temps que l’ONU retire les marrons du feu pour les Américains ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : J’ai dit et je réitère ici ce que j’ai déjà dit à plusieurs reprises : la stabilité de l’Iraq nous concerne tous. Et je pense que nous allons pouvoir travailler ensemble. Nous avons là l’occasion ensemble d’aller de l’avant et de faire progresser un processus. Et je vais par conséquent essayer de voir si, d’un point de vue opérationnel, nous pouvons favoriser le processus. Je pense que nous sommes tous d’accord sur le fait que les choses seront beaucoup plus faciles après le 1er juillet, après la mise en place de l’Administration provisoire iraquienne. Mais je pense que si nous prenons une décision à ce stade, les choses risquent de devenir difficiles, et nous risquons de nous heurter à un grand nombre d’obstacles lors de la deuxième phase. C’est une question que j’examine de très près. Nous avons des discussions et ces discussions vont continuer.


Question (interprétation de l’anglais) : M. le Secrétaire général, avez-vous discuté des détails ? Des plans ont-ils été mis en place pour choisir le Gouvernement de transition ? L’ONU pourrait-elle faciliter ce processus ? L’ONU dispose de compétences certaines. Pourriez-vous faire en sorte que le résultat soit acceptable pour les Iraquiens ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Oui, nous avons discuté de tout cela, mais nous avons besoin de discussions détaillées, et c’est pourquoi j’ai parlé tout à l’heure de réunions techniques. Nous avons également discuté d’une lettre que m’a adressée M. Al-Hakim et qui portait justement sur une aide électorale de l’ONU. Et si les élections ne peuvent pas avoir lieu, l’ONU pourrait assurer un autre type d’aide. En fait, ce que je veux dire à ce sujet, c’est que tous les partenaires sont ouverts. Nous sommes ouverts à toute éventualité. On peut affiner le plan actuel et on peut progresser en ce sens.


Question (interprétation de l’anglais) : Pourriez-vous dire à l’Ayatollah Sistani la chose suivante : « La situation en matière de sécurité ne permettra pas la tenue d’élections directes dans le pays » ? Pouvez-vous le lui dire à ce stade ? Et pensez-vous que les cartes de rationnement utilisées dans le cadre du programme « pétrole contre nourriture » pourraient servir à inscrire les électeurs, à élaborer la liste électorale ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je ne souhaite pas entrer dans les détails. Ce sont les experts qui se pencheront sur la question, et ensuite, je pourrai porter certains jugements. Lorsque l’équipe technique se sera rendue sur le terrain – si j’accepte d’envoyer une telle équipe à Bagdad – elle pourra discuter de ces questions avec les Iraquiens, et ce n’est qu’à ce moment-là que je pourrai tirer mes conclusions, une fois seulement que j’aurai toutes les informations nécessaires.


Question (interprétation de l’anglais) : Et les élections et les cartes de rationnement ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Cela fait partie des discussions techniques. D’aucuns ont indiqué que c’était là une possibilité, mais la question est de savoir si l’on peut utiliser ces cartes. Nous devons l’examiner au niveau des experts.


Question (interprétation de l’anglais) : Est-ce qu’il y a des communications directes avec l’Ayatollah Sistani ? Avez-vous un envoyé direct auprès de l’Ayatollah Sistani ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je n’ai pas de communications directes avec lui mais mon Représentant spécial Sergio de Mello et son directeur politique, M. Salame, avaient des contacts directs. Personnellement, je n’en ai pas eu. Mais nous avons des contacts avec son entourage.


Question (interprétation de l’anglais) : Que faudra-t-il pour que l’ONU retourne en Iraq ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Nous connaissons tous la situation en matière de sécurité. J’ai dit qu’il faut bien comprendre le processus car cela fait un certain temps que nous ne sommes pas sur le terrain en Iraq. La situation a connu des changements que je dois mieux comprendre par le biais des discussions qui vont avoir lieu afin de pouvoir bien juger de la façon dont l’ONU peut faire avancer le processus. Je pense que les discussions de ce matin ont été très utiles et nous allons les poursuivre pour les approfondir. Nous comprenons que la situation est urgente, qu’elle  exige des mesures urgentes et nous n’allons pas faire traîner le processus.


Question (interprétation de l’anglais) : Avez-vous des détails sur le rôle que jouera M. Brahimi dans ce processus ? Et quant votre équipe devrait-elle achever son travail, vous faire rapport, étant donné que la situation ne laisse pas beaucoup de temps ? Quand pensez-vous pouvoir parvenir à une discussion ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Tout d’abord, je n’ai pas pris de décision quant à M. Brahimi. Deuxièmement, je ne porterai pas de jugement sur la personne qui dirigera mon équipe tant que nous n’aurons pas terminé les discussions dont j’ai parlé. Je suis parfaitement

conscient de l’urgence de la situation et du fait que les discussions doivent avoir lieu rapidement. Certains experts sont déjà sur place et nous allons voir comment nous pouvons faire avancer les choses le plus rapidement possible.


Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, je voudrais simplement avoir une idée claire de ce dont vous avez convenu aujourd’hui. Est-ce que vous avez convenu d’envoyer une équipe pour décider si la situation en matière de sécurité sur le terrain permet l’envoi d’une seconde équipe pour évaluer la situation avant les élections ou bien allez-vous élargir l’équipe de quatre personnes déjà en place pour évaluer la sécurité ? Sans entrer dans les détails, je voudrais savoir ce que vous avez décidé aujourd’hui.


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Les quatre personnes évoquées par The New York Times constituent une équipe de sécurité que nous avons envoyée en Iraq pour établir la liaison sur le terrain et pour permettre des contacts sur les questions de sécurité. Je viens d’obtenir confirmation ce matin qu’une lettre adressée samedi autorise leur déplacement en Iraq. C’est une question dont il a déjà été convenu. Ce que nous avons discuté ce matin est une demande du Conseil de gouvernement et de l’Autorité provisoire de la Coalition d’envoyer une équipe technique pour évaluer sur le terrain s’il est possible d’organiser des élections d’ici le mois de mai et, dans la négative, quelles autres possibilités seraient à envisager ou à suggérer. Partant du principe que la première équipe est déjà sur le terrain, nos discussions ce matin portaient sur l’équipe chargée des élections.


Question (interprétation de l’anglais) : S’agissant du retour de l’ONU en Iraq, vous avez dit qu’outre la sécurité, vous souhaiteriez que l’ONU joue un plus grand rôle. Pourriez-vous nous préciser ce que vous entendez par là ? S’agit-il d’un rôle d’intermédiaire sur les questions électorales ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je crois que, d’une façon générale, tout le monde s’accorde à dire qu’une fois qu’un gouvernement iraquien provisoire sera constitué et en place, l’ONU aura un rôle important pour aider ce gouvernement, s’il le souhaite, tout au long du processus constitutionnel pour l’inscription sur les listes électorales, outre les efforts que nous déployons dans les domaines des droits de l’homme, de reconstruction, de relèvement et des questions humanitaires. Ce dont nous avons essentiellement parlé ce matin est ce que peut faire l’ONU dans l’immédiat pour que le processus aboutisse à la constitution d’un gouvernement provisoire le 30 juin. C’est dans ce contexte que j’envisage l’envoi d’une mission en Iraq afin de donner des avis consultatifs sur le terrain.


Question (interprétation de l’anglais) : L’attentat d’hier à Bagdad sera-t-il pris en compte dans votre analyse de la situation en matière de sécurité ? Je sais que vous étudiez la question. Avez-vous déjà une idée sur la faisabilité des élections ? Cet attentat aura-t-il des conséquences sur la faisabilité des élections ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Bien entendu, nous nous sommes toujours intéressés à la question de la sécurité. Ce qui s’est passé n’est pas rassurant. Mais comme je l’ai dit précédemment, c’est une question que nous avons discutée ce matin et dont nous continuerons de débattre en détail avec l’Autorité provisoire de la Coalition et le Conseil de gouvernement. Nous examinerons donc la question de la protection que ces deux autorités peuvent offrir à l’ONU.


S’agissant des élections, j’ai indiqué que je ne crois pas qu’il reste suffisamment de temps d’ici mai pour tenir des élections mais l’équipe se rendra sur le terrain, examinera la situation de façon plus approfondie et me fera rapport.


Question (interprétation de l’arabe) : Vous venez d’indiquer que le Conseil de gouvernement et l’Autorité provisoire de la Coalition vous ont donné des garanties en matière de sécurité. Pouvons-nous en déduire que vous vous êtes entendus pour faire en sorte que l’ONU retourne en Iraq afin de sauver l’accord du 15 novembre ? Est-il juste de dire que vous pensez qu’il est peu probable que l’ONU retourne en Iraq avant le 30 juin ? Vous avez dit vous-même que vous envisagez un rôle important après le 30 juin. Vous l’avez dit très clairement mais vous avez donné l’impression que vous envisagez un rôle moindre avant cette date. Est-ce que vous accepteriez que l’Autorité provisoire de la coalition ait une responsabilité accrue ?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Vous avez utilisé le terme « garanties ». Je ne pense pas que, dans la situation actuelle en Iraq, personne ne puisse donner des garanties en matière de protection et de sécurité. Ce qu’ils nous ont offert, c’est de faire de leur mieux pour assurer la sécurité. S’agissant de la date de notre retour, cela dépendra beaucoup des conclusions de l’équipe que j’ai envoyée et de ce que nous allons convenir de faire dans l’immédiat. Si je devais envoyer une équipe après les discussions que nous engagerons sur la nature du travail dont nous allons nous charger, cette tâche exigerait peut-être une présence de l’ONU avant le 30 juin et même si nous sommes opérationnels et beaucoup plus actifs après l’entrée en fonctions du gouvernement provisoire, il nous faudrait malgré tout planifier dès maintenant. Nous devons commencer non seulement à planifier mais également à nous assurer que nous pourrons travailler avec le nouveau gouvernement. Il n’est pas possible de s’y atteler après coup. Il faut donc qu’il y ait une présence en amont. Il s’agira d’un déploiement progressif. Je n’envisage pas une présence massive de l’ONU, compte tenu de la situation en matière de sécurité. 


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