LES EXPERTS DU CEDAW ENGAGENT LA LETTONIE À UTILISER LE PROCESSUS D’ADHÉSION À L’UNION EUROPÉENNE COMME UN MOTEUR DE L’ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES
Communiqué de presse FEM/1293 |
Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
657e séance – matin
LES EXPERTS DU CEDAW ENGAGENT LA LETTONIE À UTILISER LE PROCESSUS D’ADHÉSION À L’UNION EUROPÉENNE COMME UN MOTEUR DE L’ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES
Ils l’encouragent à lutter contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes y compris la traite et la prostitution
Tout en reconnaissant la priorité donnée par la Lettonie depuis son indépendance en 1991 à la préparation de son adhésion à l’Union européenne et à l’OTAN, les experts du Comité chargé de suivre l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes (CEDAW) ont souligné que ce processus devait non pas reléguer les questions de promotion des femmes au second plan mais servir de puissant moteur à l’intégration de la Convention à la législation nationale. La discussion qui a suivi la présentation, ce matin, du rapport initial et des deuxième et troisième rapports périodiques par la Présidente de la Commission parlementaire sur les droits de l’homme et les affaires publiques de la Lettonie, Mme Ina Druviete, a ainsi révélé les manquements à la mise en oeuvre des dispositions de cet instrument juridique et du Programme d’action de Beijing dans ce pays en transition, qui a ratifié la Convention en 1992.
Pour la Chef de la délégation lettone, l’affirmation dans la Constitution des principes de l’interdiction de la discrimination et de l’égalité entre les sexes et de l’interdiction de toute discrimination à l’égard des femmes dans la législation relative à des domaines spécifiques des droits de l’homme, garantissent aux femmes lettones la jouissance des mêmes droits dans tous les domaines. Or, comme elle l’a toutefois reconnu, la garantie juridique de l’égalité par les textes de loi en vigueur ne constitue que la base juridique de l’égalité dans tous les domaines de la vie et le défi à relever est l’application concrète et effective de ces dispositions légales. Les experts se sont félicités que la législation lettone n’impose aucune restriction aux femmes dans l’exercice et la jouissance de leurs droits dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou autre. Ils ont toutefois souligné la nécessité d’amender ou d’assortir certaines lois de mesures spéciales temporaires, notamment des mesures sur l’enseignement, le nouveau Code du travail, la loi sur la citoyenneté, les Code de procédure civile et le Code pénal. De telles mesures permettraient d’établir plus rapidement et de manière significative une égalité de fait entre les hommes et les femmes et de prendre en compte la dimension féminine dans les politiques et programmes. Les experts ont ainsi encouragé la Lettonie à faire en sorte pour renforcer la représentation des femmes à la fois dans la magistrature et au sein des administrations nationales et locales, et dans la vie économique et sociale.
Au-delà de la nécessité pour le Gouvernement letton de prendre de manière urgente et sur plusieurs fronts des mesures concrètes et proactives pour favoriser le plein épanouissement des femmes, les experts ont également souligné l’importance de lutter de manière systématique contre les stéréotypes et traditions patriarcales qui sapent l’égalité des chances des femmes dans l’éducation, dans le travail et dans la vie politique. Les experts se sont étonnés de constater que 57,4% de la population au chômage était féminine. Selon les membres du Comité, pour modifier l’opinion publique à l’égard des rôles masculins et féminins, il est primordial de faire connaître les dispositions de la Convention, que ce soit en letton ou dans les langues minoritaires, et d’étudier les causes des actes de discrimination dont sont victimes les femmes. Lutter contre les préjugés sexistes, ont-ils notamment affirmé, permettra de lutter en amont contre la violence familiale et les phénomènes de la traite et de la prostitution, qui prennent une ampleur inquiétante dans les pays baltes. Les experts ont reconnu que, pour que cette lutte soit réellement efficace, il faut garantir la possibilité pour les femmes d’exercer leurs droits en toute confiance et de lutter contre l’impunité et la perception de la violence domestique comme relevant du domaine privé.
Les experts se sont également dits préoccupés par la propagation rapide du VIH/sida et du fait que le nombre d’avortements soit cinq à six fois plus élevé que la moyenne de l’Union européenne et, ce, en dépit d’une légère baisse ces dix dernières années. Ils ont ainsi encouragé l’État à promouvoir la planification familiale, en particulier auprès de la population masculine. S’agissant de l’égalité en matière d’accès à la santé, certains experts ont mis l’accent sur la situation précaire des personnes âgées.
L’existence d’une catégorie de citoyens caractérisés de « citoyens de seconde zone » a été vivement condamnée. En effet, les experts se sont inquiétés de la situation de la minorité russe qui, en dépit du fait qu’elle représente 30% de la population, ne bénéficie pas des droits se rapportant à la citoyenneté lettone. Plusieurs experts ont ainsi invité les autorités lettonnes à revoir la loi sur la citoyenneté, y compris les modalités relatives à la naturalisation, et à prendre en compte les besoins spécifiques des minorités.
La délégation lettone répondra aux experts, lundi 19 juillet à partir de 10 heures.
Le Comité examinera le rapport initial ainsi que les quatre rapports périodiques suivants de la République dominicaine, demain, jeudi 15 juillet à partir de 10 heures.
*CEDAW/C/LVA/1-3
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES
Rapport initial et des deuxième et troisième rapports périodiques combinés de la Lettonie (CEDAW/C/LVA/1-3)
Ces rapports, présentés par la Lettonie sur l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, à laquelle elle est partie depuis 14 mai 1992, présentent des informations sur les mesures d’ordre législatif ainsi que sur les mesures politiques et judiciaires adoptées afin de protéger les droits des femmes et éliminer toutes formes de discrimination perpétrées à leur encontre.
Ils fournissent des renseignements assortis de commentaires sur la mise en oeuvre des articles 2 à 16 de la Convention et des informations sur la situation socioéconomique actuelle des femmes en Lettonie. Ils passent notamment en revue les activités entreprises au niveau gouvernemental pour assurer le plein développement et le progrès des femmes dans les domaines du droit de la famille, du droit du travail, de la protection générale des droits fondamentaux et de la liberté individuelle sur la base de l’égalité des hommes et des femmes, la place des femmes dans la vie économique, politique et publique, dans les structures traditionnelles de l’autorité et la situation en matière d’éducation.
L’État partie explique qu’un groupe de travail spécial a été constitué aux fins d’établir le rapport, comprenant notamment des représentants des Ministères des affaires étrangères, de la justice, de l’intérieur, des affaires sociales et de la culture. Le projet de rapport a bénéficié des observations et des suggestions de l’Institut des droits de l’homme de la Faculté de droit de l’Université de Lettonie, du Bureau national des droits de l’homme, de l’Association lettone pour l’égalité entre les sexes, de l’Association lettone de planning familial et de santé en matière de sexualité « Papardes Zieds », du Centre d’information des femmes « Marta » et de l’Association des syndicats libres.
Depuis le rétablissement de son indépendance, la Lettonie a ratifié de nombreux instruments internationaux des droits de l’homme interdisant toutes formes de discrimination, y compris la discrimination à l’égard des femmes dans les domaines social, économique et politique, indique l’État partie, en précisant que la Constitution (Satversme) dispose que « l’État reconnaît et protège les droits fondamentaux de l’homme consacrés dans la Constitution et dans les lois et traités internationaux ayant force obligatoire en Lettonie ». La Constitution affirme également le principe de l’interdiction de la discrimination et le principe de l’égalité. Par conséquent, fait remarquer l’État partie, les femmes en Lettonie jouissent des mêmes droits dans tous les domaines des droits de l’homme conformément au chapitre de la Constitution consacré aux droits de l’homme. La législation lettone, poursuit-t-il, n’impose aucune restriction aux femmes dans l’exercice et la jouissance de leurs droits dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou tout autre, indépendamment de leur état civil. L’interdiction de toute discrimination à l’égard des femmes est comprise dans d’autres textes de loi à portée normative dans des domaines spécifiques des droits de l’homme, par exemple la loi sur l’enseignement, le nouveau Code du travail, la loi sur la citoyenneté, le Code de procédure civile et le code pénal.
L’État partie indique que les activités des institutions et des organismes publics sont dictées par les textes normatifs qui réglementent leurs opérations et qui sont subordonnés et harmonisés avec la Constitution, de manière à garantir le respect de l’égalité entre les sexes. Les dispositions législatives requises pour éliminer la discrimination pratiquée à l’égard des femmes par une personne, une entreprise ou une organisation, figurent dans les textes de loi pertinents. Les coutumes enracinées dans la communauté, de même que la pratique de l’exercice des droits, omettent de mettre l’accent sur le rôle des femmes à l’égard des possibilités de réalisation de ces droits. L’État partie assure avoir pris les mesures législatives appropriées pour promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes, pour interdire la discrimination fondée sur le sexe et édicté la réglementation appropriée pour le plein épanouissement des femmes.
Il fait observer que l’évolution des comportements sociaux et culturels des hommes et des femmes en Lettonie a été marquée par l’histoire nationale et la culture qui ont elles-mêmes subi les influences des divers régimes politiques qui se sont succédé dans le pays ainsi que des modèles culturels dominants. Les influences les plus importantes à prendre en compte sont la culture traditionnelle des lettons de souche, la tradition chrétienne et le droit canon, les traditions de démocratie et d’autoritarisme durant la période de souveraineté nationale entre la Première et la Deuxième Guerres mondiales, la culture de la période soviétique et le statut des femmes au sein de la collectivité ainsi que la culture politique et communautaire qui se développe depuis le rétablissement de l’indépendance.
Présentation par la délégation de l’État partie
Présentant les rapports, la Présidente de la Commission parlementaire des droits de l’homme et des affaires publiques de la Lettonie, Mme INA DRUVIETE, a déclaré que la Constitution nationale énonçait le principe de l’égalité entre les sexes et de l’interdiction de toute forme de discrimination. Depuis son indépendance en 1991, le pays a établi une législation garantissant le principe de l’égalité des hommes et des femmes, l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe et un cadre juridique pour le développement des femmes. La législation lettone n’impose aucune restriction aux femmes dans l’exercice et la jouissance de leurs droits dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou tout autre, indépendamment de leur état civil, a-t-elle précisé. Parmi les lois les plus récentes prévoyant la prise en compte du principe de l’égalité entre les sexes, on comptait notamment la loi sur la sécurité des conditions de travail et le nouveau Code du travail, de même la loi sur la santé sexuelle et reproductive. Elle a néanmoins indiqué que le Bureau national des droits de l’homme, qui a des compétences similaires à celles d’un Ombudsman, avait fait observer que sur le plan juridique, l’égalité est garantie par les textes de loi en vigueur, mais qu’il ne s’agissait que de la base juridique de l’égalité dans tous les domaines de la vie. L’enjeu, a-t-elle dit, est de veiller à l’application concrète de ces dispositions légales. S’agissant du mécanisme de promotion de la femme, elle a expliqué que le point focal en la matière était le Département du développement des politiques sociales et la Division de l’égalité entre les sexes et de l’intégration publique du Ministère des affaires sociales. Il est chargé de coordonner la mise en oeuvre du Concept de l’application de l’égalité entre les sexes adopté par le Conseil des Ministres, en octobre 2001. L’Association lettone pour l’égalité entre les sexes est une organisation non-gouvernementale active qui s’attache à aider le Gouvernement en matière de promotion des questions de parité, a-t-elle précisé.
S’agissant des stéréotypes et des comportements sociaux et culturels, Mme Druviete a indiqué qu’en dépit des progrès évidents accomplis en matière de promotion de la femme, il restait encore beaucoup à faire pour lever les obstacles à la pleine jouissance des droits des femmes lettones. S’agissant de la participation des femmes à la vie politique et économique, elle a notamment précisé que son Gouvernement avait accordé une attention particulière à l’élimination des discriminations à l’embauche, sur le lieu de travail, en particulier pour les femmes enceintes ou les femmes mariées, et les inégalités de rémunérations. Elle a également précisé que son pays disposait d’un régime de sécurité sociale qui garantit l’égalité de traitement tant en matière d’aide sociale que d’assurance-maladie, de retraite et de chômage. Concernant la santé, Mme Druviete a tout particulièrement insisté sur la propagation du VIH/sida et sur la prévalence croissante de la maladie chez les femmes et les enfants. Elle a également souligné le lien entre la toxicomanie et l’épidémie de VIH/sida.
Abordant la question de la violence domestique, Mme Druviete a indiqué que, bien que les lois prévoient des sanctions pénales en cas de violence physique familiale, le Bureau national des droits de l’homme estime que les institutions chargées de faire respecter la loi en Lettonie accordent une attention insuffisante aux violences physiques commises au sein des familles. Les représentants de l’ordre public ont tendance à ne pas considérer les blessures provoquées par un membre de la famille comme graves ni même modérées. De surcroît, la loi ne définit pas la violence psychologique sur le lieu du travail ou au sein de la famille, et ne dispose d’aucun mécanisme pour prévenir cette forme de violence. Mme Druviete a reconnu que ces facteurs contribuaient à la réticence des femmes à signaler les cas de violence aux institutions chargées du maintien de l’ordre. Dans ce contexte, a-t-elle estimé, ce problème ne pourra être résolu sans l’appui de l’État et sans une aide sociale des municipalités aux victimes de violences. Il faut en outre que la police change son attitude à l’égard de la violence au foyer, qu’elle doit considérer désormais comme un crime et non comme une simple dispute familiale. Afin de résoudre le problème de la violence à l’encontre des femmes au sein de la famille, a-t-elle insisté, le Conseil central de police criminelle de la police d’État collabore déjà depuis de longues années avec le Centre de crise « Skalbes » dont les membres sont des psychologues, des psychiatres et des assistants sociaux qui assistent de façon anonyme les victimes.
Le Centre organise des séminaires pédagogiques et d’information destinés aux officiers de la police d’État sur les réactions des victimes de violence ou en situation de crise ainsi que sur la gestion du stress. Les officiers de police sont de leur côté mieux informés sur la violence au foyer.
Lorsque la Lettonie a retrouvé son indépendance en 1991, a expliqué Mme Druviette, elle s’était engagée à lutter contre l’exploitation sexuelle, en ratifiant la Convention de 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, qui est entrée en vigueur le 13 juillet 1992. Toutefois, a-t-elle concédé, la législation nationale n’est pas encore pleinement conforme aux normes internationales en la matière. Le Gouvernement a donc adopté un programme de prévention contre la traite pour 2004-2008 prévoyant l’amélioration de la législation, des mesures préventives, l’établissement d’un système de réhabilitation des victimes et des campagnes de sensibilisation du public. Elle a également indiqué que malgré l’existence de sanctions pénales contre l’encouragement de la prostitution, la traite et le tourisme sexuel se sont accrus. Elle a indiqué que 10 à 12% des prostituées étaient des mineures. Pour limiter la traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle, diverses mesures ont déjà été prises: la législation a été harmonisée avec les dispositions de l’Union européenne; une force spéciale de police a été créée– la police de la vertu–; la coopération internationale avec les institutions de maintien de l’ordre a été renforcée; des séances d’information sont organisées pour persuader les victimes potentielles de refuser de se livrer à la prostitution; et la collaboration avec les organisations non gouvernementales ne cesse de s’étendre. La brigade spéciale de la police est chargée de la lutte contre la traite et contre le proxénétisme, des enquêtes et de la coordination des enquêtes.
Faisant référence à l’éducation, Mme Druviete a notamment indiqué que le droit des femmes à l’éducation sans discrimination, est garanti par la Constitution. La loi sur l’enseignement dispose également qu’il ne peut y avoir en Lettonie de discrimination fondée sur le sexe dans l’accès à l’enseignement. Chacun jouit de l’égalité des chances en matière d’accès à l’éducation et d’obtention de diplômes, sans distinction de sexe. À cet égard, elle a précisé que pour l’année académique 2002/2003, 61,7% des étudiants suivant un enseignement supérieur étaient des femmes. Elle a également précisé que des initiatives avaient été prises pour éliminer les stéréotypes masculins et féminins dans le programme des cours à tous les niveaux d’enseignement.
Questions des experts et dialogue avec le Comité
Se lançant la première dans une série de questions générales, Mme NAELA GABR, experte de l’Egypte, a demandé à la délégation de la Lettonie de préciser les priorités établies par son Gouvernement pour assurer la mise en œuvre de la Convention. Certaines informations ne sont pas contenues dans les rapports, notamment des statistiques portant sur la parité, a-t-elle ensuite remarqué. Par ailleurs, si la délégation a pu indiquer que peu de plaintes avaient été enregistrées contre des violences subies par les femmes, l’experte a rappelé que cela ne devait pas indiquer forcément l’absence de problèmes, mais plutôt un manque d’informations sur les droits que les femmes peuvent exercer.
Regrettant que la Lettonie ait tant tardé à présenter ses rapports, Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé si des ONG avaient été associées à son élaboration. Le Parlement est-il par ailleurs au courant de l’obligation d’applicabilité de la Convention? Quelles sont ensuite les données disponibles s’agissant de la place des femmes au sein de la magistrature? Enfin, elle a demandé quand la Lettonie envisagerait d’adhérer au Protocole facultatif. Revenant sur le statut des ONG, Mme KRISZTINA MORVAI, experte de la Hongrie, a souhaité savoir combien de ces organisations, notamment de femmes, existent en Lettonie et de quels modes de financement disposent-elles?
Articles 1 à 6 de la Convention
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a voulu savoir si des références aux droits de l’homme étaient intégrées au Code du travail. La Constitution autorise-elle par ailleurs l’application de mesures temporaires spéciales dans le cadre des plans de parité? Reprenant la parole, Mme ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé pour sa part s’il existait des cas où la Convention avait été directement appliquée par les tribunaux. De son côté, Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a posé la question de savoir si une redéfinition de la Constitution était envisagée en vue d’y intégrer une notion explicite de la discrimination. Quels efforts ont été déployés pour assurer un suivi sur l’application des lois qui ont été approuvées? Elle s’est enfin interrogée sur la connaissance réelle qu’ont les citoyens lettons de la Constitution de leur pays.
M. CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a souhaité que lui soient fournies des informations complémentaires sur l’action du Bureau national pour les droits de l’homme et sur la possibilité pour cet organe de porter éventuellement certains cas devant les tribunaux.
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a demandé de préciser l’organe responsable d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques relatives à la parité. Combien de personnes sont employées à cet effet et quel est le budget alloué à ce processus? Quels sont par ailleurs les liens du Gouvernement avec l’Institut des droits de l’homme? A-t-elle ajouté. Poursuivant, Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a déclaré qu’elle avait été frappée par le manque de mécanismes chargés de promouvoir l’égalité entre les sexes et par les problèmes de coordination entre ceux qui existent. Elle a conclu en appelant la délégation à lui faire connaître la date de lancement du Programme pour l’égalité des femmes, auquel il est fait référence dans les rapports.
Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a demandé si le Centre de promotion de l’égalité entre les sexes différait du Centre pour l’égalité. Informée de l’existence d’un réseau d’ONG en Lettonie, elle a demandé ensuite à connaître la nature des relations avec ces dernières et si elles étaient intégrées dans le cadre d’un Conseil.
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a demandé si les citoyens étaient convenablement informés des dispositions de la Convention et si un effort de diffusion avait été fait en ce sens. Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a renchéri, affirmant qu’il fallait exploiter tous les moyens disponibles, notamment dans les médias, pour bien faire comprendre la Convention aux femmes lettones. Elle a enfin incité l’État partie à étudier la recommandation 25, qui préconise l’emploi de mesures temporaires spéciales. Soulignant le manque de participation des femmes à la vie politique, Mme TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a encouragé le recours à de telles mesures.
Pour sa part, Mme PATTEN, experte de Maurice, a demandé si l’absence de lois spécifiques sur la violence domestique dans la législation lettone était le résultat d’une volonté du Gouvernement, car il ressort des rapports que ce type de violence semble plus relever du domaine privé. Elle a souhaité savoir si une loi était envisagée à l’avenir en ce domaine. Par ailleurs, les centres de crise mentionnés dans le rapport fournissent-ils aux femmes, qui s’y présentent, des services d’abri? Quel est enfin le véritable champ d’action du Bureau national des droits de l’homme en matière de protection des droits de la femme?
Dans la mesure où le Bureau national des droits de l’homme recommande d’amender le Code pénal pour mieux lutter contre la discrimination à l’égard des femmes, Mme SJAMSIAH ACHMAD, experte de l’Indonésie, a demandé ce que le Gouvernement avait fait pour modifier la législation en ce sens.
Toujours sur la violence domestique, Mme KRISZTINA Morvai, experte de la Hongrie, a demandé à l’État partie de fournir des chiffres sur le nombre de femmes tuées par leur mari ou partenaire. Elle a souhaité savoir si le système judiciaire prévoyait des mesures pour séparer l’époux violent de la famille et si des centres d’accueil pour les femmes victimes de la violence domestique et leurs enfants avaient été créés. Soulignant que le nombre d’avortement était cinq à six fois plus élevé que la moyenne dans l’Union européenne, elle a demandé de préciser les mesures prises par la Lettonie pour remédier à cette situation, en particulier pour promouvoir la planification familiale, y compris auprès des hommes. S’agissant de la traite des femmes, elle a souligné que la meilleure façon de combattre ce fléau était de mettre en oeuvre des programmes de prévention et de lutter contre la demande dans le domaine de la prostitution. Elle a demandé si l’utilisation d’enfants dans la prostitution était considérée comme une infraction.
Intervenant sur la question des stéréotypes et traditions patriarcales, Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh, a suggéré que le Gouvernement prenne des mesures urgentes et immédiates sur plusieurs fronts pour faire changer les comportements. Elle a notamment insisté sur la nécessité d’agir dans le cadre du système éducatif qui, selon elle, favorise la ségrégation fondée sur le sexe entre les hommes et les femmes, de lancer une campagne d’information du public et d’adopter des mesures spéciales. Elle a par ailleurs demandé s’il existait une agence de vérification de la publicité chargée de censurer les annonces publicitaires dégradantes pour les femmes. Elle a aussi demandé si la Convention avait été traduite en Lettonie et dans les langues minoritaires. Faisant référence au mécanisme national de promotion de l’égalité entre les sexes, elle a demandé des clarifications sur les domaines de compétences des différentes instances et sur la méthode de coordination et de suivi utilisée. En outre, elle a souhaité des précisions sur la phase actuelle du processus d’incorporation de la Convention dans la législation nationale.
A son tour, Mme DORCAS AMA FREMA Coker-Appiah, experte du Ghana, a souhaité connaître les mesures en vigueur pour sensibiliser le personnel chargé de l’application des lois et le public à la violence domestique et pour lutter contre les stéréotypes sexuels issus de la tradition patriarcale, identifiés comme une des causes de la violence à l’égard des femmes. Reprenant la parole, Mme Ferrer Gómez, experte de Cuba, a souligné que le Gouvernement devait travailler de manière systématique à l’élimination des stéréotypes, notamment chez les médecins, avocats, personnel social et autres. Elle a demandé ce que faisait le Gouvernement pour mieux diffuser la Convention et informer les citoyennes de leurs droits et moyens de recours. Pour combattre la violence, la formation du personnel d’application des lois et de soutien social est essentielle, a-t-elle souligné. Revenant sur la question de la prostitution, Mme Tavares da Silva, experte du Portugal, a demandé s’il existait des services de réhabilitation pour les jeunes filles qui en sont victimes. Mme Schöpp-Schilling, experte de l’Allemagne, a quant à elle demandé si une étude avait été menée sur les causes de la traite et a souligné la nécessité de s’attaquer aux causes de ce phénomène.
Articles 7 à 9 de la Convention
Mme FRANÇOISE Gaspard, experte de la France, a demandé des précisions sur la composition de la législature actuelle. Elle a souhaité disposer de statistiques sur la place des femmes dans les administrations locales. S’agissant de la forte présence des femmes dans les conseils municipaux, elle a demandé si cela avait permis l’intégration d’une perspective sexospécifique dans les politiques locales, notamment en matière de violence. Elle a également souhaité avoir des précisions sur la représentation des femmes lettones élues au Parlement européen.
Poursuivant sur la question de la représentation des femmes lettones dans la vie politique, Mme Belmihoub-Zerdani, experte de l’Algérie, a demandé des précisions sur la composition du Parlement et sur l’âge minimum du droit de vote et d’éligibilité. Elle a regretté la présence limitée de femmes dans l’exécutif. S’agissant du Parlement, elle a suggéré de reprendre sous une autre forme la proposition parlementaire qui avait été rejetée selon laquelle les listes électorales au Parlement ne pourraient pas compter plus de 75% de candidats et pas moins de 25% de candidates. Mme Coker-Appiah, experte du Ghana, a voulu pour sa part des précisions sur la loi sur la citoyenneté.
M. FLinterman, expert des Pays-Bas, a déploré le fait que les membres de la minorité russophone ne soient pas considérés comme des citoyens lettons alors qu’ils représentent 30% de la population totale. Cette situation crée, a-t-il estimé, une grande catégorie de citoyens à part. Il a demandé de préciser le statut des femmes russophones ainsi que le processus de naturalisation.
Articles 10 à 14 de la Convention
Mme ROSARIO Manalo, experte des Philippines, a souhaité savoir si l’État partie avait déterminé les causes du niveau inégal d’éducation entre les femmes et les hommes. À ce titre, elle a regretté la sous-représentation des femmes dans le corps enseignant, en particulier au niveau universitaire. Elle a souhaité connaître la méthode utilisée par le Gouvernement letton pour éliminer les stéréotypes dans l’ensemble du système éducatif et sur la manière dont est garantie l’absence de discrimination dans l’enseignement. Mme Achmad, experte de l’Indonésie, a souhaité disposer de statistiques en fonction de l’âge, du sexe et du groupe ethnique pour tous les niveaux d’enseignement. Elle a par ailleurs demandé des informations sur les causes expliquant le taux élevé de chômage chez les femmes, qui s’élève à 57,4%. À cet égard, Mme Gaspard, experte de la France, a souligné la nécessité de préparer des statistiques ventilées par sexe, en particulier pour l’enseignement supérieur.
Rappelant le taux de chômage des femmes, qui atteint 57,4% en Lettonie, Mme KHAN, experte du Bangladesh, a demandé des informations plus précises sur l’emploi de ces femmes et du degré d’implication des syndicats dans le secteur public. S’agissant des différences des salaires, elle a rappelé que celles-ci étaient curieusement moins importantes en zones rurales (13%) qu’en zones urbaines (22%) et a souhaité savoir quelles mesures avaient été prises pour les réduire. Enfin, elle s’est aussi interrogée sur les conditions d’emploi des femmes issues de la minorité russe et des minorités en général.
À son tour Mme FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a demandé plus de précisions sur le partage établi par le Code du travail entre les activités professionnelles exclusivement réservées aux hommes et celles réservées aux femmes, qui pourrait être, selon elle, utilisé comme une échappatoire à la lutte contre la discrimination. Poursuivant sur le sujet de l’emploi, Mme HUGUETTE BOKPE GNACADJA, experte du Bénin, a rappelé la possible discrimination qui peut survenir du refus par les employeurs d’embaucher des femmes considérées comme trop jeunes en raison des risques de grossesse. Quel est par ailleurs le mécanisme de suivi mis en place au quotidien en matière de respect de l’égalité des sexes devant les opportunités professionnelles? Mme PATTEN, experte de Maurice, a demandé ensuite si des inspecteurs du travail avaient pour tâche de vérifier le respect du Code du travail et si les tribunaux étaient compétents pour connaître de ces questions. Elle a également demandé des informations complémentaires sur les mesures concrètes prises par le Gouvernement pour surmonter la ségrégation entre hommes et femmes sur le marché du travail.
Mme SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a recommandé à l’État partie de tenir compte des succès pour l’amélioration de la situation des femmes en milieu professionnel dans les pays scandinaves et aux États-Unis. Elle s’est par ailleurs intéressée à la manière dont le montant des indemnités en cas de licenciement est établi par le tribunal compétent.
Soulignant la plus grande vulnérabilité des femmes devant la pauvreté, Mme GABR, experte de l’Égypte, a demandé des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement pour les assister.
Mme COKER-APPIAH, experte du Ghana, a demandé s’il existait une politique nationale en matière de lutte contre le VIH/sida et si la gratuité du traitement antirétroviral était assurée pour les patients. Dans le cas contraire, est-il prévu de mettre en place un tel programme? Mme BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, s’est quant à elle interrogée sur la gratuité des préservatifs. Elle a également voulu savoir si les autorités lettones informaient les citoyennes des méthodes de contraception dans le cadre des programmes de planification. Enfin, Mme SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a demandé pourquoi la gratuité des soins de santé n’était pas assurée pour les femmes âgées.
Articles 15 à 16 de la Convention
Mme MANALO, experte des Philippines, a souhaité en savoir plus sur les cas de dérogation exceptionnels mentionnés par le rapport concernant l’âge légal minimum du mariage pour les femmes. Pour sa part, Mme ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a souhaité obtenir des précisions sur les différences d’éducation entre hommes et femmes dans les zones rurales. Notant qu’il existe une divergence entre les rapports de l’État partie et ceux des ONG concernant les critères requis pour reconnaissance de la paternité, l’experte a souhaité des éclaircissements.
Composition de la délégation de l’État partie
Conduite par Mme Ina DUVRIETE, Présidente de la Commission parlementaire sur les droits de l’homme et les affaires publiques de Lettonie, la délégation était également composée de M. Maris BADOSVKIS, Directeur du Département des affaires européennes et juridiques au Ministère des Affaires sociales; de Mme Sandra FALKA, spécialiste au Centre pour l’évaluation et l’élaboration des programmes du Ministère de l’éducation et de la science; de M. Gints JEGERMANIS, Représentant permanent de la République de Lettonie auprès des Nations Unies, et de Mme Aiga LIEPINA, Représentante permanente de la République de Lettonie auprès des Nations Unies. Étaient aussi présents trois autres membres du Gouvernement letton.
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