L’ESPAGNE ENCOURAGÉE À ÉTENDRE À L’ENSEMBLE DE SA SOCIÉTÉ LES PROGRÈS ACCOMPLIS EN MATIÈRE DE PARITÉ AU SEIN DE SON NOUVEAU GOUVERNEMENT
Communiqué de presse FEM/1288 |
Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
649e et 650e séances – matin & après-midi
L’ESPAGNE ENCOURAGÉE À ÉTENDRE À L’ENSEMBLE DE SA SOCIÉTÉ LES PROGRÈS ACCOMPLIS EN MATIÈRE DE PARITÉ AU SEIN DE SON NOUVEAU GOUVERNEMENT
Les experts du CEDAW appellent l’État partie à renforcer
sesmesures pour réprimer toutes les formes de violence à l’égard des femmes
Alors qu'elle vient de changer de gouvernement, l'Espagne a présenté ce matin son cinquième rapport périodique devant les 23 experts du Comité chargé du suivi de l’application des dispositions de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW). Rappelant la parité parfaite de la formation gouvernementale actuelle, qui comprend huit ministres hommes et huit ministres femmes, Mme Soledad Murillo-de-la-Vega, Secrétaire générale des politiques d’égalité du Ministère du travail et des affaires sociales de l’Espagne et chef de la délégation, a assuré le Comité que son Gouvernement avait l’intention de réaliser un équilibre comparable dans différents domaines de la société espagnole.
Parmi les mesures en cours visant à éliminer la discrimination à l’égard des femmes, la délégation espagnole a insisté sur l’adoption de plans d’égalité et, en particulier d'une « action positive » dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et de la santé. L'Espagne est fermement engagée à lutter contre la persistance de stéréotypes stigmatisants pour la femme dans tous les secteurs de la société, a-t-elle ajouté. Au nombre des graves problèmes qui continuent de se poser pour les femmes figure la banalisation de la violence. Sur ce dernier point, la délégation, consciente de la nécessité de réglementer l’espace privé, a indiqué que cet aspect avait été intégré à la première loi générale sur la violence à l’égard des femmes, qui prévoit un système de protection, de tutelle et des mesures d’éducation transversales.
Plusieurs membres du Comité ont toutefois exprimés leur inquiétude quant à la portée de cette nouvelle loi, qui ne couvre que les violences commises en milieu familial ou dans le contexte des relations affectives. La Présidente du Comité et experte de la Turquie, Mme Ayse Feride Acar, a déclaré qu’il serait sans doute bien plus efficace de l’étendre à toutes les formes de violences perpétrées à l’encontre des femmes, qu’elles soient commises dans un cadre privé ou public.
Le Comité a noté que la compétence en matière d’égalisation des chances avait été transférée aux communautés autonomes et exprimé sa crainte de voir ce transfert aboutir à la non-jouissance par les femmes de la plénitude de leurs droits, si le Gouvernement ne mettait pas en place des mécanismes de surveillance efficaces. Les experts ont en outre regretté que la parité de l’actuel gouvernement ne se reflète pas dans la diplomatie et la magistrature, où la représentation des femmes reste faible.
Une attention toute particulière a enfin été portée sur des catégories spécifiques de femmes qui ne bénéficient pas, selon les experts, de mesures adaptées, comme les femmes âgées, les femmes vivant en milieu rural, les femmes détenues, les immigrantes et les prostituées. Le Comité a souligné que les difficultés auxquelles étaient exposées les femmes en général s’en trouvaient encore aggravées dans ces cas particuliers et que l’information les concernant était parfois lacunaire. S’agissant des immigrantes, la délégation espagnole a rappelé qu’en vertu du Pacte des droits économiques culturels, le Gouvernement espagnol ne pouvait collecter des données fondées sur la race et l’appartenance aux minorités ethniques. Quant à la prostitution, si elle est assimilée à un délit par le Code pénal espagnol, certaines Communautés autonomes, comme la Catalogne, ont adopté une position différente en faveur de sa légalisation, qui contreviennent aux dispositions de la Convention visant à réprimer le trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution. La délégation espagnole a indiqué que le Gouvernement s’est engagé à tenir prochainement des consultations sur cette question avec les organisations de la société civile.
Le Comité examinera demain, jeudi 8 juillet à partir de 10 heures les deuxième et troisième rapports combinés et quatrième et cinquième rapports combinés de la Guinée équatoriale.
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES
Cinquième rapport périodique de l'Espagne (CEDAW/C/ESP/5 et CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.1/Add.4, CEDAW/PSWG/2004/II/CRP.2/Add.3)
Le rapport indique que dans le cadre de sa décentralisation administrative, le Gouvernement espagnol a transféré la compétence en matière d'égalisation des chances aux communautés autonomes. La coordination avec les communautés autonomes est organisée dans le cadre de la Conférence sectorielle des femmes, un organe de consultation et de délibération ayant pour objectif premier d'assurer une certaine cohérence dans la définition et l'application des politiques de promotion de l'égalité définies par l'État et les communautés.
Approuvé en Conseil des Ministres au mois de mars 2003, le quatrième Plan pour l'égalité des chances des hommes et des femmes (2003-2006) a pour objectif premier la prise en compte des questions d'égalité des chances dans toutes les politiques et initiatives. Par ailleurs, le Gouvernement espagnol a procédé à l'adoption du « Plan de Empleo 2003 », un programme d'action créé en vue de favoriser la réinsertion des chômeurs et des chômeuses, et du « Plan Nacional de Acción para la Inclusión Social », actuellement en cours d'exécution.
Des mesures d'action positive sont également développées dans le cadre des plans pour l'égalité des chances et autres plans spécifiques, notamment ceux définis par l'Institut de la femme, chargé d'intégrer une perspective sexospécifique afin de parvenir à une véritable égalité de faits.
Face au grave problème de la violence familiale, des plans de lutte ont été approuvés et mis en œuvre sous la coordination de l'Institut de la femme. L'élaboration du Protocole sanitaire en cas de mauvais traitement au sein de la famille a constitué une initiative importante. Son objectif est de fixer la procédure que doit suivre le personnel sanitaire face à une personne maltraitée. Le rapport mentionne en outre l'adoption et la mise en œuvre du deuxième Plan contre la violence familiale (2001-2004) et du deuxième Plan complet de lutte contre la violence familiale (2001-2004). Plusieurs projets d'amendement du Code pénal ont été introduits au titre de ce dernier en vue de renforcer la répression des actes de violence commis à l'encontre des femmes.
La participation des femmes à la vie politique s'améliore progressivement mais le fossé qualitatif et quantitatif entre les deux sexes reste évident, et il est tout particulièrement frappant pour les postes à responsabilité dans le domaine des relations internationales. Au vu des difficultés rencontrées dans ce domaine, le troisième plan pour l'égalité des chances prévoyait des mesures pour améliorer la participation des Espagnoles aux organismes internationaux. Un ensemble de mesures a par ailleurs été adopté en vue de modifier la manière stéréotypée dont les femmes sont représentées dans les médias, dans la publicité et dans la société tout entière. Des outils de diffusion ainsi que des guides de bonnes pratiques et des cours de formation aux enseignants ont été élaborés et permettent de dispenser un enseignement non sexiste.
En ce qui concerne les politiques sanitaires visant spécifiquement les femmes, le rapport indique entre autres mesures l’adoption, en 1998, du Plan Integral de Atención a la Mujer par l’Instituto Nacional de Salud (INSALUD), qui a pour but de regrouper, de quantifier et de hiérarchiser les initiatives de santé en faveur des femmes et de promouvoir l’adoption de mesures concrètes afin d’élargir leur couverture sanitaire.
Le rapport rappelle enfin qu'en Espagne, la notion de minorités ethniques renvoie essentiellement à la population des Gitans. Depuis 1998, l'Institut de la femme collabore avec la Fundación Secretariado General Gitano dans le cadre d’activités qui encouragent la participation sociale et l’insertion professionnelle des Gitanes. Dans le cadre de cet accord, des réunions sur la participation sociale et l’insertion professionnelle des Gitanes ont été organisées à l’intention des hommes et des femmes impliqués dans les mouvements associatifs et participant aux initiatives sociales de promotion de la femme gitane, ainsi que des professionnels des institutions publiques ou privées qui mènent des activités dans ce domaine.
Présentation par la délégation de l’État partie
Mme SOLEDAD MURILLO-DE-LA-VEGA, Secrétaire générale des politiques d’égalité du Ministère du travail et des affaires sociales de l’Espagne, a rappelé que l’adoption des plans d’égalité a pour objectif de réviser tout préjugé à l’égard des femmes dans le pays. L’action positive constitue à cet égard une des mesures fondamentales du Gouvernement espagnol, parce qu’il s’engage fermement à éliminer toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Pratique courante dans les pays développés, les mesures positives, compensatoires et rectificatives, prennent en compte les obstacles particuliers. Elles peuvent être provisoires ou temporaires et prendre fin lorsque l’injustice est corrigée. Ces actions sont aujourd’hui encouragées dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et de la santé.
S’agissant des rôles et des stéréotypes, le Gouvernement espagnol a souligné les mesures établies par le troisième plan pour l’éducation, qui vise à combattre les stéréotypes en refusant de limiter l’apparition de la femme dans les medias ou un cadre privé. Il s’agit de faire disparaître les signes qui détériorent son image en lançant des campagnes en faveur de la lutte contre la violence. Les campagnes publicitaires menées par le Gouvernement ont ainsi tenté de rappeler que la démocratie passe aussi par le respect des droits de l’homme. L’Institut de la femme a mené des études auprès des populations, dont le plan national d’enquête scientifique, qui permet de mieux de comprendre l’ancrage des stéréotypes et de les combattre.
Avec la politique en matière d’égalité des chances, le Gouvernement espagnol s’est engagé à prendre en considération toutes les questions ayant trait à la défense et à la promotion de l’égalité des chances. Mme Murillo-de-la-Vega a par ailleurs indiqué l’adoption prochaine du Plan de lutte contre la discrimination à l’égard des femmes, qui associera tous les organes politiques et sera caractérisé par un échange constructif entre les pouvoirs exécutif et législatif. Rappelant la parité parfaite de l’actuelle formation gouvernementale, qui comprend huit ministres hommes et huit ministres femmes, elle a fait part de l’intention de son Gouvernement de parvenir à un équilibre comparable lors des élections à venir. Ces futurs élus devront d’ailleurs recevoir une formation solide et ne pas se contenter de siéger dans des organes de décision.
Dans le domaine du travail, le manque de disponibilité reste un problème spécifiquement féminin, a fait observer la délégation qui a cependant demandé s’il s’agissait d’un problème imputable aux femmes ou plutôt à la division existante des tâches. Elle a fait part à cet égard du futur « plan de dépendance » et aussi de la création d’un nombre de places supplémentaires dans les crèches afin de mieux répartir les responsabilités entre hommes et femmes.
Par ailleurs, le Gouvernement projette de créer des services sociaux de qualité pour les personnes dépendantes et en particulier les femmes, qu’il s’agisse de personnes âgées -en Espagne, deux personnes dépendantes sur trois ont plus de 60 ans- ou de femmes issues de minorités ou de l’immigration. En Espagne, la moitié des immigrants sont des femmes. Convaincue qu’il faut évaluer les avantages de la diversité culturelle, Mme Murillo-de-la-Vega a déclaré qu’il est également important de tenir compte des autres catégories de femmes exposées à la discrimination, comme les aides soignantes ou les personnes handicapées. Un autre problème majeur soulevé par la délégation concerne la traite organisée des femmes et des mineurs, qui suppose une stratégie réelle d’intervention. Ainsi, la lutte contre la prostitution exige que les organes de la société civile engagent un dialogue avec le Gouvernement.
Faisant remarquer que la plupart des femmes battues entretiennent une relation affective avec leur agresseur, la délégation a indiqué que cet aspect avait été intégré à la première loi générale sur la violence à l’égard des femmes, qui associe sept ministères, et met en place un système de protection, de tutelle et des mesures d’éducation transversale pour mieux sensibiliser à l’égalité de traitement. Il est ainsi nécessaire, a conclu Mme Murillo-de-la-Vega, de réglementer l’espace privé. Les lois sur le temps de travail y participent de façon indirecte de même que celles sur la répartition des tâches. Mais il faudrait aller plus loin en réprimant les relations de pouvoir associées aux mauvais traitements. À cet égard, le Gouvernement procède à l’élaboration d’un projet de loi qui devrait être adopté par le Parlement en 2005.
Questions des experts et dialogue avec le Comité
Articles 1 à 6 de la Convention
Mme FRANÇOISE GASPARD, experte de la France, a demandé quels étaient les moyens mis en œuvre, tant au plan national qu’au plan des communautés autonomes, pour faire connaître la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Elle a également demandé si la Convention était diffusée dans les universités et dans la fonction publique. Elle a aussi souhaité savoir si le rapport périodique avait été soumis, au moins pour avis, au Parlement national. L’experte a en outre voulu connaître les intentions du Gouvernement pour informer le grand public sur les conclusions du Comité; et pour encourager la participation des femmes aux conseils municipaux.
A son tour, Mme MARIA REGINA DA SILVA, experte du Portugal, a demandé si la Secrétaire générale pour les questions de l’égalité était exclusivement chargée de lutter contre toutes les discriminations à l’égard des femmes ou si elle était chargée de toutes les formes de discrimination. Elle a souhaité savoir pourquoi il n’y avait pas eu de plan pour l’égalité des chances pendant trois ans entre les troisième (1997-2000) et quatrième (2003-2006) Plans d’action. S’agissant des stéréotypes, elle a demandé des précisions sur les mesures prises pour éliminer ceux qui nourrissent l’inégalité entre les sexes, ainsi que sur les mesures visant à faire avancer les choses en matière de conciliation de la vie familiale et du travail. A cet égard, elle a souhaité que la délégation espagnole précise si la loi de 1999 en la matière répondait à une situation propre aux femmes ou à l’organisation plus globale de la société.
M. GÖRAN MELANDER, expert de la Suède, a demandé aux membres de la délégation espagnole de mentionner, le cas échéant, les affaires ou les jugements dans lesquels des tribunaux ont expressément fait référence à la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Il a également souhaité savoir dans quelle mesure les femmes victimes de la traite, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, pouvaient se voir reconnaître le statut de réfugiés, en particulier dans les cas où elles courent des risques en retournant dans leur pays d’origine.
Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, s’est félicitée de la prise de conscience par le Gouvernement de la nécessité d’agir pour lutter activement contre la violence infligée aux femmes et de la réduction de la distinction entre domaine public et domaine privé en la matière. Elle a cependant suggéré au Gouvernement espagnol de reprendre la définition de la violence pour y inclure les domaines privé et public et donner ainsi davantage d’effets à la nouvelle loi globale contre la violence à l’encontre des femmes.
Intervenant à son tour, Mme HANNA BEATE SCHÖPPE-SCHILLING, experte de l’Allemagne, s’est dite surprise par l’attitude du Gouvernement précédent, qui avait répondu aux questions du Groupe de travail pré-session, concernant l’acceptation de l’amendement du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention relatif à la durée des sessions du Comité, qui vise à concrétiser ce qui est déjà la pratique du Comité. Elle a par ailleurs demandé qui était responsable de l’intégration de la perspective sexospécifique au sein du Gouvernement. Elle s’est dite cependant satisfaite par les mesures positives prises à cet égard dans le cadre de la loi électorale mais a mis en garde contre la tentation de confondre les mesures temporaires positives visant à encourager l’égalité entre les sexes et l’égalité effective. Elle a aussi souhaité obtenir des précisions sur les mesures positives prises dans le domaine de l’emploi.
Mme KRISZTINA MORVAI, experte de la Hongrie, s’est félicitée que la composition du nouveau Gouvernement espagnol soit respectueuse de la parité entre les sexes. Elle a toutefois demandé des précisions sur la façon dont est supervisé le Plan pour l’égalité entre les sexes ainsi que sur l’implication et la contribution des ONG dans l’élaboration des politiques et du rapport périodique. Elle s’est réjouie de la sélection opérée par l’Ombudsman pour ce qui est de déterminer les cas de discrimination à l’égard des femmes, tout en regrettant que ne soit pas mentionnée la situation des femmes détenues. Elle a en outre demandé des précisions sur les dispositions législatives prévues pour lutter contre les discriminations à l’égard des femmes en matière de versement de la pension alimentaire pour les enfants en cas de divorce. S’agissant du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, que l’Espagne a ratifié en 1991, Mme Morvai a souhaité savoir si une formation était prévue pour les avocats pour en faciliter la mise en œuvre. S’agissant de l’article 6 de la Convention relatif à la prostitution, elle a demandé à la délégation espagnole de faire le point sur la politique du Gouvernement en la matière et de préciser si cette politique allait dans le sens des prescriptions de la Convention qui vise à réprimer, sous toutes ses formes, le trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution, en luttant tout particulièrement contre la demande. Elle a demandé à la délégation de confirmer que l’intention du Gouvernement n’était pas de légaliser la prostitution.
M. CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a demandé à la délégation de préciser les instruments dont dispose le Gouvernement central pour encourager les gouvernements des communautés autonomes à appliquer la Convention et, pour assurer le respect de la Convention au cas où un Gouvernement autonome adopterait une loi non conforme.
Mme DUBRAVKA SIMONIC, experte de la Croatie, a demandé à la délégation espagnole de préparer davantage de données statistiques classées par groupe ethnique et par sexe afin d’étudier la situation des femmes des groupes minoritaires, et notamment les femmes Roms. Elle a également souhaité savoir si la Convention faisait partie du système juridique national et si la Convention prévalait sur le droit national. Reconnaissant que la Constitution consacre l’égalité, elle a indiqué qu’il conviendrait cependant qu’une mention expresse du principe de l’égalité entre les hommes et les femmes soit ajoutée dans la Constitution ou un autre texte législatif.
Mme FUMIKO SAIGA, experte du Japon, s’est interrogé sur le montant de l’engagement financier contracté par le Gouvernement espagnol pour atteindre l’objectif de l’égalité entre les sexes et pour répondre aux besoins spécifiques des femmes. Elle a par ailleurs fait observer que s’il n’était pas prévu d’inclure dans la loi générale sur la violence à l’égard des femmes d’autres formes de violence telles que le viol ou le harcèlement. Si la loi ne couvre que la violence infligée aux femmes dans le cadre familial ou de leurs relations intimes, il conviendrait de préciser le titre pour l’harmoniser avec le contenu de la loi. Elle a également souhaité des précisions sur le processus de consultation des ONG; les mesures prises pour améliorer la condition des femmes des groupes vulnérables, en particulier les femmes migrantes et issues des minorités; et les mesures prises pour encourager l’indépendance économique des femmes divorcées.
Répondant aux questions portant sur la formation des policiers, la délégation espagnole a indiqué qu’une formation spécifique a été établie pour les tenir au courant des dispositions de la Convention. Le Ministère de l’intérieur s’occupe par ailleurs de la formation des policiers et de la Garde civile ainsi que des policiers des régions autonomes. Des cours particuliers sont organisés aussi bien à l’intention des nouveaux policiers que de ceux déjà en cours de carrière. La délégation a rappelé que dès 1986, des groupes de policiers chargés spécialement du traitement des délits causés à l’encontre des mineurs et des femmes avaient été créés. Ces policiers bénéficient d’une formation permanente qui tient compte de tous les amendements législatifs au fur et à mesure qu’ils sont adoptés.
Concernant la traite d’êtres humains et la lutte contre les réseaux criminels organisés, la délégation a notamment rappelé qu’il existe une loi organique qui exonère les étrangères en situation irrégulière qui ont été témoins de toute infraction administrative si elles acceptent de coopérer avec les autorités compétentes pour aider à démanteler les réseaux criminels. Ces femmes peuvent ainsi soit rester en Espagne, soit retourner dans leur pays d’origine si elles en font la demande. En outre, lorsqu’une décision d’expulsion a été prise à l’égard d’une victime ou témoin d’un trafic, cette décision peut être annulée.
La délégation a ensuite indiqué que le Pacte des droits économiques et culturels ne permet pas au Gouvernement espagnol de collecter des données fondées sur la race et l’appartenance aux minorités ethniques, car cela est considéré comme discriminatoire. Abordant les questions relatives à l’immigration, phénomène relativement récent en Espagne, la délégation espagnole a donné les derniers chiffres disponibles, qui indiquent que les étrangers représentent actuellement 6% de la population et que 45% d’entre eux sont des femmes. L’augmentation du nombre d’étrangers est variable selon les communautés autonomes. Les Équatoriens, les Marocains et les Colombiens sont aujourd’hui les plus nombreux et il y a même maintenant des immigrés issus de la seconde génération. Grâce à la fécondité des mères d’origine étrangère, le taux de natalité a augmenté en Espagne et permis de rééquilibrer la situation démographique du pays.
À la question de savoir quels instruments permettent à la population de connaître la Convention et les grands principes qui la régissent, la délégation a répondu que les traités internationaux, une fois ratifiés par l’Espagne, sont intégrés à la législation nationale et que la Convention a été publiée dans le Journal officiel. Les magistrats du parquet et du siège sont tenus de connaître les dispositions de la Convention. Et dans le cadre de leur formation permanente, la Convention figure au programme de modules facultatifs qui sont consacrés chaque année aux traités internationaux et à leurs éventuelles modifications.
Par ailleurs, un citoyen espagnol peut, s’il constate qu’une loi espagnole est contradictoire avec les dispositions de la Convention, en saisir la justice pour demander que celles-ci soient appliquées en priorité. En matière pénale, dans la mesure où les communautés autonomes ne peuvent légiférer, le gouvernement central a autorité pour trancher sur la mise en oeuvre de certains chapitres de la Convention.
Pour ce qui est de la violence à l’égard des femmes, les pouvoirs publics espagnols sont engagés comme d’ailleurs le reste de l’État à éliminer pleinement la violence au foyer. Le Code pénal espagnol qualifie de délit toute voie de fait à l’égard d’une femme, qu’il s’agisse de mutilation sexuelle, d’agression sexuelle, de violences physiques ou de pratique de la traite.
La délégation a ensuite répondu aux questions relatives à l’amendement du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention sur la durée des sessions du Comité. Réaffirmant que le Gouvernement espagnol attache une grande importance aux travaux du Comité, notamment la diffusion de la Convention et de son Protocole facultatif, la délégation a souligné que l’amélioration des méthodes de travail du CEDAW concerne également les autres comités créés en vertu d’instruments des droits de l’homme.
S’agissant des Plans d’égalité, la délégation a rappelé qu’il existe un délai évident entre la mise en œuvre du troisième plan et l’adoption du quatrième. Ces délais d’une année correspondent au temps nécessaire pour évaluer les résultats obtenus par le précédent plan avant de débuter le suivant. Le Gouvernement procède ainsi à une évaluation des résultats obtenus dans le cadre de la mise en œuvre des plans et des aspects qui peuvent avoir une incidence sur la question sociale. Quant à l’Institut de la femme, a précisé la délégation, il s’agit d’un organisme chargé des politiques d’égalité et axé autour de trois unités: la première est chargée de faire des études à partir desquelles sont élaborées des politiques d’intervention. Une autre sous-direction est chargée de préparer ces plans d’intervention. La dernière, enfin, est chargée de la gestion des ressources humaines et des questions administratives.
La délégation espagnole a fait observer que, depuis la rédaction du rapport, l’Espagne a connu un changement de Gouvernement et donc de politique. Toutefois, a-t-elle précisé, le rapport rend compte de faits établis qui constituent des paramètres d’information indépendants de la politique du Gouvernement. S’agissant de la consultation des ONG pour l’élaboration de la loi contre la violence à l’égard des femmes, elle a précisé qu’un mécanisme a été mis en place pour que les organisations de la société civile intéressées soumettent leurs préoccupations quant à la violence à l’égard des femmes et a ajouté qu’elles auront également l’occasion de suggérer des améliorations techniques lors d’une prochaine présentation. Elle a précisé que le titre initial de la loi était « loi générale contre la violence à l’égard des femmes dans le contexte des relations affectives » mais qu’il avait été modifié pour prendre en compte les préoccupations exprimées par certaines organisations de femmes. Cette loi couvre les cas de violence physique, psychique et sexuelle. Mention sera faite, a-t-elle assuré, de la nécessité, d’harmoniser le contenu avec l’intitulé de la loi.
S’agissant des compétences respectives des différents niveaux de gouvernement au niveau central et des communautés autonomes, la délégation a précisé que les gouvernements autonomes disposaient de beaucoup de pouvoir, notamment en matière d’éducation et d’emploi mais que la législation dépendait exclusivement du Gouvernement central. Des groupes de travail permanents sur les questions d’égalité entre les sexes, composés de représentants de toutes les entités et du Gouvernement central, assurent la cohérence des mesures prises par les différents niveaux. L’avantage de la décentralisation est de permettre aux communautés autonomes d’établir un diagnostic de la situation au niveau local, qui est plus proche de la population, et de proposer des politiques publiques appropriées. Le principe de réciprocité et d’échange mutuel d’informations permet également d’améliorer l’efficacité globale du système.
Articles 7 à 9 de la Convention
M. FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, a demandé des précisions sur les intentions du Gouvernement pour ce qui est d’amender la loi générale sur les élections pour encourager la parité aux niveaux de représentation nationale et locale. Il a fait observer, à ce titre, que certaines dispositions des lois sur les partis politiques des gouvernements autonomes violeraient les dispositions de l’article 7 de la Convention sur la participation des femmes à la vie politique et publique.
Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, s’est félicité que la composition du nouveau Gouvernement espagnol ait respecté la parité et a encouragé l’Espagne à nommer les magistrats, les ambassadeurs et les diplomates en suivant le même principe. Elle a affirmé que la loi électorale devrait être amendée pour être rendue conforme à la Convention et que le Gouvernement central devrait obliger tous les partis politiques, y compris locaux, à présenter des
listes de candidats comportant autant de femmes que d’hommes. Elle s’est réjouie du fait qu’à la suite de la réforme récente du Code de la nationalité, la transmission de la nationalité espagnole pouvait se faire également par la mère. Reprenant la parole, M. MELANDER, expert de la Suède, a encouragé l’Espagne à amender la loi sur les partis politiques.
Mme DUBRAVKA SIMOVIC, experte de la Croatie, a demandé des précisions sur le nombre de femmes aux postes de prise de décisions au niveau politique, et notamment au Ministère des affaires étrangères. Elle a également souhaité connaître l’intention du Gouvernement pour augmenter le nombre de femmes ambassadeurs et diplomates.
Répondant à cette deuxième série de questions, la délégation espagnole a précisé que la loi électorale concernait la représentation des femmes dans les partis politiques et la présence des femmes dans les gouvernements autonomes. Le débat, a-t-elle insisté, porte sur les quotas pour la représentation des femmes dans les partis, et à tous les niveaux de représentation, ainsi qu’en termes de tendance politique au sein d’un même parti. La délégation espagnole a par ailleurs indiqué que du point de vue juridique, le nouveau Gouvernement pouvait, s’il le décidait, retirer un recours présenté par un Gouvernement espagnol précédent. Le Gouvernement a l’intention de se prononcer dans les meilleurs délais sur le maintien ou non des deux recours présentés devant la Cour constitutionnelle, suite à l’adoption au niveau local, de deux lois relatives à la composition des parlements autonomes dont la légalité a été mise en doute. Au cas où il les retirerait, la Cour constitutionnelle ne pourra pas se saisir du fond, auquel cas, les deux lois approuvées au niveau des gouvernements autonomes seraient parfaitement légales pour ce qui est de la composition des parlements autonomes.
Concernant la parité dans le domaine judiciaire, elle a précisé qu’au niveau des juges et des magistrats, la parité était pratiquement assurée. En revanche, ce n‘est pas le cas dans la majeure partie des organes de décision du pouvoir judiciaire. Toutefois, la tendance est encourageante comme en témoigne la nomination, pour la première fois, d’une femme à la présidence de la Cour constitutionnelle espagnole, institution judiciaire suprême.
Le taux de représentation des femmes dans les services diplomatiques est faible puisqu’il n’est que de 13%, a reconnu la délégation espagnole. Elle a toutefois indiqué que des mesures avaient été prises pour encourager la représentation des femmes, y compris dans les postes de décision. À l’heure actuelle, le corps diplomatique espagnol compte trois femmes ayant rang d’ambassadeur. Le Gouvernement, a-t-elle ajouté, prévoit de faire des recommandations pour augmenter le nombre de femmes au ministère des affaires étrangères.
Articles 10 à 14 de la Convention
Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a demandé des précisions sur les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre les discriminations dont sont victimes les femmes, notamment sur le marché du travail, en raison du travail à temps partiel, du chômage, qui touche plus particulièrement les femmes de plus de 25 ans qui ont interrompu leur carrière à la suite d’une grossesse ou de l’éducation d’un ou de plusieurs d’enfants ou encore des inégalités de rémunération, y compris dans le secteur informel. Elle a également demandé que soit précisé ce que comptait faire le Gouvernement espagnol en matière de santé pour éliminer les inégalités liées à l’accès et à la qualité des soins fournis aux femmes. Elle a par ailleurs déploré que les femmes soient exclues des essais cliniques.
Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh, a demandé des précisions sur les mesures prises pour favoriser l’accès des femmes à l’emploi. Elle a aussi souhaité être informée des conditions de l’accès des femmes immigrées au marché du travail. L’experte s’est ensuite inquiétée de l’état de santé mentale des femmes en Espagne plus touchées que les hommes. Enfin, elle a voulu savoir si les violences commises à l’encontre des femmes relèvent des questions de santé.
Mme NAELA GABER, experte de l’Egypte, a demandé dans quelle mesure les plans futurs du Gouvernement espagnol tenaient compte des droits spécifiques et de l’intégration des immigrantes, des femmes âgées et des femmes vivant en milieu rural? A propos de cette dernière catégorie, l’experte de l’Allemagne, Mme SCHÖPP-SCHILLING a demandé ce qu’il en était de l’accès de la femme rurale aux soins de santé.
Mme GASPARD, experte de la France, a demandé des précisions sur ce qui a été accompli par l’Espagne et ce qu’elle envisage de faire pour accroître le nombre d’études sur les questions liées à la parité entre les sexes dans l’enseignement supérieur. Il serait par ailleurs pertinent de mener une étude sur la représentation des femmes dans l’enseignement supérieur.
Faisant référence aux 60 000 avortements par an pratiqués en Espagne, Mme MORVAI, experte de la Hongrie, a demandé à la délégation d’expliquer les raisons de ce taux élevé qui ne cesse d’augmenter. Quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement dans ce domaine?
Reprenant la parole, Mme SIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé si les Gitanes bénéficiaient d’un programme d’éducation. Quelle est par ailleurs la situation concernant les mariages précoces parmi les femmes gitanes? Mme PRAMILIA PATTEN, experte de Maurice, s’est inquiétée pour sa part de la déscolarisation des enfants gitans et a souhaité connaître les mesures prises par les gouvernements des Communautés autonomes pour y remédier? Enfin, a-t-elle demandé, le nouveau Gouvernement a-t-il l’intention de remédier à l’écart de salaires entre hommes et femmes?
Si la délégation espagnole a reconnu que le taux de chômage de son pays était un des plus bas de l’Union européenne, elle a affirmé que l’Espagne connaissait avec l’Irlande la meilleure évolution en ce qui concerne la création d’emplois. Or, la majorité des emplois créés à partir de 1997 étaient destinés aux femmes. Le maintien d’un taux de chômage élevé est dû essentiellement au fait qu’il y a de plus en plus de femmes actives sur le marché du travail. Pour ce qui est des différences de salaires entre hommes et femmes, la délégation a indiqué qu’il n’incombe pas au Gouvernement de fixer les salaires dans le secteur privé où, en effet, les femmes reçoivent en moyenne seulement 71,13% du salaire accordé aux hommes. Les enquêtes montrent cependant que si ces écarts entre les salaires ne sont pas toujours liés à des discriminations directes ou indirectes, mais à des facteurs objectifs. Il est par ailleurs nécessaire de comparer des emplois analogues où les différences de rémunération sont moins évidentes. Plusieurs mesures ont toutefois été prises dans le cadre du Plan d’inspection du travail et un contrôle plus efficace a été appliqué en ce qui concerne les discriminations relatives aux différences de salaires.
Le Gouvernement espagnol a lancé des programmes de soins pour les mineurs et mis en place des plans pour les femmes migrantes ou les victimes de violences au foyer. Sur le statut des femmes migrantes dans le domaine agricole, jusqu’ici difficilement quantifiables, des indicateurs ont récemment montré que l’enregistrement du nombre de femmes employées légalement a augmenté.
S’agissant de la situation des femmes rurales ou travaillant dans le domaine agricole, la délégation espagnole a indiqué que son Gouvernement menait depuis longtemps des politiques concrètes pour améliorer la condition des femmes dans les zones rurales. Les femmes ont été associées au processus de transformation et de renouvellement social qu’a connu l’Espagne depuis la fin de l’époque franquiste, a-t-elle précisé. Elle a reconnu l’existence de déséquilibres, en particulier au niveau territorial à la suite du démembrement, entre les générations, d’où le vieillissement des zones rurales. La délégation a toutefois souligné que le regard porté sur les zones rurales et, en particulier sur les femmes rurales, avait changé. Environ 18% des femmes, soit 3,8 millions, vivent dans les zones rurales. La plupart participe à des activités économiques dans le secteur tertiaire, et un million de femmes s’occupent d’exploitations agricoles (500 000 d’entre elles en sont propriétaires), a-t-elle indiqué. Le nombre d’unités de travail par an (228 journées ou 1 800 heures) dans le secteur agricole révèle que seulement 240 000 femmes sont effectivement employées dans le secteur agricole, soit un peu moins de 30% de la population active agricole. Afin de maintenir le modèle d’exploitation familiale agricole, auquel les femmes participent de manière significative, le Gouvernement alloue à quelque 48 000 personnes des aides familiales. La délégation a en outre indiqué qu’un processus de substitution de cette main d’œuvre traditionnelle par une population immigrante, constitué d’un noyau très important de femmes, était en cours. Elle a par ailleurs indiqué qu’une étude a été lancée pour mesurer la contribution invisible des femmes dans les différents secteurs de production.
La délégation espagnole a par ailleurs évoqué les politiques visant à encourager la participation des jeunes dans la production agricole. Elle a notamment évoqué les mesures incitatives adoptées pour faciliter l’intégration de jeunes agricultrices dans les exploitations agricoles et celles pour encourager la diversification des secteurs de production dans les zones rurales. Elle a précisé que 36% des emplois créés dans ce cadre étaient initiés par des femmes.
S’agissant de la situation des femmes en matière de santé, la délégation espagnole a souligné que son pays avait été évalué par l’OMS comme étant l’un des sept meilleurs systèmes de santé au monde. Ce système, a-t-elle insisté, assure l’équité pour ce qui est de l’accès aux soins et encourage tout particulièrement les services de soins primaires universels et décentralisés. Elle a indiqué que les statistiques montraient que les femmes fréquentaient davantage les hôpitaux et les services des médecins en raison de la perception qu’elles avaient de leur santé. Les hommes, a-t-elle noté, considèrent souvent que fait d’être en mauvaise santé est une faiblesse. S’agissant de l’accès des réfugiés aux soins de santé, elle a souligné que chaque personne se trouvant sur le territoire espagnol en situation régulière disposait d’une carte de santé et que la politique de l’État en la matière était plus large que celle de l’Union européenne. Pour ce qui est de la consommation de tabac et de l’alcool, elle a précisé que la consommation des hommes était 25% plus importante que celle des femmes. Elle a aussi indiqué que 83% des cas de VIH/sida étaient des hommes.
S’agissant de la santé mentale, elle a reconnu que les femmes consommaient davantage de tranquillisants que les hommes et avaient des taux de dépression et d’anxiété plus élevés, en raison du poids de leurs activités concurrentes. S’agissant des ressources allouées à la politique d’égalité, elle a notamment indiqué que l’Observatoire de l’égalité récemment créé avait été doté d’un budget initial de 9 millions d’euros pour étudier la situation des femmes et les moyens d’encourager l’égalité des sexes, y compris en matière de santé. Il travaille notamment à l’élaboration de nouveaux indicateurs pour déterminer la situation des femmes en matière d’accès aux soins de santé. S’agissant des interruptions volontaires de grossesse, elle a indiqué que le Gouvernement avait lancé des campagnes d’information notamment axées sur la prévention et l’usage du préservatif.
En ce qui concerne la représentation inégale des femmes dans l’enseignement supérieur, la délégation a précisé que beaucoup d’étudiantes interrompent leurs études supérieures en raison de leur mariage ou de leur grossesse. L’abandon de la scolarité par les jeunes gitans persiste, notamment chez les fillettes, dans l’enseignement secondaire et, ce, à cause des traditions profondément enracinées de la culture rom. Afin d’enrayer ce phénomène, un dialogue a été engagé avec la communauté par l’intermédiaire de l’ONG « Secrétariat général gitan ».
S’agissant des personnes âgées, la délégation a fait valoir quelques aspects de sa politique en ce domaine, en particulier une mesure récente prise à la fin de l’année dernière en vue d’améliorer les pensions versées aux personnes âgées, et qui affecte 1,8 million de femmes. Il a été aussi envisagé de poursuivre le processus d’amélioration des pensions minimales de veuvage pour près de 200 000 personnes retraitées, sachant qu’il y a aussi 375 000 personnes qui reçoivent des pensions du régime général. Le Gouvernement espagnol a aussi amélioré les pensions pour les personnes qui poursuivent une activité professionnelle au-delà de 65 ans. Il s’engage en outre à harmoniser les 10 principes du système général de protection. En ce qui concerne le plan de dépendance qui concerne 1,5 million de personnes, le Gouvernement a annoncé un taux de couverture comparable à celui des pays les plus avancés.
Attachée au respect des droits des travailleurs, l’Espagne s’est engagée à accorder par ailleurs une grande importance à l’intégration des migrants. À cette fin, elle essaie de combattre la mafia qui exploite les clandestins en adaptant sa législation à l’ampleur du phénomène, sans pour autant empiéter sur ses obligations en matière de respect des droits de l’homme.
Articles 15 et 16 de la Convention
Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, s’est inquiétée de la culture d’impunité qui existe aujourd’hui en Espagne en matière de violences commises à l’encontre des femmes et s’est demandé quelles mesures concrètes le nouveau Gouvernement comptait prendre en ce domaine.
Mme HUGUETTE BOKPE GNANCADJA, experte de Bénin, a demandé si la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a déjà été invoquée par les juges ou les justiciables et si quelques exemples pouvaient lui être fournis.
Depuis des années déjà en Espagne, il existe un engagement pour éradiquer la violence dont sont victimes les femmes. Dans le cadre du suivi des jugements et arrêts, l’Observatoire de l’égalité travaille sur une compilation de 12 000 décisions judiciaires en vue d’établir une analyse qui sera transmise dans trois mois au Comité. La délégation a ensuite contesté l’idée d’une culture d’impunité en Espagne, au regard du durcissement des mesures de répression. L’an dernier, le pouvoir législatif a adopté la loi organique 11/2003 contre les menaces au sein de la famille ou les agressions, même lorsqu’elles n’entraînent pas de lésions graves. Pour ce qui est de la violence au foyer, on peut dire qu’il n’existe pratiquement plus de comportements qualifiés de légers puisqu’ils peuvent être sanctionnés comme délits. Les jugements assortis de peines de prison fermes doivent être exécutés dans tous les cas et ne peuvent pas faire l’objet d’une suspension. Dans le cas d’une première condamnation, la peine est accompagnée d’une formation pédagogique pour favoriser la réinsertion du condamné. Récemment, la Commission de suivi des mesures de précautions d’éloignement a approuvé un Protocole visant à assurer une meilleure coordination des organes judiciaires pour que toutes les femmes puissent pleinement bénéficier de la protection de leurs droits.
La délégation a en outre indiqué que son Gouvernement réfléchissait à la mise en place de nouveaux indicateurs pour déterminer le nombre de plaintes et de recours exercés par les femmes victimes de la violence.
Posant une nouvelle série de questions, Mme BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a demandé des précisions sur les voies de recours et la place laissée dans le système judiciaire à la saisine du CEDAW en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention.
Mme TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a demandé si le Gouvernement avait l’intention d’examiner la réserve émise sur la succession au trône. À son tour, Mme SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, a demandé davantage d’informations sur les mesures prises par le Gouvernement espagnol pour assurer l’égalité de rémunération sur le marché du travail.
Répondant à ces commentaires et questions, la délégation espagnole a indiqué que la prostitution était qualifiée de délit par le Code pénal mais, a-t-elle précisé, certaines communautés autonomes, notamment la Catalogne, adoptent une position différente sur la question, favorisant la légalisation de la prostitution. Elle a indiqué que le Gouvernement avait l’intention d’engager avec la société civile un débat sur la prostitution. S’agissant de la possibilité de régulariser la situation actuelle en Catalogne, la délégation a indiqué que la pratique de la prostitution n’était pas considérée comme un délit et que les femmes pratiquant la prostitution étaient jugées comme des victimes contrairement au proxénète qui, lui, était au contraire jugé comme un délinquant, même lorsque la femme est consentante. Elle a précisé que son pays oeuvrait activement pour lutter contre la traite, en particulier à des fins d’exploitation sexuelle, elle-même liée à la prostitution. Elle a notamment évoqué l’organisation d’un colloque sur la traite, les activités des organisations de la société civile et l’élargissement du champ d’action d’Europe. La délégation espagnole a également indiqué que la création par son Gouvernement, au sein du Ministère du travail et des affaires sociales, d’un Secrétariat chargé de la coordination des programmes visant l’égalité entre les sexes, témoignait de sa volonté d’œuvrer en faveur de l’intégration d’une perspective sexospécifique, y compris dans tous les ministères et dans l’ensemble de l’administration publique. Pour ce qui est de la succession au trône, elle a indiqué que le souverain pouvait être un homme ou une femme mais que le fils aîné était toujours prioritaire. S’agissant de la sensibilisation et de la responsabilisation des hommes face à la violence à l’égard des femmes, la délégation a indiqué que le suivi des délinquants visait notamment à faire comprendre que les délits visaient à porter une grave atteinte à la dignité et à l’intégrité physique d’une personne. Par ailleurs, elle a expliqué que les recours devant la Cour constitutionnelle ou le CEDAW pouvaient être exercés parallèlement.
Dans ses remarques de clôture, la Présidente du Comité et experte de la Turquie, AYSE FERIDE ACAR, a indiqué que le Comité appréciait pleinement les mesures prises par l’Espagne pour assurer la parité entre les sexes dans la vie politique. En revanche, elle reste préoccupée par les insuffisances constatées au sein des partis politiques, par la faible représentation politique à tous les niveaux, et par la loi électorale en vigueur. Elle a ainsi invité le Gouvernement espagnol à prendre toutes les mesures requises pour que les femmes soient représentées selon le principe de la parité entre les sexes, en particulier sur les listes électorales. Les progrès dans le domaine de la vie politique doivent être étendus à tous les secteurs de la société, y compris aux affaires étrangères et à la magistrature. La situation actuelle, a poursuivi Mme Acar, révèle néanmoins un goulot d’étranglement dans le tissu social et culturel de la société espagnole. Elle a reconnu une amélioration sur le marché du travail mais a déploré la persistance de comportements patriarcaux. Malgré les améliorations, a-t-elle insisté, il est nécessaire de mettre en œuvre des politiques propres à modifier les esprits et les comportements et à lutter contre les stéréotypes, notamment ceux touchant aux migrants et aux habitants des zones rurales.
La Présidente du Comité a en outre invité l’Espagne à réévaluer sa politique en matière de statistiques ventilées par sexe et par groupe ethnique. Loin d’être une pratique discriminatoire, une telle distinction permettrait de répondre plus efficacement à l’évolution de la société, du fait notamment de la présence d’une deuxième génération d’immigrés. Elle a en outre invité le Gouvernement à considérer l’extension de la loi contre la violence à l’égard des femmes en vigueur à toutes les formes de violence dont sont victimes les femmes, tant dans la vie privée que dans la vie publique. Ces mesures, a-t-elle dit, permettraient d’améliorer l’efficacité du Comité et de qualifier ces violences comme des délits à caractère sexiste. Elle a par ailleurs encouragé le Gouvernement espagnol à appuyer l’amendement du paragraphe 1 de l’Article 20 de la Convention.
Composition de la délégation de l'État partie
Mmes Soledad MURILLO-DE-LA-VEGA, Secrétaire générale des politiques d’égalité du Ministère du travail et des affaires sociales de l’Espagne; Montserrat COMAS-D'ARGEMIR CENDRÁ, Présidente de l'Observatoire de l’égalité contre la violence domestique; Florentina ÁLVAREZ ÁLVAREZ, Directrice générale adjointe des études statistiques à l'Observatoire de l'égalité; Paloma ALONSO, Directrice générale adjointe des relations internationales au Ministère de la Santé publique; et M. Mariano Alvaro PAGE, Directeur général adjoint des études et de la coopération à l'Institut de la femme. Étaient également présents huit autres spécialistes des questions relatives à la lutte contre la discrimination à l'égard des femmes en Espagne.
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