LES EXPERTS DU CEDAW INVITENT LE KOWEIT A ACCORDER LE DROIT DE VOTE AUX FEMMES
Communiqué de presse FEM/1268 |
Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
634e et 635e séances – matin et après-midi
LES EXPERTS DU CEDAW INVITENT LE KOWEIT A ACCORDER LE DROIT DE VOTE AUX FEMMES
Alors que le Parlement koweïtien s’apprête à examiner à nouveau un projet de loi visant à octroyer le droit de vote aux femmes, les 23 experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) ont invité le Koweït à mettre fin à une contradiction flagrante. En effet, le Koweït où les femmes ont atteint un niveau d’éducation supérieur à celui des hommes, est le dernier pays au monde à accorder le droit de vote aux hommes uniquement.
Lors de son exposé sur la situation des femmes koweïtiennes, l’Ambassadeur du Koweït, Mme Nabeela Al-Mulla, s’est dite consciente des difficultés existant au Koweït pour octroyer aux femmes tous les droits politiques et civils. A titre d’illustration, elle a rappelé que l’Emir avait, le 16 mai 1999, signé un décret devant donner aux femmes le droit de vote, malheureusement rejeté par le Parlement à une voix près. L’experte française, Françoise Gaspard, a rappelé que les parlementaires français avaient refusé à 21 reprises d’accorder le droit de vote aux femmes en 1919 et 1939. Elle a encouragé la délégation à transmettre les conclusions du Comité aux parlementaires koweïtiens.
Affirmant que des progrès avaient cependant été observés dans le pays, Mme Al-Mulla a cité la mise en place en 1997 d’une Division de la famille et de la femme au sein du Ministère des affaires sociales et de l’emploi, et celle en 2000, d’un Haut Comité de l’enfance et de la famille. Elle a également cité l’existence d’une Commission de la condition de la femme. Elle a également fait état d’indicateurs sociaux positifs, la mortalité infantile étant seulement de neuf décès pour 1 000 naissances et le taux d’analphabétisme, étant passé de 26% en 1982 à 11% en 1995.
La Présidente du Comité, Mme Ayse Feride Acar, experte de la Turquie, a salué l’existence d’une volonté politique claire de l’Emir du Koweït à garantir une vie politique aux femmes koweïtiennes. Elle a invité le Koweït à retirer les réserves formulées à l’occasion de la ratification de la Convention, en ce qui concerne les articles relatifs aux droits de la femme en matière de vie politique et publique, la transmission de la nationalité, ainsi que le mariage et la vie de famille. Par exemple, les enfants prennent la nationalité de leur mère koweïtienne uniquement dans les cas où l’identité ou la nationalité du père est inconnue.
D’autres questions ont porté sur les problèmes liés au mariage précoce, l’égalité d’accès aux soins ou au travail, les disparités salariales, la lutte contre les stéréotypes, la situation et la protection des travailleuses étrangères ou la lutte contre la prostitution.
Mme Nabeela Al-Mulla, Ambassadeur koweïtienne nouvellement nommée Représentante permanente de son pays auprès des Nations Unies, représentait la délégation koweïtienne qui ne pouvait être à New York cette semaine. La délégation répondra aux questions des experts, jeudi 22 janvier, à 15 heures.
RAPPORT INITIAL ET DEUXIEME RAPPORT PERIODIQUE COMBINES DU KOWEIT
Rapports (CEDAW/C/KWT/1-2)
Il est affirmé en premier lieu que la Convention fait partie du droit koweïtien et qu’elle doit être appliquée par toutes les autorités du pays. Quiconque s’estime lésé par sa non-application peut faire appel aux tribunaux, conformément aux procédures en vigueur, pour recouvrer les droits énoncés dans la Convention. La Constitution considère le principe de l’égalité et de non-discrimination comme l’un des fondements de la société koweïtienne. Son article 175 interdit toute modification d’une de ses dispositions relatives aux principes de liberté et d’égalité.
Il est précisé qu’une Division de la famille et de la femme a été créée en 1997 au sein du Ministère des affaires sociales et de l’emploi. Elle relève de la Direction de l’enfance. Un Haut Comité de l’enfance et de la famille a été mis en place en 2000. Il existe également une Commission de la condition de la femme. Il est expliqué qu’en matière de mesures temporaires spéciales visant à accélérer de facto l’égalité entre les hommes et les femmes, le droit koweïtien contient une profusion de dispositions visant à protéger la maternité.
La politique de l’Etat pour lutter contre les traditions et pratiques relevant de schémas socioculturels qui entravent les progrès tourne autour de l’éducation et de la prise de conscience. La loi sur le statut personnel contient toutes les garanties voulues pour protéger la femme contre les actes de violence de la part de son mari. Le rapport détaille par ailleurs certaines dispositions de cette loi selon lesquelles par exemple, l’obéissance ne peut pas être imposée à une femme contre son gré.
Sur la question de l’exploitation de la prostitution et de la traite des être humains, il est expliqué que selon la loi, le fait d’avoir des rapports sexuels avec une femme sous la contrainte est un crime sanctionné par la peine de mort. Quiconque déshonore un garçon ou une fille âgés de moins de 21 ans sans user de contrainte est passible d’une peine de prison ne pouvant pas excéder 10 ans. La Loi qualifie de crime l’ouverture d’un lieu de débauche ou de prostitution et prévoit une peine de prison ne pouvant pas excéder trois ans. La prostitution n’est pas une pratique notable au Koweït précise le rapport.
S’agissant de la participation des femmes à la vie publique et politique du pays, le rapport explique que de nombreux recours, déposés devant les tribunaux à la suite du rejet par l’Assemblée nationale d’un décret accordant aux femmes le droit de voter et de se faire élire aux organismes parlementaires, ont également été rejetés. Le nombre de femmes disposant de postes de haut niveau dans l’administration est passé de 285 en 1993, à 311 en 1997. Les Koweïtiennes occupant des postes de direction représentent 7,6% du nombre de travailleurs koweïtiens en 1993. Elles représentaient 14% des postes de direction du secteur des hydrocarbures.
La nomination dans le secteur diplomatique et consulaire est limitée aux hommes. Le père koweïtien transmet sa nationalité à son enfant, les enfants prenant la nationalité de leur mère koweïtienne dans le cas où l’identité ou la nationalité du père est inconnue.
Avec les centres d’alphabétisation, le taux d’analphabétisme pour les femmes est passé de 50% en 1980 à 11% en 1999. Les filles constituaient 50,3% du nombre total d’élèves en 1998 contre 48,3% en 1980. Le pourcentage de femmes dans le corps enseignant était en 2000 de 95,3% dans les écoles maternelles, de 92,4% dans le primaire, de 82,7 dans le cycle intermédiaire et de 61,7% dans le secondaire. Le corps enseignant universitaire compte 338 hommes et 105 femmes en premier cycle. Le taux de participation des femmes à la population active est de 32,1%.
Dans le domaine de la santé, le rapport indique que le taux de mortalité maternelle était en 1998 de 958 décès pour 12 590 naissances vivantes. 99% des accouchements se déroulent sous supervision médicale. L’avortement est un crime. Les mutilations génitales sont inconnues au Koweït.
La femme koweïtienne a pleine capacité juridique dès sa majorité à 21 ans et elle dispose d’un patrimoine distinct et indépendant de celui de son mari. Le Code civil est neutre et ne comprend aucune distinction ou discrimination fondée sur le sexe. Les conflits entre époux sont tranchés par le Tribunal du statut personnel. Ce statut confère à la femme le droit après le mariage de recevoir une dot et de vivre au domicile conjugal et l’obligation de subvenir aux besoins de son époux si la situation de ce dernier l’exigeait. La femme peut demander le divorce après une absence d’un an de son mari, si cette absence lui a été préjudiciable. La garde des enfants et confiée en premier lieu à la mère puis, à la grand-mère maternelle.
Présentation par l’Etat partie
Présentant le rapport de son pays, l’AmbassadeurNABEELA ABDULLA AL-MULLA, s’est dite consciente des difficultés existant au Koweït pour octroyer aux femmes la quasi-totalité de leurs droits politiques et civils. Elle a néanmoins assuré les membres du Comité de la volonté de l’Emir de garantir aux femmes un réel accès à la vie politique. A titre d’illustration, elle a rappelé que l’Emir avait, en date du 16 mai 1999, signé un décret devant donner aux femmes le droit de vote et leur permettre d’être élues au parlement. Malheureusement ce décret à été rejeté par le parlement par une voix.
Elle a précisé que le Koweït figurait en très bonne place d’après les indicateurs de développement et de la santé, puisque la mortalité infantile n’est que de 9 pour 1 000. Le taux d’analphabétisme n’était plus que de 11% en 1995, alors qu’il était de plus de 26% en 1982. Même s’il y a des lacunes au Koweït en matière de droits de la femme, a-t-elle reconnu, le pays aspire à aller de l’avant en matière de mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, dans le respect des nuances culturelles et constitutionnelles de notre pays. L’Ambassadeur a également indiqué que la législation nationale consacrait une attention particulière aux femmes dans l’administration en leur octroyant des congés de maternité payés et des prestations pour celles qui sont épouses de prisonniers de guerre.
Dialogue avec les experts
Au terme de cette présentation, Mme AYSE FERIDE ACAR, Présidente du Comité et experte de la Turquie, a félicité la délégation du Koweït pour la présentation de son rapport initial après avoir signé la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en 1994. Constatant l’existence d’une volonté politique claire de son Altesse l’Emir du Koweït à garantir la participation des femmes koweïtiennes à la vie politique, elle a invité les autorités à retirer les réserves formulées aux articles 7, 9.2 et 16 (f) à l’occasion de la ratification de la Convention. Ces articles concernent les droits de la femme en matière de vie politique et publique, d’accès à la nationalité et le mariage et la vie de famille.
Articles 1 à 6 de la Convention
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, s’est inquiétée des nombreuses questions restées sans réponse. Elle a demandé si la présentation et l’élaboration de ce rapport ont fait l’objet d’un débat public et de la consultation de la société civile. Ne considérez-vous pas que le fait de refuser aux femmes le droit de vote va à l’encontre de la mise en œuvre de la Convention, a-t-elle demandé? Elle a voulu savoir si le Gouvernement entendait retirer les réserves formulées à l’égard de certains articles de la Convention et dans quels délais. Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé quelle était la place de la Convention dans l’ordre juridique koweïtien et quel instrument prenait le pas sur l’autre en cas de conflit entre un texte international et la législation nationale.
De son côté l’experte française, Mme FRANÇOISE GASPARD, a souligné l’importance symbolique très forte de la présentation de ce rapport, alors que l’on vient d’apprendre que le Parlement koweïtien va être saisi bientôt d’un nouveau texte de loi devant donner le droit de vote aux femmes. Elle a demandé quelle était la diffusion du contenu de cette Convention auprès du public koweïtien, notamment les universités et les ONG. Qu’est-il entrepris pour faire connaître la Convention? L’experte hongroise, Mme KRISZTINA MORVAI, s’est félicitée des acquis remarquables observés dans le domaine de l’éducation des femmes au Koweït en notant qu’il y avait une grande proportion de femmes médecins et avocates. Elle a suggéré à la délégation koweïtienne de travailler à la visibilité des femmes, en montrant que l’islam ne contredit pas leur promotion. Elle a souhaité que les ONG koweïtiennes soient représentées lors de la prochaine présentation de rapport.
L’expert des Pays-Bas, M. CORNELIS FLINTERMAN, appuyant les questions de l’experte japonaise,Mme FUMIKO SAIGA, a souhaité recevoir des informations sur les dispositions constitutionnelles s’appliquant aux étrangers résidant légalement au Koweït.
Mme FATIMA KWAKU, experte du Nigéria, a demandé également comment le rapport avait été élaboré. Le Koweït a pris des mesures constitutionnelles et autres pour que les femmes jouissent de leurs droits, a-t-elle noté. Or on constate qu’elles n’ont pas la possibilité de déposer un recours devant un tribunal administratif qui examine les questions de parité. Mais d’après le rapport, la Convention fait partie du droit interne et peut donc être appliquée directement. Depuis 1994, date de la ratification de la Convention, est-ce que celle-ci a été invoquée devant un tribunal? Est-ce que les femmes koweïtiennes ont connaissance de l’existence de la Convention? M. GÖRAN MELANDER, expert de la Suède, a demandé s’il existait un débat sur les droits des femmes au Koweït. Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, a adressé ses félicitations à l’Ambassadeur du Koweït qui devrait être une source d’inspiration pour toutes les Koweïtiennes. Elle a cependant regretté que la Constitution ne fasse pas directement référence à la femme. Seul le Code pénal spécifie que la condamnation à mort d’une femme est commuée en prison à vie si elle est enceinte. L’experte a également regretté que les questions féminines soient liées aux questions relatives à la famille.
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a demandé des précisions sur la Commission permanente des droits de l’homme au Parlement. Y-a-t-il eu des propositions en vue d’amender la législation? Y-a-t-il eu des plaintes déposées par des femmes pour violation de leurs droits. Mme PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, s’est dite préoccupée par l’application de la peine de mort alors que le Koweït est partie au Pacte sur les droits civils et politiques. Est-ce que les femmes ont réellement accès à la justice? Disposez-vous d’un budget pour accorder une aide juridique aux femmes?
Mme SCHÖPP-SCHILLING a voulu savoir si le Koweït avait l’intention de ratifier le Protocole facultatif et l’amendement à l’article 21 de la Convention sur les périodicités des sessions du Comité. Depuis la ratification de la Convention, est-ce que le Koweït a passé en revue son arsenal législatif? Elle a demandé des précisions au sujet de l’application du droit islamique pour ce qui touche aux questions familiales. Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a également demandé si le rôle de la femme était restreint à celui de mère de famille. Le plan de promotion de la condition de la femme doit voir la femme comme un être indépendant. Il faut sensibiliser les femmes et l’ensemble de la population à leurs propres droits. Parmi les objectifs des mécanismes de promotion de la femme, il est regrettable que l’on ne parle pas de la nécessité de garantir aux femmes leurs droits civils et politiques.
Mme NAELA GABR, experte de l’Egypte, a constaté que la présence d’une femme ambassadeur est une manifestation de la volonté politique de promouvoir la femme. Elle a également relevé positivement la création de mécanismes de promotion de la femme koweïtienne tout en insistant sur le rôle important que doivent jouer les organisations de la société civile. A l’heure actuelle, il n’y a que cinq ONG de femmes. Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a suggéré à l’Etat partie de réfléchir aux stéréotypes traditionnels et de voir comment ceux-ci trouvent leur expression dans les programmes et politiques gouvernementales.
Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, a relevé qu’aucun mécanisme n’accordait la priorité à l’amélioration de la condition de la femme en tant qu’individu. Elle a demandé à la délégation dans quelle mesure les mécanismes adoptés en application de l’article 3 protègent les femmes koweïtiennes. Est-ce que ces mécanismes protègent également les femmes non koweïtiennes? Elle a souhaité obtenir des données sur les diverses nationalités sur le territoire koweïtien. Mme SHIN a souhaité qu’on lui fournisse des explications au sujet des divers mécanismes chargés de promouvoir et de défendre les droits de la femme. Elle a dit sa perplexité quant au Haut Comité de l’enfance et de la famille qui ne comprend même pas le mot femme. Est-ce que les ONG peuvent y être représentées? Mme MANALO, a relevé le nombre important de bureaux et mécanismes chargés des droits de la femme en demandant s’il existait un organe chargé de la coordination.
S’agissant tout particulièrement de l’article 4 sur l’adoption de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes, Mme SCHÖPP-SCHILLING, a émis des doutes sur l’approche des explications fournies par l’Etat partie dans son rapport au sujet de sa mise en œuvre. Certaines dispositions semblent impliquer que les femmes ne peuvent être que des mères. Mme FERRER GOMEZ, a regretté l’absence de renseignement sur l’action du Gouvernement pour lutter contre les stéréotypes et préjugés culturels. Elle a demandé si des campagnes de sensibilisation aux questions d’éducation et de santé étaient prévues. A l’instar de Mme TAVARES DA SILVA, elle a souhaité recevoir des informations sur les mesures envisagées pour empêcher les actes de violence contre les femmes.
Mme GABR a souligné la nécessité de sensibiliser l’opinion publique au contenu et moyens de mise en œuvre de la convention. Elle a suggéré que le Koweït prépare pour son prochain rapport une étude sur les obstacles à son application. Comme Mme SAIGA, elle a demandé des précisions sur les possibilités offertes aux femmes de faire carrière dans le corps diplomatique ou la police. Mme MORVAI a invité le Koweït à s’engager dans la lutte contre la prostitution et prendre la tête d’un mouvement au niveau régional. Elle a souligné la nécessité de sensibiliser les hommes, qui sont la principale cause de la prostitution, au fait que la prostitution est un fléau.
Mme MANALO a questionné les représentants de l’Etat partie sur les initiatives envisagées pour éliminer la pratique des crimes d’honneur dont sont victimes les femmes. Elle a demandé si des sanctions étaient prévues pour punir les auteurs de viol et suggéré au Gouvernement du Koweït la mise en place d’une législation contre le harcèlement sexuel pour protéger les travailleuses étrangères.
Articles 7 à 9 de la Convention
L’experte du Bangladesh, Mme SALMA KHAN, s’est inquiétée que le Koweït soit un des derniers pays du monde à accorder le droit de vote aux hommes mais non aux femmes, situation qu’elle a définie comme contradictoire avec la volonté affichée par le Koweït de promouvoir une égalité de fait entre les hommes et les femmes. C’est pourquoi, elle a demandé ce qui a été fait pour s’assurer que le nouveau projet de loi visant à octroyer le droit de vote aux femmes ne subisse pas le même sort que le dernier, à savoir le rejet.
Mme VICTORIA POPESCU SANDRU, experte de la Roumanie, a demandé des informations et statistiques sur la présence des non-Koweïtiennes dans l’administration publique. A l’instar de l’expert de M. FLINTERMAN, elle a souhaité avoir des précisions sur les moyens envisagés pour promouvoir la participation égale des hommes et des femmes dans l’administration.
Mme GASPARD a regretté que la possibilité d’octroyer le droit de vote aux femmes koweïtiennes ait été repoussée à deux occasions. La situation, après le rejet d’un décret de l’Emir et d’un projet de loi d’initiative parlementaire, montre que la résistance vient d’abord des hommes politiques. Elle a indiqué qu’elle venait d’un pays où 21 projets ou propositions de loi visant à accorder le droit de vote aux femmes avaient été rejetés entre 1919 et 1939 en raison de la forte résistance des hommes et partis politiques. Elle a déclaré qu’il était d’autant plus contradictoire de voir que le Koweït est un des derniers pays à refuser le droit de vote aux femmes, alors qu’il s’agit d’un pays où les femmes sont extraordinairement compétentes comme en atteste leur proportion très élevée parmi les médecins et les avocats. Elle a souhaité que les conclusions du Comité soient très largement diffusées auprès des parlementaires koweïtiens, afin qu’ils voient à quel point la situation des femmes koweïtiennes fait l’objet d’une attention particulière de la communauté internationale. Mme ŠIMONOVIC, a demandé ce que le Koweït souhaitait entreprendre pour encourager la participation de la femme aux activités économiques.
Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a salué le courage de la Représentante permanente du Koweït qui a remplacé la délégation koweïtienne qui ne s’est pas rendue à New York pour présenter son premier rapport périodique. Elle a demandé comment on pouvait dénier à une femme musulmane son droit à entrer en politique. La présence de l’Ambassadeur est la preuve qu’avec de la volonté, on peut aller plus loin que ce qui figure dans les conventions et les lois. Si la femme koweïtienne est arrivée à un niveau d’éducation supérieur à celui des hommes, nous ne voyons pas pourquoi elle ne pourrait pas siéger au Parlement. L’experte a évoqué les quotas en vigueur dans des pays musulmans comme au Maroc qui compte 30 femmes au Parlement, et qui constituent une façon de briser les tabous qui n’ont pas d’assise religieuse. Mme CHRISTINE KAPALATA, experte de la République-Unie de Tanzanie, ainsi que Mme SIMONOVIC, ont relevé une incohérence dans le rapport. Il existe une attitude paternaliste des hommes à l’égard des femmes. Le rapport dit que la Constitution prévoit des garanties comme le droit au travail mais en même temps, il existe des lois qui restreignent le travail des femmes dans la police et le corps diplomatique. Quelles sont les raisons de cette contradiction? Elle a souhaité des détails sur les moyens qui permettent aux femmes d’être diplomates alors que des textes paraissent le leur interdire.
Mme GASPARD a, elle aussi, relevé la contradiction entre l’article 26 de la Constitution et la loi qui interdit l’accès des femmes à la vie diplomatique. Elle a également expliqué que les résolutions votées par les Nations Unies sur le règlement des conflits et le rôle des femmes dans le règlement des différends, impliquent que les femmes aient accès à la diplomatie. Mme DORCAS AMA FERMA COKER-APPIAH, experte du Ghana, a demandé au Gouvernement de prendre des dispositions pour lever les réserves à l’article 2 de la Convention. Elle a demandé des précisions au sujet du droit de la femme mariée à obtenir un passeport. Mme KHAN, a relevé qu’il n’y avait pas d’égalité de droits entre les hommes et les femmes dans l’acquisition de la nationalité. Est-ce que les femmes ont besoin de l’accord de leur mari pour travailler, saisir les tribunaux? Qu’en est–t-il pour les femmes non mariées?
M. MELANDER a demandé si les étrangers vivant dans le pays pendant longtemps peuvent devenir citoyens koweïtiens. Mme SCHÖPP-SCHILLING, a demandé ce qui empêchait une femme koweïtienne de transmettre sa nationalité si elle est mariée à un étranger. Mme GASPARD, qui a précisé que le Koweït appliquait le droit du sang et du sol, a rappelé que pourtant la mère ne transmettait pas sa nationalité à son enfant. Elle a demandé des statistiques sur les taux de mariage entre Koweïtiens et étrangers et sur le statut de leurs enfants.
Répondant aux premières questions, Mme ABDULLA AL-MULLA, s’est dite surprise elle-même de certaines contradictions apparentes dans le rapport ce qui est le reflet d’une société dont certains éléments sont très progressistes et d’autres qui le sont moins. Elle a reconnu que peu de missions diplomatiques dans le monde comptaient des femmes.
Articles 10 à 14 de la Convention
En ce qui concerne l’application de l’article 10,M. FLINTERMAN et Mme SAIGAont souhaité que leur soient fournies des précisions sur les droits et obligations des résidents non Koweïtiens, notamment en matière d’accès à l’éducation. D’autre part, ils ont voulu savoir comment les manuels scolaires présentaient les rôles respectifs des hommes et des femmes. De son côté, Mme TAVARES DA SILVA, tout en notant la participation importante des femmes aux services d’éducation, a relevé une contradiction entre le nombre de femmes étudiantes et le nombre de femmes enseignantes; les femmes étant proportionnellement beaucoup plus nombreuses parmi les diplômées que parmi les enseignants.
Mme SCHÖPP-SCHILLING et Mme GASPARD ont demandé si au niveau de l’éducation primaire, il y avait des classes mixtes au Koweït. L’experte de la France a aussi voulu savoir si l’éducation au sport était la même pour les filles et les garçons et quelle était l’importance de la participation des femmes koweïtiennes aux compétitions sportives internationales. De son côté, Mme ACHMAD a demandé ce qui était fait pour permettre aux femmes de conjuguer obligations professionnelles et responsabilités familiales. Elle a souhaité qu’on lui explique par quels moyens le Koweït protège les travailleuses migrantes. Evoquant une loi interdisant le travail de nuit des femmes dans le secteur privé, elle a désiré connaître comment une telle interdiction était justifiée.
Mme KHAN a souhaité être informée du taux de chômage chez les femmes et du nombre de femmes ayant un emploi non rémunéré. Elle a également demandé quels étaient les rapports des rémunérations des hommes et des femmes. A l’instar de Mme COKER-APPIAH, elle a demandé des précisions sur la situation des travailleuses étrangères et les droits qui leur sont accordés. Mme PATTEN a demandé des précisions sur les disparités salariales et sur les initiatives que le Koweït envisage d’entreprendre pour lutter contre les stéréotypes.
Mme POPESCU SANDRU a demandé si la constitution faisait mention de l’égalité d’accès aux soins pour les hommes et les femmes et quels étaient les droits existant en la matière pour les travailleuses étrangères. Elle a également demandé ce que le Koweït entreprenait pour lutter contre les mutilations génitales.
Intervenant au sujet de l’article 15 relatif à l’égalité devant la loi, Mme HUGUETTE BOKPE GNACADJA, experte béninoise, a demandé des précisions sur l’âge minimum du mariage pour les filles et pour les garçons. Exige-t-on le consentement de la femme? De son côté, Mme KAPALATA a demandé si le temps d’attente après le divorce était le même pour les hommes et les femmes. Mme ŠIMONOVIC a voulu savoir si pour le divorce, les mêmes motifs étaient admis, pour les hommes et les femmes et si les femmes jouissaient de l’égalité en ce qui concerne la gestion des biens acquis durant le mariage.
Au sujet de l’article 16, Mme SCHÖPP-SCHILLING a demandé des précisions sur les motivations ayant amené le Koweït à poser des réserves sur le contenu de l’article 16 (f) de la Convention relatif aux droits et responsabilités en matière de tutelle, de curatelle, de garde et d’adoption des enfants, ou d’institutions similaires. De son côté, Mme AÏDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, a souhaité que l’on précise les clauses et motifs aux termes desquels les hommes peuvent demander un divorce. Mme MORVAI, estimant que le mariage précoce est un obstacle grave à l’éducation, a suggéré que le Koweït élève l’âge minimum du mariage à 18 ans.
Réponse de la délégation koweïtienne
Un membre de la délégation koweïtienne a assuré que son pays présentera toutes les réponses aux questions formulées. Il est bien normal, a-t-il ajouté, qu’il demeure des lacunes et que des questions aient été insuffisamment traitées dans ce premier rapport. Il a formé le vœu que les réponses que fournira sa délégation jeudi prochain, le 22 janvier à 15 heures, seront de nature à satisfaire le Comité.
En conclusion, la Présidente du Comité, Mme FERIDE ACAR, a espéré que le Comité saura profiter la semaine prochaine de la présence de la délégation koweïtienne et de ses experts dans le souci d’un dialogue constructif.
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