LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME CLÔT LES TRAVAUX DE SA QUATRE-VINGT-UNIÈME SESSION
Communiqué de presse DH/G/363 |
Communiqué de base
LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME CLÔT LES TRAVAUX DE SA QUATRE-VINGT-UNIÈME SESSION
Il présente ses observations finales sur la Belgique, la Namibie, le Liechtenstein et la Serbie-et-Monténégro
(Publié tel que reçu)
GENÈVE, 30 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a clos, ce matin, les travaux de sa quatre-vingt-unième session, qui s'est tenue à Genève depuis le 5 juillet, en présentant ses observations finales sur les rapports de la Belgique, la Namibie, le Liechtenstein et la Serbie-et-Monténégro, soumis en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Comité a également examiné la situation des droits civils et politiques en République centrafricaine, ce pays n'ayant pas soumis de rapport.
Dans ses observations finales sur la Belgique, le Comité accueille avec satisfaction la ratification du deuxième Protocole facultatif au Pacte visant à abolir la peine de mort ainsi que l'adoption de la loi octroyant le droit de vote aux élections communales aux étrangers non ressortissants d'un pays de l'Union européenne. Saluant les nombreux projets visant à une meilleure application du Pacte, le Comité relève avec inquiétude que certains d'entre eux sont en examen depuis de longues années. Il est préoccupé par la persistance d'allégations de violences policières, souvent accompagnées d'actes de discrimination raciale, par le fait que plusieurs actes racistes, xénophobes, antisémites ou anti-musulmans sont intervenus sur le territoire et que des partis politiques incitant à la haine raciale peuvent continuer à bénéficier du système de financement public. Il est également préoccupé par la persistance de la surpopulation carcérale. Il recommande en particulier de mettre fin immédiatement à la rétention d'étrangers en zone de transit aéroportuaire, d'accroître ses efforts pour faire en sorte que la religion musulmane bénéficie des mêmes avantages que les autres religions et de prendre les mesures nécessaires pour protéger les enfants contre les violences sexuelles dont ils sont victimes.
S'agissant du rapport périodique de la Namibie, le Comité prend note des efforts déployés depuis l'indépendance pour mettre en place et développer des institutions démocratiques. Il salue en particulier l'abolition de la peine de mort et se félicite de ce que les normes du droit international soient considérées comme partie intégrante du droit interne. Il se félicite en outre de l'adoption de la loi sur l'égalité dans le mariage tout en demeurant préoccupé du taux important de mariages coutumiers non enregistrés et de leurs conséquences sur les droits des épouses et des enfants, notamment en ce qui concerne l'héritage et la propriété de la terre. Le Comité apprécie par ailleurs les efforts déployés par la Namibie pour lutter contre VIH/sida tout en notant que ces efforts ne sont pas à la mesure du problème. Le Comité note avec préoccupation que le crime de torture n'est pas défini dans le code pénal namibien et recommande l'établissement d'un mécanisme d'enquête et de sanction des cas de torture, d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions.
Le Comité note que, tant en droit que dans la pratique, le Liechtenstein apparaît largement en conformité avec les obligations découlant du Pacte et se félicite de l'engagement du pays à ne pas extrader un citoyen vers un pays où il serait passible de la peine capitale. Tout en notant les nombreuses mesures adoptées pour promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes, le Comité remarque la persistance d'une attitude passive de la société, s'agissant du rôle des femmes et de leur participation aux affaires publiques. À cet égard, il est préoccupé quant à la compatibilité avec le Pacte de la législation relative à la succession au trône qui exclut les femmes. Le Liechtenstein devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre la violence domestique contre les femmes et les enfants, en punir les auteurs et assurer la prise en charge tant matérielle que psychologique des victimes. En outre, le Liechtenstein devrait intensifier ses efforts dans la lutte qu'il mène contre l'extrémisme de droite et autres expressions de xénophobie et d'intolérance religieuse.
En ce qui concerne la Serbie-et-Monténégro, le Comité note que la protection des droits de l'homme au Kosovo est actuellement l'une des principales responsabilités de la présence civile internationale. Il considère que le Pacte continue de s'appliquer au Kosovo et encourage la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) de fournir, sans préjudice du statut juridique du Kosovo, un rapport sur la situation des droits de l'homme au Kosovo depuis juin 1999. Le Comité se félicite des progrès significatifs accomplis en matière de réforme législative et institutionnelle suite au changement de régime d'octobre 2000 et tout particulièrement de l'adoption en février 2003 d'une Charte sur les droits de l'homme et des minorités et sur les libertés civiles ainsi que de l'abolition de la peine de mort. Le Comité se dit néanmoins préoccupé par la persistance de l'impunité face aux graves violations des droits de l'homme, commises tant durant la période qui a précédé que durant celle qui a suivi les changements d'octobre 2000; par le manque de progrès en ce qui concerne les enquêtes et les poursuites à l'encontre des responsables de ces crimes; et par le fait qu'à plusieurs reprises, la Serbie-et-Monténégro n'a pas pleinement coopéré avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, y compris pour ce qui est de l'arrestation des accusés.
Le Comité a par ailleurs adopté des observations provisoires, à titre confidentiel, à l'intention du Gouvernement de la République centrafricaine, suite à l'examen de la situation dans cet État partie en présence d'une délégation mais en l'absence de tout rapport, le pays n'ayant pas produit de rapport depuis son adhésion au Pacte en 1986.
Au cours de la session, le Comité a en outre examiné, dans le cadre de séances privées, des communications reçues conformément aux dispositions du Protocole facultatif se rapportant au Pacte et qui habilite le Comité à examiner les plaintes émanant de particuliers qui relèvent de la juridiction d'un des États parties au Pacte ayant ratifié le Protocole facultatif.
Lors de sa prochaine session, qui se tiendra à 18 octobre au 5 novembre prochain à Genève, le Comité a prévu d'examiner les rapports des États parties suivants: Albanie, Bénin, Finlande, Maroc et Pologne. Il examinera en outre la situation au Kenya, État partie au Pacte très en retard dans la présentation de ses rapports.
Observations finales sur les rapports examinés au cours de la session
Dans ses observations finales sur le rapport périodique de la Belgique, le Comité apprécie la qualité des informations fournies dans le rapport et dans les réponses de la délégation, mais regrette l'insuffisance des renseignements relatifs à l'effectivité des mesures adoptées pour mettre en œuvre le Pacte. Il accueille avec satisfaction la ratification du deuxième Protocole facultatif au Pacte visant à abolir la peine de mort et salue l'entrée en vigueur, le 1er mai 2004, de la loi-programme instituant un mécanisme de tutelle pour les mineurs étrangers non accompagnés. Le Comité se félicite en outre de l'adoption de la loi du 19 mars 2004 octroyant le droit de vote aux élections communales aux étrangers non ressortissants d'un pays de l'Union européenne. Saluant les nombreux projets visant à une meilleure application du Pacte, le Comité relève néanmoins avec inquiétude que certains d'entre eux sont en examen depuis de longues années. Le Comité réitère sa recommandation que la Belgique garantisse les droits acquis par les victimes à un recours utile, sans aucune discrimination. Il est préoccupé à cet égard par le fait que le droit à un recours effectif des personnes se trouvant irrégulièrement en Belgique est menacé par l'obligation faite aux fonctionnaires de police de dénoncer leur présence sur le territoire. Le Comité est préoccupé par le fait que la Belgique ne soit pas en position d'affirmer l'applicabilité automatique du Pacte lorsqu'il exerce un pouvoir ou un contrôle effectif sur quiconque en dehors de son territoire, par exemple dans le cadre des missions de paix ou des missions militaires de l'OTAN. Il est également préoccupé par le faible nombre de condamnations pénales ou disciplinaires prononcées à l'encontre des militaires soupçonnés d'avoir commis des violations des droits de l'homme dans le cadre de la mission des Nations Unies en Somalie.
Le Comité est préoccupé par la persistance d'allégations de violences policières, souvent accompagnées d'actes de discrimination raciale, et recommande que l'État accroisse ses efforts pour procéder à des enquêtes plus approfondies. À cet égard, il devrait modifier la composition du personnel des services d'enquête du Comité permanent de contrôle des services de police («Comité P») en vue de garantir leur efficacité et leur indépendance réelles et faire cesser toute utilisation excessive de la force lors de l'éloignement d'étrangers. Le Comité recommande de mettre fin immédiatement à la rétention d'étrangers en zone de transit aéroportuaire et de conférer un caractère suspensif non seulement aux recours en extrême urgence, mais aussi aux recours en annulation assortis d'une demande de suspension ordinaire formulés par tout étranger contre les mesures d'éloignement les concernant. Il s'inquiète aussi de ce que les règles de fonctionnement des centres INAD (passagers non admis sur le territoire) et les droits des étrangers qui y sont détenus ne semblent pas être clairement établis par la loi. Il se déclare en outre préoccupé par le fait que la directive du Ministère de l'intérieur relative à la double peine ne garantit pas que des étrangers ayant la majorité de leurs attaches en Belgique ne seront pas expulsés. Préoccupé par le fait qu'aucune mosquée n'est encore reconnue officiellement en Belgique, le Comité recommande à l'État partie d'accroître ses efforts pour faire en sorte que la religion musulmane bénéficie des mêmes avantages que les autres religions. Il note également avec inquiétude que plusieurs actes racistes, xénophobes, antisémites ou antimusulmans sont intervenus sur le territoire et que des partis politiques incitant à la haine raciale peuvent continuer à bénéficier du système de financement public.
La Belgique devrait poursuivre ses efforts en matière de lutte contre la traite et le trafic des êtres humains, garantir une meilleure prise en charge des victimes et assurer leur accueil dans de bonnes conditions. Le Comité est par ailleurs préoccupé par la fréquence avec laquelle se produisent des cas de violence sexuelle à l'égard des enfants et recommande à la Belgique de prendre les mesures nécessaires pour protéger les enfants dans tous les domaines. Le Comité réitère par ailleurs ses préoccupations au sujet des droits des personnes gardées à vue, et la Belgique devrait accorder la priorité à la modification de son Code de procédure pénale et garantir les droits des personnes gardées à vue d'informer leurs proches de leur détention, et d'accéder à un avocat et à un médecin dès les premières heures de la détention. Préoccupé par la persistance de la surpopulation carcérale, le Comité recommande en outre à la Belgique d'accroître ses efforts, dans le cadre d'une politique axée sur la recherche d'une diminution du nombre des détenus, ainsi que d'adopter une législation appropriée définissant le statut juridique des détenus. Il recommande également de mettre fin dans les meilleurs délais à la pratique de maintien des malades mentaux dans les prisons, qui est incompatible avec le Pacte.
S'agissant du rapport périodique de la Namibie, le Comité prend note des efforts déployés par la Namibie, depuis son indépendance en 1990, pour mettre en place et développer des institutions démocratiques. Il salue l'esprit de coopération avec les organisations non gouvernementales et les organes internationaux dont les autorités ont fait preuve dans ce processus. Le Comité salue en particulier l'abolition de la peine de mort pour tous les crimes. Il se félicite de ce que la Constitution considère les normes du droit international et les accords internationaux auxquels la Namibie a adhéré comme partie intégrante du droit interne et apprécie les informations relatives à l'invocation, dans certains cas récents, des dispositions du Pacte devant les tribunaux.
Toutefois, le Comité s'inquiète de ce que l'article 144 de la Constitution namibienne pourrait entraver la pleine mise en œuvre du Pacte et recommande de réexaminer le statut du Pacte dans l'ordre juridique interne. Se félicitant de la mise en place d'un Médiateur, le Comité recommande le renforcement de son mandat et l'allocation de ressources supplémentaires afin de lui permettre de remplir son rôle avec efficacité. Le Comité prend note des informations fournies par la Namibie sur l'application de ses constatations relatives aux affaires «Diergaardt et consorts contre Namibie» et «Müller et Engelhard contre Namibie», mais déplore l'absence de mécanisme pour les mettre en œuvre. Le Comité se félicite en outre de l'adoption de la loi sur l'égalité dans le mariage tout en demeurant préoccupé du fort taux de mariages coutumiers non enregistrés et de leurs conséquences sur les droits des épouses et des enfants, notamment en ce qui concerne l'héritage et la propriété de la terre. Le Comité apprécie par ailleurs les efforts déployés par la Namibie pour lutter contre le VIH/sida tout en notant que ces efforts ne sont pas à la mesure du problème. La Namibie devrait adopter des mesures d'ensemble en facilitant l'accès d'un plus grand nombre de personnes à un traitement antirétroviral adéquat.
Par ailleurs, le Comité note avec préoccupation que le crime de torture n'est pas défini dans le code pénal namibien. Prenant note de la diminution des allégations de violations des droits de l'homme dans le Nord de la Namibie, le Comité recommande l'établissement d'un mécanisme d'enquête et de sanction des cas de torture, d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions. Il recommande également la poursuite des efforts visant à assurer le respect de la règle des 48 heures en matière de détention avant jugement et réitère la nécessité d'établir un organe externe et indépendant chargé de visiter les centres de détention et de recevoir les plaintes ainsi qu'un mécanisme indépendant d'enquête sur les allégations de brutalités policières. En outre, la Namibie devrait prendre des mesures pour renforcer l'application de l'aide juridictionnelle et garantir son octroi aux personnes qui en ont besoin, notamment grâce à un meilleur financement. La Namibie devrait également prendre des mesures pour prévenir les menaces ou les attaques contre des journalistes et faire en sorte que, dans de tels cas, des enquêtes rapides et en profondeur soient menées et des mesures adéquates prises contre les responsables. L'État devrait prendre des mesures urgentes afin de garantir le droit d'être jugé dans des délais raisonnables notamment en augmentant le nombre de juges afin de réduire les retards dans le traitement des affaires. La Namibie devrait en outre prendre des mesures pour établir un système de justice pénale pour les jeunes afin d'assurer qu'ils soient traités selon leur âge. Tout en se félicitant de l'entrée en vigueur de la loi sur la violence domestique, le Comité recommande que la Namibie encourage davantage le recours à cette loi, notamment par le biais d'une meilleure sensibilisation des forces de police à aux besoins des victimes et par la création de foyers supplémentaires pour les accueillir. Le Comité recommande par ailleurs à la Namibie d'envisager d'introduire l'interdiction de la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle dans une législation contre la discrimination.
Le Comité se félicite du dialogue franc et constructif engagé avec la délégation du Liechtenstein. Il se félicite également de la concision du rapport, élaboré par ailleurs dans le respect de ses directives. Le Comité note que, tant en droit que dans la pratique, le Liechtenstein apparaît largement en conformité avec les obligations découlant du Pacte. Le Comité se félicite de l'engagement du Liechtenstein à ne pas extrader un citoyen vers un pays où il serait passible de la peine capitale. Le Comité est d'avis que le Liechtenstein devrait continuer d'envisager le retrait de toutes ses réserves au Pacte. En outre, le Liechtenstein devrait prendre les mesures nécessaires pour assurer la conformité avec l'article 4 du Pacte de ses dispositions relatives aux pouvoirs de dérogation en cas de proclamation d'un état d'exception.
Tout en notant les nombreuses mesures adoptées par le Liechtenstein pour traiter de la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, le Comité remarque la persistance d'une attitude passive de la société, s'agissant du rôle des femmes dans de nombreux domaines, particulièrement en ce qui concerne leur participation aux affaires publiques. Le Comité est en outre préoccupé quant à la compatibilité avec le Pacte de la législation relative à la succession au trône. Le Liechtenstein devrait continuer à prendre des mesures efficaces, y compris par le biais d'amendements législatifs, afin de remédier à l'inégalité entre les femmes et les hommes. Le Comité encourage le Liechtenstein à prendre des mesures visant à renforcer la participation des femmes au gouvernement et aux processus de décision, et à promouvoir encore l'égalité entre les femmes et les hommes dans les domaines non-publics. Le Comité regrette que la violence domestique contre les femmes et les enfants continue d'exister au Liechtenstein. Le Liechtenstein devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour lutter contre ce phénomène, en punir les auteurs et assurer la prise en charge tant matérielle que psychologique des victimes. Par ailleurs, le Liechtenstein devrait envisager un amendement à sa Constitution pour s'assurer du principe d'égalité devant la loi de toutes les personnes relevant de sa juridiction. En outre, le pays devrait intensifier ses efforts dans la lutte qu'il mène contre l'extrémisme de droite et autres expressions de xénophobie et d'intolérance religieuse. Le Liechtenstein devrait s'assurer que les dispositions relatives à la légitime défense ainsi que les règles relatives à l'usage de la force par les agents chargés de faire appliquer la loi, soient pleinement compatibles avec le principe de proportionnalité énoncé dans les Principes de base des Nations Unies relatifs à l'usage de la force et des armes à feux par les officiers chargés de l'application de la loi.
Le Comité est préoccupé par l'existence de lacunes dans la protection des droits des personnes arrêtées et des personnes placées en détention provisoire. Il regrette que le Code de procédure pénale du Liechtenstein ne prévoie pas que les personnes placées en détention préventive soient informées de leur droit à garder le silence. Aussi, le Comité recommande-t-il au Liechtenstein de mettre sa législation sur cette question en conformité avec les articles 9 paragraphe 3, et 14 paragraphe 3 (d) du Pacte. Le Liechtenstein devrait par ailleurs envisager l'amendement du mécanisme de nomination des juges, afin de garantir pleinement le principe de l'indépendance du judiciaire. Le pays devrait enfin réviser sa politique en matière de financement des congrégations religieuses en s'assurant que chacune d'entre elles se voit allouer une part équitable de ces fonds.
Dans ses observations finales sur le rapport périodique de la Serbie-et-Monténégro, le Comité note que, conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité, le Kosovo continue actuellement de faire partie de la Serbie-et-Monténégro, bien qu'il soit sous administration internationale intérimaire, la protection des droits de l'homme étant l'une des principales responsabilités de la présence civile internationale. Le Comité considère que le Pacte continue de s'appliquer au Kosovo et encourage la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) de fournir, sans préjudice du statut juridique du Kosovo, un rapport sur la situation des droits de l'homme au Kosovo depuis juin 1999. Le Comité se félicite des progrès significatifs accomplis en matière de réforme législative et institutionnelle suite au changement de régime d'octobre 2000. Il se réjouit tout particulièrement de l'adoption en février 2003 d'une Charte sur les droits de l'homme et des minorités et sur les libertés civiles. Il félicite la Serbie-et-Monténégro d'avoir aboli la peine de mort et d'avoir accédé au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
Le Comité se dit néanmoins préoccupé par la persistance de l'impunité face aux graves violations des droits de l'homme commises tant durant la période qui a précédé que durant celle qui a suivi les changements d'octobre 2000. Le Comité souligne que la Serbie-et-Monténégro a l'obligation d'enquêter pleinement sur tous les cas de violations présumées des droits de l'homme au cours des années 1990 et de poursuivre en justice toutes les personnes qui sont suspectées d'avoir été impliquées dans de telles violations. Tout en prenant note du travail effectivement réalisé s'agissant des exhumations et des autopsies pratiquées sur 700 corps provenant de charniers de Batajnica, le Comité se dit préoccupé par le manque de progrès en ce qui concerne les enquêtes et les poursuites à l'encontre des responsables de ces crimes. Le Comité reste en outre préoccupé par le fait qu'à plusieurs reprises, la Serbie-et-Monténégro n'a pas pleinement coopéré avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, y compris pour ce qui est de l'arrestation des accusés. Il recommande au pays d'accorder audit Tribunal sa pleine coopération dans tous les domaines.
Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par les mesures prises au titre de l'état d'urgence, qui comportent des dérogations substantielles aux obligations incombant au pays, en matière de droits de l'homme, en vertu du Pacte. Il est recommandé à la Serbie-et-Monténégro de prendre immédiatement des mesures pour enquêter sur toutes les allégations de torture durant l'opération «Sabre» (déclenchée après le meurtre du premier ministre serbe Zoran Djindjic.). Le Comité se dit d'autre part préoccupé par les allégations qui continuent de faire état de mauvais traitements infligés à des personnes par des agents responsables de l'application des lois. Il est recommandé au pays de mettre sur pied, au niveau de la République, des organes civils indépendants ayant autorité pour recevoir toutes les plaintes d'usage excessif de la force par la police et d'enquêter à leur sujet. Le Comité note par ailleurs que la Serbie-et-Monténégro est une voie de transit principale pour le trafic des êtres humains et, de plus en plus, un pays d'origine et de destination. Il est recommandé au pays de prendre des mesures pour combattre ce trafic et de prendre des mesures fortes pour le prévenir et imposer des sanctions à ceux qui exploitent de la sorte les femmes et les enfants. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par la forte incidence de la violence domestique. Il exprime également sa préoccupation face au manque de protection pleine et entière des droits des personnes déplacées internes en Serbie-et-Monténégro. Il note que les Roms du Kosovo déplacés durant le conflit de 1999 constituent un groupe particulièrement vulnérable et se dit préoccupé qu'une discrimination largement répandue persiste à l'encontre des Roms dans tous les domaines de la vie. Le Comité recommande en outre au pays d'assurer que tous les membres des minorités ethniques, religieuses et linguistiques, que leurs communautés soient ou non reconnues comme des minorités nationales, jouissent effectivement d'une protection contre la discrimination et soient en mesure de jouir de leur propre culture, de pratiquer leur propre religion et d'utiliser leur propre langue. Il est également recommandé à la Serbie-et-Monténégro d'assurer le strict respect de l'indépendance du pouvoir judiciaire.
Composition du Comité
Le Comité est composé de dix-huit experts qui siègent à titre individuel. Les membres du Comité sont M. Abdelfattah Amor (Tunisie); M. Nisuke Ando (Japon); M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati (Inde); Mme Christine Chanet (France); M. Franco Depasquale (Malte); M. Maurice Glèlè-Ahanhanzo (Bénin); M. Walter Kälin (Suisse); M. Ahmed Tawfik Khalil (Égypte); M. Rajsoomer Lallah (Maurice); M. Rafael Rivas Posada (Colombie); M. Nigel Rodley (Royaume-Uni); M. Martin Scheinin (Finlande); M. Ivan Shearer (Australie); M. Hipolito Solari Yrigoyen (Argentine); M. Patrick Vella (Malte); M. Ruth Wedgwood (États-Unis); M. Roman Wieruszewski (Pologne); et M. Maxwell Yalden (Canada).
M. Amor est Président du Comité. MM. Rivas Posada, Rodley et Wieruszewski sont Vice-Présidents et M. Shearer est le Rapporteur du Comité.
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