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DEV/2493-AG/EF/3098

LE MICROCRÉDIT, QUI FAIT DES PAUVRES DE VÉRITABLES ACTEURS DU DÉVELOPPEMENT, NE DOIT PAS ÊTRE PERÇU COMME UNE AUMÔNE

18/11/2004
Communiqué de presse
DEV/2493
AG/EF/3098


Deuxième Commission

Lancement de l’année internationale du

Microcrédit 2005


LE MICROCRÉDIT, QUI FAIT DES PAUVRES DE VÉRITABLES ACTEURS DU DÉVELOPPEMENT, NE DOIT PAS ÊTRE PERÇU COMME UNE AUMÔNE


La cérémonie de lancement de l’Année internationale du microcrédit 2005

soulignele rôle important de ce secteur financier dans la lutte contre la pauvreté


« Le microfinancement peut permettre aux populations pauvres d’échapper au cercle vicieux de la pauvreté.  Si nous voulons atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, c’est ce type de progrès qu’il nous faut réaliser, a déclaré ce matin le Secrétaire général, M. Kofi Annan, dans son message transmis par vidéoconférence au cours de la cérémonie de lancement de l’Année internationale du microcrédit, qui sera célébrée tout au long de l’année 2005.  Le microcrédit n’est pas une forme de charité, a-t-il estimé, mais plutôt un moyen de permettre aux ménages à faible revenu de disposer des mêmes services que les autres familles.  C’est également une façon de reconnaître que les pauvres, qui ne doivent pas être perçus comme un problème, peuvent plutôt être la solution à la question de la pauvreté.  L’année internationale du microcrédit doit être l’occasion d’ouvrir à des familles les portes de la prospérité », a souligné le Secrétaire général.


Soutenant le point de vue du Secrétaire général selon lequel la microfinance ne doit pas être considérée comme une forme d’aumône ou de charité, la Princesse Mathilde de Belgique, porte-parole de l’Année internationale du microcrédit, a indiqué que les familles et les personnes qui ont bénéficié de cette forme de prêts financiers ont largement démontré leur solvabilité.  Dans les sociétés où il est pratiqué, le microcrédit contribue considérablement à l’amélioration de la vie des femmes, à leur autonomisation, et à la promotion de l’égalité entre les sexes, a fait remarquer la Princesse Mathilde.  Les efforts que va déployer la communauté internationale ne devront pas se limiter à l’année 2005, mais être conçus comme une œuvre de longue haleine, a-t-elle insisté, en promettant son soutien à cette tâche. 


Outre les personnalités qui ont pris la parole aujourd’hui à l’occasion du lancement de l’Année internationale du microcrédit, les participants à cette rencontre ont entendu Mme Titiek Winarti, la Lauréate du Prix mondial de la création de petites entreprises, qui leur a relaté la manière dont, à partir de moyens limités, elle a réussi à créer une entreprise couronnée de succès.  De nationalité indonésienne, Mme Winarti a déclaré que c’est en se basant sur une idée simple, la fabrication artisanale de sacs à main, et sur un sens de solidarité sociale et communautaire, qu’elle dirige aujourd’hui une entreprise employant une trentaine de jeunes handicapés.  Ces jeunes, autrefois sans emploi, montrent que lorsqu’on leur donne une chance, les pauvres ou les personnes vulnérables peuvent être productifs et vivre dans la dignité.  « Notre histoire n’aurait cependant pas été un succès sans le petit financement que nous a accordé une coopérative indonésienne qui soutient les femmes au foyer souhaitant créer de petites entreprises », a déclaré Mme Winarti.  


Cet après-midi, deux tables rondes organisées sur le microcrédit ont porté sur les thèmes suivants: perspectives existant en matière de microfinance en 2005, et contraintes qui empêchent la création d’un secteur financier inclusif.


À l’issue des débats, le représentant du Groupe consultatif sur le microcrédit a fait un résumé des points de vues exprimés par les différents panélistes et a déclaré que l’Année internationale du microcrédit serait couronnée de succès si elle s’appuyait sur la réalisation des avantages que peut générer la microfinance en faveur des pauvres.  Les gouvernements devraient favoriser la promotion du microcrédit, a-t-il dit, en exhortant aussi les ONG à s’impliquer dans la propagation des activités de microfinance.  Si les gouvernements parvenaient à mettre en place des politiques et des cadres réglementaires favorables à ces activités, ces actions pourraient inciter le secteur privé et les organismes de financement à s’impliquer dans le développement de la microfinance.  Enfin, a estimé le représentant, un changement de mentalité est nécessaire, afin que les pauvres soient perçus comme des acteurs importants de l’économie et de véritables agents de développement.


LANCEMENT DE L’ANNÉE INTERNATIONALE DU MICROCRÉDIT 2005


Déclarations


Le Secrétaire général, M. KOFI ANNAN, a déclaré ce matin, dans son message transmis par vidéoconférence à la cérémonie du lancement de l’Année internationale du microcrédit, que dans de nombreux pays, le microfinancement s’était révélé une arme efficace contre la misère et la faim.  Un prêt d’un montant modeste, un compte d’épargne, une façon abordable d’envoyer son salaire à sa famille sont des moyens qui peuvent faire une grosse différence dans la vie d’une famille pauvre ou à faible revenu, a déclaré le Secrétaire général.  Ceux qui ont accès au microfinancement peuvent gagner plus, acquérir des biens et mieux se prémunir contre des pertes ou des revers éventuels, a-t-il poursuivi.  Ces gens et ces familles peuvent faire des projets d’avenir, au lieu de se contenter de survivre au jour le jour, et ils peuvent investir dans leur alimentation, leur logement, leur santé et l’instruction de leurs enfants, a dit le Secrétaire général.  Le microfinancement peut leur permettre d’échapper au cercle vicieux de la misère, a indiqué M. Annan. 


« Si nous voulons atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement, c’est précisément ce type de progrès qu’il nous faut réaliser », a déclaré le Secrétaire général, en soulignant que le microfinancement n’était pas une forme de charité.  C’est plutôt une façon de permettre aux ménages à faible revenu de disposer des mêmes services que tous les autres, et c’est une façon de reconnaître que les pauvres ne sont pas le problème, mais la solution, a-t-il souligné.  Le microfinancement permet de soutenir des entreprises productives, et donc d’aider des collectivités à prospérer.  Quand l’entreprise privée ne peut se développer, les pays ne le peuvent pas non plus, a relevé le Secrétaire général.  « Que l’Année internationale du microcrédit soit donc l’occasion d’ouvrir à des familles les portes de la prospérité », a souhaité le Secrétaire général.  


M. MARCO BALAREZO (Pérou), Président de la Commission économique et financière, a déclaré que l’objectif du lancement officiel de l’Année internationale du microcrédit 2005 était de mobiliser la communauté internationale afin d’atteindre les objectifs de développement.  Il s’agit de sensibiliser le public sur l’importance du microcrédit et de la microfinance, a-t-il poursuivi, afin d’aider les pauvres en bâtissant un secteur financier inclusif.  Il a estimé que cet objectif était fortement facilité par les milliers d’institutions de microfinancement à travers le monde.  Il a expliqué qu’au Bangladesh, le microcrédit bénéficiait en grande partie aux femmes et qu’une étude en Ouganda avait indiqué que les clients du microfinancement tiraient partie des microcrédits et, en outre, entraient rapidement dans le marché du travail.  Ces deux exemples, a-t-il ajouté, montrent comment l’on peut changer la vie des gens pauvres pour le mieux grâce à un microfinancement.  M. Balarezo a affirmé que l’Année internationale du microcrédit devait être l’occasion d’offrir à tous un accès à différents services financiers, avec la participation du secteur privé.  Il s’est déclaré convaincu que la Réunion de Maurice chargée d’évaluer la mise en œuvre du Programme d’action de la Barbade concernant les petits États insulaires en développement, en janvier prochain, et l’examen des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) à New York, en septembre 2005, seront des événements uniques pour promouvoir le microcrédit. 


M. MARK MALLOCH BROWN, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), s’est déclaré convaincu que, par le biais du microfinancement, des millions de personnes, et notamment les femmes, peuvent sortir de la pauvreté.  Cette forme de mécanisme financier peut contribuer à la réduction, de moitié, du nombre de personnes vivant dans des situations de pauvreté dans le monde, a dit M. Malloch Brown.  Dans les régions où se pratique le microcrédit, les familles peuvent améliorer leurs conditions de vie, bénéficier d’un minimum d’accès aux structures de santé, et envoyer leurs enfants à l’école, a indiqué l’Administrateur du PNUD.  Les services financiers traditionnels n’atteignent pas les pauvres, a-t-il fait remarquer.  L’Année internationale du microcrédit doit donc sensibiliser les structures financières traditionnelles à la demande et aux possibilités qui existent sur le terrain et qui leur permettraient de faire des affaires avec les populations pauvres.  Le taux de remboursement des crédits accordés par les organismes de microcrédit aux pauvres est souvent plus élevé que celui qui existe dans les opérations conduites par les systèmes bancaires classiques qui s’adressent généralement à une clientèle aisée, a relevé M. Malloch Brown.  Cette constatation devrait rassurer les entrepreneurs financiers qui voudraient créer des services de microcrédit et de microfinance pour les pauvres, a-t-il souligné.


M. IFTHEKAR AHMED CHOWDHURY, Représentant permanent du Bangladesh auprès des Nations Unies et Vice-Président de la 59ème session de l’Assemblée générale, a déclaré au nom du Président de l’Assemblée générale, M. Jean Ping, que le microcrédit et la microfinance constituaient certaines des innovations les plus réussies en matière de développement social et économique.  Ils peuvent contribuer de manière positive à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a-t-il poursuivi, en fournissant aux clients la possibilité de prendre part à des activités productives et, ainsi, d’obtenir des revenus plus élevés.  De tels résultats permettraient de réduire la vulnérabilité des pauvres face aux crises personnelles ou économiques.  Les pauvres pourront également utiliser les revenus tirés du microcrédit pour améliorer l’éducation de leurs enfants.  Le microcrédit a aussi ouvert des possibilités aux femmes qui peuvent participer activement à l’économie, a-t-il insisté.  M. Chowdhury a donc plaidé pour un meilleur accès au microfinancement, affirmant que pour atteindre un plus grand nombre de personnes, il fallait axer les efforts sur la formation et la diversification des produits, avec la participation du secteur privé.  Enfin, il a espéré que l’Année internationale du microcrédit servirait de catalyseur afin que la microfinance et le microcrédit aboutissent au développement social et humain pour tous les peuples dans le monde. 


Son Altesse royale, la Princesse MATHILDE de Belgique, Porte-parole de l’Année internationale du microcrédit, a déclaré qu’elle adhérait à l’objectif assigné de la politique du microcrédit qui est d’aider les individus et les groupes les plus pauvres à améliorer leurs conditions de vie.  La Princesse Mathilde a ensuite indiqué qu’elle se rendrait la semaine prochaine en Chine pour rencontrer des groupes de personnes qui ont bénéficié de cette forme de financement et dont la vie a été améliorée.  La microfinance contribue beaucoup à l’amélioration de la vie des femmes et à leur autonomisation, et son impact se traduit par la promotion de l’égalité entre les sexes, a indiqué la Princesse Mathilde.  Cependant, a-t-elle noté, la grande majorité des populations des pays en développement ne bénéficient pas encore de services de microcrédit.  Il faut mettre fin à l’exclusion dont les personnes à faibles revenus sont victimes de la part des services financiers traditionnels, a-t-elle estimé.  Le microcrédit n’est pas une forme de charité, et les personnes qui en ont bénéficié ont largement démontré leur solvabilité, a-t-elle fait remarquer.  L’Année internationale du microcrédit doit permette à la communauté internationale de généraliser le microfinancement.  L’effort à déployer devrait cependant s’inscrire dans la durée, bien au-delà de l’année 2005, a recommandé la Princesse Mathilde, en promettant son soutien à cette tâche qui doit être perçue comme une œuvre de longue haleine.


M. JOSÉ ANTONIO OCAMPO, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a affirmé que l’Année internationale du microcrédit offrait l’occasion de mettre en lumière le microcrédit et de prouver qu’il s’agit d’un instrument important pour le développement social et économique.  Il a indiqué que les institutions de microfinancement avaient créé de véritables changements dans la vie des pauvres.  L’Année internationale doit permettre de progresser dans ce sens et d’aider les pauvres qui n’ont pas accès aux services financiers, a-t-il insisté en rappelant que ceux-ci pouvaient être un outil important dans la réalisation des OMD alors que les progrès accomplis depuis la Déclaration du Millénaire doivent être examinés l’année prochaine.  M. Ocampo a souligné que les institutions de microfinancement avaient remis en cause l’idée que les pauvres étaient des emprunteurs à risques.  Désormais, ils ne sont plus perçus comme des bénéficiaires d’aide mais comme des clients et acteurs dynamiques.  Il s’est toutefois interrogé sur la manière d’atteindre les plus pauvres des pauvres, précisant qu’aucun modèle n’était universellement applicable et devait donc tenir compte des circonstances locales.  Par ailleurs, il a souhaité que la révolution du microcrédit engendre d’autres innovations dans les services financiers, notamment en ce qui concerne l’épargne et l’assurance.  Il a également insisté sur le rôle du secteur privé et des nouveaux partenariats à développer, affirmant que toutes les parties prenantes devaient s’engager dans un dialogue fructueux et partager les pratiques optimales dans ce domaine.  La création d’un secteur financier inclusif est un défi important qu’il nous faut relever, a-t-il conclu. 


Mme TITIEK WINARTI (Indonésie), Lauréate du Prix mondial de la création de petite entreprise, a indiqué qu’au départ, elle fabriquait, de manière artisanale, des sacs à main.  Après avoir constaté que de nombreuses personnes handicapées de sa région étaient sans emploi, elle a utilisé le capital qu’elle avait tiré de son activité pour les former à la fabrication de sacs à main.  La bonne qualité des marchandises produites a été reconnue par certains clients, puis par une coopérative qui soutient les femmes au foyer désirant se lancer dans les affaires, a indiqué la Lauréate.  Cette coopérative m’a accordé un petit prêt qui a permis à ma petite entreprise d’augmenter sa capacité de production et de trouver des acheteurs au Brésil, a dit la Lauréate.  Ces succès nous permettent aujourd’hui d’employer une trentaine de jeunes handicapés, a-t-elle ensuite indiqué.  Ce sont ces jeunes qui sont les véritables héros de notre histoire et c’est à eux que revient le prix qui nous est accordé aujourd’hui, a-t-elle souligné, en demandant à l’assistance de ne pas ressentir de la pitié pour ces jeunes travailleurs qui veulent simplement être reconnus comme des êtres humains productifs.


M. IFTHEKAR AHMED CHOWDHURY (Bangladesh), s’exprimant au nom du Premier Ministre de son pays, la Begum Khaleda Zia, a expliqué que le succès du microcrédit avait prouvé que les pauvres avaient la créativité et la capacité d’améliorer leurs conditions de vie lorsqu’on leur fournissait un accès aux services financiers.  Il a indiqué qu’au Bangladesh, le microcrédit représentait un partenariat efficace entre le Gouvernement et la société civile, montrant que si les moyens étaient limités, les idées ne l’étaient pas.  C’est là notre contribution à la réflexion sur le développement, a-t-il ajouté, précisant que l’Année du microcrédit devait être l’occasion de partager les expériences des divers pays.  Il a souligné le rôle crucial de partenariats entre les États, le système multilatéral, les ONG et le secteur privé afin de mettre en œuvre un cycle de progrès basé sur le microcrédit.  Enfin, il s’est dit convaincu que la création d’un secteur financier inclusif donnant aux pauvres l’accès aux services financiers contribuerait à réduire de moitié le nombre des pauvres dans le monde, d’ici à 2015.


M. SULTAN AL-MAHMOUD (Qatar), s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a rappelé que le microcrédit joue un rôle essentiel pour réduire la pauvreté et pour renforcer l’autonomie des groupes les plus vulnérables, dont les femmes.  Il a toutefois insisté sur la nécessité de mettre en place des institutions de microfinancement afin de fournir aux millions de pauvres du monde des ressources financières adéquates et un environnement propice.  Le secteur privé et la société civile doivent compléter les efforts des gouvernements, a-t-il poursuivi, tout en espérant que les partenaires de développement accordent des fonds pour les institutions de microfinancement.  Il a affirmé que les États Membres, le système des Nations Unies, les institutions financières internationales, le secteur privé et la société civile avaient tous un rôle de partenariat à jouer pour promouvoir le microcrédit et le microfinancement.  L’Année internationale du microcrédit offre une excellente occasion pour mettre en avant les bonnes pratiques dans le domaine du microcrédit, pour partager des idées et pour innover afin d’élargir les choix offerts aux pauvres, a-t-il conclu.  


M. DIRK JAN VAN DEN BERG (Pays-Bas), au nom de l’Union européenne, s’est félicité du lancement de l’Année internationale du microcrédit, qu’il considère comme l’occasion de construire des services financiers inclusifs et accessibles aux pauvres, femmes et hommes.  L’Union européenne pense que la microfinance et le microcrédit jouent un rôle important dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et en particulier de celui visant la réduction de moitié du nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté dans le monde.  Les clients des services de microfinancement, en particulier les femmes, sont capables, une fois qu’un prêt leur est accordé, d’investir dans des activités qui leur permettent ensuite d’améliorer les conditions de vie de leurs familles.  Les microfinancements peuvent aussi permettre aux pauvres de mieux faire face à des situations d’urgence ou de catastrophes, a estimé le représentant.  La communauté internationale, a-t-il recommandé, doit faire tout ce qui est possible pour que les femmes aient un accès équitable au microcrédit.  L’Union européenne considère le développement des zones rurales comme une priorité, et met l’accent sur cette question dans ses rapports avec les pays des Caraïbes, d’Afrique et du Pacifique (ACP).  Nous considérons le microcrédit comme un outil d’autonomisation des femmes et de promotion du développement économique et social.


M. RÉGIS AVANTHAY (Suisse) a souligné que le microcrédit donne accès aux pauvres, et particulièrement aux femmes aux services financiers et leur offre des opportunités pour améliorer leurs conditions de vie.  Il a affirmé que la Suisse avait toujours soutenu le développement d’un secteur financier inclusif.  Pour que le microfinancement réussisse, a-t-il poursuivi, il doit se fonder sur des politiques stables et adaptées aux différentes situations dans les pays en développement.  Par ailleurs, il a souhaité que les succès dans le domaine de la microfinance et du microcrédit soient pris en compte lors de l’examen de la mise en œuvre du Consensus de Monterrey.  Enfin, il a espéré que l’Année internationale du microcrédit serait l’occasion d’élargir l’accès aux services financiers à ceux qui en ont le plus besoin, notamment les femmes et les populations rurales.


Mme KATHERINE McKEE (États-Unis) a indiqué que les États-Unis ont versé cette année plus de 100 millions de dollars aux programmes de microcrédit existant dans les pays en développement cette année.  Les États-Unis pensent qu’il faut multiplier le nombre d’acteurs privés opérant dans ce domaine, qui doit être élargi et prendre en compte les structures d’épargne et les transferts de fonds des travailleurs migrants, a dit la représentante.  Notre pays pense que les activités de microfinancement devraient être perçues sous un angle commercial, a estimé la représentante.  Il est essentiel de bâtir des structures qui soient plus accueillantes pour les services financiers, a-t-elle poursuivi.  Plus de 3 milliards d’épargne dormante existent actuellement à travers le monde.  Cet argent est transféré par des travailleurs de pays en développement et pourrait être utilisé dans le cadre de transactions financières pour être investi dans des activités productives.  Les États-Unis proposent que soient créés des indicateurs permettant d’évaluer le nombre de personnes qui doivent être classées comme pauvres, ou comme étant exclues des services financiers traditionnels.  Ceci permettrait de mieux cibler les efforts que la communauté internationale peut déployer dans le domaine du microcrédit.


Des tables rondes seront également organisées dans le cadre du lancement de l’Année internationale du microcrédit 2005.


TABLE RONDE I SUR LE THÈME « PERSPECTIVES SUR LA MICROFINANCE: OÙ SERONS NOUS EN 2005? »


Les participants à la première table ronde se sont interrogés sur l’évolution du microfinancement dans les années à venir et la manière d’atteindre le plus grand nombre de pauvres, en leur offrant des services financiers adaptés à leurs besoins et à des coûts de plus en plus réduits.  M. RUDJITO, Président de la Banque Rakyat d’Indonésie, a présenté l’expérience de cette institution, une des plus importantes dans le monde en matière de microcrédit.  Il a expliqué que la Banque Rakyat avait d’abord fourni des crédits locaux puis s’était axée sur des pratiques commerciales par des prêts et emprunts en faveur des pauvres dans les années 1980.  Il a indiqué que ces activités connaissaient un essor continu, atteignant maintenant 32 millions d’emprunteurs, dont le montant moyen des prêts est de l’ordre de 400 dollars.  Il a estimé que les clefs du succès de la microfinance étaient l’accessibilité, l’offre d’un large éventail de services, la durabilité et la viabilité.  M. RUPERT SCOFIELD, Directeur de FINCA, un grand réseau d’institutions financières axées sur la pauvreté, a également fait écho à cette idée en affirmant que l’aspect social devait aller de pair avec la microfinance et qu’il fallait travailler côte à côte avec ceux qui fournissent les services sociaux.  C’est par cette alliance, a-t-il insisté, que l’on pourra atteindre un grand nombre de pauvres et les aider à sortir de leur situation.  Il a dressé un tableau positif de la tendance à venir en matière de microfinance, estimant qu’en raison de la concurrence entre les institutions financières, elles devront continuer à diversifier leurs services et les offrir à des coûts plus faibles. 


Le rôle des grandes institutions financières dans le domaine de la microfinance a été mis en lumière par Mme MARIA OTERO, Présidente d’AcciÓn Internacional.  Elle a estimé qu’il existait 200 institutions locomotives faisant preuve des meilleures pratiques de microfinancement, notamment parce que ce concept était véritablement intégré dans le système financier des pays.  Ce sont leurs expériences et leurs résultats qui nous ferons avancer dans les années à venir, a-t-elle précisé.  Selon elle, les banques commerciales ayant désormais compris les avantages de la microfinance tenteront de prendre part à ce secteur mais les grandes institutions déjà établies préserveront leur statut de chef de file.  Elle a affirmé qu’en raison de cette concurrence, ces institutions devaient maintenant penser en termes de stratégie et adopter une approche plus commerciale.  Enfin, elle a appelé les Nations Unies à appuyer ce qui existe déjà, notamment par l’assistance technique et le renforcement des capacités locales. 


Mme NANCY BARRY, Présidente « Women’s World’s Banking, un réseau mondial de microfinancement en faveur des femmes, a insisté sur le changement qui s’est opéré dans la perception des pauvres: ils sont aujourd’hui des clients à part entière et veulent être traités ainsi.  Elle a expliqué que les femmes pauvres désiraient une diversification des produits mais que ceci n’était pas encore offert.  En matière de

la mobilisation de l’épargne locale et nationale, question jugée essentielle par tous les participants, elle a déclaré qu’il y avait beaucoup à apprendre des coopératives et caisses de crédit, bien que les instruments doivent être adaptés selon les pays.  Elle a souhaité la mise en place d’un système qui travaille à l’avantage de la majorité mais a estimé que l’on en était encore loin, même dans les pays où des actions sont prises dans ce sens.  Elle a aussi salué la venue de nouveaux acteurs dans la microfinance, ajoutant que ce secteur avait besoin d’idées nouvelles pour son avenir et que, dans cette étape, le capital humain serait aussi important que l’argent. 


Enfin, Mme MSRILOU VAN GOLSTEIN BROUWERS, de TriodosInternational, a souligné l’augmentation extraordinaire des fonds internationaux qui fournissent des prêts en devises dures.  En revanche, les fonds locaux sont peu nombreux.  Concernant l’évolution de la microfinance, elle a partagé le point de vue des autres panélistes et a estimé que les banques commerciales participeraient de plus en plus à ce secteur.  Toutefois, a-t-elle indiqué, les institutions de microfinancement sauront mieux servir leurs clients que les banques commerciales qui, elles, adoptent une politique financière plus conservatrice.  Par ailleurs, elle a déclaré que les fonds internationaux comme Triodos International auraient un rôle à jouer notamment dans la gouvernance des banques de microfinancement.  La microfinance est un instrument puissant mais d’autres facteurs sont nécessaires pour sortir les gens de la pauvreté, a-t-elle affirmé, en citant, entre autres, l’accès des pauvres au marché pour le développement de leur entreprise, les infrastructures et le droit de propriété. 


TABLE RONDE II SUR LE THÈME « QUELLES SONT LES CONTRAINTES QUI EMPÊCHENT LA CRÉATION D’UN SECTEUR FINANCIER INCLUSIF? »


Les participants à cette table ronde ont soumis leurs idées concernant la manière dont devrait être conçu et dont devrait fonctionner un secteur financier inclusif pouvant servir toutes les couches de population.  La table ronde s’est efforcée d’identifier les obstacles qui se posent à la mise en place, au plan national, de ce type de secteur financier qui devrait surtout mette fin à l’exclusion des pauvres de la vie économique.


M. RENÉ AZOKLI, Président du PADME, qui est un réseau d’institutions de microcrédit au Bénin, a indiqué que pendant longtemps les usuriers ont dominé le secteur de la microfinance.  Mais à cause des taux d’intérêt trop élevés qu’ils imposaient à leurs débiteurs, d’autres formes d’institutions de microcrédit ont pris la place qu’occupaient ces usuriers.  Ce mouvement a été soutenu par des ONG soucieuses de faciliter l’insertion des pauvres dans la vie économique, a indiqué M. Azokli.  Les problèmes qui se posent en ce moment aux institutions de microfinance sont d’abord liés aux coûts administratifs de leur fonctionnement, qui sont trop élevés, a-t-il ajouté.  Ces coûts obligent les organismes de financement à imposer à leur tour des taux d’intérêt élevés à leurs emprunteurs, ce qui leur fait parfois perdre leur raison d’exister.  Un autre problème important auquel fait face la microfinance est celui de sa politisation, certains dirigeants et hommes politiques l’utilisant à des fins électoralistes, a indiqué M. René Azoli.


Mme LEONOR DE VELASCO, Présidente de la « Fundación Mundo Mujer-Popayan  » de Colombie, a déclaré que la promotion de la démocratie favorisait l’expansion du microcrédit.  Les instituts de microfinancement peuvent être viables et profitables, a estimé Mme De Velasco.  Les banques traditionnelles devraient donc être encouragées à s’investir dans le microcrédit.  En Bolivie et au Brésil, les organismes de microcrédit ont obtenu beaucoup de succès, a relevé Mme De Velasco. 

Les bonnes pratiques qui ont permis ces succès devraient être mieux connues, a-t-elle dit, en regrettant que l’information concernant les bonnes pratiques ne circule pas de manière satisfaisante.  Les gouvernements devraient promouvoir le microcrédit dans le cadre des programmes de lutte contre la pauvreté en créant des structures nationales de gestion et des réglementations qui favoriseraient le fonctionnement de la microfinance, a-t-elle recommandé.


M. DIEDRICK LAMAN TRIP, Directeur des communications du Groupe financier international néerlandais ING et Président national de cette banque et société d’assurance, a estimé que le principal problème à résoudre était celui de la propagation des services de microfinance auprès des populations et des groupes qui en ont vraiment besoin.  ING est prête à partager son expérience dans les pays où elle opère, a dit M. Trip.  Mais la difficulté à laquelle fait face ING se situe au niveau de la création de partenariat avec des institutions locales.  Le Groupe ING serait heureux de travailler avec des institutions de microfinancement dans tous les pays où il a des succursales, afin de partager son expérience et les meilleures pratiques qu’il a adoptées, a dit M. Trip.  Dans les pays du Nord, notamment aux Pays-Bas et au sein de l’Union européenne, il faudrait mener des campagnes de sensibilisation et d’information pour expliquer aux gens et aux décideurs que le microcrédit n’est pas synonyme de charité, mais plutôt d’opportunités d’affaires, a-t-il ajouté.


M. STANLEY FISCHER, Vice-Présidentde Citigroup, ancien Directeur général adjoint et Économiste en chef du FMI et ancien Vice-Président de la Banque mondiale, a déclaré que les coûts des transactions et de l’administration des opérations de crédit étaient le plus grand obstacle au développement de la microfinance.  L’amortissement de ces frais est difficile quand on s’adresse à une clientèle aux moyens limités, a estimé M. Fischer.  Bien que la solvabilité des emprunteurs soit bonne, a-t-il dit, on ne peut pas en conclure que la microfinance soit immunisée contre des crises causées par le non-remboursement des emprunts, à l’évolution des taux de change, ou à l’impact de mauvaises réglementations nationales.  Il faudrait en outre réduire le nombre des lois et règlements auxquels sont confrontés les promoteurs de services financiers.  Il faudrait uniformiser la législation en vigueur dans les différents pays d’une même région, afin de simplifier les procédures, a recommandé M. Fischer.  La microfinance, a fait remarquer M. Fischer, ne pourra se développer tant que les populations occidentales continueront à considérer, à tort, que la microfinance est une œuvre de charité.  Les médias ont un rôle à jouer pour corriger cette image.


Dans son intervention, M. CHARLES KONAN BANI, Gouverneur de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), a indiqué que la disparition des banques nationales de développement qui existaient dans les pays du Sud, avait entraîné celle des services financiers qu’elles offraient aux populations les plus vulnérables.  Ce vide a immédiatement été comblé par des usuriers, puis par de petites institutions de microfinance qui ont connu un essor rapide.  Dans les huit pays membres de la BCEAO, les activités de microcrédit sont aujourd’hui devenues indispensables, a dit M. Konan Bani.  Cependant, a-t-il regretté, le manque de liquidités et de ressources financières, la faiblesse des capacités humaines de gestion, et les retards dans le développement de réglementations adaptées, ont ralenti le développement des institutions de microfinance.  La BCEAO, qui s’est impliquée dans le soutien au microcrédit, est en train de mettre en place un programme régional d’appui à la microfinance, a annoncé le Gouverneur de la BCEAO.


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