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CNUCED/277

DES APPELS MULTIPLES AU RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION ET DES RELATIONS COMMERCIALES ENTRE PAYS DU SUD MARQUENT L'OUVERTURE DE LA CNUCED XI

14/06/2004
Communiqué de presse
CNUCED/277


11èmeConférence des Nations Unies

surle commerce et le développement

matin


DES APPELS MULTIPLES AU RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION ET DES RELATIONS COMMERCIALES ENTRE PAYS DU SUD MARQUENT L'OUVERTURE DE LA CNUCED XI


Cette « nouvelle géographie du commerce mondial » prônée par le Président

du Brésil est soutenue par les Présidents de l'Uruguay, du Paraguay et de la Bolivie


SAO PAULO, 14 juin -- Accueillis par le Maire de Sao Paulo, Martha Suplicy, et le Gouverneur de l'Etat du même nom, Geraldo Alckmin, Chefs d'Etat et Ministres des 192 Etats membres de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) ont ouvert, ce matin, les travaux de leur onzième session quadriennale dans la plus ancienne ville du Brésil.  Sao Paulo a été décrite par le Président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, comme « l'illustration de toutes les contradictions sociales qui incitent à renforcer la lutte contre la pauvreté et la coopération en faveur du développement ». 


La CNUCED, qui célèbre cette année ses 40 ans, a reçu un hommage appuyé du Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan: « Sans elle, pendant toutes ces années, le débat sur le développement aurait été moins riche, et les peuples du monde bien plus pauvres ».  La CNUCED tient sa onzième session au bon moment, a-t-il estimé en soulignant que ce qui manque aujourd'hui ce n'est pas tant les moyens d'élever le niveau de vie partout dans le monde mais bien  au contraire la cohérence. 


« Le renforcement de la cohérence entre les stratégies nationales de développement et les processus économiques dans le monde afin de favoriser la croissance économique et le développement », est précisément le thème choisi par cette CNUCED XI qui doit s'achever le 18 juin prochain.  Représentant le pays hôte de la CNUCED X, en 2000, le Premier Ministre de la Thaïlande a, tout comme le Secrétaire général, jugé que la cohérence ne passe pas seulement par l'aboutissement du processus de Doha, ville dans laquelle l'Organisation mondiale du commerce (OMC) avait lancé le cycle de négociations dit « Cycle de développement ». 


La cohérence exige aussi, selon ces deux personnalités, le renforcement des relations commerciales Sud-Sud.  La division par deux des tarifs douaniers pratiqués entre pays en développement augmenterait la valeur des échanges de 15,5 milliards de dollars, a indiqué le Secrétaire général.  « S'il n'y a pas de garantie que la coopération Sud-Sud marche mieux que les relations entre pays du Sud et pays du Nord, nous devons cependant reconnaître que le vieux jeu auquel on nous a habitué ne fonctionne pas de manière équitable.  Il est injuste que chaque fois que le Sud se trouve en position de marquer des points, on change les règles du jeu », a soutenu le Premier Ministre thaïlandais. 


Il faut donc « une nouvelle géographie du commerce mondial », a résumé le Président du Brésil en arguant qu'elle  nécessite l'élargissement du système mondial de préférences qui viserait à associer aux 44 pays signataires une quarantaine d'autres.  Le Président du Brésil a rappelé que c'est son pays, aux côtés de l'Inde et de l'Afrique du Sud, qui est à l'origine de l'Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté.  Il a fait une autre proposition aujourd'hui visant à créer un centre international de recherche sur le financement du développement. 


Le Président brésilien et le Premier Ministre thaïlandais ont ensuite participé au débat de haut niveau aux côtés du Président de l'Uruguay, Jorge Battle, du Président du Paraguay, Nicanor D. Frutos et du Président de la Bolivie, Carlos Diego Mesa Gisbert.  Ce débat de haut niveau, qui avait pour objectif de préciser les contours de « la nouvelle géographie du commerce mondial », a été précédé par l'hommage que le Secrétaire général de la CNUCED, Rubens Ricupero, a rendu au Professeur Celso Furtado, père de la construction socioéconomique du Brésil dont les réflexions sur l'évolution de l'économie contemporaine, notamment les flux de capitaux, restent d'une actualité brûlante. Celso Furtado avait passé une dizaine d'années à la Commission économique et sociale pour l'Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC). 


C'est dans le cadre de nombreux forums auxquels participeront le Secrétaire général, les chefs d'Etat et de gouvernement, les ministres concernés ainsi que les représentants des fonds et programmes des Nations Unies, de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI), de l'OMC, du secteur privé et de la société civile que seront examinés le thème principal de la CNUCED XI et ses quatre sous-thèmes, à savoir les stratégies de développement dans une économie mondialisée; la capacité de production et la compétitivité internationale; et la faculté du système commercial international et des négociations commerciales à générer des progrès dans le développement; et le partenariat pour le développement.  De ce foisonnement d'idées émaneront un plan d'action et une déclaration politique.


La CNUCED XI poursuivra ses travaux cet après-midi à partir de 14 heures 30.  Après le débat de haut niveau, elle tiendra une table ronde sur les relations entre le commerce et la lutte contre la pauvreté.  


Déclarations


Prenant la parole à la cérémonie inaugurale de la onzième Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED XI), M. THAKSIN SHINAWATRA, Premier Ministre de la Thaïlande, a déclaré que l'optimisme qui aurait pu exister après la  CNUCED X, tenue à Bangkok, avait été érodé par les suites des attentats du 11 septembre 2001, la crise de l'Iraq et l'échec des négociations de Cancun.  La mondialisation sur laquelle le monde avait beaucoup misé, est menacée par de nombreux mécontentements dans la mesure où elle n'a pas créé un monde plus juste, notamment pour les populations des pays les plus pauvres. Création humaine, la mondialisation devrait mieux être gérée pour servir toute l'humanité.  Le "Consensus de Washington" a échoué, et n'est resté qu'une illusion.  Les pays en développement continuent de lutter avec la pauvreté, la faim, les maladies et la criminalité.  Les institutions multilatérales comme les Nations Unies et la Banque mondiale croulent sous le poids des problèmes créés par la mondialisation.  Une réforme est indispensable, mais une simple réforme institutionnelle ne suffira pas à sauver le multilatéralisme.  De plus en plus, les pays se tournent vers des formes de coopération régionale, sous-régionale ou bilatérale.


La coopération Sud-Sud n'a jamais été plus nécessaire, a dit le Premier Ministre thaïlandais.  Nous ne devons pas nous contenter de blâmer les pays du Nord.  Ceci ne nous mène pas à grand chose, comme nous l'avons constaté dans le passé.  La Thaïlande ne suggère pas que les pays du Sud abandonnent les engagements qu'ils ont pris avec ceux du Nord.  Au contraire, nous devons les exhorter à poursuivre les négociations promises à Doha.  Cependant, la Thaïlande suggère que les pays en développement réduisent leur trop grande dépendance envers les marchés des pays développés.  Nous devons réduire les risques en explorant de nouvelles opportunités, qui existent au Sud.  Les schémas du commerce Sud-Sud montrent que celui-ci est loin d'atteindre son vrai potentiel.  Certains critiques disent que le Sud est caractérisé par des réalités très disparates.  Nous devons leur répondre que cette diversité est un atout et une richesse.  Si l'on ne peut garantir que la coopération Sud-Sud fonctionne mieux que celle qui est établie entre les pays du Nord et les pays du Sud, nous devons cependant reconnaître que le vieux jeu auquel on nous a habitué n'est pas équitable.  Il est injuste que chaque fois que le Sud se trouve en position de marquer des points, on change les règles du jeu.  Nous devons donc créer un nouveau jeu, ce que la Thaïlande et d'autres pays d'Asie ont fait, sur la base de partenariats et de l'autosuffisance.  Nous sommes aussi en train de créer de nouveaux cadres de coopération avec les autres pays en développement, non seulement en Asie, mais aussi en Afrique.  Nous comptons sur la CNUCED XI pour qu'elle contribue à la création d'une mondialisation à face humaine.


Sans la CNUCED, pendant toutes ces années, le débat sur le développement aurait été moins riche, et les peuples du monde bien plus pauvres, a déclaré le Secrétaire général de l'ONU, KOFI ANNAN, après avoir rendu un vibrant hommage à Sergio Vieira de Mello et réclamé une minute de silence en mémoire de celui qui a consenti au sacrifice ultime pour le bien des peuples.  Cette Conférence se tient au bon moment, a-t-il ensuite estimé: « Nous avons tout ce qu'il faut pour élever le niveau de vie partout dans le monde », a-t-il affirmé en arguant que ce qu'il manque trop souvent c'est la cohérence.  Donnant les exemples d'un entrepreneur asiatique confronté au manque d'infrastructures, d'une agricultrice africaine aux prises avec les règles phytosanitaires et les obstacles découlant de la politique des subventions ou encore d'un cultivateur d'herbes médicinales dont l'apport n'est ni reconnu ni rémunéré à sa juste valeur, le Secrétaire général a déclaré qu'« il ne faut pas que ce qui est donné d'une main soit repris de l'autre ».  Il ne faut pas, a-t-il poursuivi, que les règles censées faire tomber les barrières élèvent de nouveaux obstacles.  Il faut que les pays qui poussent les autres à libéraliser le commerce soient prêts à faire de même chez eux.  S'ils ne le font pas, a averti le Secrétaire général, on peut parler de manque de cohérence mais on peut tout aussi bien parler de discrimination.  Et c'est précisément contre la discrimination que les gens veulent que cette Conférence s'oppose avec la plus grande fermeté. 


Ce qui manque, a précisé le Secrétaire général, c'est un régime commercial propice au développement.  Se félicitant des initiatives prises dans ce sens par l'Union européenne, les Etats -Unis et d'autres, il a toutefois estimé que ce qu'il faut surtout c'est que les négociations de Doha aboutissent.  Il faut aussi, a-t-il ajouté, que les possibilités offertes par la coopération et l'intégration commerciales Sud-Sud soient exploitées.  Si les pays en développement se mettaient d'accord pour réduire de moitié les tarifs douaniers moyens qu'ils imposent les uns aux autres, la valeur des échanges augmenterait de 15,5 milliards de dollars, a souligné le Secrétaire général.  Cette mesure pourrait jouer un rôle déterminant dans la création d'une nouvelle géographie du commerce mondial prônée par le Président du Brésil, a conclu Kofi Annan.


M. JULIAN HUNTE, Président de la 58e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, a souligné la nécessité d'examiner la cohérence entre les politiques économiques nationales et les prescriptions édictées au niveau mondial.  Lors de la CNUCED X à Bangkok, on avait affirmé que la mondialisation était porteuse de nouvelles perspectives de croissance.  Ce constat se basait sur l'espoir d'une ouverture des marchés et de transfert de technologies en faveur des pays en développement.  La réalité est cependant toute autre dans la majorité des pays en développement, alors qu'au Nord, les pays ont toujours été plus prospères.  A cet égard, le non-respect des engagements de Doha et l'échec des négociations de Cancun suscitent beaucoup d'interrogations.


Nous estimons que les sociétés transnationales devraient rendre davantage compte aux gouvernements et aux institutions internationales pertinentes.  Le Groupe de haut niveau nommé par le Secrétaire général accomplit actuellement un travail de recherches en vue de soumettre des recommandations sur ces questions importantes.  Nous devons respecter les engagements pris lors des conférences internationales sur le financement du développement et le développement durable.


Les pays en développement devraient bénéficier d'un meilleur accès aux marchés des pays du Nord, ce qui ne serait après tout qu'un geste d'équité.  L'appui à l'ajustement et le renforcement des capacités devraient être favorisés.  Concernant les économies les plus vulnérables, notamment celles des petits Etats insulaires en développement, M. Hunte a insisté sur la nécessité de reconnaître leurs spécificités et les problèmes particuliers auxquels ils sont confrontés.  Il faut aider ces pays à ne plus dépendre d'un ou de deux produits d'exportation.  Le droit au développement devrait devenir une réalité.  Le problème de l'élimination de la pauvreté devrait être résolu dans ce cadre.  Le système multilatéral doit devenir plus cohérent, et nous sommes heureux que la CNUCED participe désormais au dialogue de haut niveau qui a été établi entre l'ECOSOC, les institutions de Bretton Woods et l'Organisation mondiale du commerce.  En conclusion, M. Hunte a soutenu la mission assignée à la CNUCED de promouvoir un ordre économique mondial plus juste et plus équitable et souhaité qu'elle ait les moyens de s'acquitter de son mandat.  


M. LUIZ INACIO LULA DA SILVA, Président du Brésil, a décrit la ville hôte comme un pôle dynamique dans les domaines culturel, commercial et des services.  Mais Sao Paulo est aussi, a-t-il dit, l'illustration de toutes les contradictions sociales qui constituent les fondements de la lutte contre la pauvreté et de la promotion du développement.  Rendant hommage aux pionniers de la CNUCED, le Président brésilien a argué que la Conférence est devenue indispensable pour le développement, lequel ne peut être une création spontanée des forces du marché.  Le développement, a précisé le Président, passe par le débat politique et démocratique et l'échange d'expériences qu'encourage la CNUCED.  La tâche du développement, a-t-il insisté, ne peut dépendre du seul commerce.  Elle exige des efforts dans le domaine des infrastructures et de la productivité pour créer les conditions nécessaires à la croissance économique.  Le Président a plaidé pour que la place d'une bonne architecture financière internationale soit réaffirmée afin d'encourager les changements voulus.  Les économies qui ont profité du Plan Marshall, a-t-il rappelé, ont pu très rapidement assurer leur relance.  Il est impératif d'incorporer dans le système multilatéral du commerce les secteurs dans lesquels les pays en développement ont un avantage comparatif.  Tout comme le Secrétaire général, le Président brésilien a plaidé pour l'élargissement du système mondial de préférences tarifaires dont bénéficient les 44 pays signataires, en y intégrant 40 autres pour accélérer l'édification de la "nouvelle géographie du commerce mondial", accroître la confiance dans un grand nombre de pays en développement et faire naître un meilleur espoir d'entente économique entre le Nord et le Sud. 


Le Président brésilien a, dans ce contexte, proposé la création d'un centre international de recherche et d'études sur le financement du développement.  Il a aussi donné rendez-vous aux leaders mondiaux, en septembre prochain à l'Assemblée générale à New York, pour insuffler un nouvel élan à la lutte contre la faim et la pauvreté.  A cette fin, il a proposé de créer un fonds dans le cadre de l'Alliance mondiale, qui avait été établie par son pays, l'Inde et l'Afrique du Sud.


Débat de haut niveau sur la nouvelle géographie du commerce: la coopération Sud-Sud dans un monde de plus en plus interdépendant


Ouvrant ce débat, le Président du Brésil a déclaré que cette nouvelle géographie économique qui a été facilitée par les échanges mondiaux pouvait être aujourd'hui aisément constatée.  Dans cette nouvelle géographie, que nous proposons d'examiner, nous ne prétendons pas remplacer les traditionnels échanges Nord-Sud.  Le commerce entre pays du Sud va en augmentant, ce qui prouve que des potentialités existent dans ce domaine.  Ce qui est important, a-t-il fait remarquer, c'est que les échanges de produits manufacturés se multiplient.  Le commerce Sud-Sud a connu une croissance annuelle moyenne de 10% au cours de la décennie écoulée.  Cette évolution peut également être observée au niveau des échanges interrégionaux.  Une réduction de 30% des tarifs douaniers aboutirait à une augmentation de la valeur des échanges de l'ordre de 15 milliards de dollars US d'après les études de la CNUCED.  La somme de 18 milliards pourrait être rapidement atteinte.  Nous ne parviendrons cependant à réaliser ces objectifs qu'en faisant preuve d'une volonté politique soutenue, et en prenant en compte les besoins des pays du Sud les plus vulnérables, a souligné le Président du Brésil.


A son tour, le Président de l'Uruguay, JORGE BATTLE, a estimé que les énormes efforts déployés par les Nations Unies en faveur des pays en développement se sont révélés vains car ils n'étaient pas accompagnés par des activités indispensables à l'amélioration économique et sociale.  Donnant un exemple, il a expliqué qu'avec ses 10 000 Casques bleus dont 2 000 Uruguayens, l'effort économique et financier consenti par la communauté internationale en République démocratique du Congo (RDC) servira à bien peu de choses si les pays africains  ne disposent pas des infrastructures nécessaires à leur relance économique.  L'ONU doit se concentrer sur la coopération et faire comprendre à ces pays combien il est impératif de réaliser les travaux d'infrastructures pour assurer une autosuffisance rapide.  La RDC est un pays immensément riche doté de ressources considérables.  Il lui manque cependant une chose essentielle, à savoir des routes, a souligné le Président qui s'est interrogé sur la pertinence du commerce pour améliorer  les conditions sociales et économiques alors que des éléments fondamentaux, comme les infrastructures de base, font cruellement défaut.  Le Président a prôné le renforcement des capacités d'analyse de la CNUCED et de sa faculté à contribuer aux projets commerciaux, de développement et de création des institutions.  Il a aussi réclamé une CNUCED qui soit à même d'offrir des cours de formation aux fonctionnaires et aux négociateurs nationaux" pour être mieux armés face à leurs interlocuteurs du Nord.  Le Président a conclu en exprimant l'attachement de son pays à un système commercial multilatéral équitable, non discriminatoire et fondé sur des règles et à un développement du commerce Sud-Sud. 


M. NICANOR DUARTE FRUTOS, Président du Paraguay, a déclaré que parfois les pays du Sud mettent en doute la confiance en raison de la répétition des mêmes arguments lors des grandes rencontres internationales.  La situation des pays d'Amérique latine, a-t-il regretté, a empiré au cours de ces dernières années, malgré l'avancée des processus démocratiques sur le continent.  Les dirigeants des pays de la région doivent, de ce fait, faire preuve de beaucoup plus d'imagination s'ils veulent redonner confiance à leurs peuples et un sens au terme "démocratie".  Si nous ne pouvons traduire nos actions et nos discours en normes et en valeurs au profit de nos peuples, nous nous retrouverons dans une situation où la démocratie elle-même n'aura plus de sens.  Si le Conseil de sécurité de l'ONU, garant de la paix et de la sécurité, ne dispose plus des instruments de sa légitimité et de son mandat, comment peut-on imaginer que la CNUCED ait la moindre chance de faire entendre efficacement sa voix?  Le Paraguay est en faveur de la création d'un Conseil de sécurité économique au sein duquel seraient définies les règles de l'économie et des échanges mondiaux.  Nous ne devons pas nous laisser aller au pessimisme.  La question récurrente des subventions agricoles doit, une fois pour toutes, être réglée. La paix mondiale sera dépendante d'une mondialisation plus juste. 


Si la situation actuelle perdure, la mondialisation ne pourra aboutir qu'à une polarisation qui deviendra une menace à la paix mondiale.  Les pays riches devraient avoir une vision juste des choses.  Nous n'avons pas besoin de leur charité, a rappelé le Président du Paraguay.  Le monde a besoin en revanche d'humanisme.  Si la justice ne s'instaure pas, nous ne voyons pas comment certains pays pourraient continuer à faire des demandes à d'autres groupes de pays qui, il faut le noter, sont déjà les plus démunis.  Il est maintenant temps de passer de la réflexion à l'action.  Nous voulons qu'une attention spéciale soit accordée aux  pays enclavés sans littoral.  La priorité doit être accordée à la mise en œuvre des engagements et des objectifs adoptés lors de la Conférence d'Almaty.  Tout en reconnaissant le bien-fondé d'accusations de corruption portées contre certains dirigeants de pays en développement, il faut aussi reconnaître la lourde responsabilité des pays du Nord et de certains facteurs extérieurs aux pays pauvres dans la situation de pauvreté actuelle, a estimé M. Frutos.  C'est pourquoi, nous souhaitons que la CNUCED retrouve les principes éthiques et moraux qui ont présidé à sa création.  Nous devons pouvoir offrir aux prochaines générations un monde où il sera plus facile de dialoguer et de tracer la voie d'un espoir partagé.


M. CARLOS DIEGO GISBERT, Président de la Bolivie, a estimé que le processus des années 60, qui était au cœur de la philosophie de la CNUCED, n'est plus valable car, dans la pratique, les préférences dont pourraient bénéficier les pays à faible revenu ne jouent plus qu'un rôle de "béquilles".  En effet, ces préférences n'ont pas épargné aux pays concernés l'impact négatif des asymétries et des inégalités du système commercial multilatéral.  Le Président bolivien a donc prôné une réflexion approfondie sur la coopération Sud-Sud qui semble une solution valable.  Cette option doit inclure les pays les moins avancés (PMA) et mettre l'accent sur le transfert des technologies.  Il a toutefois estimé que les différences de développement entre les pays du Sud exige le maintien de relations Nord-Sud fortes.  La taille de certaines économies du Sud, a-t-il précisé, est beaucoup plus proche de certaines économies du Nord.  Connaissant un faible niveau de développement, la Bolivie  a constaté que la modernisation et  les réformes structurelles ne lui ont pas permis de réaliser les progrès souhaités en raison du coût social de ces efforts et du déséquilibre macroéconomique qu'ils ont suscité. 


Le deuxième problème est que les théories libérables orthodoxes constituent un défi pour des pays comme la Bolivie qui prône l'intervention de l'Etat.  L'Etat, s'est expliqué le Président, peut créer des activités dans les sphères sociales et économiques et maintenir ainsi un certain équilibre quand le marché n'apporte rien.  Le Président bolivien a donc voulu que le rôle de l'Etat soit envisagé sous un autre angle.  Il a aussi souligné que le système des traitements préférentiels a emprisonné les pays pauvres dans un cercle vicieux qui les empêchent d'être des partenaires égaux sur la scène économique.  La vulnérabilité devient ainsi un obstacle à une pleine participation au commerce mondial, a insisté le Président en préconisant de réfléchir plus à fond sur l'impact des politiques de coopération internationale sur les politiques économiques nationales. 


Le Premier Ministre de la Thaïlande a déclaré qu'il appréciait les vues du Président Lula du Brésil sur la nouvelle géographie du commerce international et la coopération Sud-Sud.  Les pays du Sud doivent développer entre eux les échanges commerciaux, et c'est ce que fait la Thaïlande.  Nous devons réduire la dépendance des pays du Sud à l'égard des pays du Nord.  Le Gouvernement thaïlandais promeut une économie qui soit autosuffisante et prône le développement d'un système basé sur la maîtrise des connaissances.  C'est dans ce but que nous avons lourdement investi dans les technologies de l'information et de la communication (TIC).  Nous soutenons également le renforcement de partenariats entre pays en développement, tout en entretenant des liens et un dialogue franc avec les pays développés.  Au sein de l'Association des nations d'Asie du Sud-Est (ANASE) et du Dialogue de la Sous-Région du Grand Mékong, nous avons développé des cadres de coopération prometteurs.  Nous sommes aussi en faveur du développement de projets qui aient un impact réel sur la vie de nos populations. 


La Thaïlande est favorable à la création d'un marché asiatique des valeurs financières qui relancerait les investissements et les échanges commerciaux de la région.  Par ailleurs, nous devons, a indiqué le Premier Ministre thaïlandais, nous assurer que le pays dispose d'un cadre et de règles qui s'harmonisent avec celles du reste du monde.  Manquant de ressources humaines et techniques, les pays du Sud ont parfois du mal à suivre les règles d'engagement commercial énoncées au niveau mondial.  C'est pourquoi la Thaïlande soutient la promotion de programmes de renforcement des capacités nationales.  Chaque pays en développement devra faire le bilan de ses forces et de ses faiblesses de manière à faire ensuite des choix qui lui permettent de mieux réaliser ses objectifs.  


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