CHARTE/89

LES CONSEQUENCES DES SANCTIONS ET LA RATIONALISATION DES TRAVAUX AU CENTRE DES PREOCCUPATIONS DE LA SESSION 2004 DU COMITE SPECIAL DE LA CHARTE

29/03/2004
Communiqué de presse
CHARTE/89


Comité spécial de la Charte des Nations Unies

et du raffermissement du rôle de l’Organisation

245e séance – matin


LES CONSEQUENCES DES SANCTIONS ET LA RATIONALISATION DES TRAVAUX AU CENTRE DES PREOCCUPATIONS DE LA SESSION 2004 DU COMITE SPECIAL DE LA CHARTE


Le Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation a entamé, ce matin, les travaux de sa session 2004.  Cette séance a été l’occasion d’entendre une dizaine de délégations, dans le cadre du débat général, qui se sont exprimées sur les conséquences des sanctions sur les pays tiers, la prévention et le règlement pacifique des différends et la rationalisation et les méthodes de travail du Comité spécial. 


Pour ce débat, le Comité était notamment saisi de nouvelles propositions.  Au titre du premier document intitulé « Déclaration relative aux normes et principes fondamentaux régissant l’adoption et l’application de sanctions et d’autres mesures de coercition », présenté par la Fédération de Russie*, le Comité déciderait, entre autres, que l’imposition de sanctions est une mesure extrême qui ne doit être prise que lorsque l’on a épuisé tous les moyens pacifiques de règlement des différends, y compris les mesures provisoires prévues à l’Article 40 de la Charte des Nations Unies.  Présenté par le Japon, le deuxième texte intitulé « Méthodes de travail du Comité spécial de la Charte des Nations Unies et du raffermissement du rôle de l’Organisation présenté notamment par le Japon »** formule des propositions sur les efforts de rationalisation des travaux conformément à la résolution 58/248 adoptée par l’Assemblée générale le 23 décembre dernier.  Enfin, le Comité était également saisi de son rapport sur les travaux de sa session 2003***.


Au cours des discussions, le représentant de la Fédération de Russie a invité le Comité spécial à examiner de manière approfondie le document qu’elle présentait sur les éléments fondamentaux des principes juridiques applicables aux opérations de la paix dans le cadre du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies***.  Une fois ce document négocié, a-t-il suggéré, le Comité pourrait le transmettre au Comité spécial pour les opérations de maintien de la paix en tant que document juridique.  Intervenant à son tour, le représentant de la Jamahiryia arabe libyenne a appuyé un autre document présenté par la Fédération de Russie et le Bélarus**** qui propose de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice sur les conséquences légales du recours à la force par les Etats sans autorisation préalable du Conseil de sécurité, proposition qu’il a définie comme un moyen d’asseoir la primauté du droit international.  Exprimant son inquiétude face au danger que représente l’unilatéralisme, le représentant de la République populaire démocratique de Corée a souhaité, à l’instar de nombreuses délégations, une réforme du Conseil de sécurité qui puisse permettre de promouvoir efficacement le multilatéralisme.  La plupart des délégations ont souligné l’importance pour le Comité spécial de poursuivre ses travaux sur les moyens de répondre aux conséquences des sanctions sur les pays tiers.  Appelant les délégations à s’efforcer de prendre des mesures concrètes, le représentant de la Chine a notamment proposé la création d’un fonds d’affectation spéciale pour assister ces pays. 


S’agissant de l’organisation des travaux, le représentant de la Fédération de Russie, tout comme celui du Brésil, intervenant au nom du Groupe de Rio, a fait sienne la proposition encourageant le Secrétaire général à trouver des ressources pour continuer la publication du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies. 


En début de séance, le Comité a également élu les membres de son Bureau, et adopté l’ordre du jour provisoire* de ses travaux.  Il a élu par acclamation son Président, Carl Peersman, des Pays-Bas.  Zlatko Dimitrov (Bulgarie), Rolando Ruiz-Rosas (Pérou), et Mohammed Haj Ibrahim (République arabe syrienne) ont été élus Vice-Présidents.  Les fonctions de Rapporteur du Comité seront assurées par Sabri Chaabani (Tunisie).


A la présente session, le Comité spécial a pour mandat de poursuivre, entre autres, l’examen de toutes les propositions concernant la question du maintien de la paix et de la sécurité internationales sous tous ses aspects; et, à titre prioritaire, la question de la mise en œuvre des dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l’assistance aux Etats tiers touchés par l’application de sanctions imposées en vertu du Chapitre VI de la Charte; de garder à son ordre du jour la question du règlement pacifique des différends entre Etats; de poursuivre l’examen des propositions concernant le Conseil de tutelle, ceci, à la lumière du rapport présenté par le Secrétaire général, et de poursuivre, de manière prioritaire, l’examen des voies et moyens qui permettraient d’améliorer et de rationaliser les méthodes de travail du Comité qui devra identifier des mesures pouvant contribuer à la revitalisation des travaux de l’Organisation des Nations Unies. 


Outre ceux déjà cités, ont pris la parole les représentants des pays suivants: Irlande (au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés), Turquie, Guatemala, et République arabe syrienne. 


Le Comité tiendra sa prochaine séance plénière le jeudi 8 avril, à 10 heures.  


* A/AC.182/L.114/Rev.1

** A/AC.182/L.108/Rev.315

*** A/58/33

**** A/AC.182/L.104/Rev.2


Débat général


M. ZHANG YISHAN (Chine) a souligné le caractère prioritaire de la question de l’aide aux Etats tiers touchés par l’application de sanctions et de l’adoption et de l’application de sanctions ou d’autres mesures de coercition.  Toutefois, a-t-il expliqué, son pays estime que l’imposition des sanctions ne vise pas forcément à contribuer au règlement de différends; c’est pourquoi, les sanctions ne doivent être invoquées qu’après l’épuisement de tous les autres recours.  En revanche, il a insisté sur la nécessité d’étudier les moyens pratiques de soutenir les Etats tiers, y compris la création d’un fonds.  Appuyant le document de travail présenté par la Fédération de Russie concernant les principes juridiques applicables aux opérations de maintien de la paix dans le cadre du Chapitre VI de la Charte, le délégué de la Chine a estimé que le Comité avait toute légitimité à étudier ces questions dans le cadre de ses compétences, et en coordination avec le travail mené par d’autres organes.  S’agissant des méthodes de travail, le représentant a appelé toutes les parties à s’efforcer d’améliorer le travail du Comité et à adopter une approche constructive orientée vers l’adoption de mesures concrètes.  Concluant, il a estimé que la question de la réforme du Conseil de tutelle devait être étudiée avec soin et dans le cadre général du renforcement de l’ONU.


S’exprimant au nom de l’Union européenne, des pays candidats et des pays associés, PETER BARCROFT (Irlande) a rappelé que l’Assemblée générale, par sa résolution 58/248 du 23 décembre 2003, conférait au Comité le mandat de continuer l’examen d’un certain nombre de questions.  A cet égard, il a notamment insisté sur le rôle du Comité en ce qui concerne la mise en œuvre des dispositions de la Charte des Nations Unies relatives à l’assistance aux Etats tiers touchés par l’application de sanctions.  Rappelant l’impact de ces sanctions sur les populations civiles et les Etats tiers, le représentant a insisté sur la nécessité de mener des sanctions ciblées.  Il a également insisté sur le renforcement de l’efficacité du Comité qui doit éviter de faire double emploi avec les autres commissions ou comités, comme par exemple les Comités du Conseil de sécurité sur les sanctions. 


M. HIROSHI TAJIMA (Japon) a invité les délégations à respecter le mandat du Comité, rappelant que lors de sa 58ème session, l’Assemblée générale avait actualisé celui-ci en demandant d’examiner de manière prioritaire la question de la mise en œuvre des dispositions de la Charte relatives à l’assistance aux Etats tiers touchés par les sanctions et des moyens d’améliorer les méthodes de travail du Comité pour renforcer son efficacité.  S’agissant du débat de fond sur les sanctions, il a appelé les délégations à tenir compte des travaux des Comités des sanctions et les dispositions pertinentes du rapport du Secrétaire général sur le renforcement de l’ONU.  S’agissant du document de travail proposé par la Fédération de Russie, le Japon, a-t-il dit, estime que le Comité doit l’étudier de manière approfondie en prenant en compte le travail effectué par les autres organes du système des Nations Unies.  Relevant les critiques exprimées à l’égard des méthodes de travail, le représentant a, comme l’année précédente, préconisé un examen approfondi et l’adoption de mesures concrètes.  A cet égard, il a appuyé le document de travail révisé présenté sur ce point, dont le Japon est coauteur.  Ce document, a-t-il dit, prend en compte les observations formulées lors de la précédente session.  Il a invité le Comité à se livrer à une évaluation préliminaire de celui-ci pour une discussion orientée sur les résultats et les mesures concrètes.   


Intervenant au nom du Groupe de Rio, M. SIDNEY LEON ROMEIRO (Brésil) a également convenu de la nécessité de procéder à une évaluation préliminaire des propositions des délégations afin d’établir une liste de priorités en ce qui concerne les points à examiner.  Compte tenu des restrictions budgétaires, il a appuyé l’idée exprimée au paragraphe 177 du rapport du Comité (A/58/33) qui encourage le Secrétaire général à trouver des ressources pour continuer la publication du Répertoire de la pratique suivie par les organes des Nations Unies.  Il nous faut une publication à jour qui nous montre comment nous appliquons les recommandations du Conseil de sécurité.  La création d’un fonds pour la publication régulière de ce Répertoire semble nécessaire.  La résolution 58/248 de l’Assemblée générale réaffirme de manière claire le mandat du Secrétaire général en ce qui concerne la publication de ce Répertoire, a-t-il rappelé.   


M. DMITRY A. LOBATCH (Fédération de Russie) a estimé que le travail du Comité spécial est plus que jamais pertinent, compte tenu des risques réels de voir s’ébranler les bases du système multilatéral.  Il a réaffirmé la pertinence de l’ONU et de sa Charte et la nécessité de renforcer son rôle dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales et dans la promotion de la démocratie.  S’agissant du document de travail révisé sur les normes et principes fondamentaux régissant l’adoption et l’application de sanctions et d’autres mesures de coercition que sa délégation présente à cette session, il a appelé les membres du Comité à l’examiner de manière constructive afin d’être en mesure de le présenter à la 59ème session de l’Assemblée générale.  S’agissant de travaux du Comité sur l’aide aux Etats tiers touchés par les sanctions, le représentant a estimé que la création du Groupe de travail au sein de la Quatrième Commission permettra de faire des progrès concrets en la matière.  Il a invité le Comité à examiner l’opportunité de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques du recours à la force par les Etats sans autorisation préalable du Conseil de sécurité, sauf dans l’exercice du droit de légitime défense, et notamment les propositions présentées sur ce sujet par le Bélarus, l’Australie et son pays.  Evoquant le document de travail sur les éléments fondamentaux des principes juridiques applicables aux opérations de la paix dans le cadre du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies, le représentant a invité le Comité à examiner la possibilité de le transmettre au Comité spécial pour les opérations de maintien de la paix, en tant que document juridique.  Par ailleurs, il a précisé que de l’avis de sa délégation, il n’était pas judicieux de transférer les pouvoirs du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix et de la sécurité.  Il a aussi insisté sur la nécessité d’améliorer l’efficacité du Comité en tant qu’organe juridique essentiel et s’est opposé à la réduction de la durée de ses sessions ordinaires.  Il a également estimé qu’il n’était pas opportun de supprimer le Conseil de tutelle et qu’il était au contraire important de le maintenir.  Il a regretté les retards enregistrés dans la publication des Répertoires de la pratique des organes des Nations Unies.  Compte tenu de l’absence d’allocation de moyens pour la publication de ces répertoires dans le budget 2005, il a suggéré que la Sixième Commission examine d’autres sources de financement. 


Mme GÖKCEN TUGRAL (Turquie) a déclaré que son pays, qui a considérablement souffert des sanctions appliquées à un pays voisin, attendait beaucoup des délibérations en cours des Etats Membres sur l’assistance à apporter aux Etats tiers touchés par les sanctions.  Elle a toutefois salué la contribution du Groupe d’experts créé en 1998 afin de mettre en œuvre une méthodologie permettant de faire face aux conséquences des sanctions sur les populations civiles et les Etats tiers.  S’agissant de l’amélioration des méthodes de travail, la représentante a

estimé que le Comité devait tout mettre en œuvre afin de commencer ses réunions à l’heure et faire usage de la manière la plus rationnelle possible des services de conférence.  


M. AHMED A. S. ELMESSALLATI (Jamahiriya arabe libyenne) a rappelé les propositions présentées à deux reprises par son pays concernant les sanctions et a noté avec intérêt les propositions formulées par d’autres Etats Membres.  Il a demandé le réexamen du régime des sanctions pour prendre en compte les propositions de son pays et en améliorer l’efficacité.  A cet égard, il a insisté sur le fait que les sanctions ne devaient être que des mesures exceptionnelles auxquelles on ne pouvait avoir recours qu’en dernier ressort, après épuisement de tous les autres moyens de règlement pacifique des conflits.  Le représentant s’est félicité de l’inscription à l’ordre du jour de la Commission du droit international de la question du principe de la responsabilité des organisations internationales.  Il a appuyé par ailleurs les documents de travail présentés par Cuba et la Fédération de Russie qui, selon lui, viennent compléter les propositions libyennes.  Il a également appuyé la proposition de la Fédération de Russie concernant la demande d’avis consultatif de la Cour internationale de Justice quant aux conséquences légales du recours à la force par les Etats sans autorisation préalable du Conseil de sécurité, et ce, afin d’asseoir la primauté du droit. 


M. ROBERTO LAVALLE-VALDES (Guatemala) a insisté sur la question du règlement pacifique des différends entre les Etats qui n’a fait que l’objet de quelques commentaires sporadiques lors des travaux 2003 du Comité.  Il a regretté que les plus importantes résolutions adoptées par l’Assemblée générale sur l’assistance à des pays tiers touchés par les sanctions n’aient pas été reflétées dans les recommandations du Comité spécial.  Il a donc souhaité que le Comité se concentre sur cette question de l’assistance aux pays tiers.  Sa délégation salue par ailleurs la contribution du Comité sur la question des moyens de règlement pacifique des différends. 


M. KIM CHANG GUK (République populaire démocratique de Corée) a affirmé que le principe de l’égalité des Etats et de la souveraineté nationale n’était pas respecté, regrettant que le bien et le mal soient des concepts définis par les plus forts au mépris du droit international.  Il a également dénoncé l’unilatéralisme et a appelé au renforcement du rôle des Nations Unies.  A cet égard, il a souligné la nécessité d’élargir la compétence de l’Assemblée générale en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales.  Il a insisté en particulier sur l’importance de réformer le Conseil de sécurité en vue d’assurer une meilleure représentation des pays en développement et la transparence de ses activités.  Les Etats-Unis, a-t-il regretté, empêchent son pays de participer aux discussions du Conseil de sécurité le concernant en violation du règlement intérieur de cet organe.  Le Conseil de sécurité est anachronique et sert à la réalisation des objectifs stratégiques des Etats-Unis, a-t-il souligné en conclusion.   


M. MOHAMMED HAJ IBRAHIM (République arabe syrienne) a jugé très dangereux qu’un parlement impose des sanctions à un autre pays.  Il a déclaré que l’on ne devait recourir aux sanctions que lorsqu’il y avait une menace grave de la paix et de la sécurité internationales et lorsque tous les moyens prévus au Chapitre VI de la Charte des Nations Unies avaient été épuisés.  Il faut réfléchir à l’impact de ces sanctions et s’assurer qu’elles sont bien définies et ce, conformément à la Charte des Nations Unies.  Elles doivent être levées dès que le pays touché a mis un terme à son comportement préjudiciable.  Le représentant s’est félicité du document de travail révisé présenté par la Fédération de Russie intitulé « Déclaration relative aux normes et principes fondamentaux régissant l’adoption et l’application de sanctions et d’autres mesures de coercition ». 


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