DES EXPERTS PRECONISENT UNE AMELIORATION DES REGIMES PREFERENTIELS EN FAVEUR DES PAYS LES MOINS AVANCES
Communiqué de presse TAD/1959 |
Des experts preconisent une amelioration des regimes preferentiels en faveur des pays les moins avances
GENEVE, 10 octobre (CNUCED) -- Il faudrait que les préférences commerciales accordées aux pays les moins avancés (PMA) deviennent plus permanentes, a estimé hier le Secrétaire général de la CNUCED, Rubens Ricupero, lors d'une discussion au sein du Conseil du commerce et du développement de la CNUCED, qui se tient à Genève jusqu'au 17 octobre (voir communiqué de presse UNCTAD/PRESS/PR/2003/101). Il a préconisé de récompenser les pays, qui sont parvenus à se servir du commerce pour réduire la pauvreté et stimuler la croissance, en prolongeant les accords préférentiels, plutôt qu'ils soient pénalisés lorsque le régime préférentiel arrive à terme.
La CNUCED étudie avec le plus grand soin l’impact des initiatives prises récemment en faveur des PMA – comme la loi sur la croissance et les potentialité de l'Afrique (AGOA) des États-Unis et l'initiative Tout sauf les armes de l'Union Européenne – afin de comprendre si elles procurent effectivement les avantages attendus: augmenter les revenus et réduire la pauvreté. En effet, lorsque que l'accès préférentiel aux marchés a des effets positifs, rien ne dit qu’ils sont durables ni qu’ils suffisent pour surmonter les obstacles au développement (capacités d'offre inadéquates ou politiques de distorsion commerciale de la part des partenaires des pays développés). "Pour que le commerce soit utile à la réduction de la pauvreté, il importe qu'un accès préférentiel aux marchés soit utile au commerce, a précisé M. Ricupero. Si le lien entre la croissance du commerce, l'emploi et la réduction de la pauvreté est indéniable, il n’est toutefois ni linéaire ni automatique. Il doit être renforcé via la mise en œuvre de politiques dans d'autres domaines que celui du commerce, comme celui de la répartition des revenus et des disparités régionales".
Le Ministre du commerce et de l'industrie du Lesotho, M. Mpho 'Meli Malie, a décrit les avantages que l'AGOA a procuré au Lesotho; un pays enclavé avec un taux de chômage de 45% et un taux de HIV de 31%. Après avoir surmonté les difficultés inhérentes à la mise en conformité avec les critères d'éligibilité de l'AGOA (comme l'incompatibilité des systèmes juridiques), le Lesotho a enregistré des progrès considérables dans le secteur de l'industrie des textiles et des vêtements. Ayant choisi d'accorder la priorité à la création d'emplois en vue d'éradiquer la pauvreté, le Lesotho a mis l'accent sur la promotion de l'industrie textile auprès des investisseurs car c'est une activité à forte intensité de main d'œuvre. L'emploi dans le secteur est passé de 19 000 en 1999 à 55 000 aujourd'hui. Le Lesotho est ainsi devenu le principal exportateur subsaharien de textiles et de vêtements vers les Etats-Unis.
M. Malie a cependant précisé qu'à elle seule la contribution de l'AGOA n'aurait pas suffit; il a aussi fallu développer des compétences. En outre, l'incertitude pesant sur la question de savoir si l'AGOA et d'autres schémas préférentiels allaient être prolongés a empêché de nouveaux investissements. Les autres difficultés dans la mise en oeuvre de ce schéma tiennent aux contraintes pesant sur l'offre (pénurie de financement et manque d'eau à un coût raisonnable pour un usage industriel). Le Lesotho s'est préparé à l'éventualité d'une suppression des préférences en se tournant vers des projets d'infrastructure du secteur public-privé et en révisant ses politiques macro-économiques. Il s'est également impliqué dans un certain nombre d'initiatives régionales. Tout en saluant les initiatives unilatérales, l'orateur a estimé qu'il fallait mettre l'accent sur le système multilatéral d'accès au marché car il offre plus de sécurité et de prévisibilité.
Les schémas préférentiels sont peu utilisés
Le rapport de la CNUCED (TD/B/50/5) montre que les PMA utilisent peu les schémas d'accès préférentiel aux marchés, principalement en raison de l'imprévisibilité relative des préférences, de règles d'origine contraignantes, des obstacles non tarifaires, des aides à l'agriculture dans les pays développés et de la carence des capacités d'offre dans la plupart des PMA. Pour les auteurs du document, vu le caractère temporaire des préférences, elles devraient être exploitées au maximum tant qu'il y en existe; au fur et à mesure qu'elles disparaissent, il faudra envisager d'autres moyens de traitement spécial et différencié.
Lors de la discussion, hier, sur ce thème, Jean-Pierre Chauffour, du Fonds monétaire international (FMI), a déclaré que "l'image miroir" du fait que les taux d'utilisation sont souvent bas était, en toute logique, que l'effritement des préférences serait aussi limité; les pertes en résultant seraient également modestes, sauf pour quelques pays. Ceux dont les exportations sont très concentrées ne devraient pas être les plus vulnérables à un effritement des préférences, a-t-il assuré; contrairement à ce qui inquiète les PMA.
William Cline, de l'Institute for International Economics (Washington, DC), a déclaré que la croissance des exportations aurait un impact disproportionné sur la croissance du PNB qui, à son tour, aurait beaucoup d'impact sur la réduction de la pauvreté. Pour augmenter les exportations, il importe de supprimer les subventions agricoles dans les pays développés, mais il est tout aussi essentiel pour ces pays de démanteler les barrières commerciales existantes, surtout dans l'agriculture. Le rôle de l'accès préférentiel aux marchés dans la réduction de la pauvreté dans les pays en développement a été démontré de manière empirique, notamment à travers l'exemple de l'AGOA et du Lesotho. Pour que les préférences soient encore plus efficaces, a-t-il ajouté, il faudrait: étendre leur période d'applicabilité, simplifier les règles d'origine, élargir ces initiatives à tous les biens, et exonérer les investisseurs étrangers afin de surmonter les contraintes qui pèsent sur l'offre dans les pays hôtes.
M. Cline a également préconisé de dissocier les subventions agricoles du commerce et de les affecter à d'autres secteurs comme la protection de l'environnement. En outre, les pays industriels devraient largement réduire les tarifs des produits manufacturés; quant aux pays en développement, ils devraient réduire leurs tarifs au moins de moitié.
Le lien entre les schémas commerciaux préférentiels et la réduction de la pauvreté - et, plus largement, entre les négociations commerciales et le secteur productif - est l'un des thèmes qui seront traités lors de la onzième session de la conférence sur le commerce et le développement (CNUCED XI), qui se tiendra à Sao Paulo, Brésil, du 13 au 18 juin 2004.
* *** *