SG/SM/8994

A SANTIAGO, LE SECRETAIRE GENERAL CITE L’AMERIQUE LATINE ET LES CARAIBES EN EXEMPLE EN SOULIGNANT L’IMPORTANCE DE LA REFORME DE L’ONU

24/11/2003
Communiqué de presse
SG/SM/8994


A SANTIAGO, LE SECRETAIRE GENERAL CITE L’AMERIQUE LATINE ET LES CARAIBES EN EXEMPLE EN SOULIGNANT L’IMPORTANCE DE LA REFORME DE L’ONU


On trouvera ci-après le texte de l’allocution prononcée le vendredi 7 novembre 2003 par le Secrétaire général, lors d’une table ronde consacrée au renouveau de l’Organisation des Nations Unies et à la situation mondiale.


Nous gardons, Nane et moi, un excellent souvenir du chaleureux accueil qui nous a été réservé lors de notre dernier séjour au Chili et cette hospitalité ne s’est pas démentie.  J’avais prévu de visiter Santiago ce matin, mais lorsqu’on m’a invité à participer à cette table ronde, avec mes amis, le Président Lagos et le Président Halonen, c’est bien volontiers que j’ai accepté.


Le thème retenu est vaste et important, et je suis heureux que nous ayons l’occasion d’en débattre ici, à la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  J’en suis d’autant plus heureux que c’est en compagnie de deux fervents partisans de l’ONU, qui de plus sont mes amis.


Comme je l’ai dit devant les dirigeants du monde entier en septembre, lors de mon discours à l’Assemblée générale, nous sommes à la croisée des chemins: l’heure n’est pas moins importante que celle qui a vu la naissance de l’ONU, en 1945.  Ce que j’ai préconisé, c’est un renouveau de l’ONU passant par une refonte de sa structure. Voici pourquoi je l’ai fait et ce à quoi je pensais.


Comme nous le savons tous, la guerre froide a paralysé l’ONU. L’Organisation a certes connu des succès, mais la bipolarisation politique de la planète l’a empêchée de jouer le rôle que ses fondateurs avaient prévu pour elle.  Le Mur de Berlin ne se contentait pas de couper Berlin en deux, il était aussi un sérieux accroc dans la Charte.


Ce monde divisé et bipolaire a été remplacé par un monde que les uns qualifient d’unipolaire et les autres de multipolaire.  Mais la vraie question est ailleurs: comment le pouvoir, qu’il soit unipolaire ou multipolaire, doit-il s’exercer?


Je suis convaincu qu’il peut et doit être utilisé collectivement.  Nous vivons une époque d’interdépendance, où les mêmes dangers comme le terrorisme et la pauvreté, les armes de destruction massive et les maladies, l’intolérance et l’injustice, nous menacent tous.  Nous ne pouvons nous permettre de les ignorer et, si nous agissons ensemble, nous pouvons en sortir grandis.


Si nous échouons, beaucoup en viendront à penser que le multilatéralisme est synonyme d’inaction et les buts énoncés dans la Charte des Nations Unies resteront hors d’atteinte.  Les plus puissants agiront unilatéralement, alimentant le ressentiment des moins puissants, comme c’est actuellement le cas un peu partout dans le monde.  Le monde pourrait être encore plus profondément divisé qu’il ne l’était.


Les valeurs que nous partageons seraient compromises et les menaces qui pèsent sur nous s’en trouveraient accrues.  De toute évidence, c’est exactement ce que certaines organisations terroristes cherchent à obtenir.  Nous devons les en empêcher.


L’expérience de l’Amérique latine et des Caraïbes illustre, à bien des égards, la corrélation existant entre, d’une part la pauvreté, l’inégalité et l’exclusion et d’autre part, l’extrémisme, le conflit et la division.  L’expérience de cette région montre également que pour difficile qu’elle soit, la réforme est indispensable et doit être gérée de manière à ce que toutes les parties prenantes en partagent la responsabilité et les bénéfices. Cela vaut pour les pays du monde.


Quelles conclusions en tirer pour l’ONU?  D’après moi, cela signifie que nous devons nous employer à redéfinir le dispositif international de façon à faciliter l’action collective face aux menaces auxquelles nous sommes en butte – qu’il s’agisse des « nouvelles » menaces que sont le terrorisme et les armes de destruction massive; des menaces « anciennes » comme les armes conventionnelles, lourdes et légères; des menaces « dures » telles que la guerre et les conflits armés; ou des menaces « légères », à savoir la pauvreté, la maladie et la dégradation de l’environnement.  En qualifiant ces dernières de « légères », je ne cherche pas du tout à en minimiser l’importance, car si les menaces dures font beaucoup parler d’elles, des fléaux comme le sida font des millions de victimes et la pauvreté et les privations sont les principales menaces à la sécurité humaine.


La structure de l’ONU doit concilier la nécessité d’agir et le besoin de légitimité et nous devons nous attaquer à toutes, je dis bien toutes, les menaces qui pèsent sur l’humanité.


Je sais que la redéfinition de la structure actuelle de l’ONU est une tâche difficile.  Ainsi, la réforme du Conseil de sécurité est inscrite depuis longtemps à l’ordre du jour, mais je sens que le sentiment général aujourd’hui est qu’on ne peut plus repousser l’échéance.  Il est temps d’examiner de près les organisations internationales et les institutions intergouvernementales – non seulement le Conseil de sécurité, mais aussi l’Assemblée générale, le Conseil économique et social et même le Conseil de tutelle.


La refonte de l’ONU doit tenir compte du rôle qu’elle joue dans les affaires économiques et sociales, notamment de ses relations avec les institutions de Bretton Woods.


Tout à l’heure, le Président Halonen a évoqué le Conseil des chefs de secrétariat, qui réunit les chefs de tous les organismes internationaux deux fois par an.  Ces questions, en particulier en raison des événements survenus en Iraq, étaient au premier rang des points que nous avons examinés la semaine dernière.  Je me dois d’ajouter que le Président Halonen a coprésidé le Sommet du Millénaire et qu’il a contribué pour beaucoup au succès des travaux.


Cette semaine, j’ai constitué un groupe de personnalités éminentes, présidé par le Premier Ministre thaïlandais, M. Panyarachum, que j’ai chargé d’examiner les difficultés qui font actuellement obstacle à la paix et à la sécurité, afin de déterminer comment relever ces défis grâce à l’action collective et d’examiner le fonctionnement des principaux organes de l’ONU.  J’espère qu’il proposera des changements radicaux.


Ce groupe s’intéresse avant tout aux menaces à la paix et à la sécurité, mais il se penchera également sur les problèmes mondiaux qui pourraient être liés à ces menaces.  J’espère que ses recommandations porteront aussi sur les moyens de renforcer l’ONU, en réformant ses institutions et ses procédures.


J’ai demandé au groupe de me faire rapport suffisamment à l’avance pour que je puisse formuler des recommandations à l’Assemblée générale à sa prochaine session, même si c’est aux seuls États Membres qu’il incombe de se prononcer sur les modifications à apporter aux règles et institutions.


Ne vous méprenez pas: il ne faudrait pas conclure de l’appel que j’ai lancé et de la création du groupe que l’ONU n’a pas évolué ou n’a rien fait pour se réformer au cours de ces dernières années.  Au contraire, nous avons profondément modifié nos méthodes de gestion, et il me semble que l’Organisation fonctionne un peu mieux aujourd’hui.


L’ONU est plus efficace, plus productive et plus active que jamais. En Amérique latine et aux Caraïbes, elle intervient dans les domaines politique, économique et social.


Je suis néanmoins convaincu que le contexte actuel exige une réforme plus fondamentale, qui dynamise et motive nos organes intergouvernementaux.  C’est ce qui m’a poussé à lancer cet appel, dont je suis heureux de m’entretenir avec vous.


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