SG/SM/8854-ENV/DEV/733

POUR PROTEGER LA DIVERSITE BIOLOGIQUE, UNE APPROCHE D’OUVERTURE, QUI SOIT PRAGMATIQUE ET SOUPLE, EST NECESSAIRE, DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL

08/09/2003
Communiqué de presse
SG/SM/8854
ENV/DEV/733


Pour proteger la diversite biologique, une approche d’ouverture, qui soit pragmatique et souple, est necessaire, declare le Secretaire general


On trouvera ci-après le texte du message que le Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’environnement, M. Klaus Toepfer, a prononcé au nom du Secrétaire général, M. Kofi Annan, au Congrès mondial sur les parcs naturels tenu à Durban (Afrique du Sud):


Il n’est pas indifférent que ce cinquième Congrès mondial sur les zones protégées se tienne en Afrique du Sud, pays qui, il y a juste un an, accueillait le Sommet mondial pour le développement durable.


Depuis plus d’un siècle, les pays du monde entier accordent une protection spéciale à certaines zones en raison de leur beauté naturelle ou parce qu’elles constituent un refuge pour certaines des espèces les plus magnifiques, les plus précieuses mais aussi, bien souvent, les plus menacées de la faune et de la flore mondiales.


Les dernières statistiques élaborées pour la présente conférence, conjointement par l’Organisation des Nations Unies et l’Union mondiale pour la nature, à partir de données recueillies auprès des gouvernements, révèlent que les zones protégées occupent actuellement 12% de la superficie terrestre, soit près de 19 millions de kilomètres carrés, superficie équivalente aux territoires de la Chine et des États-Unis réunis.  En outre, depuis la publication en 1962 de la première Liste des parcs nationaux et réserves analogues, établie par l’Organisation des Nations Unies, le nombre de zone protégées recensées a été multiplié par cent, atteignant un total supérieur à 100 000.


Il semblerait ainsi que l’histoire des zones protégées du monde soit un cas de succès écologique.  Mais rien n’autorise à garantir que cette histoire finira bien. Alors que les zones protégées se multiplient, on assiste au déclin de la diversité biologique, et ce à un rythme sans précédent depuis la dernière grande extinction survenue il y a 65 millions d’années.  Les fonctions des écosystèmes essentiels sont fragilisées, peut-être irrévocablement, à cause de l’abattage des forêts, de l’assèchement des zones humides et de la dégradation des habitats terrestres et marins par suite de la pollution.  L’augmentation de la population humaine, les effets de la pauvreté sur l’environnement, la disparition croissante des ressources naturelles et l’incapacité ou la réticence de nombreux pays à affecter les fonds nécessaires aux zones protégées ou à veiller à la protection effective des habitats précieux ne font qu’aggraver la crise à laquelle se heurte l’humanité tout entière.


Les services que rendent les écosystèmes et la diversité biologique constituent le fondement du développement de la société, en particulier dans les pays en développement où, proportionnellement, un plus grand nombre de personnes est directement tributaire des ressources naturelles, qui sont source de combustible, de revenus, d’aliments et de médicaments. Le mois dernier, à Durban, le Gouvernement sud-africain a mis l’accent sur le rôle de la médecine traditionnelle en tant que moyen de lutter contre le VIH/sida. Les remèdes traditionnels ne sont qu’un exemple des nombreux produits issus de la biodiversité qui non seulement assurent la subsistance de milliards d’individus mais aussi, s’ils sont récoltés de façon viable et commercialisés équitablement sur les marchés mondiaux, peuvent être profitables pour les populations locales, les zones protégées et les économies des pays en développement.


Ces derniers ne sont, du reste, pas les seuls à dépendre de la diversité biologique.  L’humanité tout entière en dépend pour la santé de ses membres, la sécurité alimentaire et la production de revenus. Bien des choses qui nous paraissent aller de soi – la fertilité du sol, l’aménagement des bassins hydrographiques, la pollinisation des cultures, les nouveaux produits pharmaceutiques et les gènes qui protègent des maladies bétail et cultures – tout cela procède de la biodiversité.


Grâce au progrès scientifique et aux travaux de l’Union mondiale pour la nature, du Centre mondial de surveillance pour la conservation du Programme des Nations Unies pour l’environnement, du Programme des Nations Unies pour le développement et d’autres organismes, nous comprenons chaque jour un peu mieux le rôle que jouent dans notre vie la biodiversité et les écosystèmes naturels.


De même, nous prenons conscience de la rapidité avec laquelle ces ressources irremplaçables se perdent.


Les changements climatiques, l’appauvrissement de la couche d’ozone, la pollution et les espèces allogènes figurent parmi les principaux responsables, mais la plus grande menace vient de la dégradation et de la fragmentation des habitats, en particulier dans les zones riches en espèces telles que les écosystèmes forestiers et côtiers, notamment les récifs coralliens.  La mise en valeur des écosystèmes est donc capitale pour assurer la viabilité des habitats qui abritent la biodiversité, servent les intérêts écologiques et protègent les zones protégées elles-mêmes.  Les zones protégées, qui ne représentent que des îlots infimes par rapport à l’immensité des étendues dégradées, sont condamnées à dépérir et à disparaître.  L’une des tâches du présent Congrès sera donc d’examiner la question de la fragmentation des habitats essentiels.


L’autre impératif consistera à trouver des solutions adaptées en vue de régler les nombreux autres problèmes que connaissent les zones protégées. Certaines zones protégées ne le sont qu’en théorie.  Dans la pratique, nombreuses sont celles qui, même dans les pays développés, ne bénéficient malheureusement pas de fonds suffisants.  La question des financements et de la protection effective là où les problèmes sont les plus pressants, par exemple dans les régions extrêmement pauvres ou en proie à un conflit armé, mettra à rude épreuve les gouvernements, les organisations internationales et les responsables de ces zones protégées.


La question du droit des populations autochtones mérite également qu’on s’y arrête.  Bien souvent, ces populations sont les premières victimes lorsque les habitats sont dégradés ou les terres usurpées pour aménagements divers, ou encore lorsque les gouvernements décident que leurs terres doivent être protégées.  Nous devons veiller à ce que les bienfaits de la protection de l’habitat et de l’exploitation de la biodiversité soient répartis équitablement.


Il n’existe pas de solution universelle au problème de la mise en valeur des zones protégées.  Dans certaines zones, il convient de mettre en place une protection stricte, d’édifier des clôtures et d’interdire toute activité humaine.  Pour d’autres, il importe de considérer que la population fait partie de l’écosystème et que l’en exclure serait non seulement injuste mais contre-productif.  Il convient d’adopter une approche d’ouverture, qui soit pragmatique et souple.  Telle était l’approche prônée par le Sommet mondial pour le développement durable, où l’on a reconnu l’utilité des partenariats avec le secteur privé comme moyen de trouver les ressources et les modes de pensées novateurs nécessaires.


Pour conclure, permettez-moi d’évoquer une question fondamentale qui pèsera lourdement sur tous les efforts visant à éliminer la pauvreté et à réaliser un développement durable: la protection des océans.


Alors que plus de 11% de la superficie terrestre est protégée, moins d’un pour cent des océans le sont.  La pêche est en déclin, et les zones côtières sont victimes de la pollution terrestre.  Des études montrent que dans les zones marines protégées, les poissons sont plus gros et plus nombreux.  Quand on sait que 90% des pêcheurs dans le monde travaillent localement à petite échelle, produisent plus de la moitié des prises mondiales, génèrent des revenus et alimentent une proportion importante de la population côtière, qui représente actuellement 60% de la population mondiale, les avantages du renforcement de la protection des milieux marins sautent aux yeux.


Votre conférence est l’occasion de mettre en lumière ces questions complexes et d’autres encore et de donner des directives précises aux gouvernements et à leurs partenaires.  Que chacun fasse de son mieux pour assurer la conservation de la biodiversité de la planète et pour la mettre au service des générations présentes et des générations futures.


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