SG/SM/8684

LE SECRETAIRE GENERAL LANCE UN APPEL AU CONSEIL DE SECURITE POUR ECARTER SES DIVERGENCES PASSEES SUR L'IRAQ ET TROUVER UNE NOUVELLE UNITE

01/05/2003
Communiqué de presse
SG/SM/8684


                                                            SC/7746

                                                            IK/354


LE SECRETAIRE GENERAL LANCE UN APPEL AU CONSEIL DE SECURITE POUR ECARTER SES DIVERGENCES PASSEES SUR L'IRAQ ET TROUVER UNE NOUVELLE UNITE


La déclaration suivante a été prononcée hier par le Secrétaire général à l'occasion du débat de synthèse des travaux du Conseil de sécurité pour le mois d'avril :


Je voudrais tout d’abord vous remercier, Monsieur le Président, ainsi que votre gouvernement, d’avoir pris l’initiative de ce débat sur les enseignements à tirer de l’expérience de l’ONU dans les situations de conflit et d’après conflit qui se sont produites antérieurement.


Comme les membres le savent fort bien, l’ONU a pris part à un vaste éventail d’activités dans ce domaine, allant de la négociation de règlements politiques à des efforts approfondis de reconstruction institutionnelle, notamment la création d’un nouvel État. L’examen de ces expériences passées nous permet de savoir ce que nous avons bien réussi et ce que nous avons moins bien fait, et peut peut-être, dans certains cas, nous permettre d’en cerner les raisons.


Mais ce qui ressort de l’examen de l’engagement de la communauté internationale dans les pays touchés par des conflits, c’est qu’une seule et même approche n’a jamais été adoptée à deux reprises, dans la mesure où deux conflits ou deux situations de conflit ne sont jamais identiques. Même les quatre cas les plus récents –Afghanistan, Kosovo, Timor oriental et Sierra Leone– sont très différents les uns des autres pour ce qui est des causes et des effets des conflits, de la participation antérieure de l’ONU, du contexte politique et juridique régissant la réponse de la communauté internationale, et de l’effectif même des populations et des territoires touchés.


Par conséquent, l’un des enseignements les plus importants, lorsqu’il s’agit de planifier l’engagement de la communauté internationale dans une situation nouvelle –telle que celle que nous connaissons maintenant en Iraq– c’est la nécessité, premièrement, de parvenir à une vision commune des traits distinctifs de la crise en question afin d’adapter en fonction la forme de nos réponses. Nous devons faire fond sur nos expériences précédentes pour que notre réponse soit la mieux adaptée possible, tout en n’excluant pas qu’il faudra peut-être trouver des méthodes ou des formes d’assistance totalement nouvelles.


Cela signifie que nous devons commencer par nous poser quelques questions fondamentales telles que: les parties au conflit sont-elles désireuses ou reconnaissantes d’une intervention de la communauté internationale, et si oui à quelle fin? La communauté internationale est-elle en mesure et a-t-elle la volonté politique de fournir les ressources financières et humaines voulues et de maintenir son engagement suffisamment longtemps pour en garantir le succès? Quelles sont les conditions préalables à l’instauration d’une paix durable auto-entretenue? Quels sont les besoins à satisfaire et dans quel ordre de priorité? À quel rythme le processus doit-il avancer?


Quelques enseignements précis ressortent des cas récents : la confiance des parties et de la population peut être fragile et ne saurait être considérée comme gagnée d’avance : leur assentiment doit être cultivé et protégé. Le rôle de la communauté internationale n’est pas de régler tous les problèmes d’un pays mais d’aider sa population à s’autonomiser. Il faut fixer des priorités, à commencer par les besoins humanitaires essentiels de la population, au nombre desquels se trouve la nécessité d’assurer des conditions élémentaires de sécurité, de primauté du droit et d’ordre public. Lorsque ces besoins sont satisfaits, instaurer ensuite les conditions propices à la mise en place et au développement de processus politiques viables – par l’encouragement, notamment, de la réconciliation, de la bonne gouvernance, de la primauté du droit, du respect des droits de l’homme et des dispositifs provisoires en vue d’assurer la justice – devient du même coup plus facile.


Toutes décisions concernant la réforme des grandes institutions de l’État et des appareils juridiques et politiques, pour être viables à long terme, doivent être prises par les gens du pays eux-mêmes. Ce type de processus ne peut réussir que si tous les principaux groupes du pays ou du territoire y prennent part, s’ils ont le sentiment qu’il leur appartient et s’ils ne le perçoivent pas comme lié à une issue décidée d’avance.


La progression du processus ainsi que l’ordre séquentiel et temporel de ses différentes phases sont également essentielles à son succès. Il faut tenir compte des conditions politiques et socioéconomiques du pays et de ses conditions de sécurité, ainsi que du degré de soutien sur lequel on peut réalistement compter de la part des membres intéressés de la communauté internationale. Procéder trop lentement risquerait de casser l’élan acquis et d’alimenter les frustrations, mais aller trop vite peut être tout aussi pernicieux, si l’on prend des décisions hâtives, sur les effets desquelles il serait difficile de revenir.


L’aspect régional est une dimension à laquelle il convient de s’intéresser au plus tôt et à long terme.


Et enfin, il existe une corrélation directe entre les succès remportés par l’ONU et l’unité du Conseil de sécurité – et entre les revers de l’ONU et les divisions au sein des membres du Conseil concernant la stratégie à suivre. Le Conseil doit être uni pour fixer les objectifs globaux de l’aide internationale et répartir clairement les tâches et il doit garder cette unité pour pouvoir apporter un soutien politique vigoureux tant dans les périodes cahoteuses où les progrès sont remis en question qu’une fois passée la phase aiguë du conflit et que l’attention des médias du monde s’est détournée vers d’autres sujets.


Dans le cas de l’Iraq – auquel nous pensons tous, bien sûr, en ce moment – le Conseil a l’occasion maintenant de laisser derrière lui les désaccords passés et de retrouver une communauté de vues dans la phase d’après guerre.


Ces décisions ne seront pas faciles. Mais elles ne devraient pas être impossibles pourvu que l’on garde dûment en tête un certain nombre de principes communs. Lorsque le Conseil en discutera, j’exhorte ses membres à laisser de côté les dissensions passées et à se demander ce qui aidera au mieux la population iraquienne. Les intérêts de celle-ci doivent être prioritaires. L’objectif absolu est de permettre à la population iraquienne de prendre en mains sa propre destinée.

D’ores et déjà, dans la résolution 1472 (2003), les membres du Conseil ont réaffirmé leur attachement à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Iraq, leur respect du principe selon lequel le peuple iraquien a le droit de déterminer lui-même son avenir politique et de contrôler ses propres ressources naturelles, et leur conviction que toutes les parties concernées doivent respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris de la quatrième Convention de Genève.


Je suis convaincu que tous les membres du Conseil conviendront que la souveraineté implique l’indépendance politique et que pour définir lui-même son avenir politique, le peuple iraquien doit être libre de choisir son propre système de gouvernement et ses propres dirigeants politiques. Ce qu’il faut, c’est un processus impartial, représentatif et transparent permettant aux Iraquiens de choisir eux-mêmes une autorité politique iraquienne crédible et légitime, à laquelle la souveraineté puisse être rendue. Je veux croire que les membres conviennent tous de la nécessité de mettre fin à l’isolement de l’Iraq et d’aider la population iraquienne, le plus vite possible, à mettre en place les conditions du retour à la normale.


Au cours des semaines à venir, le Conseil aura d’importantes décisions à prendre sur les mandats existants de l’ONU dans le cadre de cette nouvelle situation – notamment sur les sanctions, le programme « pétrole contre nourriture » et l’inspection des armes. Au-delà, les membres devront examiner comment la communauté internationale peut au mieux aider les Iraquiens à reconstruire leur pays – et quel rôle l’ONU pourrait jouer pour appuyer cet effort et aider l’Iraq à recouvrer sa souveraineté.


J’espère que je peux compter sur eux pour que, quel que soit le mandat confié par le Conseil à l’ONU, ce mandat soit clair, cohérent et assorti des ressources nécessaires. En à peine plus de 20 ans, le peuple iraquien a traversé trois guerres et plus de 10 ans de sévères sanctions de l’ONU. Laissons tous derrière nous nos désaccords passés, demandons ce qui sera le plus utile au peuple iraquien et agissons en conséquence.


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