SG/SM/8588

POUR LE SECRETAIRE GENERAL, IL FAUT FAIRE DE LA MONDIALISATION UN PROCESSUS OUVERT ET EQUITABLE

05/02/2003
Communiqué de presse
SG/SM/8588


                                                            SG/SM/8588

                                                            5 février 2003


POUR LE SECRETAIRE GENERAL, IL FAUT FAIRE DE LA MONDIALISATION

UN PROCESSUS OUVERT ET EQUITABLE


On trouvera ci-après le texte d’un message du Secrétaire général, Kofi Annan, dont le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, Nitin Desai, a donné lecture au Forum social mondial, à Porto Alegre (Brésil), le 27 janvier:


J’adresse mes salutations les plus cordiales aux participants à ce forum.


À l’heure où vous vous réunissez, la situation dans le monde est particulièrement angoissante : éventualité d’une guerre en Iraq, prolifération nucléaire dans la péninsule coréenne, escalade de la violence au Moyen-Orient, éventualité de nouveaux attentats terroristes. Le Conseil de sécurité est d’ailleurs actuellement mis à l’épreuve comme il l’a rarement été auparavant; en ce moment même, il est réuni à New York pour entendre les inspecteurs en désarmement de l’ONU rendre compte des progrès accomplis en Iraq. Je partage l’inquiétude que vous inspirent toutes ces crises et tiens à vous assurer que je suis déterminé à continuer à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour les régler conformément aux principes consacrés par le droit international et par la Charte des Nations Unies.


Mais, si vous êtes réunis ici, c’est aussi parce que vous êtes gravement préoccupés par de nombreuses autres questions qui revêtent une importance cruciale pour la sécurité, la prospérité et la paix internationales. La situation tragique des populations les plus pauvres et des pays les plus faibles; la progression inexorable du sida, le pillage impitoyable de l’environnement; l’inégale répartition des bienfaits de la mondialisation; les obstacles au commerce et les subventions qui enlèvent aux pays en développement toute chance réelle de rivaliser économiquement avec les autres pays ou de régler certaines crises de santé publique : tous ces problèmes devraient, dans une égale mesure solliciter notre conscience, susciter notre générosité et mobiliser notre volonté. Et pourtant je crains, tout comme vous, qu’ils ne soient négligés, ne tombent dans l’oubli faute d’une attention soutenue ou à cause d’une vision étroite des intérêts nationaux, ou n’aient simplement du mal à rester au coeur de l’actualité, alors qu tant de choses vont se passer, ou risquent de se passer, dans les semaines et les mois à venir.


Cela serait tragique, d’autant plus que nous sommes mieux que jamais à même de les régler. Lors des grandes conférences et sommets mondiaux de ces dernières années, les États se sont engagés au plus haut niveau politique à ouvrir les marchés aux produits des pays en développement, à accélérer l’allégement de la dette, à augmenter l’aide, à protéger l’environnement et à mettre le développement au centre de leurs politiques. Et nous avons plus que des engagements,


des promesses et de longs plans d’action. En ce qui concerne le développement économique et social, question cruciale, nous pouvons aussi nous appuyer sur un cadre commun pour orienter nos efforts: les objectifs du Millénaire en matière de développement. Ces objectifs, qui vont de la réduction de moitié de l’extrêmement pauvreté à l’enrayement de la propagation du VIH/sida et à l’enseignement primaire pour tous – tout cela d’ici à 2015 –, sont simples mais forts; l’homme de la rue, qu’il soit à New York, Nairobi ou New Delhi, peut les comprendre et les appuyer. Pour ambitieux qu’ils puissent paraître, ils ne sont pas que des voeux pieux. Bien au contraire, ils sont tout à fait réalisables, même dans le court laps de temps qui a été fixé.


Les gouvernements doivent prendre des mesures concrètes. Les principaux organismes des Nations Unies uniront leurs forces pour les aider le mieux possible. Mais ni eux ni les gouvernements n’atteindront leur but si vous ne vous associez pas à eux, vous les forces dynamiques représentées ici à Porto Alegre. Il y a pour vous, à mon avis, trois moyens d’agir.


Premièrement, vous pouvez tenir vos gouvernements comptables de leurs promesses. Un ensemble de rapports établis grâce à l’action conjointe des gouvernements, des organismes des Nations Unies, des organisations non gouvernementales (ONG) et d’autres partenaires permettront de suivre les progrès accomplis. Ils vous donneront la possibilité de faire connaître vos vues, de faire l’éloge des gouvernements quand ils progresseront suffisamment vite ou de les critiquer lorsque la mobilisation semblera tarder ou lorsque les priorités seront mal établies.


Deuxièmement, même si vous contraignez vos gouvernements à rendre des comptes, vous pouvez aussi, et j’ose espérer que vous le ferez, travailler en partenariat avec eux et forger des alliances entre vous, avec les organismes des Nations Unies et aussi – mais oui – avec le secteur privé. Les ONG et les entreprises ont, les unes et les autres, une contribution capitale à apporter, mais doivent aller au-delà d’attitudes réflexes de mépris et de diabolisation mutuels, qui sont tout sauf productives.


Troisièmement, vous pouvez enrichir le débat sur la conduite des affaires mondiales. Certains d’entre vous ont des opinions très arrêtées sur la mondialisation. Nous nous accordons tous à dire que trop de gens et trop de pays n’en tirent pour ainsi dire pas profit. Toutefois, la question n’est pas de savoir si nous voulons la mondialisation, mais plutôt de savoir quelle forme nous souhaitons lui donner. Notre objectif doit être d’en faire un processus ouvert et équitable. Votre militantisme continuera à jouer un rôle capital dans les efforts qui sont faits pour qu’elle offre des possibilités non seulement à quelques privilégiés mais à tous, en particulier aux pauvres et aux groupes vulnérables.


Il semble, à certains moments, que le système international soit à jamais otage du pouvoir et victime de la cupidité. Mais parfois, il se présente des occasions d’agir. C’est le cas aujourd’hui. Le moment est venu de redoubler d’efforts pour édifier un système respectueux du droit, qui soit ouvert et honnête, ne tolère ni la pauvreté ni l’injustice et réponde aux besoins réels d’individus réels. C’est pourquoi il est indispensable que nous, à l’ONU, et vous, dans la société civile, poursuivions notre association constructive. J’attache la plus haute importance à cette relation et à notre quête commune d’un monde pacifique, sûr et juste. Dans cet esprit, je vous adresse tous mes voeux de succès pour votre forum.


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