LA COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DEVELOPPEMENT ENTAME SA SESSION CENTREE CETTE ANNEE SUR L’EDUCATION, FACTEUR DETERMINANT DU DEVELOPPEMENT DURABLE
Communiqué de presse POP/854 |
Commission de la population
et du développement
1re et 2e séances – matin et après-midi
LA COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DEVELOPPEMENT ENTAME SA SESSION CENTREE CETTE ANNEE SUR L’EDUCATION, FACTEUR DETERMINANT DU DEVELOPPEMENT DURABLE
Les donateurs appelés à tenir les engagements pris à la Conférence du Caire en 1994
La trente-sixième session de la Commission de la population et du développement a entamé aujourd’hui ses travaux, centrés cette année sur «Population, éducation et développement», dans le cadre du suivi de l’application du Programme d’action de la Conférence sur la population et le développement qui s’était tenue au Caire en 1994.
L’accès à l’école primaire pour tous les enfants, en particulier les filles, était un objectif clef de la Conférence du Caire et figure également en tête des objectifs de développement du Millénaire, a rappelé Mme Thoraya Obaid, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP): l’éducation des femmes, a-t-elle insisté, est un facteur déterminant de développement durable dont les principaux bénéfices sont l’accroissement du revenu familial, des mariages plus tardifs, une réduction de la mortalité infantile et maternelle et des enfants et des familles mieux nourries et en meilleure santé. Les efforts engagés en faveur de la santé reproductive depuis la Conférence du Caire doivent être poursuivis et accrus car, a-t-elle rappelé, le monde compte encore 860 millions d’adultes analphabètes, dont deux tiers de femmes. Il s’agit, comme l’a fait valoir ensuite le représentant de l’Indonésie, de promouvoir l’éducation pour tous à la fois comme un droit fondamental et comme le moyen d’infléchir la croissance démographique dans les pays les plus peuplés qui sont aussi souvent les plus pauvres.
En écho aux propos de Mme Obaid, M. Joseph Chamie, Directeur de la Division de la population au Département des affaires économiques et sociales (DESA), a rappelé les grandes lignes de la «Revision 2002» publiée récemment des perspectives de la croissance démographique mondiale: de 6,3 milliards de personnes aujourd’hui, la population du globe devrait atteindre 8,9 milliards d’ici à 2050, contre 9,3 milliards prévus initialement. Cette diminution de 400 millions, a-t-il expliqué, est le résultat d’une augmentation des décès en raison notamment du VIH/sida, mais aussi d’une diminution des naissances: dans les 20 prochaines années, quarante-quatre pays auront un taux de population âgée de plus de 65 ans supérieur au reste de la population.
Le VIH/sida, les migrations et le vieillissement sont trois priorités inscrites par le Secrétaire général dans la réforme des Nations Unies, a relevé pour sa part M. Nitin Desai, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, exhortant la Commission à jouer un rôle de «leadership» lorsque ces questions seront abordées au sein du système des Nations Unies. Il lui a également demandé d’inscrire son action dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de développement du Millénaire et du processus intégré des grandes conférences. «On ne peut parler de développement, de droits de l’homme ou de paix et de sécurité, sans parler des êtres humains, sans aborder la problématique de la population», a conclu M. Desai.
Mais relever ces défis suppose des ressources financières adéquates: Mme Obaid s’est inquiété de la tendance à la diminution des dépenses nationales et internationales consacrées aux activités démographiques. Et lors du débat qui s’est engagé sur les suites à donner aux recommandations de la Conférence internationale sur la population et le développement, les représentants des pays en développement, parmi lesquels le Pakistan et l’Indonésie -respectivement les quatrième et septième pays les plus peuplés de la planète- ont souligné que si beaucoup avait été fait de leur part pour mettre en œuvre le Programme d’action, beaucoup restait à faire: ils ont été nombreux à déplorer à l’instar de Mme Obaid que les donateurs n’aient pas tenu leurs engagements pris au Caire en 1994 alors que les pays en développement avaient tout fait pour respecter les leurs.
En ouverture de séance, la Commission avait désigné M. Gediminas Serksnys (Lituanie) comme Président de la trente-sixième session puis, procédé à l’élection de ses quatre Vice-Présidents: respectivement MM. Iftekhar Ahmed Chowdhury (Bangladesh), Crispin Grey-Johnson (Gambie), Marc Bichler (Luxembourg) et Alfredo Chuquihuara (Pérou). Le Rapporteur de la Commission sera ultérieurement choisi parmi ces trois Vice-Présidents. Au cours de cette première journée, la Commission a également pris note de l’ordre du jour* de cette trente-sixième session puis entendu la présentation des rapports qui lui sont soumis pour cette semaine de travaux. M. Antonio Golini, Président de la 35e session de la Commission a introduit le rapport du Bureau de la réunion intersession qui s’est tenue à Rome en octobre 2002.**
Outre les orateurs déjà cités, les représentants des pays suivants ont également pris la parole: Maroc, Grèce (au nom de l’Union européenne), Etats-Unis, Japon, Brésil, Fédération de Russie, Pakistan, Chine, Canada, Suisse, Ethiopie, Algérie, Inde. Le Pr Alaka Basu, de l’Université Cornell, ainsi que les représentants des organisations suivantes se sont aussi exprimés: Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), et l’alliance intergouvernementale «Partnership in Population and Development».
La Commission poursuivra ses travaux demain mardi 1er avril à 10 heures.
*E/CN.9/2003/1
**E/CN.9/2003/8
SUITE DONNÉE AUX RECOMMANDATIONS DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT
Déclarations
M. NITIN DESAI, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a souligné le rôle important de la Commission de la population et du développement dans le suivi des questions démographiques au sein du système des Nations Unies. Rappelant les dernières statistiques contenues dans «Revision 2002», M. Desai a indiqué que le Secrétaire général avait accordé une attention particulière aux prévisions notamment en raison de leur impact sur le développement économique et social. Il s’est félicité de la forte médiatisation de ces données qui permettent de sensibiliser la population mondiale aux grands enjeux démographiques. Le VIH/sida, les migrations et le vieillissement sont trois priorités inscrites par le Secrétaire général dans la réforme des Nations Unies, a-t-il poursuivi, avant d’exhorter la Commission à jouer un rôle de «leadership» lorsque ces questions seront abordées au sein du système des Nations Unies. M. Desai a abordé ensuite les questions relatives à l’orientation des programmes au sein du système des Nations Unies et a invité la Commission de la population et du développement à s’inscrire dans les efforts visant à coordonner les résultats obtenus lors des grandes conférences des années 1990, sur le développement social de Copenhague, sur la population et le développement du Caire, sur les femmes à Beijing, sur le financement du développement à Monterrey et enfin sur le développement durable à Johannesburg.
Chaque commission doit contribuer au suivi de ces conférences au travers du groupe créé par l’Assemblée générale et qui est chargé du suivi intégré des grandes conférences, a-t-il dit. Ce groupe doit soumettre un rapport d’ici le mois de juin afin de bâtir une architecture claire et d’établir des corrélations entre les différents secteurs au sein du système des Nations Unies. L’examen des résultats des conférences à travers les «processus +5 ou +1» doivent permettre d’accélérer la mise en œuvre de ce qui a été convenu dans le cadre de ces rencontres, a-t-il dit, et de les intégrer dans le contexte des objectifs de développement du Millénaire. M. Desai a demandé ensuite à la Commission, qui se penchera cette année sur le thème de l’éducation et du développement, d’inscrire son action dans le cadre de la mise en œuvre des objectifs de développement du Millénaire et du processus intégré des grandes conférences. «On ne peut parler de développement, de droits de l’homme ou de paix et de sécurité, sans parler des êtres humains, sans aborder la problématique de la population», a conclu M. Desai.
Mme THORAYA OBAID, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a rappelé que l’accès à l’école primaire pour tous les enfants, en particulier les filles, était un objectif clef de la Conférence du Caire et figurait en tête des objectifs de développement du Millénaire. L’éducation des femmes, a-t-elle insisté, est un facteur déterminant de développement durable dont les principaux bénéfices sont l’accroissement du revenu familial, des mariages plus tardifs, une réduction de la mortalité infantile et maternelle, et des enfants et des familles mieux nourries et en meilleure santé. Depuis la Conférence du Caire en 1994, le contenu de l’éducation populaire s’est davantage axé sur la santé et notamment la santé reproductive. Mais ces efforts doivent être poursuivis et accrus car il subsiste toujours 860 millions d’adultes analphabètes dans le monde et plus de 113 millions d’enfants, dont une majorité de filles, ne fréquentent pas l’école.
Mme Obaid a rappelé que depuis des années, le FNUAP et ses partenaires au sein et en dehors du système des Nations Unies ont engagé et soutenu de nombreuses initiatives pour corriger les disparités entre hommes et femmes en terme d’éducation, notamment dans le domaine de la santé reproductive. Déjà, a-t-elle assuré, plusieurs pays ont été capables de traduire en actes politiques et programmes d’action leurs engagements du Caire. Le suivi du Sommet du Millénaire reconnaît largement les objectifs du Caire concernant l’accès à des services de santé reproductive de qualité pour tous d’ici à 2015.
La révision 2002 de la Division de la population récemment publiée indique que la population mondiale atteindra 8,9 milliards d’ici à 2050, contre 6,3 milliards aujourd’hui, a-t-elle souligné: cette nouvelle estimation, qui représente une baisse de 400 millions d’individus par rapport aux projections antérieures est essentiellement liée au virus VIH/sida qui entraîne un accroissement de la mortalité dans certains pays notamment de l’Afrique sub-saharienne; mais cette baisse est aussi due aux progrès de la santé familiale et à une meilleure information des femmes sur le contrôle des naissances. Près d’un milliard de jeunes gens entrent aujourd’hui dans la vie reproductive. Les programmes de santé doivent être renforcés et conjugués à d’autres efforts pour donner davantage de pouvoir aux femmes et aux filles.
Mme Obaid a plaidé pour une analyse pragmatique et constructive, pays par pays, des progrès enregistrés dans la mise en œuvre de la Conférence du Caire. Le FNUAP, a-t-elle expliqué, mène actuellement une enquête de terrain des expériences menées au plan national dans les pays développés et en développement: le FNUAP préparera ensuite une synthèse générale des programmes mis en œuvre. Cet exercice devrait stimuler les activités aux plans national et régional: l’échange d’expérience avec les commissions régionales de l’ONU permettra aux pays de comparer les progrès dans chaque région et de voir comment ils peuvent s’aider les uns les autres. Ces conclusions, a-t-elle annoncé, seront présentées dans le rapport 2004 du FNUAP.
Enfin, Mme Obaid a fait valoir qu’on ne peut atteindre les objectifs du Caire sans ressources financières adéquates et a regretté que ces ressources n’aient pas atteint à ce jour un niveau suffisant pour assurer la mise en œuvre du Programme d’action: les dernières études font apparaître que les dépenses nationales et internationales consacrées aux activités démographiques ont diminué, signe sans doute de difficultés économiques conjoncturelles plutôt que d’une véritable tendance. Mais, a-t-elle rappelé, il est plus important que jamais d’atteindre les objectifs définis lors de la Conférence du Caire en 1994.
M. JOSEPH CHAMIE, Directeur de la Division de la population au Département des affaires économiques et sociales (DESA), a abordé les statistiques contenues dans le rapport sur les perspectives de la population mondiale «Revision 2002», publié il y a trente jours. Les composantes fondamentales de l’évolution démographique ne peuvent être modifiées par décret, a-t-il dit, à savoir les naissances, les décès et les migrations. A partir du milieu du XXe siècle, on a assisté à une croissance rapide de la population mondiale qui a quadruplé au cours du dernier quart de siècle, a-t-il poursuivi. En outre, de nouvelles tendances démographiques telles que les migrations et l’exode rural ont eu des conséquences sur les domaines sociaux, politiques, économiques et environnementaux. Cette tendance se maintiendra-t-elle au XXIe siècle, a interrogé M. Chamie.
Il a annoncé toutefois que la population mondiale devrait être de 8,9 milliards d’ici à 2050, contre 9,3 milliards prévus initialement. Cette diminution de 400 millions est le résultat d’une augmentation des décès et d’une diminution des naissances, a expliqué le Directeur, indiquant que si l’on découvrait un vaccin aujourd’hui contre le VIH/sida la population mondiale compterait 315 millions de personnes en plus en 2050.
S’agissant de la diminution des naissances, il a fait état de taux de fécondité inférieurs à 2,1 enfants par femme dans les pays en développement en 2050, soit le niveau moyen pour assurer le renouvellement de la population. Ce résultat est dû notamment au succès des programmes de planning familial, a-t-il dit, avant de préciser que si le taux de fécondité passait à 2,35 enfants, la population serait de 10,6 milliards en 2050 contre 7,5 milliards si le taux de fécondité chutait à 1,35 enfant. M. Chamie a poursuivi en énonçant une série d’hypothèses dans le cas des trois pays les plus dynamiques en termes de progression démographique, Inde, Pakistan et Nigéria, et les trois les moins dynamiques, Fédération de Russie, Japon et Italie. 80 gouvernements estiment que leur taux de fécondité sont trop élevés, a-t-il poursuivi, et ils entendent, à l’instar de l’Inde et du Pakistan, les maîtriser davantage. Dans le même temps, des pays européens, inquiets du vieillissement de leur population, qui représente 12% de la population mondiale aujourd’hui et ne représentera plus que 7% en 2050, entendent relancer la natalité par des mesures incitatives.
A cet égard, M. Chamie a annoncé un nouvel ordre démographique mondial en 2050 dans la mesure où dans les 20 prochaines années, 44 pays auront un taux de population âgée de plus de 65 ans supérieur au reste de la population. Les pays développés craignent par conséquent la faillite de leurs systèmes de retraite et de protection sociale et envisagent des solutions peu populaires telles que l’augmentation des impôts ou la diminution de la couverture pour remédier à ces situations. Il a exhorté la Commission à réfléchir à ces questions au cours de cette session afin d’apporter des réponses concrètes aux grands enjeux démographiques mondiaux qui intéressent tans le monde développé que le monde en développement.
Mme ALAKA BASU, professeur à l’Université Cornell (Ithaca, New York), a estimé que l’objectif de la scolarisation primaire va de pair avec l’élimination des inégalités entre les sexes. Mais que se passe-t-il chez une fillette scolarisée quelques années seulement au début de sa vie? Les rares études empiriques n’ont pas montré que dans de tels cas les fillettes disposaient d’une information très différente de celle des femmes non éduquées sur les maladies, les traitements et la prévention. Une autre hypothèse est que la «petite» scolarisation n’enseigne pas de compétences particulières mais apprend aux femmes comment avoir accès aux compétences et aux connaissances, notamment par le biais des médias et des assistants de santé. Mais dans ce cas, l’on peut se demander pourquoi cette information ne se reflète-t-elle pas en termes qualitatifs et quantitatifs. Mais, a-t-elle reconnu, cette hypothèse reste pourtant valide parce que le fait même de la scolarisation donne de nouvelles capacités aux femmes à protéger leurs enfants des menaces qui les guettent. Même des femmes peu éduquées ont mieux tendance à déterminer les éléments nécessaires à la survie d’un enfant comme obtenir des soins de santé efficaces.
Pourquoi après une courte scolarisation les femmes sont-elles capables d’avoir un meilleur accès aux soins? Les recherches ont montré que l’autonomie et le renforcement des capacités de la personne sont les premiers acquis de l’éducation. Pourtant, l’expérience tirée de la scolarisation dans le tiers-monde ne montre pas que les femmes et filles sortent plus habilitées ou plus autonomes d’une petite scolarité. Les valeurs d’universalité, d’autonomie, sont souvent en conflit avec les valeurs plus familiales du foyer. Mme Basu a cité la seule étude sur le sujet, le rapport PROBE de 1999 sur les écoles primaires en Inde: ce rapport n’a pas trouvé de liens évidents entre la transmission du savoir et les valeurs d’indépendance et d’autonomie. Ce que l’on apprend surtout à l’école, selon PROBE qui parle de «programme caché», ce sont des valeurs d’obéissance, de discipline et de routine; cette notion d’autorité est incarnée par le professeur, la classe enseigne le respect des spécialistes, des dirigeants nationaux, des fonctionnaires: ce que l’enseignant, le docteur ou le chef de village dit est vrai et ne peut être remis en question. Lui obéir c’est appartenir à ce monde moderne. Il s’agit moins de comprendre que d’apprendre par cœur.
Cet effet, a poursuivi l’intervenante, est renforcé par l’entrée des enfants dans le cadre horaire de l’école: tout ceci fait que la femme éduquée sera plus encline à suivre les conseils des autorités médicales et quand ce respect conduit à la guérison d’un enfant, cette foi ne peut être que renforcée. Le programme caché de l’enseignement dans les pays en développement sert donc les programmes de développement économique et social et il n’est donc pas étonnant que l’éducation primaire fournisse un taux élevé de retour sur l’investissement dans les pays pauvres. Pour Mme Basu, ce n’est pas l’école primaire qui donne l’indépendance, mais des expériences visant «à rendre l’école heureuse» montrent qu’il est possible de mettre en place des systèmes d’écoles primaires d’où les écoliers sortent avec une dignité renforcée, capables d’émettre leurs avis. Si l’école apprend à remettre en cause l’autorité et à renforcer l’indépendance, la relation éducation/démographie/reproduction sera moins ambiguë qu’aujourd’hui. Mais pour Mme Basu, il faut être plus ambitieux et penser à fournir un enseignement secondaire plus universel car c’est ce niveau plus élevé d’éducation qui habilite et renforce les esprits.
M. MOULAY LAHCEN ABOUTAHIR (Maroc), intervenant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a réaffirmé l’attachement du Groupe aux principes et objectifs définis au Caire en 1994, dans le cadre de la Conférence sur la population et le développement. Il a indiqué que les pays en développement sont confrontés à certains obstacles dans la mise en œuvre de ce Programme d’action en raison notamment du fardeau de la dette et de l’accès limité de leurs produits aux marchés internationaux qui les privent de ressources. A cet égard, le représentant a rappelé aux pays développés leurs obligations en matière d’aide publique au développement pour permettre aux pays en développement de financer leurs programmes relatifs à la population. Or, a-t-il constaté, cette aide internationale a eu tendance à diminuer ces dernières années au moment même où les questions de population sont de plus en plus complexes. Aussi le Maroc, au nom des 77 et la Chine, a-t-il proposé une démarche intégrée et coordonnée des institutions spécialisées du système des Nations Unies afin de répondre aux enjeux de la population, en particulier en matière d’éducation, et ce afin de parvenir aux objectifs définis au Caire à l’horizon 2015.
Le représentant a encouragé ensuite le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) à poursuivre la mise en œuvre des programmes population et développement tout en soulignant de nouveau la nécessité de disposer de fonds suffisants à cette fin. Le Groupe des 77 et la Chine estime qu’il appartient à l’Assemblée générale de définir les modalités du suivi de la Conférence du Caire et de la Conférence de Caire+5. La session de 2004 de la Commission de la population et du développement devrait être vue comme une session ordinaire chargée d’évaluer les progrès réalisés et les objectifs encore à atteindre dans la mise en œuvre du Programme d’action du Caire, a-t-il jugé. Il a ensuite proposé à la Commission de choisir au cours de cette session le thème de la session de 2005 qui pourrait être intitulé «Population, pauvreté et VIH/sida» qui est important pour l’ensemble du système des Nations Unies et des pays en développement.
M. ADAMANTIOS TH. VASSILAKIS (Grèce), intervenant au nom de l’Union européenne et des pays associés, a souligné les progrès remarquables atteints dans le cadre de la Conférence du Caire, rencontre qui a permis de revitaliser les discussions sur la population et le développement. La rencontre du Caire s’est avérée un jalon important et les décisions prises à cette occasion sont essentielles pour atteindre les objectifs de développement du Millénaire, en particulier pour ce qui est des questions de santé reproductive et de gestion démographique, a-t-il dit. Poursuivant sur la question de l’éducation, il a jugé que l’accès à l’éducation est une pré-condition pour le développement humain et rappelé à ce sujet les dispositions de la Déclaration du Millénaire. Il a expliqué que l’éducation constituait un moyen efficace pour accroître la participation, la responsabilisation sociale et l’intégration des populations et en particulier des couches les plus vulnérables. L’élimination de l’analphabétisme et des disparités entre les sexes est primordiale à cet égard, a-t-il dit, suggérant que les recommandations visant à améliorer la qualité de l’enseignement portent notamment sur l’environnement scolaire, la formation du personnel enseignant et la révision des cursus.
L’Union européenne, dans le prolongement de l’Assemblée mondiale sur le vieillissement, rappelle également la nécessité d’assurer une formation continue et permanente, notamment concernant les technologies de l’information et de la communication, afin de n’exclure aucune catégorie de la population nationale des objectifs définis au Caire. M. Vassilakis a invité tous les gouvernements à demeurer mobilisés dans le cadre de la mise en œuvre du Programme d’action du Caire et du Consensus de Monterrey afin de pouvoir répondre aux enjeux de la population et du développement. Le rôle de l’éducation dans l’amélioration de la santé reproductive et sexuelle mérite également d’être souligné, a insisté le représentant, soulignant que l’éducation a un impact certain sur la diminution des grossesses précoces et sur la propagation de la pandémie du VIH/sida. L’éducation est un levier du développement économique dans les pays en développement car ils peuvent opérer des choix en connaissance de cause, que ce soit en terme de contrôle des naissances, de lutte contre la mortalité infantile, ou de prévention contre les maladies sexuellement transmissibles. Il a souhaité ensuite que la session de 2004 ne comporte pas de négociations et qu’elle soit consacrée à un thème transversal qui donne lieu à une réflexion d’ensemble et non chapitre par chapitre du Programme d’action.
M. SICHAN SIV (Etats-Unis) a souligné les continuelles inégalités dans l’accès des femmes et des filles à l’éducation, malgré des progrès constants au cours des dix dernières années. Beaucoup reste à faire, a-t-il poursuivi, rappelant que les deux tiers des 850 millions d’analphabètes dans le monde sont des femmes. Mais pour les Etats-Unis, a-t-il assuré, modifier ce panorama est à portée de mains, en expliquant que les Etats-Unis soutiennent de nombreux pays pour les aider à relever ces défis et assurer l’accès de l’éducation à tous leurs enfants. S’assurer que les filles restent à l’école et complètent leurs cycles primaires et secondaires réclame de la part des éducateurs qu’ils ne s’arrêtent pas à la présence et aux taux d’inscriptions, mais qu’ils traitent aussi de questions plus larges comme l’impact sur l’éducation des différences de traitement entre filles et garçons.
Rappelant que les Etats-Unis avaient apporté l’an dernier 232,5 millions de dollars à 36 pays pour les aider à améliorer le système éducatif, le représentant a cité les exemples de l’Egypte, du Guatemala ou du Pérou où plusieurs milliers de bourses ont été accordées. Il a également rappelé que le Président Bush a créé le Compte pour le défi du Millénaire, qui cible l’assistance sur les pays qui ont adopté des politiques notamment de santé et d’éducation favorisant la croissance économique. Ce compte encourage les pays en développement à créer des partenariats avec leurs citoyens, les financements allant à ceux qui présentent des programmes clairs et axés sur les résultats, a-t-il indiqué.
M. YOSHIYUKI MOTOMURA (Japon) a souligné que l’être humain était confronté aujourd’hui à de nombreuses menaces, diversifiées du fait de la mondialisation. Aussi, le Japon considère essentiel d’aborder les questions démographiques sous l’angle de la sécurité. La population mondiale a déjà dépassé les six milliards de personnes selon l’ONU et la croissance démographique rapide est l’une des causes de l’augmentation de la pauvreté; les pays développés, pour leur part, sont confrontés au vieillissement de leur population. Le Gouvernement du Japon est convaincu que le développement des ressources humaines est à la base du développement national et du développement durable. Le Japon a lui-même fortement investi dans l’éducation de base pour devenir un Etat moderne.
Le Japon attache beaucoup d’importance à l’éducation des filles qui contribue à aider les femmes à prendre des décisions en connaissance de cause et est un facteur pour freiner la croissance démographique en raison de taux de fécondité plus faibles et diminuer la mortalité infantile. Le Gouvernement japonais entend fournir 250 milliards de yens -2 milliards de dollars- au cours des cinq prochaines années pour aider les pays à atteindre les objectifs de Dakar; il met aussi en œuvre des projets d’éducation des filles avec des ONG japonaises et appuie les projets de l’UNICEF. Enfin, pour le représentant, les efforts de sensibilisation et d’éducation ciblant les adolescents comptent parmi les efforts les plus porteurs dans la prévention du sida et autres maladies infectieuses. Il a rappelé l’initiative sur ce point lancé au Sommet du G-8 à Okinawa en 2000, lors duquel le Japon a promis d’apporter trois milliards de dollars sur cinq ans pour lutter contre ces maladies.
Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a indiqué que l’éducation avait une influence sur la croissance démographique à long terme dans la mesure où elle permet de sensibiliser la population aux questions de santé reproductive et de prévention du VIH/sida, les deux étant étroitement liées aux questions de population. Dans le cas du VIH/sida, a-t-elle poursuivi, l’éducation a un impact indéniable sur la prévention de la maladie et sur l’atténuation de ses conséquences sociales et communautaires. Elle a ensuite fait état d’un taux de croissance démographique en déclin au Brésil où il est passé de 2,9% en 1960 à 1,6% en 2000. Elle a fait part de mesures concrètes adoptées par le Gouvernement pour créer un environnement propice au développement social et expliqué que des investissements continus avaient été consentis en matière d’éducation. Ainsi, des bourses ont été créées pour les enfants défavorisés dans le but de les maintenir en classe. Un système de bourses nutritionnelles va être mis en place pour tous les enfants défavorisés jusqu’à l’âge de six ans et les femmes enceintes bénéficieront d’un soutien financier et d’un suivi médical dès le début de la grossesse.
Au Brésil, a expliqué la représentante, nous intervenons à la fois dans le cadre de campagnes de prévention et de traitement du VIH/sida et des maladies sexuellement transmissibles (MST) qui ont été intégrées dans les cursus scolaires. En outre les pères de famille sont à leur tour formés et dans le cadre des programmes de prévention et de traitement, un encouragement au dépistage du virus et des soins et conseils aux malades sont prévus. L’éducation en soi ne peut-être suffisante et il faut que le taux de croissance économique soit adéquat pour augmenter les chances de disposer d’un emploi, a-t-elle toutefois constaté, car il s’agit d’intégration socioéconomique. A cet égard, elle a plaidé pour un environnement international propice et des financements adéquats, invitant la communauté internationale à mettre en œuvre les grandes orientations des conférences liées au développement organisées cette dernière décennie.
M. GREGORI OUSTINOV (Fédération de Russie) a souligné que la qualité de l’enseignement et une réponse aux problèmes de l’époque moderne et un outil central pour le développement durable. Parmi les approches innovantes préconisées, le représentant a mis en avant le recours à l’enseignement à distance. Il a également insisté sur la sensibilisation pour prévenir le VIH/sida et autres maladies infectieuses afin d’en réduire l’impact sur la société, les malades et leur environnement. Tous les efforts doivent être engagés pour lutter contre les disparités entre régions, pays développés et pays en développement et notamment pour réduire la fracture numérique, a-t-il poursuivi en appelant de ses vœux une plus grande coopération entre les services des Nations Unies chargés des technologies de l’information et ceux qui oeuvrent dans le domaine du développement durable. Le représentant a préconisé une approche souple pour déterminer le suivi de la Conférence du Caire en mettant l’accent sur les mécanismes intergouvernementaux existants et que les paramètres du deuxième examen quinquennal restent ouverts.
M. ABDUR RASHID KHAN (Pakistan) a rappelé qu’avec 147,5 millions d’habitants le Pakistan était le quatrième pays le plus peuplé en Asie, le septième au monde: il compte aujourd’hui un taux de croissance annuel de sa population de 2,1% et un taux de fertilité de 4,3% et si ces caractéristiques se maintiennent, le Pakistan aura 197,8 millions d’habitants en 2020; sa population va continuer de croître pour au moins encore quatre décennies et il faudra encore 60 à 70 ans pour la stabiliser, ce qui est un sujet d’extrême préoccupation pour le pays. Le représentant a également fait valoir qu’un manque de ressource mais aussi certaines rigidités socioculturelles avaient empêché son pays de contrôler sa démographie avant l’adoption du Programme d’action du Caire. Néanmoins, la situation a changé depuis 1994 a-t-il indiqué, en citant pour exemple le taux d’utilisation des préservatifs passé de 2% dans les années 90 à 33% en 2002; le taux de fertilité est lui aussi en déclin depuis cette époque. Ceci a amené un allègement de la pression démographique qui avait, au cours de ces dernières décennies, empêché tout progrès socioéconomique.
Le représentant a ensuite expliqué comment il avait agi pour mettre en œuvre les recommandations de la Conférence: une politique définie a fait l’objet d’un consensus entre Gouvernement, ONG et divers partenaires: l’objectif de cette politique est d’améliorer la qualité de vie de tous les Pakistanais en réduisant le taux de croissance de la population par le biais d’un planning familial; il s’agit de créer un environnement propice qui lui-même engendre des changements de mentalité et d’habitudes sociales. Cette politique souligne que toutes les questions de population et de développement relèvent de tous les citoyens et qu’elles s’adressent donc aussi à la société civile. Pour ce qui est de la disponibilité des ressources, tout le monde avait convenu au Caire qu’il fallait une aide de la part des donateurs mais la communauté internationale n’a pas respecté ses engagements. Malgré tout, le Pakistan a augmenté ses investissements dans le domaine de la santé et de l’éducation. Nous craignons néanmoins, a-t-il prévenu, que le manque de ressources entrave les progrès du Pakistan et il serait malheureux que la percée enregistrée soit remise en cause. Le représentant a donc réclamé de nouveau l’appui des donateurs et assuré que son pays restait déterminé à poursuivre la tâche entreprise qui vise à réduire la mortalité infantile et maternelle et à faire baisser le taux de fécondité.
M. JERROLD W. HUGUET, Chef de la Division de la population et de l’intégration sociale à la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a expliqué que la priorité de la Commission était d’apporter une assistance aux Etats Membres dans la mise en œuvre du Programme d’action du Caire. Il a indiqué que les gouvernements avaient avancé dans la définition d’une approche intégrée en matière de santé reproductive, tout en soulignant les obstacles résultant du manque de financement. Il a également regretté que certaines questions telles que les migrations et le vieillissement de la population n’aient pas reçu jusqu’ici une attention suffisante de la part des Etats membres de la CESAP. La CESAP apporte quant à elle une assistance technique qui passe par l’analyse de programmes, l’appui à l’élaboration des politiques en matière de population, l’analyse des données de recensement, et ce, grâce à des financements du FNUAP et d’autres bailleurs de fonds. Cette sensibilisation passe également par le réseau Internet et par la publication d’une revue diffusée dans les Etats membres, a-t-il expliqué.
M. WANG GUOQIANG (Chine) a indiqué que des efforts considérables ont été déployés pour mettre en œuvre le Programme d’action du Caire dans son pays, avant de constater des progrès significatifs. L’amélioration de l’accès à l’éducation des femmes et des filles contribue à leur autonomisation et à la réduction de la taille des familles. Il a jugé ensuite que l’élimination de l’analphabétisme constituait une condition sine qua none du développement humain et jugé impératif d’assurer l’accès universel à l’éducation comme l’a fait la Chine au cours des neuf dernières années. Cela a permis de porter le taux d’alphabétisation au niveau de ceux des pays développés, a ajouté M. Wang, tout en reconnaissant que des problèmes persistent dans le domaine de l’enseignement secondaire et universitaire. La Chine a intégré l’éducation des femmes dans les programmes de développement, a-t-il poursuivi, et la prévention du VIH/sida figure en bonne place dans les programmes éducatifs. L’esprit du Programme d’action du Caire va dans le bon sens, a-t-il enfin déclaré, assurant que la Chine ne souhaite pas rouvrir les négociations.
M. GILBET LAURIN (Canada) a constaté que, malgré les Conférences du Caire, de Dakar ou la Déclaration du Millénaire, les femmes et les filles constituent toujours la majorité des gens sans instruction. Des quelque 130 millions d’enfants qui ne vont pas à l’école, les deux tiers sont des filles, a-t-il rappelé. Il est vrai que la pauvreté rend difficile la fréquentation de l’école aussi bien pour les garçons que pour les filles, mais celles-ci sont plus touchées, même si l’on sait qu’investir dans leur éducation rapporte des dividendes: pour chaque année de primaire supplémentaire, le revenu augmente de 10%, la mortalité infantile et la fécondité reculent et la productivité agricole s’élève de 10% au moins. Le représentant a fait valoir que les femmes et surtout les pauvres parmi elles étaient les plus exposées aux risques et conséquences du VIH/sida d’autant qu’elles se trouvaient souvent dans l’incapacité de se protéger des comportements à risques.
La priorité accordée à l’éducation, à la population et au développement est une approche que le Canada met en avant dans ses efforts d’alphabétisation au plan national, dans ses collaborations bilatérales et dans sa participation aux organisations multilatérales. Le Canada a adopté un Plan d’action en matière d’éducation de base par lequel il quadruplera ses investissements en la matière dans les pays en développement pendant la période 2000-2005, pour porter à 555 millions de dollars canadiens le total de ses dépenses dans ce domaine.
Pour le représentant du Canada, la Commission peut contribuer pour beaucoup en influant sur les processus nationaux, sur la communauté internationale et en assurant le suivi des engagements internationaux; elle sera d’autant plus efficace si elle travaille de concert avec les autres organismes de l’ONU. D’autres domaines clefs exigent également un redoublement de nos efforts: supprimer les disparités entre les sexes, relever les défis que pose la pandémie du VIH/sida, répondre aux besoins des filles et garçons qui n’ont pas accès à l’éducation et qui sont souvent obligés de travailler ou que la pauvreté, le sexe, la langue, la race ou l’isolement éloignent de l’école. La priorité doit être accordée à l’amélioration de l’intégration de la formation en santé génésique à tous les niveaux d’éducation.
M. JACQUES MARTIN (Suisse) a jugé nécessaire de procéder à un examen approfondi des progrès réalisés en matière de population et développement depuis la Conférence du Caire en 1994. Il s’est félicité entre autres du renforcement des approches horizontales qui ont permis d’accorder une priorité à la santé des femmes et des jeunes, à l’éducation et au renforcement des capacités, ou «empowerment» notamment en direction des femmes. «Le Caire+5» a permis de préciser les objectifs définis au Caire, a ajouté le représentant, avant de faire état de changements visibles sur le terrain notamment sur les fronts de la santé, y compris sexuelle et reproductive, de l’éducation et de la condition de la femme. Il a prôné un examen des différents contextes et avancées et a rappelé l’importance d’une large sensibilisation contre le VIH/sida, comme l’a souligné la session extraordinaire de juin 2001 contre cette pandémie.
La pauvreté, l’insécurité ont une influence immédiate sur la capacité de mise en œuvre des objectifs de développement du Millénaire, a-t-il constaté ensuite, avant de louer le fait que le développement humain ait pris une place de plus en plus importante dans la coopération internationale. Prenant l’exemple de la Suisse qui a intégré «l’empowerment» et le développement humain dans ses priorités en matière d’aide au développement, tant bilatérale que multilatérale, il a regretté que les ressources consacrées à la mise en œuvre du Programme d’action du Caire aient été moins importantes que prévues tout en assurant que pour sa part la Suisse accorde actuellement 30 millions de francs suisses au développement humain contre 10 millions en 1990. Ces fonds sont certes largement absorbés par la prévention et la lutte contre le VIH/sida, a-t-il constaté. Le représentant a ensuite abordé la question du vieillissement, dans le prolongement de l’Assemblée mondiale de Madrid, question qui interpelle les pays riches et suppose un suivi aussi rigoureux que celui du Caire, a-t-il souhaité.
M. PRIJONO TJIPTOHERJANTO (Indonésie) a estimé qu’en dépit des progrès effectués, le défi à relever restait important en terme d’éducation: l’éducation est directement liée aux aspects socioéconomiques du développement comme la croissance démographique, l’analphabétisme, les questions de genre, la santé reproductive, la prévention contre le VIH/sida, les droits des enfants et les droits de l’homme. Il s’agit donc de traduire par des faits le droit de chaque enfant à une éducation de base gratuite et obligatoire. L’Indonésie a récemment lancé une initiative en ce sens en adoptant un amendement à sa Constitution qui alloue 20% du budget national à l’éducation contre 7% jusqu’à présent. En outre, cet amendement suppose de dispenser une «éducation morale» à tous les niveaux d’enseignements. Il reste cependant alarmant de noter, dans les rapports du Secrétaire général, que 88 pays resteront incapables d’assurer les cinq premières années d’école primaire à tous les enfants d’ici à 2015. Pour remplir cet objectif, les neuf pays en développement les plus peuplés, dont l’Indonésie, ont lancé l’initiative E-9 qui vise à atteindre l’éducation pour tous à la fois comme un droit fondamental et comme le moyen d’infléchir la croissance démographique.
L’autre défi auquel son pays doit faire face, a poursuivi le représentant, est la croissance démographique justement: en tant que quatrième pays le plus peuplé du monde, l’Indonésie doit faire face à d’énormes défis en terme d’éducation: la relation entre éducation et croissance démographique est très étroite en terme de mortalité et de fertilité. L’éducation dont bénéficient les jeunes mères les aide à élever une jeune génération de moins de cinq ans plus saine; en outre, l’analphabétisme étant un précurseur important de la pauvreté il convient de l’éliminer. Les pays en développement connaissent des difficultés à appliquer le Programme d’action du Caire: l’objectif de mobiliser 17 milliards de dollars d’ici à 2000 n’a pas été atteint par les pays développés et le représentant a donc appelé à forger des partenariats fondés sur les intérêts mutuels, des bénéfices et des responsabilités partagées.
M. AZANAW TADESSE ABREHA (Ethiopie) a jugé important de définir une thématique pour chaque session afin d’évaluer les progrès réalisés dans le suivi du Programme d’action du Caire. L’éducation a un impact vital sur le bien-être des individus, sur leur développement économique et plus généralement sur le développement durable et la promotion des droits de l’homme. Il a souhaité à cet égard saluer les mesures prises ces dernières années dans le domaine du développement humain et pour la poursuite des objectifs de développement du Millénaire. En l’an 2000, a-t-il rappelé, 115 millions d’enfants étaient toujours non scolarisés tandis que 57 pays n’arriveront probablement pas, au rythme actuel, à réaliser l’objectif de l’enseignement primaire pour tous en 2015. S’agissant de l’Ethiopie, il a précisé qu’en 1994 une nouvelle politique éducative avait été définie mettant l’accent sur l’équité et la qualité.
Il importe d’élargir l’accès et la couverture de l’éducation primaire, a-t-il dit, et il importe de poursuivre les allocations budgétaires dans ces domaines. Les ressources allouées pour les programmes démographiques et pour le développement ont tendance à diminuer, a regretté M. Abreha, qui a exprimé son inquiétude face à la concurrence entre secteurs du développement qui sont souvent identifiés au détriment de l’éducation et du développement humain. Dans la perspective de la prochaine session de la Commission, M. Abreha a souhaité que des propositions concrètes puissent être définies sur le suivi de la mise en œuvre des recommandations de la Conférence du Caire. De même, constatant que l’intégration économique mondiale est étroitement liée au développement des ressources humaines et à la promotion des technologies de l’information et de la communication, il a exhorté la communauté internationale à contribuer au financement des mesures définies à Dakar en 2000 pour l’éducation pour tous et au Caire afin de permettre aux pays pauvres de développer leurs capacités.
Dr THIMOTHEE GANDAHO, Directeur exécutif de «Partners in Population and Development», a rappelé que cette alliance intergouvernementale avait été lancée par dix pays en développement lors de la Conférence du Caire en 1994 et comprenait aujourd’hui dix-neuf membres (Bangladesh, Chine, Colombie, Egypte, Gambie, Inde, Indonésie, Jordanie, Kenya, Mali, Mexico, Maroc, Nigeria, Pakistan, Thaïlande, Tunisie, Ouganda, Yémen et Zimbabwe). Sa mission vise à étendre et améliorer la collaboration sud-nord dans le domaine du planning familial et de la santé reproductive. Au terme de cette organisation, chaque «partenaire» devra renforcer sa capacité à échanger des expériences sud-sud et le nombre de ses programmes consultatifs et de formation.
Dans le cadre du Programme d’action de la conférence du Caire, les quatre priorités de l’organisation sont de fournir des services de planning familial intégré et de santé reproductive intégrée; la santé sexuelle et reproductive chez l’adolescent, la réduction significative de la mortalité et morbidité maternelle et la réduction et le traitement des maladies sexuellement transmissibles notamment le sida. Dialogue, formation et recherche sont les principales voies utilisées par «Partners», a-t-il souligné.
Depuis sa création l’organisation travaille avec le FNUAP et autres organisations des Nations Unies oeuvrant dans ce domaine. Son rôle a été reconnu par l’Assemblée générale dans le paragraphe 88 de son document sur les actions-clef à mener pour la mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence du Caire. Le FNUAP est en train de préparer une synthèse de la mise en œuvre du Programme d’action et un groupe de travail de l’Assemblée générale doit formuler des recommandations sur la meilleure façon de formuler des recommandations sur ce point; nous attendons de pouvoir en tirer des enseignements, a poursuivi le Dr Gandaho, dans la mesure où il s’agit d’améliorer l’application du Programme d’action dans les années qui viennent. Il a par ailleurs noté que le coût estimé en 1994 du VIH/sida n’est plus valable aujourd’hui et il faudrait environ dix fois plus aujourd’hui, ainsi que le FNUAP le signale: nous attendons de recevoir les propositions permettant de réagir de façon plus adéquate à l’avenir.
Mme RACHIDA BENKHELIL (Algérie) a déclaré que l’éducation, en particulier en direction des femmes, constitue sans conteste un élément majeur à même de contribuer au succès des politiques de population et de développement, dans la mesure où toutes les études confortent la corrélation étroite existant entre les niveaux d’instruction et la réduction de la fécondité ou de la mortalité. Constatant des progrès tangibles en matière d’accès à l’éducation de base, elle a regretté que des écarts subsistent entre les sexes notamment en zone rurale. Par ailleurs, a-t-elle ajouté, l’illettrisme résultant d’un abandon précoce de l’école tend à prendre le pas sur l’analphabétisme parmi les jeunes générations, tout en maintenant les mêmes contraintes en terme de possibilités d’épanouissement. C’est pourquoi il convient d’insister sur le parachèvement de l’éducation de base, en particulier pour la population féminine, a-t-elle dit, ajoutant que pour les jeunes filles, il convient d’œuvrer en faveur de la diversification des filières d’enseignement.
Par ailleurs, Mme Benkhelil a jugé que l’intégration des questions de population, de santé et de développement durable était à renforcer dans les programmes d’enseignement, avant de mettre l’accent sur la formation des formateurs pour faciliter la prise en charge de ces domaines. Elle a prôné en outre l’équipement approprié des établissements d’enseignement, y compris à travers l’accès aux moyens modernes d’information et de communication. S’agissant du programme d’action adopté au Caire, Mme Benkhelil a indiqué qu’il n’était pas à remettre en cause, mais a admis que des réajustements devaient être apportés en vue de tenir dûment compte des besoins émergents en matière de population et de développement. Nous restons particulièrement préoccupés par l’insuffisance de la mobilisation financière pour la mise en œuvre du programme d’action du Caire, a-t-elle enfin déclaré, jugeant que cette question devrait être au centre de l’évaluation qui sera opérée en 2004.
Mme SUJATHA RAO (Inde) a souligné les liens clairs entre éducation et développement durable. Outre l’impact démographique de l’éducation, l’autre aspect est qu’elle contribue à mieux faire comprendre la solidarité qui doit exister entre les individus et les nations. Il faut cependant éviter toute tendance visant à promouvoir dogmatisme ou sectarisme en la matière, a-t-elle jugé. S’agissant du financement des réformes engendrées par le Programme d’action du Caire, elle a rappelé qu’un tiers des coûts de la mise en œuvre de ce programme devait être financé, comme cela avait été suggéré à l’époque, par les donateurs: aussi la représentante a jugé malheureux de voir que les donateurs n’avaient pas honoré leurs engagements alors que les pays en développement avaient tenu les leurs.
Documentation
Rapport concis sur le suivi de la situation mondiale en matière de population, 2003: population, éducation et développement (E/CN.9/2003/2)
Ce rapport établi par la Division de la population et du développement du Département des affaires économiques et sociales du Secrétariat, a été présenté par le Directeur adjoint de la Division, M. Larry Heligman. Il fait valoir que l'éducation joue un rôle essentiel dans le développement national; qu'elle donne aux individus les moyens de faire des choix et de prendre des décisions, notamment sur la taille de leur famille, leur santé ou leur mode de vie.
Il rappelle que depuis sa création, l'Organisation des Nations Unies considère l'éducation comme l'un des éléments essentiels qui sous-tendent le développement humain et le progrès de la société, comme elle a eu l'occasion de le réaffirmer au fil des conférences et sommets internationaux. L'éducation constitue ainsi l'outil le plus puissant dont disposent les gouvernements pour promouvoir la croissance et l'égalité. Et l'étude de la rentabilité économique de l'éducation pour les individus démontre que l'élargissement de l'éducation, pour les femmes, se traduit par une rentabilité plus forte encore que celle découlant de l'élargissement de la scolarisation des hommes.
En 2000, on dénombrait cependant encore 862 millions d'adultes analphabètes dont près des deux tiers sont des femmes et dont près des deux tiers se trouvaient dans quatre pays (Bangladesh, Chine, Inde et Pakistan). L'objectif adopté lors du Forum mondial sur l'éducation, à Dakar en 2000, fixait à 50% l'accroissement des taux d'alphabétisation d'ici à 2015: si la tendance actuelle se maintient, environ 35 pays en développement devraient avoir atteint cet objectif et 50 autres sont près d'une amélioration de 30 à 50%; mais il est également probable que 57 pays ne réaliseront pas l'objectif de l'éducation primaire pour tous d'ici à 2015.
En termes de démographie, le rapport observe que chez les hommes comme chez les femmes, les jeunes sans instruction contractent plus souvent leur premier mariage à un âge précoce; en revanche, les femmes qui ont reçu une éducation supérieure deviennent sexuellement actives plus tard que les autres et leur niveau d'éducation influence considérablement l'âge auquel elles commencent à procréer et leur fécondité: les femmes dont le niveau d'études est plus élevé veulent moins d'enfants. Par ailleurs, dans les pays en développement, le taux d'utilisation de la contraception varie considérablement selon le niveau d'instruction: il est systématiquement plus élevé chez les femmes plus instruites et, souligne le rapport, même un niveau d'instruction modeste a des effets sensibles sur les comportements en matière de contraception.
Selon le rapport, les gens les plus instruits et les membres de leur famille sont aussi en meilleure santé et vivent plus longtemps: par exemple, dans les pays en développement, ceux qui sont plus instruits savent mieux comment se prémunir contre l'infection au VIH/sida. De même, la mortalité maternelle et celle des enfants de moins de cinq ans sont plus élevées dans la population moins instruite.
Enfin, le rapport rappelle que le VIH/sida menace les systèmes éducatifs de nombreux pays en développement à forte prévalence: la forte pénurie d'enseignants et leur absentéisme, liés à la maladie, compromettent leur fonctionnement. L'épidémie a également des effets dévastateurs sur les élèves et leur famille et entraîne souvent une chute des effectifs scolaires et une hausse des taux d'abandon.
Suivi des programmes de population portant en particulier sur la population, l’éducation et le développement, 2003 (E/CN.9/2003/3)
Le rapport du Secrétaire général sur la question a été présenté par Mme Deli Barcelona, experte de la branche santé reproductive du FNUAP.. Il met l’accent sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement, notamment en ce qui concerne l’éducation, la population et la santé en matière de procréation. Le rapport n’a pas pour objet d’aborder dans le détail l’ensemble des politiques et programmes d’éducation, indique le Secrétaire général.
Le rapport met en lumière l’éducation en tant que droit de l’homme et en tant que facteur clef du développement durable, du fait de ses liens avec les facteurs démographiques, économiques, sanitaires et sociaux. Il en ressort que la réduction des taux de fécondité, morbidité et mortalité et l’autonomisation des femmes est largement favorisée par les progrès dans le domaine de l’éducation. Dans la ligne des objectifs du Millénaire en matière de développement, poursuit le rapport, l’éducation est reconnue comme un moyen de permettre aux individus de disposer des connaissances et compétences leur permettant de faire face à la complexité du monde d’aujourd’hui. L’alphabétisation et l’éducation de base sont considérées à cet égard comme des instruments majeurs dans la construction d’une société cohérente et pacifique pour ce XXIe siècle, précise-t-il.
Le rapport indique ensuite qu’une attention particulière est accordée à l’éducation des jeunes, en particulier les filles, et à son impact sur les familles, les communautés et la société. Parmi les vastes retombées sociales de l’éducation mentionnées dans le rapport figurent entre autres l’augmentation du revenu familial, le mariage plus tardif, la réduction du taux de fécondité et celle des taux de mortalité infantile et maternelle, l’amélioration de l’alimentation et de la santé des enfants et des familles, la baisse du taux de décès liés aux naissances, l’augmentation des possibilités et des choix de vie pour les femmes et les hommes, l’amélioration de la protection contre le VIH/sida et le développement de la participation à la prise de décisions et au développement.
Parmi les principaux défis qu’il décrit dans son rapport, le Secrétaire général insiste sur la lutte contre l’analphabétisme, l’élimination des disparités entre les sexes et la réduction des écarts en matière de financement, d’information et de capacité à assurer une éducation de qualité à tous. Il ajoute que ces questions impliquent des réformes politiques, une action soutenue et un renforcement des partenariats plurisectoriels, en particulier dans le cadre des stratégies de réduction de la pauvreté. Les recommandations visant à améliorer l’apprentissage des élèves doivent mettre l’accent sur l’environnement matériel, l’enseignant, le programme, les matériels didactiques et les systèmes d’enseignement de substitution, ainsi que la formation continue et l’éducation des adultes.
Flux de ressources financières devant concourir à l'application du Programme d'action de la Conférence internationale sur la population et le développement (E/CN.9/2003/4)
Ce rapport qui a été présenté Mme Ann Pawiliczko du FNUAP, examine les tendances de l'aide bilatérale, multilatérale et de l'aide consentie par les organisations non gouvernementales (ONG) et les fondations en matière de population et donne des estimations des dépenses intérieures présentées par les pays en développement en 2001.
Selon le rapport, l'aide internationale et les dépenses intérieures consacrées aux activités en matière de population ont diminué en 2001 alors qu'elles avaient régulièrement progressé depuis 1994. Le montant de l'aide extérieure était estimé à 2,3 milliards de dollars en 2001, contre 2,6 en 2000. Le montant de l’aide bilatérale était de 1,6 milliard de dollars en 2000. Les dépenses intérieures publiques et privées seraient tombées, selon des estimations non exhaustives, de 8,6 milliards de dollars en 2000 à 7,1 milliards en 2001. Enfin le montant total de l'aide extérieure et des dépenses intérieures consacrées aux activités en matière de population est estimé à 9,4 milliards de dollars en 2001, alors que l'objectif fixé dans le Programme d'action de la Conférence était de 17 milliards de dollars.
Les pays en développement s'efforcent de mobiliser des ressources intérieures et ont dépassé l'objectif sur lequel ils s'étaient engagés au Caire, trouvant près de 63% des 11,3 milliards de dollars projetés. Toutefois, dans leur majorité, ces pays dépendent de l'aide extérieure pour financer leurs programmes en matière de population. D'autant plus que depuis 1994 les coûts de santé ont fortement augmenté, la pandémie du sida prenant notamment dans certains pays une ampleur qui n'avait pas été envisagée au moment de la Conférence.
Pour le Secrétaire général, il est essentiel d'appliquer le Programme d'action du Caire, en particulier l'objectif relatif à la santé de la procréation, pour réaliser les objectifs de développement du Millénaire qui se rapportent directement à la situation sanitaire, sociale et économique, en particulier les objectifs relatifs aux enfants, aux mères, à la lutte contre le VIH et le sida, à la condition de la femme et à la pauvreté. Le manque de moyens financiers reste le principal obstacle à la réalisation intégrale du Programme d'action: il faut donc trouver d'urgence des ressources supplémentaires pour financer les programmes de population et de développement des pays en voie de développement.
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