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NGO/518

L’EDUCATION A LA PAIX ET LES LUTTES EMANCIPATRICES, VECTEURS DE LA SECURITE ET DE LA DIGNITE HUMAINES

09/09/03
Communiqué de presse
NGO/518


Cinquante-sixième Conférence

annuelle DPI/ONG

matin & après-midi


L’EDUCATION A LA PAIX ET LES LUTTES EMANCIPATRICES, VECTEURS DE LA SECURITE ET DE LA DIGNITE HUMAINES


L’éducation à la paix et les luttes émancipatrices de la société civile ont aujourd’hui été au cœur des deux tables rondes de la cinquante-sixième Conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales, consacrée cette année à la sécurité et à la dignité humaines.  Ouvrant la première table ronde, Cream Wright, Chef de la section de l’éducation à l’UNICEF, a estimé que l’éducation permet de lever les barrières psychologiques et sociales qui empêchent les individus d’évoluer dans leur environnement.  Cependant, a-t-il constaté, à l’instar des autres intervenants, le premier obstacle au développement de l’éducation demeure la pauvreté et plus de 10% des enfants vivant sur notre planète n’ont toujours pas accès à l’éducation. 


Comment les organisations de la société civile peuvent-elles contribuer à la mobilisation des ressources et comment peuvent-elles contribuer à l’éradication des disparités en matière d’éducation notamment dans le cadre de partenariats associant les pouvoirs publics, les Nations Unies ou le secteur privé?  C’est en substance la préoccupation qui a dominé cet échange de vues entre spécialistes qui ont prôné par ailleurs une réforme des programmes éducatifs.  Dans certaines régions de l’Inde, a fait observer Anuradha Mitra Chenoy, Professeur au Centre d’études sur la Russie, l’Asie centrale et l’Europe à l’Ecole d’études internationales de l’Université Jawaharlal Nehru, les programmes éducatifs font la gloire des garçons et façonnent ces derniers à devenir des militants, les conduisant dans la plupart des cas à rejoindre fondamentalisme musulman et les écoles de Taliban.


Les préjugés que l’on retrouve dans les sociétés prennent leurs racines dans les écoles, ont admis les participants à cette table ronde, qui ont jugé que les organisations non gouvernementales pouvaient contribuer à privilégier l’équité, la dignité et les droits de l’homme dans l’éducation.  Représentant la section brésilienne de Global Youth Action Network, Olivia Martin a indiqué que dans le cadre des programmes d’éducation à la paix, il était possible d’inculquer aux jeunes générations des techniques non violentes de résolution des conflits, des techniques de médiation et des jeux qui peuvent être enseignés et menés dans les écoles.  Elton Skendaj, Coordonnateur national du projet «Education pour la paix et le désarmement visant à désarmer les enfants et les jeunes» pour l’Albanie a indiqué que ce programme est simultanément expérimenté en Bosnie-Herzégovine, au Cambodge et au Niger et assure une passerelle entre système éducatif, Nations Unies et société civile, en matière d’éducation à la paix.


La table ronde de l’après-midi a été consacrée au passage de l’oppression à l’autonomisation.  Le débat a porté sur les facteurs de l’émancipation, c’est-à-dire sur ce qui pousse certains acteurs à mettre en cause le statu quo, à bousculer les pratiques et les cultures dominantes pour s’affranchir du joug de la domination.  A cet égard, de nombreux exemples de lutte ont été donnés, lutte au sein desquelles la mobilisation de la société civile a été cruciale: lutte des Noirs d’Afrique du Sud, lutte des peuples autochtones, lutte des femmes afghanes et des jeunes Ukrainiens.  Danny Glover, acteur et ambassadeur itinérant du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), animateur de la table ronde, a en introduction évoqué la lutte de Martin Luther King, modèle d’une lutte émancipatrice.  Mme Nasrine Gross, représentante des Etats-Unis au Negar-Support of Women of Afghanistan, a évoqué la lutte de femmes afghanes après les cinq années d’oppression imposées par le régime Taliban.  A la tête de l’association Negar, elle se bat aujourd’hui pour que la nouvelle constitution de l’Etat afghan reconnaisse pleinement l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. 


Dans tous les cas, le dynamisme de la société civile et des mobilisations internes a été reconnu comme essentiel à toute émancipation.  Mais les intervenants ont également insisté sur l’efficacité des solidarités internationales.  Comme l’a souligné M. Dumisani Kumalo, Ambassadeur et Représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nations Unies, son pays est sorti du régime d’apartheid grâce aux pressions exercées par la société civile sur leurs gouvernements, leurs entreprises, et grâce à un mouvement qui a dépassé les frontières de l’Afrique du Sud.  Mme Gross a quant à elle remercié les femmes américaines qui ont appuyé la lutte des femmes afghanes.


M. Ole Henrik Magga, président de l’Instance permanente sur les questions autochtones, Organisation des Nations Unies et Olga Smyrnova, Centre de coordination de la jeunesse, ONU, Ukraine, sont également intervenus.


La conférence poursuivra ses travaux demain, mercredi 10 septembre, à 10 heures, avec une table ronde consacrée au développement durable dans le contexte de la mondialisation.


L’enseignement au service d’un avenir sur


CREAM WRIGHT, Chef de la section de l’éducation à l’UNICEF et animateur de la table ronde, a souligné l’impact de l’éducation sur la sécurité humaine et la dignité, en particulier au niveau des enfants.  L’éducation permet de lever les barrières psychologiques et sociales qui empêchent les individus d’évoluer dans leur environnement.  Le premier obstacle au développement de l’éducation est la pauvreté, a-t-il poursuivi, rappelant que 10% des enfants n’ont pas accès à l’éducation.  Il suffit d’observer la progression du VIH/sida et son lien avec l’absence d’éducation des enfants et des adultes pour comprendre que si l’on ne comble pas les disparités, si l’on n’investit pas dans l’éducation, le développement des sociétés sera compromis.  M. Wright a invité les organisations de la société civile à faire part de leurs expériences en matière d’éducation, et à proposer des partenariats concrets.  Le modérateur a particulièrement exhorté les ONG à mobiliser le secteur privé et les bailleurs de fonds pour assurer une éducation de base à tous les enfants, conformément à ce qui a été décidé en 2000 à Dakar puis en 2002 à Monterrey, et leur a proposé de réfléchir plus particulièrement à l’investissement dans l’éducation des filles.  Il faut que les ressources nationales soient davantage investies dans l’éducation qui, trop souvent, dépend des fonds d’aide publique au développement. 


Exposés


ANURADHA MITRA CHENOY, Professeur au Centre d’études sur la Russie, l’Asie centrale et l’Europe à l’Ecole d’études internationales de l’Université Jawaharlal Nehru, en Inde, a insisté sur la nécessité d’apporter une éducation de base à tous les enfants afin de leur inculquer des valeurs de dignité et de faire en sorte qu’ils ne puissent être battus ou abusés.  La pauvreté, les conflits, les maladies, provoquent des déséquilibres en matière d’éducation, a-t-elle dit, tout comme les centres d’intérêts ne sont pas les mêmes selon qu’on enseigne les droits de l’homme en Palestine ou en Suède.  Dans certains pays, a-t-elle dit, et notamment dans certaines régions de l’Inde, il est important de réformer les programmes éducatifs qui font la gloire des garçons et façonnent ces derniers à devenir des militants.  Nombre d’entre eux ont rejoint le fondamentalisme musulman et les écoles de Taliban, a-t-elle ajouté, déplorant que de nombreux préjugés dans les sociétés prennent leurs racines dans les écoles.  Aussi faut-il mettre en œuvre des partenariats entre le milieu éducatif et les organisations non gouvernementales afin que l’éducation privilégie l’équité, la dignité et les droits de l’homme.  Les écoles doivent être liées aux mouvements sociaux si elles veulent former des générations qui seront actives, elles doivent ouvrir leurs portes aux syndicats, aux organisations des droits de l’homme, aux associations.  Les valeurs universelles s’apprennent par l’éducation mais aussi par l’expérience vécue, a-t-elle observé, et c’est à ce niveau qu’interviennent les acteurs extérieurs à l’éducation, les partenaires tels que la famille, les médias, les militants pour la paix. 


Olivia MARTIN, chargée de l’intégration des réseaux, Global Youth Action Network, Brésil, a d’abord expliqué que parmi les principaux composants de l’éducation à la paix figurent des techniques non violentes de résolution des conflits, des techniques de médiation et des jeux qui peuvent être enseignés et menés dans les écoles.  Cette éducation porte aussi sur les causes fondamentales de la violence: racisme, sexisme et violations des droits de l’honmme.  Mme Martin a rappelé que la campagne mondiale pour l’éducation à la paix vise à diffuser ces idées et ces pratiques dans le cadre de l’école et en dehors.  Il s’agit de méthodes éducatives participatives qui incluent, entre autres, une reflexion sur les dépenses allouées au développement et les dépenses militaires: par exemple, une réduction de 10% des dépenses mondiales militaires pendant 10 ans permettrait d’éradiquer la pauvreté.  Education qui vise également à ne plus glorifier les héros militaires.


Concernant les acteurs chargés de promouvoir l’éducation à la paix, Mme Martin a cité les jeunes, les autochtones et les femmes.  C’est pourquoi le Global Youth Action Network cherche à associer les jeunes aux processus décisionnels, à promouvoir les outils de conscientisation par le biais notamment du site Web.  Les jeunes, selon Mme Martin, sont des agents clés dans la promotion de la paix car ils sont déterminés et enthousiastes.  En second lieu, il est temps que la civilisation occidentale abandonne sa politique impérialiste à prétention universaliste, reconnaisse la diversité des cultures et des systèmes de valeurs et se mettre à l’écoute des autochtones, a estimé Mme Martin.  Enfin, elle a plaidé en faveur d’une participation plus active des femmes aux mouvements de la culture de la paix, ce qui passe par des droits égaux pour les petites filles en termes de scolarisation et par l’inclusion de davantage de femmes dans les processus visant à résoudre les conflits.  L’éducation à la paix est essentielle pour encourager une pensée critique et indépendante et conscientiser les médias, a-t-elle conclu.


Margaret DABOR, membre de la Comission nationale pour la démocratie et les droits de l’homme, Sierra Leone, a rappelé que la nature des conflits a changé: ce sont désormais des enfants qui sont mobilisés, et des femmes, des enfants et des personnes âgées qui sont identifiés comme ennemi.  Dans ce contexte, l’éducation à la paix est un instrument puissant de réconciliation.  Là où des générations entières n’ont vécu que dans la guerre, ce qui a des effets psychologiques durables, il importe d’empêcher la répétition des tragédies.  En Sierra Leone, la guerre civile de 10 ans (1991-2001) a été marquée par des violations des droits de l’homme sans précédent.  Aujourd’hui, la nouvelle politique d’éducation du pays, en accord avec celle des autres pays du fleuve Mano, promeut le développement des individus dans l’objectif de la construction d’une société libre, juste et pacifique, démocratique, morale et disciplinée.  Des séminaires sont organisés à l’intention des pédagogues et des activités novatrices sont menées à bien grâce à la coopération de l’UNICEF.  Le programme comprend également des cours d’information sur le VIH/sida.  Mais la mobilisation des ressources reste le principal défi à relever, a conclu Mme Dabor. 


JUDY GASPARD, Proviseur du Collège de Grand Caillou, en Louisiane, a expliqué que 43% des élèves de son collège sont blancs, 37% amérindiens et 17% sont noirs; plus de 45% des parents d’élèves n’ont pas reçu d’éducation.  Cela n’empêche pas les enfants de quitter le collège bien formés car tout le monde participe aux modules éducatifs, les parents y compris.  Des médiateurs sont actifs pour aider les enfants tandis que le collège favorise également les handicapés qui disposent d’équipements adaptés.  Un programme de lecture souple a permis d’adapter le système d’apprentissage à chaque enfant, à son propre rythme.  Ce programme de lecture nous a fait comprendre que les enfants apprennent mieux lorsqu’ils évoluent à leur propre rythme, a-t-elle dit, certains n’aiment pas lire le matin, d’autres l’après-midi, mais ce qui importe, c’est le résultat.  Chaque fin de semaine, nous faisons parvenir aux parents un bulletin qui évalue les progrès de leurs enfants afin qu’ils puissent adapter leur suivi à ces progrès. 


ELTON SKENDAJ, Coordonnateur national du projet «Education pour la paix et le désarmement visant à désarmer les enfants et les jeunes» en Albanie, est intervenu sur des aspects pratiques de l’éducation à la paix et au désarmement tels que celui qu’il est chargé de coordonner pour l’Albanie.  Ce type de programme, lancé dans quatre pays, assure une passerelle entre système éducatif, Nations Unies et société civile, en matière d’éducation à la paix.  L’Albanie connaît des problèmes de transition vers l’économie de marché, et se remet lentement des troubles de 1997 qui ont favorisé une prolifération des armes dans la mesure où le ratio est aujourd’hui d’une arme pour quinze personne.  Par ailleurs, notre pays souffre de la faiblesse de la société civile, d’où l’importance des programmes de désarmement et d’éducation à la paix qui comportent à la fois le volet pratique mais aussi psychologique.  Ce programme est mené en Albanie, en Bosnie, au Cambodge et au Niger et suppose une approche réellement participative qui encourage les populations locales à s’investir activement dans la mise en œuvre des projets.  L’Appel de La Haye pour la paix des Nations Unies vient en appui technique à ce programme qui est conduit conjointement avec l’Unesco.  Dans chaque communauté locale, il faut identifier les besoins et les personnes capables de mettre en œuvre les projets, établir les ressources disponibles et quantifier les ressources locales afin de les compléter grâce à des apports extérieurs. 


En Albanie, ce programme a permis d’aider les élèves à assurer eux-mêmes la diffusion d’informations relatives au désarmement, notamment par un journal scolaire, et aux adultes de soutenir ces programmes grâce à des formations adéquates.  Les dirigeants des établissements scolaires et les enseignants ont été formés pédagogiquement pour faciliter le dialogue avec les enfants et les aider à déconstruire les mythes liés aux armes. 


Réponses des panélistes aux questions écrites des participants


Une première série de questions a porté sur le caractère potentiellement subversif de l’éducation à la paix.  Pourquoi les gouvernements considèrent-ils l’éducation à la paix comme une menace?  Mme Martin a répondu qu’il arrive que l’éducation à la paix soit considérée comme une menace par les gouvernements car elle vise à éradiquer l’ignorance des citoyens, en matière par exemple de la politique étrangère des pays. Selon Mme Chenoy, les gouvernements ont tendance à considérer tout changement du statu quo comme subversif.  C’est pourquoi les ONG ont un rôle central pour faire des propositions amenant peu à peu les gouvernements à changer les choses.  Mme Chenoy a indiqué que les activistes ont, en Inde, lutté avec succès pour que les manuels d’histoire ne soient pas revisés à la faveur des changements politiques et pour que l’histoire soit enseignée de facon objective.


Concernant les technologies et Internet, M. Skendaj a indiqué que leur rôle est essentiel pour éduquer les nouvelles générations; selon lui, ces nouvelles technologies permettent d’écouter la voix du peuple.  Pour Mme Martin, elles ont révolutionné les pratiques des jeunes et accru leur volume de connaissance. 


Concernant les problèmes de financement des programmes permettant d’atteindre les Objectifs du Millénaire en matière d’éducation, Mme Martin a évoqué la possibilité de réduire des budgets militaires.  Afin d’atteindre les objectifs d’ici à 2005 (comme éliminer les disparités entre les garcons et les filles dans l’enseignement primaire et secondaire), M. Wright s’est prononcé en faveur des procédures pratiques telles que le fast track initiative de la Banque Mondiale.  Mme Chenay a plaidé pour la recherche de solutions au niveau local.  M. Skendaj a indiqué que l’Albanie est un pays pauvre, où les enseignants recoivent un salaire très faible.  Consacrer davantage de ressources à l’éducation est impossible en raison de la pression du FMI qui impose des restrictions budgétaires.  Il faut selon lui changer les règles du jeu afin de restaurer la souveraineté de choix des pays pauvres.


Quelques questions ont porté sur les médias et leur tendance à présenter la violence sous un jour positif.  A la question de savoir quel est le rôle des pédagogues de la paix à cet égard, Mme Gaspard a répondu que le rôle essentiel dans ce processus revient aux parents.


DE L’OPPRESSION A L’AUTONOMISATION


M. Danny GLOVER, acteur et ambassadeur itinérant du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), et animateur de la table ronde, a rappelé que Martin Luther King, dans le discours prononcé en décembre 1964 lors de la cérémonie de remise du prix Nobel de la paix, avait identifié deux fléaux principaux: la guerre et la violence d’une part, et la pauvreté de l’autre.  M. Glover a repris Martin Luther King qui qualifiait la guerre de «legs catastrophique de désillusions politiques» et a appelé chacun à se mobiliser sur la base des idéaux de Martin Luther King.


Exposés


Mme Nasrine GROSS, représentante des Etats-Unis, Negar-Support of Women of Afghanistan, a déclaré avoir vu le visage de la terreur le jour où les Taliban ont procédé au meurtre du Général Massoud en Afghanistan, le 9 septembre 2001.  Pendant 5 ans, de 1996 à 2001, les milices d’Al-Qaida ont systématiquement anihilé tous les droits des femmes afghanes.  Aujourd’hui, l’Afghanistan est un Etat déchu.  Mais les femmes d’Afghanistan ont proclamé le caractère inaliénable de leur droits.  Maintenant, le Negar veille à ce que la constitution afghane consacre l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, de facon à ce que l’histoire ne se reproduise pas.  L’organisation travaille sur le plan politique afin que la constitution en cours d’élaboration soit un modèle pour le traitement des femmes au 21ème siècle.


L’Afghanistan a besoin d’actions concrètes en faveur de la réconciliation, a continué Mme Gross.  Elle a indiqué que de nombreux chefs de famille ont été tués par Al-Qaida et que de jeunes veufs et veuves élèvent péniblement des familles.  Comment peuvent-ils nourrir leur famille alors que les salaires sont dérisoires?  Comment tourner la page de la guerre?  Environ 17 millions d’Afghans peuvent être considérés comme des victimes de la guerre.  Elle a demandé aux Etats-Unis d’apporter une aide à la réconciliation et à la construction de la paix.


DUMISANI KUMALO, Représentant permanent de l’Afrique du Sud auprès des Nations Unies, a rappelé que son pays est sorti depuis un peu plus de dix ans du régime d’apartheid en partie grâce aux pressions exercées par la société civile sur leurs gouvernements, leurs entreprises.  C’est tout un réseau d’acteurs qui ont uni leurs efforts et qui sont ainsi parvenus à mettre fin à ce type d’oppression.  Lorsque nous élargissons ce débat à la sécurité collective, il ne faut pas perdre de vue que dans les années 1950 c’est l’Inde qui a été le premier Etat à dénoncer l’Afrique du Sud aux Nations Unies.  Puis le mouvement a pris de l’ampleur, a poursuivi M. Kumalo, et le mouvement antiapartheid a dépassé les frontières de l’Afrique du Sud, et il ne s’est pas focalisé contre les blancs.  Au contraire, comme le disaient constamment Oliver Tambo ou Nelson Mandela, nous luttions contre un système et de nombreux blancs nous ont aidé.  Nous avons eu la chance d’avoir en Afrique du Sud la Commission nationale vérité et réconciliation et des personnalités comme Nelson Mandela qui, à l’image de Martin Luther King plus tôt, a fait preuve d’une grande sagesse.  La liberté ne peut être imposée de l’extérieur, a ensuite indiqué l’Ambassadeur sud-africain, d’aucune manière car il faut avant tout que les gens se mobilisent à l’intérieur pour parvenir à la liberté.  Toutefois, a déploré M. Kumalo, une fois libres, une fois indépendants, notre rêve est terni par la pandémie du VIH/sida qui arrache à la vie les meilleurs d’entre nous.  Les ONG doivent veiller à nous contraindre, nos gouvernements, à rester honnêtes, à continuer à tenir compte des plus vulnérables. 


OLE HENRIK MAGGA, Président de l’Instance permanente sur les questions autochtones, Nations Unies, a rappelé que les peuples autochtones comptent 370 millions de personnes réparties dans 70 pays et qu’ils doivent se battre face à la marginalisation, à la pauvreté, à l’analphabétisme, et défendre leurs cultures.  C’est là un exemple à ne pas oublier lorsque nous parlons de sécurité et de dignité humaines, a poursuivi M. Magga, car au contact des civilisations colonisatrices, nos communautés ont été victimes de génocides, d’exodes forcés, voire même de traite.  Aujourd’hui, c’est la mondialisation qui nous menace car les autochtones restent les populations les plus pauvres et leur marginalisation va en s’accentuant.  Les violations des droits de l’homme dont les peuples autochtones ont fait l’objet ont très tardivement retenu l’attention des Nations Unies.  La protection de la propriété intellectuelle, des traditions culturelles et des rites doivent être considérés comme des éléments clés de la protection des droits des peuples autochtones.  M. Magga a invité les organisations non gouvernementales à poursuivre leurs efforts pour promouvoir la justice sociale, la dignité et les droits des peuples autochtones, et leur sécurité notamment en défendant la protection de l’environnement. 


Mme Olga SMYRNOVA, Centre de coordination de la jeunesse, ONU, Ukraine, a évoqué avec tristesse le legs du joug soviétique sur l’éducation dans son pays: les jeunes craignent d’être différents, attendent qu’un grand frère leur disent ce qu’ils doivent faire.  Aujourd’hui, petit à petit, les jeunes apprennent à prendre des initiatives mais ils ont besoin d’être aidés.  C’est pourquoi l’Organisation des Nations Unies a initié de nombreux programmes en faveur de la jeunesse.  En octobre 2002, une rencontre a été organisée entre des organisations non gouvernementales de la jeunesse, de jeunes dirigeants de groupes minoritaires et d’autres associations.  Au centre de cette rencontre, les Objectifs de développement du Millénaire.  Un réseau de jeunes a été établi pour travailler à la mise en œuvre de ces derniers, ce qui leur permet de prendre conscience de leur pouvoir.


Réponses aux questions des participants


Les intervenants ont plaidé, à l’instar de Mme Gross, pour la préservation de l’identité et de la diversité culturelle dans le contexte de la mondialisation.  A cet égard, le rôle des organisations non gouvernementales est important, a jugé M. Magga, faisant valoir que les populations autochtones refusent l’assimilation qui conduit certaines personnes à nier leurs propres identités communautaires.  Par exemple, a-t-il dit, il serait bien que nous puissions, à faible coût, utiliser nos langues traditionnelles sur les ordinateurs ou sur le réseau Internet.  Prenant l’exemple de son pays sous l’apartheid, M. Kumalo a rappelé que l’Etat mettait à la disposition de 5 millions de personnes toutes les structures sanitaires et éducatives mais que la majorité noire était exclue.  La démocratie ne vaut rien si elle n’est partagée avec les plus faibles, a-t-il dit, et nous devons aller au-delà de nos frontières et partager la démocratie avec nos voisins d’Afrique également.  Mme Gross a rappelé qu’en 1964, la constitution afghane reconnaissait l’égalité des sexes et que trois femmes siégeaient au parlement.  Les femmes représentaient 60% de la fonction publique, 75% du personnel médical et 50% des étudiants à l’arrivée des Talibans, a-t-elle encore précisé. 


Les questions environnementales ont ensuite été abordées, notamment quant à leur lien avec la pauvreté, l’assainissement et l’approvisionnement en eau potable, et l’Ambassadeur d’Afrique du Sud a dressé un tableau des efforts menés dans son pays où l’objectif d’assainissement contenu dans la Déclaration du Millénaire devrait être atteint en 2007.  La pollution résultant de la catastrophe de Tchernobyl a été déplorée par le Président de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones qui a rappelé qu’au lendemain de cette catastrophe, les peuples autochtones de Norvège et du Nord de l’Europe ont été privés de la chasse du cerf pour une durée de trente ans.


Exhortant les organisations non gouvernementales à défendre leurs idées, M. Kumalo leur a dit qu’elles seraient en dernier ressort écoutées par les gouvernements, même si leurs positions peuvent d’abord irriter ces derniers.  Aussi, leur a-t-il dit, profitez du Groupe de haut niveau présidé par Fernando Henrique Cardoso pour faire avancer vos points de vue. 


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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.