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NGO/517

LA 56E CONFERENCE ANNUELLE DPI/NGO SUR LA SECURITE ET LA DIGNITE HUMAINES ENTAME SES TRAVAUX PAR UN HOMMAGE AUX VICTIMES DE L’ATTENTAT DE BAGDAD

08/09/03
Communiqué de presse
NGO/517


Cinquante-sixième Conférence

annuelle DPI/ONG

matin & après-midi


LA 56E CONFERENCE ANNUELLE DPI/NGO SUR LA SECURITE ET LA DIGNITE HUMAINES ENTAME SES TRAVAUX PAR UN HOMMAGE AUX VICTIMES DE L’ATTENTAT DE BAGDAD


Consacrée cette année à la «sécurité et à la dignité humaines: tenir la promesse des Nations Unies», la cinquante-sixième Conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales a été dédiée ce matin par la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Louise Fréchette, aux vingt-deux agents de l’Organisation morts le 19 août dernier dans l’attentat à Bagdad.  Cet événement, a souligné M. Tharoor, Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information, donne tout son sens au thème retenu pour cette conférence et il importe de reconnaître qu’en dépit de nombreux efforts déployés par les Nations Unies la promesse n’a pas encore été pleinement tenue. 


Aujourd’hui plus d’un milliard de personnes vivent encore avec moins d’un dollar par jour et un milliard d’être humains n’ont pas accès à des soins de santé ou à l’eau potable, a déploré ensuite la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies.  Elle a invité la société civile à s’engager aux côtés des Nations Unies dans la poursuite des Objectifs du Millénaire en matière de développement, au premier rang desquels la réduction de moitié d’ici à 2015 du nombre de personnes vivant dans des conditions de pauvreté extrême et la lutte contre la pandémie du VIH/sida.  La réalisation de ces objectifs, grâce à l’implication de toutes les parties prenantes, et en premier lieu de la société civile, devrait avoir un impact immédiat sur la sécurité humaine et contribuer à réduire le nombre de conflits dans le monde, a quant à lui déclaré le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Jan Kavan. 


Le Président du Groupe de haut niveau de personnalités éminentes chargé des relations entre les Nations Unies et la société civile, Fernando Henrique Cardoso, ancien Président du Brésil, a reconnu que les citoyens devaient jouer un rôle de plus en plus grand dans la vie démocratique et dans la gestion des questions telles que l’environnement, les flux financiers, les échanges commerciaux qui transcendent les juridictions nationales.  Il a fait part du constat dressé en tant que Président du Brésil pendant huit ans, période au cours de laquelle il a constaté la valeur considérable qu’il y a à écouter la société civile et à puiser dans son énergie, en particulier en matière de lutte contre le sida.  Le rôle de leadership de la société civile a été essentiel et a permis de donner une visibilité sociale et politique au problème.  Grâce aux ONG, à la communauté scientifique et aux organisations de séropositifs, le Brésil est parvenu à mobiliser son opinion publique et a eu la force morale de réagir aux contradictions des accords commerciaux.  De son côté, la Présidente de cette cinquante-sixième Conférence, Mme Fannie Munlin, a rappelé que les ONG sont des agents de changements.


Dans l’après-midi, une table ronde sur les aspects psychologiques de la sécurité et de la dignité humaines animée par Giandomenico Picco, représentant personnel du Secrétaire général pour l’Année pour le dialogue entre les civilisations et Président-Directeur général de GDP Associates Inc., a réuni Anwarul Chowdury, Haut représentant des Nations Unies pour les pays les moins avancés, Joerg Bose, Directeur de l’Institut de psychiatrie, psychologie et psychanalyse William Alanson White, Pumla Gobodo-Madikizela, Professeur associé de psychologie à l’Université du Cap (Afrique du Sud), Nila Kapor-Stanulovic, Professeur de développement humain et de santé mentale de l’Université de Novi Sad (Serbie-et-Monténégro) et Afaf Mahfouz, Présidente du Comité auprès des Nations Unies et membre de l’Association internationale de psychanalyse. 


La Conférence poursuivra ses travaux demain, mardi 9 septembre, à 10 heures avec une table ronde consacrée à l’enseignement au service d’un avenir sûr.


SÉANCE D’OUVERTURE


M. SHASHI THAROOR, Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information, ouvrant ce matin la 56ème Conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales consacrée cette année au thème «La sécurité et la dignité humaines: tenir la promesse des Nations Unies», a estimé que cette promesse n’avait pas encore été pleinement tenue.  Aussi, comme les Chefs d’Etat et de Gouvernement l’ont affirmé dans la Déclaration du Millénaire, les efforts doivent être maintenus pour répondre aux besoins de tous les peuples, a dit M. Tharoor, avant de rendre hommage à Sergio Vieira de Mello qui avait rappelé il y a un an le rôle central des organisations non gouvernementales, aux côtés des Nations Unies, dans la réalisation des objectifs du Millénaire.  Certaines initiatives seront lancées au cours de cette cinquante-sixième Conférence, a annoncé le Secrétaire général adjoint, notamment dans le cadre du Cyberschoolbus des Nations Unies qui offrira aux enfants et aux jeunes un module interactif mis au point avec l’Organisation internationale du travail(OIT).  Une série d’ateliers seront consacrés chaque jour aux enjeux de la collaboration entre les Nations Unies et la société civile, a poursuivi M. Tharoor qui a souhaité que cette Conférence permette de progresser dans la définition d’objectifs communs.


Mme LOUISE FRECHETTE, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, a dédié cette Conférence à la mémoire des 22 agents de l’Organisation brutalement tués en Iraq le 19 août et souhaité le rétablissement de tous les blessés.  Mais ils ne sont pas les seuls à avoir donné leur vie pour faire progresser les idéaux des Nations Unies, a-t-elle observé, rendant hommage à tous les agents humanitaires, personnel de l’Organisation ou représentants de la société civile, qui ont trouvé la mort alors qu’ils étaient en mission au cours des dernières années.  «Sécurité humaine et dignité» est un thème particulièrement opportun aujourd’hui car il nous rappelle l’engagement que nous devons maintenir à l’égard de tous les peuples, a-t-elle dit, avant d’exhorter les organisations non gouvernementales à contribuer aux efforts de réduction de la pauvreté, d’assainissement, d’éducation et de sécurité humaine.  Les objectifs de développement du Millénaire exigent que tout le monde se mobilise, car aujourd’hui plus d’un milliard de personnes vivent encore avec moins d’un dollar par jour, plus d’un milliard de personnes n’ont pas accès à des soins de santé ou à l’eau potable, tandis que deux milliards d’êtres humains n’ont pas accès à l’assainissement.  Sur 900 millions d’analphabètes, plus des deux tiers sont des femmes, a déploré Mme Fréchette avant de rappeler que 22 millions de personnes sont déjà mortes du VIH/sida. 


En réalisant d’ici 2015 les objectifs de développement du Millénaire, nous contribuerons au développement humain et à la réduction de la pauvreté, et cela aura également un impact sur la réduction des conflits.  Dans certaines régions, comme l’Asie du Sud, des progrès réels ont eté enregistrés pour réduire de moitié le nombre de personne vivant dans l’extrême pauvreté, mais en Afrique subsaharienne et en Asie occidentale, l’évolution a été inverse.  Seuls deux pays ont réussi à enrayer la propagation du VIH/sida, a-t-elle poursuivi, alors que dans le même temps, la progression de la maladie est inquiétante puisqu’en 2025, près de 200 millions de personnes pourraient être infectées rien qu’en Chine, en Inde et en Fédération de Russie.  Il est pourtant possible de mobiliser des ressources, a-t-elle dit, exhortant la réunion de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), à la fin de la semaine à Cancun, à répondre aux attentes des pays en développement en réduisant considérablement les subventions à l’agriculture et à la production dans les pays du Nord afin de permettre aux pays en développement de disposer équitablement de ressources pour leur développement.  En cela, les organisations non gouvernementales peuvent nous aider considérablement, a-t-elle dit, avant d’encourager le Groupe de personnalités de haut niveau sur les relations entre l’ONU et la société civile -présidé par Fernando Henrique Cardoso, ancien Président du Brésil, à faire des propositions innovantes sur le renforcement du lien entre les Nations Unies et la société civile. 


M. JAN KAVAN, Président de l’Assemblée générale, a rappelé la grande utilité du travail des ONG aux niveaux national et international.  Cette Conférence est un événement pour les ONG et l’ONU car elle offre un excellent forum à la société civile et aux Nations Unies pour souligner le lien entre la sécurité humaine et la promotion de conditions de vie dignes.  Des milliers d’ONG ont aujourd’hui un statut consultatif formel et leur nombre ne cesse d’augmenter.  Des partenariats sont établis depuis longtemps et la participation des ONG a enrichi les débats.  Au Sommet mondial sur le développement durable, plus de 3 500 ONG ont été accréditées et ont joué un rôle capital dans des programmes de partenariats et dans les résultats du Sommet.  Beaucoup d’organes des Nations Unies examinent les rapports des ONG en coopération avec les gouvernements.  Les ONG ont en outre régulièrement participé au processus de planification de l’ONU. 


Le Groupe des personnalités éminentes des Nations Unies s’est vu confié la tâche importante d’établir les modalités d’interaction entre l’ONU et la société civile.  Il faut aujourd’hui rassembler ceux qui croient encore aux idées nobles des Nations Unies.  Le Sommet du Millénaire a été la manifestation du vigoureux attachement aux travaux des Nations Unies et a donné de plus grandes possibilités aux ONG et à la société civile de mener à bien leurS activités par le biais de l’adoption des Objectifs de développement du Millénaire.  Une mise en œuvre positive de ces objectifs permettra de lutter contre la pauvreté extrême et de répondre aux besoins des individus et, en même temps, de s’attaquer aux principales causes des tensions et de conflits armés.  Si nous réussissons, le monde sera plus sûr et tous les peuples vivront dans la sécurité à l’abri de la faim et de l’oppression.  Nous avons besoin de l’ONU car elle est la seule instance capable de résoudre des problèmes qui ne connaissent pas de frontières.  Dans le même temps, il faut reconnaître l’importance de la société civile pour prévenir les conflits armés.  La communauté mondiale a besoin d’un travail courageux en commun pour bâtir un monde plus sûr fondé sur l’état de droit.


M. Fernando Henrique CARDOSO, Président du Groupe des personnalités de haut niveau sur les relations entre l’ONU et la société civile, a estimé que les citoyens doivent jouer un rôle de plus en plus grand dans la vie démocratique.  La plupart des questions essentielles telles que celles liées à l’environnement, aux flux financiers, aux échanges commerciaux, transcendent les juridictions nationales.  C’est pourquoi la société civile doit jouer un rôle actif pour combler les lacunes des régulations mondiales.  Les décisions qui touchent à la vie des individus sont trop souvent examinées de façon unilatérale au détriment de la justice sociale.  Ces dernières années, on a vu naître un mouvement de contestation dans les rues.  Il est important de trouver de nouvelles voies menant au multilatéralisme car l’essentiel des conflits n’éclate plus entre les Etats mais au sein des Etats ou entre des réseaux.  De nouvelles lignes de fractures existent dans les systèmes sociaux.  C’est pourquoi, il faut relancer les principes de l’ONU et renforcer la société civile car le risque de division et d’impasse est une réalité. 


La participation directe de la société civile permet de mettre en œuvre un nouveau processus intergouvernemental et cette collaboration est efficace.  En tant que Président du Brésil pendant huit ans, nous avons constaté la valeur considérable qu’il y a à écouter la société civile et à puiser dans son énergie, en particulier en matière de lutte contre le sida.  Le rôle de leadership de la société civile a été essentiel et a permis de donner une visibilité sociale et politique au problème.  Nous avons démontré que le sida n’est pas un problème insoluble et que cette pandémie peut être jugulée.  Le Brésil a eu la force morale de réagir aux contradictions des accords commerciaux.  Les ONG, la communauté scientifique et les organisations de séropositifs ont mobilisé l’opinion publique et l’on a fini par trouver un équilibre.  La société civile a permis de lier le local et le mondial.  Nous avons montré à d’autres pays qu’il est impossible de mettre en œuvre une politique que l’opinion publique rejette.  Lors de la création du Groupe, le Secrétaire général nous a demandé d’être audacieux et pragmatiques.  La société civile a pour sa part demandé la transparence.  Sur cette base, nous allons présenter un rapport en avril 2004. 


Mme JOAN LEVY, Présidente du Comité exécutif du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales, a déploré les pertes humaines enregistrées par les Nations Unies et a souhaité qu’en dépit des revers de ces dernières semaines, les organisations non gouvernementales ne soient pas découragées dans leur partenariat avec les Nations Unies.  En tant que partenaire du système des Nations Unies, nous apprécions chaque année cette opportunité de procéder à un échange de vues avec tous les partenaires du Département de l’information.  Les réunions hebdomadaires que nous tenons et les ateliers organisés conjointement avec le DPI nous aident à affiner nos techniques de communication et nos messages concernant les objectifs de l’ONU.  Tous les efforts déployés par le DPI et certaines ONG ont permis au Comité exécutif de moderniser son site Web et d’élargir le champ d’action et de communication des ONG.  Les représentants des ONG qui ne sont pas présents peuvent interagir grâce à l’Internet avec les participants à cette Conférence.  Mme Levy s’est félicitée du fait que les échanges avec les ONG sur le terrain peuvent s’effectuer en temps réel, avant de souligner que des programmes pilotes sont mis en place dans le monde pour atteindre des ONG plus isolées dans certaines régions. 


Mme RENATA BLOEM, Présidente de la Conférence des organisations non gouvernementales ayant des relations consultatives avec les Nations Unies (CONGO), a rendu hommage au Département de l’information et au Comité DPI/NGO pour avoir choisi le thème «Sécurité et dignité humaines».  L’attaque terroriste contre le siège des Nations Unies à Bagdad, le 19 août, qui a coûté la vie à 24 personnes dont l’un des défenseurs les plus acharnés des droits de l’homme et de la sécurité humaine, Sergio Vieira de Mello, nous bouleverse tous.  En effet, elle prouve que malgré l’investissement sans relâche des Nations Unies et de Sergio Vieira de Mello, la notion de sécurité humaine est loin d’être acquise en Iraq.  La sécurité humaine concerne les personnes tandis que la sécurité militaire est une affaire d’Etats.  La sécurité n’a aucun sens lorsque les gens meurent de faim et la dignité humaine suppose avant tout la reconnaissance du droit des peuples à contribuer à leur propre développement et à leur évolution démocratique, a-t-elle dit.  Aussi, demandons-nous, en tant que société civile, aux Etats et aux Nations Unies de lutter pour la promotion de la sécurité humaine, corollaire de leur dignité, a déclaré Mme Bloem.  En décembre prochain, à Genève, nous entendons promouvoir la notion de droits de l’homme et de dignité humaine dans le contexte de la société de l’information, a-t-elle poursuivi, avant de se féliciter du rôle du Groupe de haut niveau de personnalités éminentes chargé des relations entre l’Organisation des Nations Unies et la société civile et de souhaiter qu’il contribue à affiner le lien entre les ONG et l’Organisation. 


Mme Fannie MUNLIN, Présidente de la 56ème conférence annuelle du Département de l’information pour les organisations non gouvernementales, a rappelé que le thème de cette année reflète l’attachement des participants aux principes du préambule de la Charte des Nations Unies.  Il faut développer des stratégies pour promouvoir la paix au sein de nos collectivités et élaborer des programmes et des politiques qui permettront de bâtir un monde meilleur pour tous les peuples.  Certains croient que l’humanité ne saura jamais dépasser la tendance à l’oppression.  Cependant, ceux qui participent à cette conférence savent qu’il y a de meilleures façons d’agir.  Les ONG sont des agents du changement dont l’action est basée sur l’échange d’informations et le développement de partenariats en vue de promouvoir le progrès.  Il existe une solidarité remarquable entre les ONG du monde entier pour lesquelles l’appel à la sécurité et à la dignité de l’homme ne sont pas de simples paroles mais sont profondément ressenties.  Nous ne permettrons pas d’être détournées de notre recherche mutuelle d’une vie meilleure pour tous les peuples.  Honorons la promesse des Nations Unies et rendons possible la création d’un village mondial. 


ASPECTS PSYCHOLOGIQUES DE LA SECURITE ET DE LA DIGNITE HUMAINES


Exposés


M. GIANDOMENICO PICCO, représentant personnel du Secrétaire général pour l’Année pour le dialogue entre les civilisations et Président-Directeur général de GDP Associates Inc., introduisant le thème de la table ronde, a estimé que la notion de sécurité humaine avait une importance particulière dans un monde où, trop souvent, l’ignorance engendre l’indifférence et où l’intolérance conduit à la haine 


Après les exposés* de MM. Anwarul Chowdury, Haut représentant des Nations Unies pour les pays les moins avancés, et Joerg Bose, Directeur de l’Institut de psychiatrie, psychologie et psychanalyse William Alanson White, Mme Pumla GOBODO-MADIKIZELA, professeur associé de psychologie, Université du Cap, a indiqué que les pires traumatismes sont souvent transmis de génération en génération et reproduits par ceux-là mêmes qui ont été victimes.  La professeur s’est appuyée sur l’exemple du “supplice du collier”, qui consistait pendant l’apartheid à mettre le feu à un pneu placé autour du cou de la victime.  Ce supplice est de nos jours reproduit par des enfants des townships comme un jeu.  Des enfants qui, bien qu’ils n’aient jamais de leurs yeux vu ce supplice, prennent tour à tour les rôles des tueurs, des témoins et des victimes, et semblent s’amuser lors de ce jeu.


La professeur a fait remarquer que le supplice du collier connaît actuellement une recrudescence, et qu’en l’absence d’un language qui permette d’exprimer les frustrations et l’état d’abandon dans lequel se trouvent de nombreuses personnes, il se transforme en cartharsis.  En effet, l’un des mécanismes psychologiques les plus connus pour faire face aux traumatismes d’enfance est de s’identifier avec l’agresseur et de reproduire les actes traumatiques.  En se mettant à la place de l’agresseur, la personne agressée recouvre le temps de l’agression le pouvoir auquel elle a été soumise.  Mais ces tentatives ne sont pas une solution et ne permettent évidemment pas de recouvrer l’honneur perdu.  En effet, ces actes désensibilisent ses auteurs, le libérant des tabous sociaux à l’égard de l’agression et peuvent les rendre dépendants de l’agression.


Utilisant ce cadre pour expliquer la violence actuelle en Afrique du Sud, MmeGododo-Madikizela a indiqué que les facteurs qui pouvaient inciter à la violence pendant l’apartheid n’ont pas complètement disparu.  Ceux qui reproduisent des traumatismes du passé le font parce que la dignité et le respect qu’ils ont perdu pendant l’apartheid n’ont pas été rétablis.  La conséquence la plus inquiétante de ces drames est qu’ils conduisent à détruire les liens communautaires.  Selon MmeGobodo-Madikizela, les outils employés doivent transcender les moyens habituels de la justice pénale et mettre en oeuvre des stratégies de dialogue afin de rétablir les espoirs décus et mettre fin aux humiliations du passé.


Mme NILA KAPOR-STANULOVIC, Professeur de développement humain et de santé mentale de l’Université de Novi Sad (Serbie-et-Monténégro), a indiqué que depuis son enfance, elle avait connu neuf guerres en tout mais était parvenue à surmonter ces bouleversements et à dépasser l’adversité.  Les psychologues doivent accorder la priorité à la restauration de la dignité de l’homme, et surtout à celle des enfants qui ont du mal à exprimer leurs besoins.  Il leur est déjà difficile de faire valoir leurs droits d’où l’importance de respecter le peu de droits qu’ils ont.  Autrement, les enfants sont exposés au syndrome du sentiment de «n’être personne», notamment ceux qui connaissent des conditions de vie dégradantes, ceux qui vivent dans des zones de conflits, ou ceux qui grandissent dans des structures familiales éclatées.  Les enfants qui vivent dans les pays sortant de conflits méritent une attention particulière, a dit la professeur, et les ONG locales doivent être épaulées par la communauté internationale pour leur venir en aide et assurer leur épanouissement.  Les enfants d’abord doit être le leitmotiv de toutes les interventions de la communauté internationale, a poursuivi Mme Kapor-Stanulovic, et il est important de rétablir leur dignité, de leur transmettre le sentiment de confiance et de respect.  Il est important de mettre la dignité de l’homme et de l’enfant en tête des priorités de la communauté internationale et des organisations non gouvernementales. 


Mme AFAF MAHFOUZ, Présidente du Comité auprès des Nations Unies, Association internationale de psychanalyse, a regretté que la psychanalyse ne fasse pas partie des approches reconnues pour aborder les problèmes de développement, jugeant que ce serait pourtant nécessaire pour comprendre le développement humain.  Alors que nos sociétés s’accommodent des violations des droits de l’homme, des violations des droits des enfants, et que le régime de «deux poids deux mesures» prévaut toujours en matière de droits de l’homme, a estimé Mme Mahfouz, il faut que la lutte contre la pauvreté et la violence bénéficie d’une approche intégrée et mutidimensionnelle qui ne soit pas dominée par les moyens hégémoniques et rationnels.  Présentant la psychanalyse comme la science qui permet de connaître l’autre, elle a plaidé pour l’intégration de la psychanalyse dans les politiques de développement.  Après avoir rappelé l’expérience du Mouvement de la Tricontinentale, qui, dans les années 60, a regroupé l’Asie, l’Amérique et l’Afrique pour lutter contre la domination, elle a en conclusion souhaité que Nations Unies et organisations non gouvernementales puissent penser ensemble au niveau universel pour mieux agir localement.


Réponses aux questions écrites des participants


Au cours de l’échange de vues, le rôle des organisations non gouvernementales dans la gestion des aspects psychologiques et traumatiques de la sécurité et de la dignité humaines a été souligné.  Les intervenants ont insisté sur la nécessité de considérer les besoins émotionnels dans toute action et dans les programmes d’assistance.  A cet égard, les écarts importants entre le nombre de personnes souffrant de problèmes psychiques et le personnel à même de les aider ont été déplorés.  Comment travailler dans les communautés où les résistances psychologiques sont trop fortes en raison des profonds traumatismes vécus qui privent les personnes de leur dignité, se sont interrogés ensuite les participants.  Les ONG peuvent faire comprendre aux communautés que leur comportement est explicable par les expériences vécues, dans un premier temps.  En Afrique du Sud, par exemple, a fait observer Mme Madikizela, la progression du VIH/sida induit le sentiment de condamnation à mort chez les jeunes et ils ont tendance à ne plus se protéger.  Mme Kapor-Stanulovic a estimé que chez les enfants les crises d’identité sont liées à leur interprétation des dangers, des problèmes et ils expriment leurs appréhensions à leur manière.  Aussi, ils se remettent plus vite avec l’appui de personnes étrangères que si les parents interviennent dans le processus.  Globalement, la gestion des aspects psychologiques de la sécurité et de la dignité humaines doit débuter au niveau le plus précoce de l’enfance mais la prise en charge des traumatismes, en particulier dans les zones «post-conflits» a des implications financières importantes. 


* Faute d’interprétation, la couverture de ces exposés n’a pu être assurée.


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