LE COMITE DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA SLOVAQUIE
Communiqué de presse DH/G/245 |
LE COMITE DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA SLOVAQUIE
Genève, 18 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a achevé ce matin l'examen du rapport de la Slovaquie sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, ses «observations finales» sur le rapport de la Slovaquie, qui seront rendues publiques à la clôture de la session, le 8 août prochain.
Présentant le rapport de son pays lors de la séance d'hier après-midi, M. Igor Grexa, Directeur général de la Section du droit international et des affaires consulaires au Ministère des affaires étrangères de la Slovaquie, a souligné les importants progrès réalisés par son pays dans les domaines politique, économique et du point de vue du respect du droit international des droits de l'homme, informant le Comité de la ratification d'un grand nombre d'instruments relatifs aux droits de l'homme depuis la présentation du dernier rapport. La délégation slovaque a fait état en particulier, au cours des deux séances consacrées à l'examen du rapport, des progrès réalisées en matière de respect des droits civils et politiques. Ainsi, elle a indiqué que les civils ne peuvent plus être traduits devant les tribunaux militaires. Par ailleurs, le pays a créé l'institution de l'Ombudsman. La délégation a aussi souligné la création d'une commission sur les actes de violence raciste et insisté sur le renforcement de la répression de tels actes. Elle a aussi souligné les mesures visant à promouvoir l'intégration de la minorité rom.
L’importante délégation slovaque était également composée de Mme Barbara Illkova, Représentante permanente adjointe de la Slovaquie auprès de l'Office des Nations Unies à Genève; M. Peter Prochcka, Directeur du Département des droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères; M. Peter Guran, Directeur général de la Section de l'inclusion sociale au Ministère du travail; M. Robert Dohanyos, Directeur général de la Section de la culture des minorités au Ministère de la culture; M. Jaroslav Palov, Directeur du Bureau pour la coopération policière internationale; et de représentants de plusieurs ministères.
Tout en se félicitant de la qualité des réponses fournies par la délégation slovaque, plusieurs experts ont regretté de ne pas avoir obtenu d'informations suffisamment précises sur l'étendue de la compétence de l'Ombudsman, ou encore sur les questions d'égalité entre les femmes et les hommes. Plusieurs experts ont regretté l'absence de données statistiques ventilées concernant les minorités, permettant de mesurer efficacement leur intégration. Ils ont fait état d'informations selon lesquelles le placement d'enfants rom dans des institutions prévues pour les personnes handicapées et la stérilisation des femmes rom dans des conditions défavorables à
l'expression d'un consentement éclairé, seraient toujours d'actualité. L'intégration des Roms semblerait pâtir d'un manque de volonté politique de la part des autorités, ont estimé plusieurs experts.
Répondant sur ce point, M. Grexa a déclaré qu'il existe bien une volonté politique de lutter contre l'exclusion des Roms et de promouvoir leur intégration, même si les résultats sont lents à se faire sentir. Il a démenti toute intention des autorités de procéder à des stérilisations forcées.
Le Comité se réunira de nouveau à 15 heures cet après-midi en séance privée afin de poursuivre l'examen de communications faisant état de violations des droits de l'homme reconnus par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La prochaine séance publique du Comité aura lieu le lundi 21 juillet à 10 heures, pour procéder à l'examen du rapport du Portugal (CCPR/C/PRT/2002/3).
Présentation du rapport de la Slovaquie
Présentant le deuxième rapport périodique de son pays, M. IGOR GREXA, Directeur général de la Section du droit international et des affaires consulaires au Ministère des affaires étrangères de la Slovaquie, a insisté en particulier sur les avancées réalisées par son pays dans les domaines politique et économique au cours de ces dernières années. Des progrès qui permettent aujourd'hui à la Slovaquie de satisfaire aux critères d'intégration à l'Union européenne et lui permettront d'accéder au statut d'État membre à compter de mai 2004, a annoncé le représentant. Il a également souligné les efforts déployés par son pays en vue d'approfondir l'État de droit. À cet égard, la lutte contre la corruption constitue l'une des priorités du gouvernement, a-t-il affirmé.
Le représentant a déclaré que son pays s'est efforcé de répondre aux observations finales faites par le Comité en 1997 en mettant en œuvre des mesures d'ordre législatif et pratique. Il a ainsi souligné la primauté du droit international des droits de l'homme dans l'ordre juridique interne slovaque. Le représentant a par ailleurs indiqué qu'un amendement apporté à la constitution permet désormais de garantir l'indépendance de l'ordre judiciaire. Le Code pénal et le Code de procédure pénale ont également été amendés dans le sens d'un meilleur respect des droits civils et politiques. Il en résulte notamment que des citoyens ne peuvent plus être poursuivis devant les tribunaux militaires, comme c'était le cas à l'époque de la présentation du précédent rapport. Par ailleurs, l'institution de l'Ombudsman a été créée en tant qu'autorité indépendante, compétente pour connaître des atteintes aux droits de l'homme.
M. Grexa a indiqué que la Slovaquie met actuellement en œuvre un plan de lutte contre toutes les formes de discrimination. À cet égard, la définition pénale des crimes fondés sur des considérations d'ordre racial a été élargie, a-t-il précisé. Le représentant s'est toutefois dit conscient de la nécessité d'une mise en œuvre concrète de ces textes législatifs pour satisfaire pleinement aux exigences du Pacte.
Le représentant a ensuite déclaré que son pays est sensible à la question des minorités. Le Gouvernement slovaque, a-t-il souligné, est favorable au développement des minorités tout en étant soucieux de leur intégration à la société slovaque. Dans ce contexte, il a précisé que le Gouvernement se considère lié par une obligation de résultat vis-à-vis de la minorité rom, une minorité qui pose des problèmes particuliers. Des programmes destinés à favoriser une meilleure intégration des Roms sont mis en œuvre par le Gouvernement, mais leurs résultats concrets sont très lents à se faire sentir, a-t-il reconnu.
Le deuxième rapport périodique de la Slovaquie (CCPR/C/SVK/2003/2) précise que si les droits et libertés constitutionnels ou les droits garantis par le Pacte ne sont pas respectés dans la pratique ou violés, par exemple du fait de l'application injuste d'une disposition légale, la victime «peut exiger que sa cause soit entendue conformément à la procédure établie par la loi, par un tribunal indépendant et impartial ou, dans certains cas fixés par la loi, par un autre organe de la République slovaque». En outre la Constitution donne à toute personne qui prétend que ses droits ont été violés par la décision d'un organe de l'administration publique, le droit de saisir le tribunal compétent pour qu'il réexamine cette situation. Le rapport précise également que la Cour constitutionnelle statue sur des plaintes déposées par des personnes physiques ou morales prétendant que leurs droits fondamentaux, qui peuvent notamment découler d'un traité, ont été bafoués. Il souligne qu'une loi relative à l'égalité de traitement entre les hommes et les femmes est actuellement en cours d'élaboration. Dans ce contexte, il indique la création en 1999 d'un Département de l'égalité des chances au sein du ministère du travail.
Le rapport de la Slovaquie rend également compte des mesures prises par le Directeur général de la police pour améliorer la formation professionnelle et l'éducation des policiers aux droits de l'homme. Il précise ainsi que les policiers sont tenus de passer tous les deux ans des tests de compétence au cours desquels ils doivent prouver qu'ils connaissent la loi concernant leurs droits et devoirs. Dans ce cadre, le rapport fait état de poursuites actuellement en cours contre des fonctionnaires de police pour torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le rapport note également qu'à la suite d'événements tragiques mettant en cause la police, le Ministère de l'intérieur prépare des mesures destinées à redonner la confiance du public dans ses policiers. Des formations axées sur le respect des droits de l'homme sous forme de séminaires et de stages, sont dispensées aux magistrats. L'entrée en vigueur, en avril 2002, d'un nouveau code du travail qui reconnaît le droit de toutes les personnes au travail et au libre choix de leur emploi sans aucune restriction ni discrimination. Il précise en outre que le Code pénal prévoit des sanctions contre tout auteur d'infraction à caractère racial, ethnique, religieux ou autre. Concernant les agressions commises à l'encontre des citoyens slovaques d'origine rom, le rapport souligne l'adoption d'un plan d'action pour prévenir toutes les formes de discrimination, de racisme et de xénophobie.
Examen du rapport de la Slovaquie
Présentant des renseignements complémentaires à la demande des membres du Comité, la délégation de la Slovaquie a souligné que le Gouvernement a été dûment informé des observations finales adoptées par le Comité lors de l'examen du précédent rapport slovaque. Les ministres ont ainsi été informés de manière détaillée des recommandations du Comité qui ont servi de base à la révision de textes ou à la rédaction de nouvelles lois.
La délégation a par ailleurs affirmé que l'ensemble des mesures antiterroristes adoptées par la Slovaquie sont pleinement compatibles avec le droit international des droits de l'homme. Les présumés coupables d'actes terroristes bénéficient d'une protection de leurs droits fondamentaux, en application du code de procédure pénale. Un expert s'étant inquiété de l'imprécision de la définition du terrorisme, un membre de la délégation a déclaré qu'il n’existe aucune contradiction entre les textes slovaques et la législation européenne en la matière. Il a estimé que la définition du terrorisme ne remet pas en cause les règles du Pacte et n'est pas contraire au principe général du droit pénal sur la stricte définition des crimes et des délits.
Le 19 mars 2002, le Parlement a élu un Ombudsman, titulaire d'un mandat d'une durée de 5 ans et doté d'un budget de fonctionnement de 23,173 millions de couronnes slovaques. À ce jour, a précisé la délégation, 2500 requêtes ont été portées à la connaissance du médiateur. Elles concernent dans leur majorité des agissements de l'administration publique. Les requêtes visaient également la lenteur de la justice. Sur les 35% de requêtes jugées recevables (65% d'entre elles ne relevaient pas de la compétence du médiateur), 4 violations ont été établies, a précisé la délégation. Un expert ayant exprimé des inquiétudes quant à la compétence limitée de l'Ombudsman, une représentante a expliqué de façon détaillée les possibilités de saisine du défenseur public des droits de l'homme. Elle a ainsi souligné que l'Ombudsman peut se rendre dans les lieux publics, y compris les centres de détention et s'entretenir avec les responsables mis en cause par une requête. Ces derniers sont tenus de fournir à l'Ombudsman tous renseignements utiles.
La délégation a déclaré que la protection contre la discrimination fondée sur le sexe et la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes ne font toujours pas l'objet d'un texte de loi spécifique. Cela ne signifie pas pour autant que la Slovaquie se désintéresse de cette importante question, a-t-elle souligné. Plusieurs juristes slovaques estiment que la révision des textes existants est préférable à l'adoption d'une loi spécifique. La délégation a déclaré que le Gouvernement s'attache à mettre en œuvre les principes de non-discrimination définis par les directives de l'Union européenne dans ce domaine. S'agissant de la participation des femmes à la vie publique, la délégation a évoqué l'adoption d'un Plan d'action pour les femmes qui vise à promouvoir leurs droits dans différents domaines.
Répondant à certains experts qui s'étaient interrogés sur le bien fondé du choix d'une législation anti-discriminatoire plutôt que d'un texte de loi spécifique, la délégation a souligné les efforts déployés par le Gouvernement, notamment pour favoriser une meilleure participation des femmes à la vie publique. Elle a ainsi précisé que 19,3% des parlementaires sont de femmes. Elle a par ailleurs informé le Comité de l'existence de structures d'accueil réservées aux femmes victimes de violence conjugale. La délégation a également évoqué les plans d'action mis en œuvre par le Gouvernement afin de lutter contre les diverses formes de discrimination, particulièrement à l'égard de la communauté rom, au moyen de campagnes d'information et de mesures d'action positive.
La délégation a déclaré que la législation slovaque est très précise en ce qui concerne le déroulement des enquêtes préliminaires. Les lois applicables à la garde à vue ou à la détention provisoire répondent pleinement aux exigences posées par le droit international en la matière. Tout en soulignant la sensibilisation des forces de police à la question du droit à la sûreté personnelle, la délégation a signalé que 7 officiers de police ont fait l'objet de poursuites pour traitements cruels, inhumains ou dégradants. D'autres officiers qui avaient pénétré de manière illégale dans une habitation rom, infligeant des mauvais traitements à ses occupants, ont été condamnés à des peines d'emprisonnement. Un membre de la délégation a estimé que ces condamnations illustrent la volonté des pouvoirs publics de ne pas laisser impunis les auteurs d'abus.
La délégation slovaque a par ailleurs précisé les droits qui sont garantis lors de la garde à vue, soulignant en particulier qu'aucune disposition ne limite l'exercice par le prévenu de son droit à informer ses proches.
La délégation a ensuite répondu aux questions relatives aux mesures prises par son pays pour lutter contre la traite des femmes. À cet égard, elle a reconnu que la Slovaquie est malheureusement l'un des terrains d'élection pour les bandes organisées qui tirent profit de ce type de commerce. Aussi, a-t-elle précisé, la Slovaquie a décidé de mettre l'accent sur la prévention afin que les jeunes filles candidates au départ ne soient pas tentées par la prostitution et soient bien conscientes des pièges qui peuvent leur être tendus. Des campagnes d'information à destination des femmes qui cherchent un travail à l'étranger ont donc été initiées. Par ailleurs, la Slovaquie s'est dotée d'une unité spéciale chargé de la lutte contre la traite des femmes. Cette unité, a permis l'arrestation de plusieurs personnes en 2002, a fait valoir la délégation. Elle a toutefois mis l'accent sur la nécessité d'une coopération internationale dans la lutte contre la traite des femmes, phénomène qui dépasse les frontières. Elle a ainsi placé les pays occidentaux, principaux récipiendaires du trafic, face à leurs responsabilités en ce domaine. Si le problème de l'offre nous est directement posé, celui de la demande ne doit pas être sous-estimé par les pays intéressés, a souligné un membre de la délégation.
Répondant à la question d'un expert, la délégation a expliqué que la République slovaque est liée par tous les engagements souscrits par l'ancienne Tchécoslovaquie avant le 31 décembre 1992. Par conséquent, il n'y a eu aucun vide juridique lié à la succession d'État. Celle-ci s'applique donc également au Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte, visant à abolir la peine de mort partout dans le monde, que le pays a ratifié en 1993.
En réponse à une question sur la conformité entre la loi sur l'État d'urgence et l'article 4 du Pacte sur l'adoption par les États, en cas de situation d'urgence, de mesures dérogeant aux obligations prévues dans le Pacte, la délégation a précisé que l'état d'urgence ne met pas fin à la protection des droits fondamentaux des citoyens slovaques. La mise en œuvre de l'état d'urgence est soumise à des conditions particulières et il est obligatoirement limité dans le temps. La loi sur l'état d'urgence pose des limites strictes aux droits et obligations des entités juridiques et, notamment, des entités administratives, a-t-elle précisé. Concluant sur ce point, elle a estimé que la loi sur l'état d'urgence ne viole pas les dispositions du Pacte.
La délégation a reconnu l'existence de «lits à barreaux» ou «lits cages» dans certains hôpitaux psychiatriques. Elle a expliqué que le recours à de tels dispositifs est strictement défini par la loi et nécessite à chaque fois l'aval d'un médecin. Elle a informé le Comité de l'intention des autorités concernées de mettre fin le plus rapidement possible à l'utilisation de tels dispositifs dont les dangers pour les malades ont été maintes fois soulignés par les organisations non gouvernementales.
La délégation a reconnu que le régime juridique relatif à l'indemnisation des victimes de dommages imputables à l'administration est ancien et ne satisfait pas aux normes européennes en la matière. Elle a informé le Comité de la préparation d'une nouvelle loi qui permettra d'octroyer aux victimes toutes les garanties prescrites par le droit européen.
La délégation a déclaré que le gouvernement a l'intention de se doter d'une armée professionnelle et de mettre fin au service militaire obligatoire dans les deux années à venir. Elle a également informé le Comité de la suppression du crime d'offense à la République ou à l'un de ses représentants.
La délégation a abordé la question des droits des minorités présentes en Slovaquie. À cet égard, elle a notamment souligné l'adoption par le gouvernement d'une série de principes directeurs visant à promouvoir l'intégration de la minorité rom et à favoriser l'égalité d'accès à l'éducation, au logement et à la santé. Elle a ajouté que 470 millions de couronnes slovaques ont ainsi été consacrées à la mise en œuvre d'un programme de constructions à destination des personnes dans le besoin.
La délégation a souligné l'accroissement du nombre de procès intentés pour des infractions à caractère raciste. Alors que 27 procès de ce type avaient été intentés en 2001, ce sont de plus de 100 affaires de cette nature qu'a eu à connaître la justice l'an passé. Pour la délégation, loin d'être les signes d'une augmentation de la violence raciste, ces chiffres illustrent la vigilance accrue des autorités sur ces questions. La délégation a également informé le Comité de la mise en place d'une Commission sur les actes de violence raciste.
La délégation a démenti les allégations selon lesquelles les autorités procèderaient à des stérilisations forcées sur les femmes rom. Les auteurs de ces allégations n'ont fait qu'exercer leur droit à la liberté d'expression et n'ont donc pas été inquiétés par les pouvoirs publics. La délégation a expliqué que des mesures sont prises pour assurer une bonne information sur les conséquences de la stérilisation et veiller à ce qu'elles garantissent l'expression d'un consentement éclairé.
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