COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME: LE LIEN ENTRE RESPECT DES DROITS DE L'HOMME ET SECURITE INTERNATIONALE EST REAFFIRME
Communiqué de presse DH/G/173 |
Commission des droits de l'homme
COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME: LE LIEN ENTRE RESPECT DES DROITS DE L'HOMME ET SECURITE INTERNATIONALE EST REAFFIRME
GENEVE, le 19 mars -- poursuivant son débat de haut niveau, la Commission des droits de l'homme a entendu le Ministre chargé des droits de l'homme du Royaume-Uni, la Secrétaire parlementaire aux Affaires étrangères du Japon, la Ministre des affaires étrangères du Luxembourg, le Secrétaire d'État aux relations extérieures d'Espagne, la Ministre des affaires étrangères de l'Afrique du Sud, le Vice-Ministre aux affaires étrangères du Vietnam et le Ministre des relations extérieures du Guatemala. Le Directeur exécutif du Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) est également intervenu.
Lorsqu'un régime fait preuve de mépris à l'égard des droits de l'homme, rejette le fonctionnement démocratique et se dote d'armes de destruction massive, il se pose comme une menace à la stabilité mondiale et met en danger sa population, a déclaré le ministre britannique, M. Bill Rammell, qui a rappelé que le respect des droits de l'homme est la garantie d'une société stable, déterminée à cohabiter en paix avec ses voisins. C'est pourquoi il importe que la communauté internationale désarme l'Iraq et prenne toutes les mesures nécessaires pour rétablir l'état de droit dans ce pays.
À l'instar de M. Rammell qui a salué le courage de la Présidente Mme Najat El Mehdi Al-Hajjaji, dont la tâche ne sera pas facile dans le climat de polarisation qui a marqué la dernière session de la Commission, Mme Shinako Tsuchiya, Secrétaire parlementaire aux affaires étrangères, du Japon, a exprimé l'inquiétude de son gouvernement devant la politisation et les confrontations qui semblent marquer depuis quelque temps les débats à la Commission. Elle a préconisé la recherche du consensus qui implique à son tour un dialogue approfondi, seul moyen de résoudre les divergences.
La communauté internationale a le devoir d'examiner sur un plan individuel la situation dans tous les États du monde pour se prononcer sans complaisance, avertir sans préjugés et dissuader les tentations de non-respect des droits de la personne humaine, a déclaré Mme Lydie Polfer, Vice-Premier ministre et Ministre des affaires étrangères de Luxembourg. La réalisation de ces droits est notre responsabilité commune, a-t-elle rappelé sans omettre de prendre en considération les antagonismes, parfois réels, parfois imaginaires, qui font parfois obstacle à une vision globale des droits de la personne humaine. Elle a souligné l'importance du dialogue critique et discret qui peut constituer un puissant encouragement à persévérer dans la voie de la réalisation des droits fondamentaux.
Dans le même ordre d'idée, M. Ramón Gil-Casares, Secrétaire d'État aux relations extérieures d'Espagne, a lui aussi insisté sur le rôle fondamental de la Commission dans ce domaine et a appelé au renforcement de sa crédibilité, tant dans son travail de codification du droit international que dans son évaluation des situations. Il importe que la Commission reste en mesure d'orienter et d'assister les États, de dénoncer et de combattre les violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde. À ceux qui accusent la Commission d'une politisation excessive et qui plaident pour le silence et la complicité, nous devons répondre en réaffirmant notre vigilance et l'importance fondamentale de la lutte en faveur du respect des libertés fondamentales, a-t-il déclaré.
C'est la tragédie du peuple palestinien qui a retenu l'attention de Mme Dlamini Zuma, Ministre des affaires étrangères de l'Afrique du Sud, estimant que la communauté internationale devait s'engager à y mettre un terme. La Ministre s'est inquiétée que l'on ignore l'avis de la majorité des membres du Conseil de sécurité et du récent départ des inspecteurs de l'ONU en Iraq. Quant à M. Dao Viet Trung, Ministre-adjoint aux Affaires étrangères du Vietnam, il a déclaré que son pays partageait l'aspiration des peuples du monde entier à ce qu'une guerre soit évitée en Iraq et qu'une paix internationale durement gagnée soit maintenue. Le Vietnam, ayant eu lui-même à subir les affres de la guerre, est particulièrement attaché à la résolution des différends internationaux par des moyens politiques conformes aux principes de la Charte des Nations Unies et du droit international.
M. Edgar Gutiérrez Girón, Ministre des relations extérieures du Guatemala, a dressé un tableau de la situation des droits de l'homme dans son pays, regrettant notamment que le Guatemala ne soit pas parvenu à mettre en place, en cette période d'après conflit, une stratégie politique qui permette d'aboutir à une pleine et entière réconciliation, de se rapprocher de la justice sociale et de renforcer sans équivoque les institutions démocratiques.
M. Peter Piot, Directeur exécutif du Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), a attiré l'attention sur l'importance de trois droits actuellement utilisés dans le cadre de la lutte contre le VIH/Sida, à savoir les droits de l'enfant, le droit à la santé et le droit à la liberté d'opinion et d'expression. Aujourd'hui, seules 300 000 personnes affectées par le sida dans le monde en développement utilisent des traitements antirétroviraux, ce qui représente seulement 5% des près de six millions de vies qui pourraient être sauvées grâce à ce type de traitement.
Les représentants des pays suivants ont exercé un droit de réponse : Inde, République populaire démocratique de Corée, Iraq et Japon.
La Commission entamera demain, à partir de 10 heures, la dernière journée consacrée à son débat de haut niveau.
Débat de haut niveau
Mme SHINAKO TSUCHIYA, Secrétaire parlementaire aux affaires étrangères du Japon, a estimé que la responsabilité de la protection des droits de l'homme incombait au premier chef aux gouvernements. Étant donné le caractère universel de ces droits, leur situation dans chaque État constitue une source de préoccupation légitime pour la communauté internationale, et elle ne saurait donc être exclue des débats au motif qu'elle ne relèverait que des affaires intérieures des États. Enfin, le Japon estime que tous les droits humains sont indivisibles
et interdépendants. Ceci pour expliquer l'inquiétude du Gouvernement du Japon devant la politisation et les confrontations qui semblent marquer depuis quelque temps les débats à la Commission. Le Japon rappelle que les solutions doivent être trouvées sur la base d'une recherche de consensus qui implique à son tour des discussions approfondies.
Mme Tsuchiya a rappelé la participation importante du Japon non seulement aux forums internationaux mais également en matière d'assistance individuelle aux pays, en appui à leurs efforts de promotion et de protection des droits de l'homme. Le Japon est ainsi le premier donateur au monde en termes d'Aide publique au développement. En particulier, le Japon s'est engagé de façon constante en faveur de l'Afrique, à propos du développement de laquelle il organisera en septembre prochain une Troisième conférence internationale, à Tokyo. Autre domaine d'action, en partenariat avec l'UNICEF entre autres, la protection des droits des enfants, l'accent étant mis sur la lutte contre la pornographie, la prostitution et le trafic d'enfants.
Enfin, le Japon se déclare attristé par les graves violations des droits de l'homme qui se produisent toujours, menaçant même des citoyens japonais, comme le gouvernement a pu se rendre compte avec consternation. En effet, après vingt ans de dénégations, la Corée du nord a récemment admis avoir enlevé un certain nombre de ressortissants japonais, en violation flagrante de la dignité humaine, des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Malgré les efforts du gouvernement japonais, certaines de ces victimes sont encore portées manquantes. Le gouvernement de la Corée du nord doit maintenant procéder à une enquête approfondie sur ces cas et relâcher toutes les victimes et leurs familles.
M. BILL RAMMELL, Ministre chargé des droits de l'homme, des relations avec l'ONU, avec l'Amérique latine, la Chine et l'Asie septentrionale, du Ministère des affaires étrangères du Royaume-Uni, a salué le courage de la Présidente, Mme Najat El Mehdi Al-Hajjaji, dont la tâche ne sera pas facile au vu de la politisation croissante des travaux de la Commission. Il importe, a-t-il poursuivi, de garder à l'esprit que tout dysfonctionnement de la Commission des droits de l'homme a des répercussions sur le système des Nations Unies tout entier. Dans un tel contexte, il convient de se souvenir de notre rôle de protection des populations contre les abus perpétrés par les gouvernements, a-t-il déclaré. En effet, aucun gouvernement ne peut se targuer d'une conduite parfaite en matière des droits de l'homme et c'est la raison pour laquelle tous ont besoin de l'appui de l'ONU, a-t-il dit. Prenant l'exemple du Royaume-Uni, il a fait valoir que le meilleur moyen de prévenir les violations des droits de l'homme était d'appliquer pleinement les instruments internationaux et de se soumettre à l'examen des mécanismes des droits de l'homme. Dans cette optique, il a considéré que la Commission faillirait à sa tâche si elle évitait d'examiner les situations des droits de l'homme là où c'est nécessaire. Toutefois il a reconnu qu'en certaines occasions, la communauté internationale avait été trop prompte à condamner et qu'il fallait prendre dûment en compte les situations concrètes telles que la pauvreté.
À cet égard, le ministre britannique a souligné le rôle d'assistance et de coopération que doit jouer la communauté internationale. Pour appuyer ses propos, il a indiqué que le Royaume-Uni avait augmenté de 93% ses programmes d'aide, ce qui le place au rang de quatrième plus grand donateur bilatéral au monde. Il a précisé que son Gouvernement entendait élever le montant de l'aide qu'il alloue à 0, 4 % de son revenu national d'ici à 2005-2006, soit le double de la plupart des
pays du G-7. Il a réitéré l'engagement de son pays à atteindre l'objectif de 0,7 % fixé par les Nations Unies. Ceci atteste, a-t-il déclaré, de l'engagement du Royaume-Uni en faveur du droit au développement et des objectifs du Sommet du millénaire.
Estimant que le respect des droits de l'homme est la garantie d'une société stable, déterminée à cohabiter en paix avec ses voisins, M. Rammell a estimé que lorsqu'un régime fait preuve de mépris à l'égard des droits de l'homme, rejette le fonctionnement démocratique et se dote d'armes de destruction massive, il se pose comme une menace à la stabilité mondiale et met en danger sa population. C'est pourquoi, a-t-il poursuivi, il importe que la communauté internationale désarme l'Iraq et prenne toutes les mesures nécessaires pour rétablir la primauté du droit dans ce pays. Toute brèche dans le respect des droits de l'homme met en danger la démocratie et l'état de droit. Cela détourne également les investissements étrangers et nuit au développement durable. M. Rammell a reconnu qu'il n'existait aucun modèle unique de démocratie et qu'il appartenait à chaque société de développer son propre système de gouvernement. Toutefois, il a estimé que certains principes devaient être respectés, notamment la participation de la population aux prises de décisions, la protection des groupes marginalisés, le pluralisme politique, la liberté de la presse, l'indépendance du système judiciaire et le respect de la société civile. Le ministre britannique a ensuite abordé la question de l'indivisibilité de tous les droits de l'homme. Les droits civils et politiques, et les droits économiques, sociaux et culturels, se renforcent mutuellement, a-t-il fait valoir. Veiller au respect de tous les droits dans leur indivisibilité et leur interdépendance est la tâche qui incombe à cette Commission, s'est-il exclamé enjoignant tous ses membres à travailler ensemble pour que les États soient responsables devant leurs citoyens.
Mme MARICLAIRE ACOSTA, Vice-Ministre des relations extérieures du Mexique, chargée des droits de l'homme, a déclaré qu'il était temps de marquer une pause et de réfléchir sur les activités de la Commission pour déterminer si elle avait toujours répondu de façon adéquate aux situations relevant de son mandat. Le Gouvernement du Mexique est conscient du fait que le travail de la Commission est par essence de nature éthique et politique. On a constaté malheureusement à ce sujet une certaine confusion des objectifs et des intérêts. Or la politisation et la poursuite d'objectifs étrangers à la protection des droits de l'homme risquent de miner la crédibilité de ce forum. Quoi qu'il en soit, encouragé par l'appui que son initiative sur la Protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme a reçu lors de la dernière session de l'Assemblée générale des Nations Unies, le Mexique présentera une proposition similaire devant la Commission des droits de l'homme.
Le Gouvernement de Vicente Fox estime par ailleurs que la coopération internationale est l'un des meilleurs moyens d'aborder la question des droits de l'homme dans un cadre national. Le Mexique s'est donc complètement ouvert aux visites et aux propositions relatives à la promotion des changements structuraux nécessaires à la continuité du processus de transition démocratique. L'un des objectifs est ici le développement d'une politique nationale intégrée qui réponde de façon globale aux problèmes fondamentaux posés par l'application des droits de l'homme. Mme Acosta a aussi évoqué l'ouverture au Mexique d'une représentation permanente du Haut-Commissaire aux droits de l'homme, chargée de piloter
l'application d'un ambitieux programme de coopération technique, qui comprend entre autres l'établissement d'un état des lieux complet de la situation des droits de l'homme dans le pays. Au final, Mme Acosta estime que ces efforts susciteront l'engagement collectif des autorités et de la société civile du Mexique en vue de la poursuite du processus de changement.
M. PETER PIOT, Directeur exécutif du Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), a fait observer qu'aujourd'hui, les personnes vivant avec le VIH/sida et les communautés qui, à travers le monde, luttent en supportant le fardeau de cette épidémie continuent d'être victimes de stigmatisation et de discrimination. Des programmes d'éducation sur le sida pourtant directs et efficaces sont encore censurés et certains droits, comme le droit de propriété, sont déniés aux femmes, ce qui les rend vulnérables au sida. Quant aux enfants atteints par le sida, ils continuent à être exclus des écoles, a rappelé le Directeur exécutif. Aussi, M. Piot a-t-il attiré l'attention sur l'importance de trois droits actuellement utilisés dans le cadre de la lutte contre le VIH/sida, à savoir les droits de l'enfant, le droit à la santé et le droit à la liberté d'opinion et d'expression.
Lorsque le Comité des droits de l'enfant a adopté son commentaire général sur le VIH/sida et les droits de l'enfant il y a deux mois, c'était la première fois qu'un commentaire général était adopté par un mécanisme de surveillance des instruments des droits de l'homme sur le thème du VIH/sida, a souligné M. Piot. Il a précisé que ce commentaire général demande aux États qu'ils interdisent expressément la discrimination contre les enfants en raison de leur infection, réelle ou supposée, par le VIH/sida. Ce commentaire général signifie que la réponse apportée au sida s'agissant des enfants fait désormais partie du droit international officiel. Le fossé qui ne cesse de se creuser à travers le monde entre ceux qui ont accès à des traitements salvateurs et ceux à qui cet accès est refusé est insoutenable, du point de vue éthique, a poursuivi M. Piot. Il a souligné qu'au nombre des clefs permettant d'instaurer un monde plus juste, figurent les garanties législatives relatives à l'universalité de l'accès aux traitements antirétroviraux, telles qu'elles ont été promues en Amérique latine et centrale dans les années 1990, de façon tout à fait pionnière. Aujourd'hui, seules 300 000 personnes affectées par le sida dans le monde en développement utilisent de tels traitements, ce qui représente seulement 5% des près de six millions de vies qui pourraient être sauvées grâce à ce type de traitement. En Afrique sub-saharienne, les traitements antirétroviraux ne touchent même pas un pour cent des personnes qui en auraient besoin. Aussi, M. Piot a-t-il salué la nomination de M. Paul Hunt comme Rapporteur spécial sur le droit à la santé.
Le Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression, M. Ambeyi Ligabo, a affirmé que ce droit, avec tout ce qu'il induit du point de vue de l'accès à l'information et de la possibilité pour les communautés de se faire entendre, est une condition sine qua non pour la bonne réalisation des campagnes d'information et d'éducation visant à prévenir le VIH/sida. «Le sida est partout, et l'une des principales armes pour le vaincre consiste à faire en sorte que les droits de l'homme, eux aussi, soient une réalité partout», a conclu M. Piot.
Mme LYDIE POLFER, Vice-Premier ministre et Ministre des affaires étrangères du Luxembourg, s'est félicitée de ce qu'une femme assume une nouvelle fois la Présidence de la Commission. Après avoir salué M. Sérgio Vieira de Mello dans ses nouvelles fonctions de Haut Commissaire aux droits de l'homme, elle a annoncé que son pays prévoyait dès cette année une hausse très substantielle de ses contributions volontaires au budget ordinaire comme au financement des projets. L'année dernière, a-t-elle regretté, la Commission a pu mesurer ce qui sépare encore la communauté internationale d'une pleine application de la Déclaration universelle des droits de l'homme. La réalisation de ces droits est notre responsabilité commune, a-t-elle rappelé, sans omettre de prendre en considération les antagonismes parfois réels parfois imaginaires entre différentes régions du monde, entre le Nord et le Sud, qui font parfois obstacle à une vision globale des droits de la personne humaine. Toutefois, il faut savoir que le respect des libertés individuelles ne deviendra jamais un acquis définitif, car l'arbitraire, l'absolutisme et l'avilissement humain ne sont pas des phénomènes en voie de disparition. Ils peuvent resurgir dans la plus paisible et la plus juste de nos sociétés. Ainsi, la communauté internationale a le devoir d'examiner sur un plan individuel la situation dans tous les États du monde pour se prononcer sans complaisance, avertir sans préjugés et dissuader les tentations de non-respect des droits de la personne humaine. Cela étant, il convient de ne pas perdre de vue le dialogue critique et discret qui peut constituer un puissant encouragement à persévérer dans la voie d'un meilleur respect des droits de l'homme. Il importe de choisir l'approche la mieux adaptée aux situations et la plus efficace, car dans ce monde qui ne sera jamais parfait, la communauté internationale n'a d'autre choix que de faire de la lutte en faveur des droits de l'homme un combat de tous les jours. Il faut se méfier de la tentation de violer les droits des plus faibles qui se nourrit le plus facilement des situations de crise, a-t-elle dit.
Évaluant les situations de crise dans lesquelles les droits de l'homme risquent plus particulièrement d'être mis à mal, tels que les conflits armés, Mme Polfer s'est également penchée sur la lutte contre le terrorisme. La liberté individuelle, a-t-elle poursuivi, ne s'accommodera pas des contrôles toujours plus poussés que pourraient exiger des impératifs de sécurité absolue. Dans ce contexte, les entraves aux libertés individuelles méritent la plus grande attention, y compris en matière de traitement des données. En outre, pour abjectes et inqualifiables que puissent être leurs forfaits, les terroristes doivent bénéficier des droits élémentaires de respect de la personne. Les sociétés démocratiques ne sauraient s'abaisser à combattre le mal par le mal, a-t-elle estimé, car elles perdraient l'assise morale qui les investit du pouvoir de juger et de punir ceux qui commettent de tels actes. Dans ce domaine, les solutions conciliant le respect des droits de l'homme et la lutte contre le terrorisme ne peuvent venir que d'un dialogue qui tienne compte de la diversité des nations et se penche sans complaisance sur les causes profondes du terrorisme. Partant, la ministre luxembourgeoise a également dénoncé l'utilisation de la torture et la pratique de la mise à mort légale qui est, à ses yeux, «l'abus le plus irréparable». Elle a ensuite attiré l'attention de la Commission sur les efforts à entreprendre pour protéger «les plus faibles parmi les faibles» à savoir les enfants. Sans une protection des enfants, tous les efforts d'éducation et d'assistance technique seraient vains, a-t-elle mis en garde.
M. N. DLAMINI ZUMA, Ministre des Affaires étrangères de la République d'Afrique du Sud, a déclaré que malgré cinquante ans de promotion des droits de l'homme par la Commission, beaucoup restait à faire pour leur application effective, notamment en matière de lutte contre le racisme, encore prévalent dans bien des régions. À ce titre, la Troisième Conférence du Durban sur le racisme est tombée à pic et l'Afrique du Sud continuera à s'efforcer d'appliquer le Programme d'action qui en est le fruit. Il a déjà établi un mécanisme de suivi,
qui implique les syndicats, les organisations non gouvernementales, les institutions gouvernementales et la société civile. Le Gouvernement de l'Afrique du Sud agit de façon prioritaire dans le domaine de la protection des droits des femmes et des enfants, et sa législation intègre désormais les dispositions relatives du droit international.
Sur le plan international, Mme Zuma a déploré que le droit du peuple palestinien à l'autodétermination et à un État indépendant soit bafoué depuis si longtemps. Les conditions de vie de la population palestinienne se sont qui plus est détériorées. Le Gouvernement sud-africain estime que la communauté internationale doit agir de façon à mettre un terme à cette tragédie. C'est ainsi que, pour tenter de réduire la méfiance qui prévaut, l'Afrique du sud a de son côté organisé des rencontres entre décideurs israéliens et palestiniens.
En tant que pays ayant volontairement procédé à la destruction de ses armes de destruction massive, l'Afrique du Sud est d'avis qu'aucun des membres des Nations Unies ne devrait détenir de telles armes. La paix et la sécurité internationale doivent être fondées sur les dispositions de la Charte des Nations Unies, et agir autrement que dans ce cadre ne pourra que miner la légitimité de l'Organisation et susciter la méfiance de ses membres. Le fait d'ignorer les avis de la majorité des membres du Conseil de sécurité, ainsi que le récent départ des inspecteurs de l'ONU en Iraq, sont des faits très préoccupants. En outre, la façon dont interviennent les changements de gouvernement dans certaines régions monde soulève bien des questions quant à la nature du système politique international qui semble se développer hors du cadre des Nations Unies. Et que dire des grandes manifestations d'opposition à la guerre, opposition massive mais ignorée, ce qui ne témoigne guère d'un comportement démocratique. L'Afrique du sud se déclare enfin pleinement consciente de ce que les conflits ne peuvent être résolus sans des avancées radicales dans la réduction de la pauvreté et du sous-développement. Dans ce contexte, l'Union africaine a tenu son premier sommet à Durban à l'été 2002, au cours duquel elle a adopté le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, outil macro-économique qui vise au développement durable du continent.
M. EDGAR GUTIÉRREZ GIRÓN, Ministre des relations extérieures du Guatemala, a rappelé qu'il y a un peu plus de six ans, un Accord de paix ferme et durable a été signé au Guatemala qui a mis un terme à quatre décennies d'affrontement armé dans le pays. Bien que ces accords aient permis le retour de dizaines de milliers de réfugiés, la réinsertion d'un nombre aussi important de personnes déplacées et la démobilisation des forces insurgées et de certains groupes armés de l'État, le Guatemala n'est pas parvenu à mettre en place, dans cette période d'après-conflit, une stratégie politique qui permette d'aboutir à une pleine et entière réconciliation, de se rapprocher de la justice sociale et de renforcer sans équivoque les institutions démocratiques, a déclaré le Ministre. Les Accords de paix, en particulier dans leurs chapitres consacrés aux droits de l'homme et aux droits des peuples autochtones, au renforcement du pouvoir civil et aux réformes socioéconomiques, ont un caractère refondateur pour l'État et la société guatémaltèques. Mais les prémisses de leur application n'ont pas été pleinement établies. Ainsi, l'homogénéité de la conduite politique de l'État n'est pas assurée et la société dans sa majorité ne connaît pas le contenu des accords de paix qui d'ailleurs ne trouvent pas leur expression dans la vie quotidienne. De plus, la culture politique des élites continue à être une culture de confrontation qui n'est ni constructive ni tolérante. Enfin, les institutions et mécanismes nécessaires pour promouvoir les objectifs des accords de paix n'ont pas été créés, a ajouté le Ministre. Des efforts énormes ont été déployés pour connaître la vérité sur les faits atroces de la guerre, en particulier à travers la Commission d'éclaircissement historique et de récupération de la mémoire historique. Mais la résistance opposée par certains pouvoirs à la reconnaissance de ces faits et les obstacles auxquels s'est heurtée l'application de la justice se sont avérés formidables, a expliqué le Ministre des relations extérieures. Il a par ailleurs reconnu que le tissu social de son pays avait été brutalement déchiré et que les tentatives pour le reconstituer se sont avérées partielles. M. Gutiérrez Girón a indiqué qu'en 2002, le Gouvernement et les organisations de victimes ont élaboré un plan national de réparations ayant donné lieu à un projet de loi qui a été envoyé au Congrès où il faut espérer qu'il sera adopté cette année. Il est prévu que ce plan sur onze ans soit lancé en 2003 avec un financement initial de 9 millions de dollars pour une période d'essai.
Le Ministre des relations extérieures du Guatemala a déclaré qu'en dépit de ces progrès, le pays n'a pas mis fin aux pratiques de violation des droits de l'homme. Ainsi, persiste la pratique consistant à menacer les défenseurs des droits de l'homme, les agents de justice, les témoins et d'autres. «Il s'agit là de séquelles d'un passé empreint d'arbitraire et d'impunité dont nous devons encore venir à bout», a affirmé M. Gutiérrez Girón. «Mais le problème actuel est que notre système de sécurité et de justice n'a pas identifié les agresseurs pas plus que leurs actions clandestines n'ont été sanctionnées», a précisé le Ministre. Il a donc fallu trouver un mécanisme ad hoc. Ainsi, le 13 mars dernier, le bureau du Procureur des droits de l'homme, les ONG de droits de l'homme et le Gouvernement, avec l'aide de Human Rights Watch, ont conclu un accord en vue de la mise en place d'une Commission d'enquête sur les groupes illégaux et les appareils clandestins de sécurité qui comprendra trois membres dont les représentants du Secrétaire général des Nations Unies et de l'Organisation des États américains (OEA).
Le Guatemala ne parviendra pas à instaurer pleinement la paix sans consentir un effort national pour détruire les racines de l'injustice et de l'exclusion sociale et ethnique qui ont été à l'origine du conflit, a affirmé M. Gutiérrez Girón. Il a précisé que cela implique de mener à bien une réforme fiscale progressive et une politique de développement agraire efficace marquées du sceau de la justice sociale. Au cours des trois années de fonction du Gouvernement actuel, des efforts ont été déployés pour garantir des gains de production et des prix en faveur des paysans; les salaires minima ont été augmentés; la couverture scolaire s'est étendue; et une stratégie de lutte contre la pauvreté est en train d'être élaborée. Diverses zones militaires ne remplissant pas de fonctions de défense ont été démantelées, a-t-il précisé. Une réduction des effectifs militaires est aussi prévue. Dans le domaine des droits des peuples autochtones, beaucoup reste à faire, a reconnu le Ministre. La discrimination et le racisme ont un visage autochtone, rural et féminin, a-t-il souligné. La discrimination et le racisme constituent l'essence même de l'ordre juridique, idéologique, social, politique et économique du Guatemala, a affirmé le Ministre. Il a indiqué que son pays a initié des contacts avec le Haut Commissaire aux droits de l'homme en vue de l'établissement d'un bureau au Guatemala. Rappelant qu'en novembre prochain, de nouvelles élections démocratiques se tiendront au Guatemala, M. Gutiérrez Girón a fait part de l'intention de son pays d'inviter la communauté internationale à surveiller de près le processus électoral. Des invitations sont en train d'être adressées à cette fin aux Nations Unies, à l'Organisation des États américains et à l'Union européenne.
M. RAMŌN GIL-CASARES SATRŪSTEGUI, Secrétaire d'État aux relations extérieures d'Espagne, a indiqué que les systèmes démocratiques se mesurent à l'aune du respect et de la protection des droits de l'homme, qui ne saurait se limiter à une affaire de politique intérieure. Au contraire, il existe un lien étroit entre le respect des droits de l'homme au plan interne et la sécurité internationale, comme en témoigne aujourd'hui la crise en Iraq. À l'occasion du dixième anniversaire de la Conférence de Vienne, Le Secrétaire d'État a rappelé que la promotion et la protection des droits de l'homme dans tous les pays n'est pas seulement une exigence éthique, mais également une préoccupation légitime de la communauté internationale. La dignité humaine est garantie par le respect des droits fondamentaux, qui doivent par conséquent faire l'objet de la vigilance internationale, et aucun relativisme culturel ne saurait justifier leur violation. Partant, il a insisté sur le rôle fondamental de la Commission dans ce domaine et a appelé au renforcement de sa crédibilité, tant dans son travail de codification du droit international que dans son évaluation des situations. Il importe que la Commission reste en mesure d'orienter et d'assister les États, de dénoncer et de combattre les violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde. Toute attaque contre la dignité humaine se doit d'être dénoncée, a-t-il affirmé. À ceux qui accusent la Commission d'une politisation excessive et qui plaident pour le silence et la complicité, nous devons répondre en réaffirmant notre vigilance et l'importance fondamentale de la lutte en faveur du respect des libertés fondamentales.
Sans vouloir entrer dans les détails des situations particulières, le Secrétaire d'État espagnol a attiré l'attention sur le cas de la Guinée équatoriale. S'il s'est félicité de la libération de quelque 120 prisonniers, il a exprimé certaines préoccupations depuis le non-renouvellement, l'année dernière, du mandat du Rapporteur spécial de la Commission. Il s'est toutefois déclaré convaincu que les autorités de ce pays entendait poursuivre leur politique en faveur d'un meilleur respect des droits de l'homme et a espéré que le Gouvernement équatoguinéen profiterait de l'occasion des prochaines élections législatives pour faire montre de nouveaux progrès dans la voie de la démocratisation. À cet égard, le Secrétaire d'État espagnol a souligné que tous les partis représentatifs de la société de Guinée équatoriale devaient y participer.
M. Gil Casares a ensuite abordé la question du terrorisme qui est une atteinte directe aux droits de l'homme, et particulièrement au droit à la vie. C'est un fléau qui utilise la liberté garantie par l'état de droit dans l'intention de le détruire, a-t-il mis en garde. Il a pris l'exemple de son pays, pour expliquer que le terrorisme est l'obstacle majeur à la jouissance pleine et entière des libertés et des droits fondamentaux. Il a également dénoncé les tentatives de manipulations des instances internationales pour justifier des actes terroristes et a préconisé la fermeté et la vigilance pour éviter que les instances de protection des droits de l'homme soient confisquées pour servir des objectifs criminels. Puis, le Secrétaire d'État a exprimé ses préoccupations concernant la violence contre les femmes, notamment la lapidation, les mutilations génitales et la violence domestique, et a fait savoir que son pays entendait apporter une contribution généreuse aux Programmes du Haut Commissariat dans ce domaine. S'agissant du cadre juridique international, il s'est félicité de
l'adoption du Protocole facultatif à la Convention contre la torture, de l'entrée en vigueur de la Cour pénale internationale. Enfin, attirant l'attention sur les violations dont sont victimes les migrants, il a jugé urgent de protéger les migrations légales et de lutter avec fermeté contre l'immigration illégale et les mafias qui la contrôlent. Pour ce faire, il convient d'instaurer une coopération efficace entre les pays de départ, de transit et de destination.
M. DAO VIET TRUNG, Vice-Ministre des affaires étrangères du Vietnam, a déclaré que son pays, membre de la Commission depuis maintenant trois ans, partageait l'aspiration des peuples du monde entier à ce qu'une guerre soit évitée en Iraq et qu'une paix internationale durement gagnée soit maintenue. Les Nations Unies doivent être prêtes à assumer le rôle qui est leur échoit selon les objectifs de la Charte. Le Vietnam, ayant eu lui-même à subir les affres de la guerre, déclare promouvoir la résolution des différends internationaux par des moyens politiques conformes aux principes de la Charte des Nations Unies et du droit international. Le respect de ces mêmes principes doit guider la lutte nécessaire contre le terrorisme. Le Vietnam appelle à la fin de l'embargo imposé contre certains pays, notamment Cuba, de telle sorte que leurs peuples puissent se consacrer à la reconstruction et au développement.
Au niveau national, la Constitution, les lois et les politiques du Vietnam garantissent le respect des droits de l'homme dans tous leurs aspects. Au cours des dix-sept dernières années de rénovation («Doi Moi»), le Vietnam a accompli d'importants efforts et a atteint de bons résultats en matière d'amélioration du niveau de vie, d'augmentation du PNB ou de croissance économique. Parallèlement à ces progrès matériels, l'égalité sociale a également été une préoccupation du Gouvernement, notamment en ce qui concerne les régions montagneuses du pays, 30% du budget de l'État étant ainsi consacré au développement et à la réduction de la pauvreté.
Le Vietnam est d'avis que chaque pays est tributaire de conditions économiques, sociales et culturelles particulières. La coopération peut amener la prospérité commune, et c'est sur une telle base de coopération, de respect et de compréhension mutuels que le Vietnam se déclare prêt à poursuivre le dialogue international sur les droits de l'homme.
Droit de réponse
L'Inde a répondu à l'intervention faite hier après-midi par le représentant de l'Organisation de la Conférence islamique en déplorant que l'OCI ait fait mention d'informations publiées dans la presse qui ne devraient pas être le fondement des déclarations faites devant cette assemblée. L'OCI ferait mieux de se concentrer sur les cas où il y a discrimination et persécution systématiques des minorités religieuses. L'Inde rejette en outre toute mention gratuite, de la part de l'OCI, aux quelque 140 millions de musulmans vivant en Inde.
La République populaire démocratique de Corée a regretté la déclaration faite aujourd'hui par le Japon et a rappelé que les cas d'enlèvements mentionnés par le Japon se sont produits dans le contexte de relations extrêmement hostiles entre les deux pays. Les deux parties se sont engagées à tenter de résoudre sur le plan bilatéral les questions en suspens, telles que celles liées aux crimes passés du Japon : les millions de Coréens assassinés et les 200 000 femmes réduites à l'esclavage par les militaires japonais. Grâce à la bonne foi de la
République populaire démocratique de Corée, les prétendus enlèvements ont été résolus essentiellement par des moyens bilatéraux. Il est donc totalement injuste que le Japon insiste comme s'il n'y avait pas eu de progrès à cet égard. La République populaire démocratique de Corée demande instamment au Gouvernement japonais de s'en tenir aux accords bilatéraux.
L'Iraq, en réponse à la déclaration du Royaume-Uni, a déclaré que les débats du Conseil de sécurité indiquaient que le travail des inspecteurs auraient dû continuer. La fin du discours de la représentante du Royaume-Uni laissait d'autre part entendre que l'Iraq avait fait des progrès en matière de communication avec les membres du Conseil de sécurité. Le représentant de l'Iraq déclare ne pas comprendre cette attitude bien différente de celle, intransigeante, du gouvernement du Royaume-Uni, auquel il conseille de prendre connaissance de ces faits rapportés.
Le Japon a précisé que la République populaire démocratique de Corée avait reconnu, lors d'une réunion au sommet, avoir détenu des ressortissants japonais. Toutefois, il a estimé que cette réunion bilatérale ne saurait être la fin du processus. En outre, concernant les cinq personnes qui sont revenues au Japon, il a demandé à la RPDC d'assurer la sécurité de leurs familles qui sont restées à Pyonyang. En ce qui concerne les autres personnes disparues, il a demandé que des informations soit fournies au Groupe de travail sur les disparitions forcées.
La République populaire démocratique de Corée a rejeté les allégations du Japon et a déclaré que toutes les informations sur la question avaient été transmises au Groupe de travail sur les disparitions forcées. Il a demandé au Japon ne pas adopter une attitude politique biaisée et de reconnaître lui-même ses crimes s'agissant des milliers de Coréens qui ont disparu.
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