LE CONSEIL REAFFIRME SON ENGAGEMENT A CREER UNE FORCE DE STABILISATION DE L’ONU AU LIBERIA EN VUE DE FACILITER LE RETOUR A LA PAIX
Communiqué de presse CS/2545 |
Conseil de sécurité CS/2545
4815e séance – matin 27 août 2003
LE CONSEIL REAFFIRME SON ENGAGEMENT A CREER UNE FORCE DE STABILISATION DE L’ONU AU LIBERIA EN VUE DE FACILITER LE RETOUR A LA PAIX
Le Secrétaire exécutif de la CEDEAO demande la levée
des sanctions imposées au Libéria, à l’exception de l’embargo militaire
Réuni ce matin pour examiner la situation au Libéria, le Conseil de sécurité, dans une Déclaration lue par son Président, M. Fayssal Mekdad (République arabe syrienne), s’est félicité de l’Accord de paix global signé le 18 août 2003 à Accra par le Gouvernement libérien, des dirigeants des groupes rebelles, des partis politiques et de la société civile. Le Conseil s’est déclaré préoccupé par la situation humanitaire au Libéria qui reste tragique pour une grande partie de la population. Dans cette Déclaration, le Conseil demande par ailleurs à toutes les parties d’accorder aux organismes humanitaires et à leurs personnels un accès total, en toute sécurité et sans entrave et il encourage tous les Etats Membres à apporter un appui financier, logistique et matériel aux Etats Membres qui participent à la force dirigée par la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Le Conseil réaffirme également qu’il est prêt à créer une force de stabilisation des Nations Unies en vue d’appuyer le gouvernement provisoire du Libéria et de faciliter l’application de l’Accord de paix global.
Avant la lecture de cette déclaration présidentielle, le Conseil de sécurité a entendu des présentations de M. Nana Akufo Addo, Ministre des affaires étrangères du Ghana et Président en exercice de la CEDEAO et de M. Mohammed Ibn Chambas, Secrétaire exécutif de la CEDEAO, qui ont insisté sur l’importance de l’appui de la communauté internationale aux efforts de stabilisation du Libéria. Après avoir rappelé que son pays a accueilli les pourparlers qui ont abouti à l’Accord de paix global pour le Libéria, le Ministre des affaires étrangères du Ghana a regretté l’annonce, par le Gouvernement des Etats-Unis, du retrait de toute force américaine du Libéria à la date-butoir du 1er octobre 2003. De son côté, le Secrétaire exécutif de la CEDEAO a fait part des inquiétudes des Etats membres de cette organisation quant aux risques qui demeurent au Libéria tant qu’un programme effectif de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des ex-combattants, dont beaucoup sont des enfants-soldats, n’aura pas été mis en œuvre. Insistant sur les dangers qui menacent la région d’Afrique de l’Ouest et notamment celle du fleuve Mano, M. Ibn Chambas a demandé que l’on mette fin au libre déplacement des groupes armés et à la prolifération illicite des armes légères. Estimant ensuite que le régime de sanctions imposé au Libéria deviendrait un obstacle aux efforts de reconstruction du prochain gouvernement d’Union nationale du Libéria, le Secrétaire exécutif de la CEDEAO a plaidé pour la levée de ces sanctions, à l’exception de l’embargo sur les armes.
Dans une déclaration de son Président faite à la presse le 26 août 2003, le Conseil avait décidé de maintenir les sanctions sur le bois d’œuvre, exprimant la crainte que les revenus tirés de ce bois ne servent à financer le conflit. Le Conseil avait précisé à ce sujet qu’il serait mieux placé, «une fois que la situation se serait stabilisée dans le pays, pour examiner les diverses options possibles pour réduire tout impact de ces sanctions
Outre le Ministre des affaires étrangères du Ghana et le Secrétaire exécutif de la CEDEAO, les Ministres des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, de la Guinée et du Nigéria, ainsi que le Représentant permanent du Sénégal ont pris part à la séance de ce matin.
LA SITUATION AU LIBERIA
Déclarations
M. NANA AKUFO ADDO, Ministre des affaires étrangères du Ghana et Président en exercice de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a exprimé à l’ONU les condoléances de son gouvernement et de la CEDEAO après la disparition de Sergio Vieira de Mello et de nombreux personnels de l’ONU à Bagdad. Nous sommes venus informer le Conseil des efforts que fait la CEDEAO, avec l’aide de l’Union africaine, pour maintenir la paix en Afrique de l’Ouest, a dit le Ministre. Nous nous félicitons des missions que le Conseil a dépêchées dans notre région, ce qui montre l’intérêt qu’il porte à nos pays. Nous sommes venus appuyer tous les efforts qui sont faits pour ramener la stabilité au Libéria, dans la zone du fleuve Mano et dans toute la région de la CEDEAO. Nous remercions à cet égard les Nations Unies et les Etats Membres pour ce qui a été accompli en Sierra Leone.
A la suite de toutes les réunions qui se sont tenues sur le conflit qui affectait le Libéria, il a été décidé de créer un Groupe de contact sur la paix et la réconciliation dans ce pays.
Des pourparlers de paix se sont ouverts à Accra en juillet 2003 sous la médiation du Général Abdulsalami Abubakar, l’ancien président du Nigéria. Ces négociations qui ont réuni le Gouvernement libérien, les groupes rebelles du LURD et du MODEL et la société civile, ont abouti à la signature de l’Accord d’Accra, dont la conclusion a été facilitée par le départ de Charles Taylor, exigé par la société civile libérienne et par des voix influentes au niveau international. M. Taylor est parti après une cérémonie à laquelle ont assisté les Présidents du Ghana et de l’Afrique du Sud. Nous remercions Le Président Obasanjo du Nigéria qui a offert refuge à Charles Taylor et a dépêché deux bataillons au Libéria. Forte actuellement de 1 796 personnes, il est prévu que la force d’interposition de la CEDEAO en aura 3 500 d’ici au 4 septembre. Leur acheminement est rendu possible par le soutien des Etats-Unis et de l’ONU.
Nous sommes cependant inquiets du retrait des marines vers leurs bâtiments au large des côtes et du retrait annoncé des troupes américaines et de la fin de toute présence américaine au Libéria à la date du 1er octobre. L’accord de paix pour le Libéria s’appuie sur les principes en vigueur au sein de la CEDEAO, qui condamne toute prise de pouvoir par la force et soutient la légitimité républicaine. Des tâches importantes restent à accomplir, notamment la démobilisation des combattants, leur réinsertion, et la mise en place d’un processus politique devant aboutir à des élections libres, transparentes et crédibles. Nous comptons que le déploiement total de la force des Nations Unies au Libéria, qui devrait venir en renfort des troupes déployées par la CEDEAO sera fortement soutenu par le Conseil de sécurité. L’élan de la paix au Libéria en dépend et les différents partenaires internationaux doivent garantir le respect des engagements pris à Accra dans le cadre de la négociation et de la signature de l’Accord de paix. Nous ne pouvons pas nous permettre de répéter les erreurs du passé. Il faut cette fois assurer le désarmement total des ex-combattants au Libéria.
M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Secrétaire général de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a félicité le Conseil pour avoir appuyé la position de l’Union africaine et de la CEDEAO qui avaient souligné qu’aucun groupe qui prendrait le pouvoir par la force n’obtiendrait de reconnaissance internationale en prévenant que ceux qui se rendraient coupables de meurtres ne resteraient pas impunis. Il a également défini l’excellente relation entre le Conseil de sécurité et la CEDEAO pour la résolution du conflit libérien comme un exemple à suivre en matière de coopération entre le Conseil et une organisation régionale pour la promotion de la paix et de la sécurité. Il a souhaité la mise en place d’un mécanisme consultatif prévoyant des réunions régulières entre les Nations Unies et la CEDEAO, alternativement à New York et Abuja. Par ailleurs, le Secrétaire général de la CEDEAO s’est félicité de la nomination de M. Jacques Paul Klein, comme représentant spécial du Secrétaire général au Libéria, qui a eu l’occasion de rencontrer les personnalités libériennes clés lors de la phase finale des négociations de l’Accord de paix d’Accra.
M Ibn Chambas a insisté sur trois problèmes requérant selon lui une attention particulière: les groupes armés qui se déplacent librement dans la sous-région; la lutte contre la prolifération des armes; et la nécessité de lever le régime de sanctions, à l’exception de celles interdisant les livraisons d’armes, qui frappe le Libéria.
S’agissant des groupes armés, il a souligné le problème des milliers de combattants étrangers, notamment Sierra-Léonais, qui circulent au Libéria en y menaçant constamment le processus de paix en cours. A cet égard, il a estimé que les Sierra-Léonais devaient être désarmés et réintégrés dans la société de leur pays tandis que les activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) des combattants libériens devaient être partie intégrante de la Mission de maintien de la paix au Libéria. Il a souligné qu’il était important que ces combattants se voient offrir des opportunités en matière de réinsertion et d’emplois.
Il a abordé ensuite la nécessité urgente d’éliminer la prolifération des armes légères dans la sous-région du fleuve Mano qui souffre beaucoup de ce fléau. Il s’agit, a-t-il dit, de trouver des manières de prévenir le commerce illicite de ce type d’armes, et l’établissement d’un registre officiel des courtiers en armes serait des plus utiles.
Enfin, il a souligné la nécessité de revoir le régime actuel de sanctions à l’égard du Libéria, appliqué du fait que le Gouvernement de l’ancien président ne respectait pas les résolutions du Conseil de sécurité. Aujourd’hui, a-t-il indiqué, le gouvernement intérimaire s’efforce de promouvoir des relations de bon voisinage. Le 14 octobre, un gouvernement de transition prendra la relève pour deux ans et ne pourra pas fonctionner de manière efficace si les sanctions sont maintenues. Le Secrétaire exécutif de la CEDEAO a plaidé pour que le Conseil envisage de lever toutes les sanctions, à l’exception de l’embargo sur les armes.
Déclaration du Président au nom des membres du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité accueille avec satisfaction l’exposé relatif à l’Accord de paix global conclu le 18 août 2003 à Accra que lui ont présenté des représentants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), à savoir le Ministre des affaires étrangères du Ghana, M. Nana Akufo Addo, le Ministre des affaires étrangères de la Côte d’Ivoire, M. Bamba Mamadou, le Ministre des affaires étrangères de la Guinée, M. François Fall, le Ministre des affaires étrangères du Nigéria, M. Oluyemi Adeniji, le Représentant permanent du Sénégal, M. Papa Louis Fall, et le Secrétaire exécutif de la CEDEAO, l’Ambassadeur Mohammed Ibn Chambas.
Le Conseil se félicite de l’Accord de paix global conclu le 18 août 2003 à Accra par le Gouvernement libérien et les dirigeants des groupes rebelles, des partis politiques et de la société civile.
Le Conseil salue les efforts déployés pour négocier cet accord par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), en particulier le Président de l’organisation et Président du Ghana, M. John Kufuor, le Secrétaire exécutif, M. Mohammed Ibn Chambas, et le Médiateur, le général Abdulsalami Abubakar.
Le Conseil demeure préoccupé par la situation au Libéria, en particulier par la situation humanitaire qui reste tragique pour une grande partie de la population. Il demande à toutes les parties de laisser aux organismes humanitaires et à leurs personnels un accès total, en toute sécurité et sans entrave.
Le Conseil souligne de nouveau la nécessité d’instaurer un environnement sûr qui permette de faire respecter les droits de l’homme, y compris le bien-être et la réadaptation des enfants, en particulier des enfants soldats, d’assurer la protection du bien-être des civils et d’appuyer la tâche des agents humanitaires.
Le Conseil rend hommage aux donateurs qui appuient le déploiement de la Mission de la CEDEAO au Libéria (ECOMIL), encourage tous les États Membres à apporter un appui financier, logistique et matériel aux États Membres qui participent à la force dirigée par la CEDEAO, et demande à la communauté des donateurs d’apporter une aide humanitaire d’urgence à ceux qui sont dans le besoin au Libéria.
Le Conseil engage instamment toutes les parties à respecter pleinement le cessez-le-feu et à s’acquitter entièrement de tous les engagements qu’ils ont pris en vertu de l’Accord de paix global signé à Accra le 18 août, et notamment à coopérer sans réserve avec la Mission de la CEDEAO au Libéria (ECOMIL), l’Organisation des Nations Unies, le Groupe de contact international pour le Libéria, l’Union africaine et les États-Unis d’Amérique à la constitution d’une commission mixte de suivi, qui est un aspect essentiel du processus de paix au Libéria, créée en vertu de l’Accord de paix.
Le Conseil de sécurité réaffirme qu’il est prêt, ainsi qu’il l’a indiqué au paragraphe 2 de sa résolution 1497 du 1er août 2003 (S/RES/1497), à créer une force de stabilisation des Nations Unies en vue d’appuyer le gouvernement provisoire et de faciliter l’application d’un accord de paix global pour le Libéria.
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