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CS/2490

M. BRAHIMI RECLAME LE DEPLOIEMENT DE LA FORCE INTERNATIONALE HORS DE KABOUL POUR GARANTIR LA POURSUITE DU PROCESSUS DE BONN

06/05/03
Communiqué de presse
CS/2490


Conseil de sécurité

4750e séance – matin


M. BRAHIMI RECLAME LE DEPLOIEMENT DE LA FORCE INTERNATIONALE HORS DE KABOUL POUR GARANTIR LA POURSUITE DU PROCESSUS DE BONN


Le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afghanistan, M. Lakhdar Brahimi, a prévenu une nouvelle fois ce matin le Conseil de sécurité, réuni sous la présidence de M. Munir Akram (Pakistan), que l’insécurité et les activités des factions liées à l’économie de la drogue risquaient de saper le processus de reconstruction de ce pays, dix-huit mois après la chute du régime des Taliban.  Il l’a mis en garde en expliquant qu’à ce stade, l’insécurité enregistrée dans les provinces était en passe d’atteindre la capitale, Kaboul.


Depuis son dernier compte-rendu de la situation devant le Conseil en janvier dernier, a-t-il indiqué, les conditions de sécurité se sont encore détériorées avec les affrontements interethniques ou entre factions rivales et les activités croissantes d’éléments proches des Taliban et du chef de guerre Gulbuddin Hekmatyar.  Dénonçant le harcèlement quotidien de la population et les attaques des éléments hostiles au Gouvernement central, il a déploré l’impunité totale dont bénéficient les assaillants.


Pour M. Brahimi, il s’agit donc de placer la réforme des services de sécurité au centre de l’action du Gouvernement afghan.  Mais la communauté internationale doit, de son côté, apporter son concours en autorisant le déploiement de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) hors de Kaboul.  Il s’agit là, a-t-il estimé à l’instar du Secrétaire général, d’une mesure nécessaire si l’on veut assurer la poursuite et la pérennité du processus de Bonn.  Dans les conditions actuelles, a-t-il fait remarquer, le Gouvernement du Président Karzaï risque de rencontrer de grandes difficultés pour mener à bien les tâches prioritaires qui lui sont assignées par les Accords de Bonn, portant notamment sur la réconciliation et la reconstruction de la nation.


Développant ensuite plusieurs questions importantes, M. Brahimi a d’abord rappelé que la Commission constitutionnelle avait été inaugurée le 26 avril par l’ancien Roi d’Afghanistan.  Composée de 35 membres représentant les différents groupes ethniques, religieux et régionaux du pays, elle consultera au cours de l’été la population pour en connaître les vœux et les aspirations.  L’ONU participera et soutiendra ce processus en prenant en charge entre autres les questions de sécurité pendant les déplacements de la Commission.  Par ailleurs, la Mission d’assistance des Nations Unies à l’Afghanistan (MANUA) est en train d’établir une unité électorale et l’inscription sur les listes électorales a commencé.  Cette unité spéciale aura cependant besoin de ressources pour lui permettre de s’acquitter efficacement de sa mission, a prévenu le Représentant spécial en appelant les Etats Membres à verser des contributions supplémentaires sur une base volontaire.  La sécurité sera un point focal encore plus important pendant le processus électoral, a-t-il poursuivi, indiquant que le seul processus d’enregistrement des électeurs exigera le recrutement et la formation de 300 Afghans qui devront visiter des milliers de villages.  


Le Gouvernement afghan, a également indiqué M. Brahimi, avait pris un certain nombre de mesures pour contrôler la culture du pavot et, avec l’aide du Royaume-Uni, il mettait la dernière main à un plan de stratégie de contrôle de la drogue d’une durée de dix ans.  A cet égard, il a rappelé à quel point la production d’opium et l’économie de la drogue contribuaient à l’insécurité et pouvaient potentiellement saper tous les efforts visant à renforcer les institutions et l’état de droit en Afghanistan.  S’agissant du retour des réfugiés, ce mouvement s’est accéléré en avril, a précisé le Représentant spécial en citant les chiffres du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR): 600 000 Afghans vont rentrer cette année du Pakistan, 500 000 d’Iran et 100 000 d’autres pays.  Parallèlement, le recensement de la population, décidé en application des Accords de Bonn, qui a démarré en janvier dernier à Kunduz est actuellement en cours dans les provinces de Parwan, Kapisa et Logar, et devrait prendre fin en 2004.  Il a pour objectif de mettre à jour des cartes, localiser des foyers et habitations en guise de préliminaires au recensement lui-même.  Pendant ce temps, la réouverture des écoles le 22 mars a vu un nombre record de 4 à 5 millions d’enfants scolarisés, s’est félicité M. Brahimi, déplorant cependant des incendies criminels survenus dans des écoles de filles.


La Commission de la réforme judiciaire a, pour sa part, achevé son étude sur l’état du système dans dix provinces et les principaux centres urbains.  Le rapport final devrait être disponible fin juin et fournira une base précieuse pour le lancement de la réforme.  De même, la réforme de l’administration publique, restée lente à ce jour, commence à avancer grâce à la Commission de la fonction publique; une révision de toutes les lois administratives est en cours.  Le système des Nations Unies détache, quant à lui, 140 personnes pour soutenir cette réforme tandis que la MANUA appuie notamment les fonctions du Ministère de la reconstruction et du développement rural.


Concernant le Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan, M. Brahimi a rappelé que lors de la réunion stratégique tenue à Bruxelles en mars dernier, le Gouvernement a présenté un budget de 2,2 milliards de dollars pour l’année budgétaire en cours et que les donateurs se sont engagés à ce jour à contribuer à hauteur de 1,95 milliard.  Cet engagement est très encourageant même si des ressources additionnelles extra-budgétaires seront nécessaires pour les projets en matière d’élections, d’action antimines ou de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR).


Poursuivant sa présentation, M. Brahimi a dit que la fin de l’hiver avait permis le démarrage de certains projets de reconstruction, notamment ceux concernant la réhabilitation des routes principales.  Un consortium de donateurs internationaux finance les routes menant de Kaboul à Kunduz et de Kaboul à la frontière pakistanaise en passant par Djalalabad.  Outre l’objectif de faciliter la réhabilitation économique et sociale du pays, ces projets visent à adresser aux populations un signal clair de la part du Gouvernement et de la communauté internationale concernant la reconstruction de l’Afghanistan.  Cependant, l’insécurité qui règne hors de Kaboul pose des limites au désir du Gouvernement et de ses partenaires concernant la remise sur pied de l’infrastructure du pays.  Des progrès ont été accomplis concernant la mise en œuvre de deux programmes jugés prioritaires au niveau national: le Programme d’urgence pour l’emploi (NEEP) et le Programme national de solidarité (NSP), que soutient la Banque mondiale, sont destinés à assurer l’injection de ressources financières gouvernementales dans les secteurs de l’économie locale.  Des mesures sont actuellement prises pour assurer l’injection de 75 millions de dollars dans le programme NEEP, tandis que le NSP, qui a débuté au mois d’avril, a reçu 11 millions de dollars pour son financement.  Pour ce qui est des droits de l’homme, la Commission nationale indépendante des droits de l’homme a fait d’importants progrès en ouvrant des bureaux régionaux à travers le pays.  Avec notre assistance, a dit M. Brahimi, la Commission procède actuellement à des enquêtes sur les violations de droits de l’homme qui lui ont été signalées. 


En avril 2003, l’Afghanistan a ratifié la Convention pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, ce qui laisse augurer d’une amélioration de la condition des femmes dans le pays.  Mais, malgré ces progrès, nous devons reconnaître que globalement, la situation des droits de l’homme demeure mauvaise en Afghanistan, et la Mission de l’ONU enquête en ce moment même sur de nombreux crimes, dont des exécutions sommaires, des viols, des violences sexuelles, et l’intimidation des journalistes et des membres d’organisations de la société civile.  Dans le Nord, des affrontements armés et des tensions ont provoqué le déplacement de Pachtounes vers la ville de Kandahar et les camps de réfugiés du Sud du pays.  L’absence d’infrastructures et d’un système judiciaire national permet à des chefs de guerre d’agir avec impunité et menace la paix fragile qui règne en Afghanistan.  La communauté internationale doit aider le pays à mettre en place les institutions et le système judiciaire national qui lui permettraient de mettre fin aux graves violations des droits de l’homme que nous observons.  Il est urgent de créer une police et une armée nationales, et de créer un système judiciaire opérationnel tout en donnant à la Commission afghane des droits de l’homme les moyens de devenir un organe d’éducation et de contrôle respecté. 


Les pays voisins de l’Afghanistan devraient aider à mettre en place de bonnes conditions de sécurité pour le pays, et nous sommes heureux qu’ils aient à cet égard signé une déclaration de solidarité avec l’Afghanistan en décembre 2002, a souligné M. Brahimi, rappelant qu’il a pu rencontrer le Président Pervez Musharraf du Pakistan au mois de mars.  Ce dernier l’avait assuré de son soutien au Gouvernement de M. Hamid Karzaï qui s’est lui-même rendu à Islamabad le 22 avril.  Le Président Karzaï a annoncé que le programme démobilisation, désarmement et réintégration (DDR) à mettre en place dans le pays commencera le 22 juin prochain.  Soutenu par la communauté internationale, et notamment par le Japon et les Etats-Unis, ce programme inclura les hommes en armes et les différentes milices qui sont en ce moment regroupés sous la tutelle du Ministère de la défense.  Leur nombre s’élève à environ 100 000 hommes.  Mais avant que le programme DDR ne soit lancé, il est indispensable de respecter l’esprit du décret présidentiel du 1er décembre 2002, relatif à la création de l’armée nationale.  L’esprit de ce décret doit mener à une réforme en profondeur des ministères de la défense, de l’intérieur, et des services de sécurité.  Les récentes nominations au ministère de la défense sont un début timide à un rééquilibrage ethnique des postes de responsabilités au sein de ce ministère pour en faire une institution réellement nationale.  Le Secrétaire général et moi-même avons proposé que des effectifs de la FIAS soient déployés en dehors de Kaboul, car nous estimons que c’est une mesure indispensable à la sécurité de la mise en œuvre du processus de Bonn, a ensuite dit M. Brahimi en soulignant que l’accord signé par les parties à Bonn devait s’appliquer à tout le territoire afghan.


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