SAISI DU DEUXIEME RAPPORT DE LA CCVINU ET DE L’AIEA, LE CONSEIL EVALUE LE DEGRE D’EFFICACITE DES INSPECTIONS EN DESARMEMENT DE L’ONU ET DE COOPERATION DE L’IRAQ
Communiqué de presse CS/2449 |
Conseil de sécurité CS/2449
4707e séance – matin 14 février 2003
SAISI DU DEUXIEME RAPPORT DE LA CCVINU ET DE L’AIEA, LE CONSEIL EVALUE LE DEGRE D’EFFICACITE DES INSPECTIONS EN DESARMEMENT DE L’ONU ET DE COOPERATION DE L’IRAQ
La perspective d’un recours à la force contre l’Iraq pour défaut de coopération avec les inspecteurs en désarmement de l’ONU a, une nouvelle fois, divisé les membres du Conseil de sécurité qui examinaient, ce matin, les rapports du Directeur exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et de surveillance (CCVINU) et du Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Après leur première évaluation du 27 janvier et les accusations portées contre l’Iraq par le Secrétaire d’Etat américain, le 5 février dernier, Hans Blix et Mohamed El Baradei ont rendu compte aux Ministres des affaires étrangères des pays membres du Conseil et au Secrétaire général de l’ONU, du cours des inspections menées, depuis le 27 novembre, dans le cadre du désarmement chimique, biologique et nucléaire de l’Iraq prévu par la résolution 1441 du 8 novembre 2002.
A l’aune des progrès et des manquements rapportés par les Chefs des inspecteurs, les membres du Conseil ont défendu leur propre évaluation du degré d’efficacité des inspections et de coopération de l’Iraq. Dans son intervention, le Directeur exécutif de la CCVINU a confirmé l’acceptation par l’Iraq de son obligation de coopérer avec les inspecteurs. Mais, a-t-il rappelé au pays, la coopération implique plus que «l’ouverture des portes». Elle suppose la présentation des articles interdits et des programmes visant leur élimination ou des preuves convaincantes de leur élimination. Admettant ainsi que ses inspecteurs n’ont pu explorer «toutes les caves et les coins» de l’Iraq, Hans Blix a néanmoins indiqué que les 400 inspections surprises menées, sans heurts, sur plus de 300 sites, ont permis de conclure à l’absence d’armes de destruction massive ou de tout article et programme interdit par les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. La CCVINU, a-t-il souligné, a pu se faire une bonne idée du paysage industriel et scientifique de l’Iraq ainsi que de sa capacité en matière de missiles.
Concernant l’avenir et les questions en suspens dont celles des 1 000 tonnes d’agents chimiques non comptabilisés, de l’anthrax, du gaz moutarde ou des missiles, Hans Blix a déclaré que trois mois après l’adoption de la résolution 1441, la période d’inspection pourrait se faire sur des délais courts si l’Iraq montrait une «coopération immédiate, active et inconditionnelle avec la CCVINU et l’AIEA». La pleine coopération de l’Iraq ne peut qu’accélérer le processus d’inspection, a dit en écho le Directeur général de l’AIEA. A son tour, il a indiqué que les 177 inspections menées dans 125 endroits n’ont apporté aucune preuve d’activités nucléaires interdites en Iraq. Faisant lui aussi état de questions en suspens, Mohamed El Baradei a invoqué l’expérience de son Agence qui a prouvé la possibilité d’évaluer l’existence ou l’absence de programme nucléaire sans la pleine coopération d’un Etat.
«Nous venons d’entendre que les inspections donnent des résultats et ces progrès nous confortent dans la conviction que la voie des inspections peut être efficace», a estimé le Ministre des affaires de la France, Dominique de Villepin, en donnant son évaluation de l’efficacité des inspections et de la coopération de l’Iraq. Appuyé par la majorité des membres du Conseil dont l’Allemagne, la Chine et la Fédération de Russie, le Ministre, reconnaissant «l’ampleur du travail restant à accomplir», a plaidé pour la poursuite des inspections par le biais du régime renforcé qu’il a présenté le 5 février dernier. En revanche, le Secrétaire d’Etat américain, Colin Powell, soutient que «les inspecteurs ne sont pas libres de travailler». Avec l’appui notable du Royaume-Uni et de l’Espagne, le Secrétaire d’Etat américain a argué que la situation actuelle exige du Conseil qu’il commence à réfléchir aux conséquences de l’attitude de l’Iraq et à déterminer s’il doit subir les conséquences de ses actes. Donnant son interprétation de la résolution 1441, Colin Powell a dit que «la résolution parle du désarmement et non pas d’un processus d’inspection qui peut se poursuivre à l’infini».
Personne ne peut affirmer aujourd’hui que le chemin de la guerre sera plus court que celui des inspections, a répondu le Ministre des affaires étrangères de la France en faisant part de sa conviction que l’option des inspections n’a pas été conduite jusqu’à son terme. Dominique de Villepin a proposé un nouveau rendez-vous, le 14 mars au niveau ministériel, pour évaluer un rapport supplémentaire des inspecteurs. La France l’a toujours dit: nous n’excluons pas la possibilité qu’un jour il faille recourir à la force, si les rapports des inspecteurs concluaient à l’impossibilité pour les inspections de se poursuivre, a souligné le Ministre français.
Aujourd’hui, l’Iraq a accepté de se plier aux exigences de la résolution 1441, a souligné le Représentant permanent de ce pays auprès des Nations Unies, Mohammed Aldouri. L’Iraq a soumis une Déclaration de 12 000 pages, a ouvert ses sites, de manière sans précédent, et a accepté une surveillance par des satellites, par des avions opérant à haute altitude, et par des appareils volant à moyenne et basse altitude. Le représentant iraquien a également attiré l’attention du Conseil sur la loi adoptée portant interdiction de la production et de l’usage des armes de destruction massive adoptée ce matin par le Parlement iraquien.
Le représentant iraquien s’est donc dit surpris que certains pays aient déclaré ce texte nul et non avenu ainsi que les deux commissions de vérification de la destruction des programmes d’armement créées à la demande de la CCVINU et de l’AIEA. Partout à travers le monde, des voix s’élèvent pour demander aux Etats-Unis et au Royaume-Uni de garder raison. Malgré cela, ces deux pays continuent d’amasser des troupes et des arsenaux à nos frontières pour réaliser un objectif qui, en réalité, n’est que de nature coloniale. Nous en appelons au Conseil pour qu’il œuvre pour la paix et pour qu’il lève l’injuste embargo imposé depuis trop longtemps à notre pays, a encore dit le représentant iraquien.
LA SITUATION ENTRE L’IRAQ ET LE KOWEIT
Déclarations
M. HANS BLIX, Directeur exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et de surveillance (CCVINU), a indiqué que la Commission continue de renforcer ses capacités. Le bureau régional de Mossoul est désormais opérationnel et les plans pour le bureau régional de Bassorah sont en cours de mise en œuvre. Les avions Hercule L-100 continuent leurs vols de routine entre Bagdad et Larnaca et les huit hélicoptères sont pleinement opérationnels. Maintenant qu’est réglée la question de la présence des accompagnateurs iraquiens dans les zones d’exclusion aérienne, la mobilité de la CCVINU dans ces zones s’est nettement améliorée. Le nombre des accompagnateurs iraquiens durant les inspections a souvent atteint un rapport de cinq par inspecteur et pendant les pourparlers tenus en janvier à Bagdad, la partie iraquienne a convenu de diminuer le ratio à un accompagnateur par inspecteur.
M. Blix a poursuivi en indiquant que depuis l’arrivée de la CCVINU en Iraq, plus de 400 inspections ont été menées sur plus de 300 sites. Toutes les inspections ont été menées sans alerte et l’accès aux sites a presque toujours été offert rapidement. En aucun cas, les inspecteurs n’ont pu conclure que la partie iraquienne était informée des inspections. Grâce aux inspections accomplies jusqu’ici, la CCVINU a pu se faire une bonne idée du paysage industriel et scientifique de l’Iraq ainsi que de sa capacité en matière de missiles. Toutefois, la CCVINU n’a pas exploré «toutes les caves et tous les coins». Pour M. Blix, les inspections comblent, de façon efficace, le fossé créé par l’absence des inspections entre décembre 1998 et novembre 2002. Jusqu’ici, les résultats de l’analyse des quelque 300 échantillons chimiques et biologiques ont été conformes à la déclaration de l’Iraq. La CCVINU a maintenant commencé le processus de destruction de quelque 50 litres de gaz moutarde déclarés par l’Iraq.
Le personnel de la CCVINU dépasse maintenant le nombre de 250 personnes dont 100 inspecteurs, 15 inspecteurs de l’AIEA, 50 membres d’équipage et 65 personnels d’appui, venant de 60 pays différents. En principe, l’Iraq a décidé de coopérer au processus. L’accès aux sites, y compris les sites présidentiels et les résidences privées, s’est déroulé sans problèmes. Toutefois, la coopération implique plus que l’ouverture des portes. Aux termes de la résolution 1441, la coopération exige la présentation des articles interdits et des programmes pour les éliminer ou la présentation de preuves convaincantes de leur élimination. Selon les dernières informations, l’Iraq vient d’accepter l’offre de l’Afrique du Sud d’envoyer un groupe d’experts sur la coopération avec les inspecteurs de l’AIEA.
A ce jour, la CCVINU n’a trouvé aucune arme. Seul un nombre réduit de munitions chimiques a été trouvé et détruit. Toutefois, de nombreux armes et produits proscrits n’ont pas été comptabilisés. Ainsi, environ 1 000 tonnes d’agents chimiques ne l’ont pas été. S’ils existent, ils doivent être présentés pour destruction. S’ils n’existent pas, il faudra des preuves crédibles de leur destruction. Mentionnant les informations détenues par les divers gouvernements dont celui des Etats-Unis, M. Blix a souligné que les inspecteurs n’en disposent pas. En conséquence, ils ne fondent leur rapport que sur les preuves qu’ils peuvent eux-mêmes examiner et présenter publiquement.
Pour lui, la déclaration de l’Iraq, soumise le 7 décembre, n’a pas fourni des informations et des preuves nouvelles sur les questions en suspens relatives, entre autres, à l’anthrax ou aux missiles de longue portée. S’il a reconnu qu’il n’est certainement pas facile pour l’Iraq de fournir les preuves requises, M. Blix a souligné qu’il ne revient pas aux inspecteurs de les trouver. L’Iraq doit s’atteler à cette tâche et éviter d’éluder ces questions. Au cours de cette semaine, les experts en missiles de la CCVINU ont rencontré durant deux jours des experts d’un certain nombre de pays pour discuter du système de missiles de longue portée que l’Iraq semble avoir développé. Les experts ont conclu que, compte tenu des données fournies par l’Iraq, les deux variantes d’Al Samoud que l’Iraq avait déclarées étaient capables de dépasser une portée de 150 km. Le système de missiles est donc interdit par les résolutions pertinentes du Conseil. Concernant Al Fatah, les experts ont conclu que la clarification préalable des données fournies par l’Iraq était nécessaire avant toute évaluation de la capacité du système de missile.
S’agissant des chambres de coulée, l’Iraq a déclaré qu’il les avait reconstituées et les experts ont conclu que ces chambres de coulée reconstituées peuvent très bien être utilisées pour produire des moteurs pour missiles de portée supérieure à 150 km. Ces chambres de couléesont donc interdites. Les experts ont aussi conclu que les moteurs d’essai pour missiles étaient plus puissants que les moteurs SA-2. Jusqu’ici, il n’a pas été jugé qu’il s’agissait d’une activité interdite. Pour ce qui est des moteurs de missiles 380 SA-2, les inspecteurs de la CCVINU ont été informés par les fonctionnaires iraquiens que ces moteurs étaient destinés au système de missile Al Salmoud 2, qui a été déclaré interdit.
Poursuivant sa présentation, M. Hans Blix a indiqué, concernant les quantités d’anthrax et de VX qui seraient détenues par l’Iraq, que l’Iraq a déclaré que certaines techniques et méthodes analytiques pourraient permettre de vérifier que l’anthrax et les précurseurs de VX ont été unilatéralement détruits. Bien que les experts de la CCVINU continuent d’examiner cette proposition, ils ne pensent pas qu’il serait réaliste de croire que des quantités de matériels enterrées il y a plusieurs années pourraient être retrouvées aujourd’hui. Il sera nécessaire que le personnel iraquien qui s’en est chargé fournisse des preuves documentaires. Une lettre en date du 12 février, émanant du Directorat iraquien chargé de la surveillance au niveau national pourrait à cet égard se révéler utile. Elle présente une liste de 83 noms de personnes qui ont pris part à la « destruction unilatérale des matériaux concernés dans un champ chimique durant l’été 1991 ». La présentation de cette liste de personnes qui peuvent être interviewées est une démarche utile, et est un signe de coopération sur le plan de la substance. J’espère que l’Iraq fournira une liste semblable des personnes qui ont participé à la destruction unilatérale d’autres substances interdites, notamment dans le domaine biologique. L’Iraq nous a aussi annoncé que la commission constituée au lendemain de la trouvaille de 12 têtes chimiques vides a vu son mandat élargi pour lui permettre de chercher tous autres types de produits interdits. Nous nous en félicitons.
Une deuxième commission, nous a-t-on dit, a été mise sur pied pour rassembler tous les documents concernant le processus de destruction unilatérale par l’Iraq de ses programmes qui violaient les interdictions qui lui avaient été faites. Cette commission est dirigée par le Général Amer Rashid, ancien Ministre iraquien du pétrole. Ces deux commissions sont, à nos yeux, utiles, mais elles doivent travailler le plus vite possible et de manière efficace. Concernant les interviews de scientifiques iraquiens, nous en avons seulement eu à Bagdad. Un certain nombre de ces scientifiques ont décliné nos demandes d’interview si elles ne sont pas faites en présence d’un représentant du Gouvernement. Trois personnes qui avaient au départ refusé nos demandes ont cependant accepté d’être interrogées les 8 et 9 février dernier à Bagdad. Ces interviews se sont révélées riches en informations. Lors de notre récent séjour à Bagdad, M. El Baradei et moi-même avons exhorté l’Iraq à mettre en place une législation mettant en œuvre l’interdiction qui lui est faite par l’ONU d’avoir des armes de destruction massive. Dans une lettre reçue il y a deux jours, nous avons été informés que ce processus législatif était en cours et ce matin, on nous a annoncé que le texte de loi avait été adopté par le Parlement iraquien réuni en session extraordinaire.
Un régime d’inspection crédible suppose que l’Iraq coopère pleinement sur l’aspect des procédures et aussi de la substance en fournissant des déclarations soutenues par de solides évidences matérielles et des informations pertinentes. Dans une société aussi close que celle de l’Iraq, nous aimerions aussi avoir d’autres sources d’information, notamment des défecteurs et des agences d’information gouvernementales. Les organisations internationales doivent analyser ces informations et les recouper à travers d’autres sources. La CCVINU a établi de bonnes relations de travail avec les agences de renseignement, et le niveau et la quantité des informations qu’elles nous ont fournies ont augmentés. Mais nous devons reconnaître qu’il y a des limites en ce qui concerne l’interprétation de ces informations.
Les informations fournies par le Secrétaire d’Etat américain suggéraient que l’Iraq s’était préparé aux inspections en nettoyant les sites et en enlevant toutes preuves concernant les armements interdits. J’aimerais commenter sur l’un des cas qui a été cité, celui des camions, sur lequel les analystes ont dit que c’était des camions de décontamination circulant autour d’un dépôt de munitions. Le site dont il était question était un site déclaré et l’Iraq se serait certainement attendu à ce que nous l’inspections. Nous avons cependant noté que les images satellites montrant des mouvements de munitions présumés avaient été prises à plusieurs semaines d’intervalle. Ces mouvements pouvaient être des activités de routine ou pouvaient aussi être des déplacements de munitions d’un type interdit avant l’arrivée supposée d’une inspection. Notre réserve n’enlève cependant aucun mérite à la présentation qui nous a été faite.
La CCVINU a informé l’Iraq de son intention de commencer à utiliser l’avion de reconnaissance U2 au début de la semaine prochaine. Nous sommes aussi en train d’examiner les modalités qui nous permettraient de faire usage des avions Mirage français et des drones allemands à la fin de la semaine prochaine. L’offre que nous a faite la Russie de nous fournir des Antonov à capacité de vision nocturne est la bienvenue, et fait partie de nos projets de travail. Ces développements sont conformes aux suggestions faites par la France dans un document de travail qui propose un renforcement des inspections. Nous avons l’intention de surveiller les mouvements de terrestres de camions, face aux allégations faites par certaines agences de renseignement sur l’existence de laboratoires mobiles de production d’armes biologiques. La CCVINU est fréquemment interrogée sur le temps dont elle aurait besoin pour mener à bien ses inspections.
La réponse à cette question dépend de ce que l’on a à l’esprit: est-ce la destruction des armes massives ou est-ce la surveillance, aujourd’hui, de la mise en œuvre de tout programme militaire interdit? En 1991, l’Iraq ne coopérait pas, au niveau souhaité, avec les inspections. Malgré la destruction d’énormes quantités de munitions et d’armes par le processus d’inspections, la tâche est restée de ce fait inachevée jusqu’au moment où les inspecteurs sont partis en 1998. Si l’Iraq avait coopéré en 1991, la phase de son désarmement aurait été courte, comme stipulé dans la résolution 687 (1991). Aujourd’hui, trois mois après l’adoption de la résolution 1441 (2002), la période d’inspection pourrait se faire sur des délais courts si l’Iraq mettait en œuvre une «coopération immédiate, active et inconditionnelle avec la CCVINU et l’AIEA».
M. MOHAMED EL BARADEI, Directeur général de l’Agence de l’énergie atomique (AIEA), a expliqué que depuis la présentation de son dernier rapport au Conseil, il y a moins de trois semaines, les inspections de l’AIEA ont franchi une nouvelle étape passant de la phase de «reconnaissance» à la phase «d’enquête». Cette dernière doit permettre d’acquérir une compréhension des activités de l’Iraq au cours des quatre dernières années, en particulier dans les domaines de préoccupation identifiés par les Etats et ceux identifiés par l’Agence sur la base de sa propre analyse.
Depuis notre dernier rapport en date du 27 janvier, l’Agence a mené 38 inspections supplémentaires dans 19 endroits, ce qui porte le total des inspections à 177 dans 125 endroits. Nous avons identifié certaines installations où nous allons réinstaller des équipements de surveillance pour les activités à double usage. Nous avons également prélevé des échantillons sur de vastes zones, y compris des échantillons d’eau, de sédiments et de végétation ainsi que d’air. Nous avons l’intention d’accroître le nombre d’échantillons d’air dans le futur. Nous continuons également de promouvoir le recours à des détections de rayons gamma et nous avons l’intention de les mener par hélicoptère dans le futur dès que possible.
L’Agence a également continué d’interroger les scientifiques iraquiens et récemment nous avons été en mesure d’interroger quatre d’entre eux en privé sans la présence d’observateur iraquien. Les personnes interrogées ont cependant enregistré leur interview. De plus, nous avons poursuivi nos discussions avec des techniciens et fonctionnaires iraquiens et lors de nos dernières réunions avec Bagdad, l’Iraq a confirmé son engagement à encourager ses citoyens à accepter des interviews en privé, tant en Iraq qu’en dehors de l’Iraq. En réponse à notre demande, l’Iraq a élargi la liste du personnel iraquien qui compte plus de 300 personnes. Cette liste comporte les noms des scientifiques iraquiens du plus haut niveau connus par les membres de l’AIEA dans les domaines nucléaires.
L’Iraq nous a fourni des documents sur les questions suivantes: tentatives d’importer de l’uranium, tentatives d’achat de tubes d’aluminium, achat d’aimants et d’éléments pouvant servir à la production d’aimants, utilisation de HMX. Ainsi, l’Iraq continue de nous dire qu’il n’a pas tenté d’importer de l’uranium depuis les années 1980. L’AIEA a reçu des informations à cet égard qu’elle examinera avec l’aide, il faut l’espérer, des pays africains qui seraient impliqués. L’Iraq a déclaré avoir déployé des efforts pour acquérir des tubes d’aluminium de grande résistance dans le cadre de son programme visant à modifier ses missiles conventionnels. L’Agence a constaté que l’Iraq a en effet fabriqué dans le passé de tels missiles. Toutefois, nous enquêtons toujours pour savoir si
ces tubes devaient entrer dans la fabrication de centrifugeuses pour l’enrichissement de l’uranium. L’Iraq s’est engagé à fournir des échantillons de tubes d’aluminium reçus de pays fournisseurs potentiels et nous continuerons d’enquêter sur cette question. L’Iraq nous a également fourni des informations supplémentaires relatives à ses tentatives d’acquérir une fabrique d’aimants. Nous étudions ces documents à l’heure actuelle.
Dans le cadre de son enquête sur les tubes d’aluminium, les inspecteurs ont trouvé un certain nombre de documents relatifs à des transactions devant mener à l’achat de fibre de carbone, un matériel à usage double utilisé par l’Iraq dans le passé dans le cadre de son programme clandestin d’enrichissement de l’uranium entrant dans la fabrication de moteurs de centrifugeuses à. Après examen de ces documents, nous avons conclu que la fibre de carbone que l’Iraq cherchait à acquérir ne devait pas entrer dans un programme d’enrichissement de l’uranium. Nous avons été en mesure, dans le cadre de nos inspections, de constater l’utilisation de fibre de carbone pour des applications n’étant pas liées au domaine nucléaire. Nous continuerons à enquêter sur cette question.
Nous avons continué de mener des enquêtes au sujet de l’explosif HMX. L’Iraq a fourni des informations supplémentaires dans le but d’attester du transfert de 32 tonnes de cet explosif, qui était dans le passé sous contrôle de l’AIEA, à l’industrie, notamment l’industrie du ciment. Compte tenu de la nature de tels explosifs, il est possible que l’Agence ne soit pas en mesure de tirer de conclusions sur l’utilisation finale de cet explosif. Bien que rien ne nous indique que ce matériel a été utilisé pour des applications autres que celles déclarées par l’Iraq, nous ne disposons pas de moyens techniques permettant de vérifier quantitativement l’utilisation de ce matériel dans les explosions. Nous continuerons de suivre cette question en passant en revue les pratiques minières en Iraq.
L’Agence a achevé une évaluation plus précise d’un document de 2 000 pages trouvé le 16 janvier à la résidence privée d’un scientifique iraquien. Ce document porte principalement sur l’utilisation de technologies au laser pour enrichir l’uranium et fait référence, en fait, à des activités déjà connues de l’AIEA. Rien dans ce document ne vient modifier les conclusions tirées par l’Agence au sujet du programme d’enrichissement au laser.
L’Iraq nous a par ailleurs fourni des documents supplémentaires, notamment au sujet de la fabrication de centrifugeuses et d’armes. Ces documents ne fournissent pourtant pas d’informations supplémentaires. Nous espérons que la nouvelle commission iraquienne créée dans le but de trouver des documents supplémentaires relatifs à ses programmes d’armes de destruction massive sera en mesure de clarifier les questions en suspens. J’ai par ailleurs été informé ce matin par le Directeur général du Directorat national de surveillance que la législation nationale visant à interdire les activités prohibées a été adoptée aujourd’hui par le Parlement iraquien. Cette mesure est un pas en avant pour l’Iraq dans sa mise en œuvre de ses engagements conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.
Dans les semaines à venir, l’AIEA continuera de développer ses capacités d’inspection, notamment en poursuivant ses inspections «surprises». Nous avons également l’intention d’accroître le nombre d’inspecteurs et le personnel de soutien, le nombre de traducteurs et d’analystes, le nombre d’experts en achat et en questions douanières pour surveiller les activités d’importation de l’Iraq.
Nous allons également développer la portée des réunions techniques et des interviews privées avec le personnel iraquien. Nous avons aussi l’intention de développer notre capacité de surveillance simultanée des activités et matériel à double usage. En outre, nous entendons exploiter pleinement les possibilités offertes par l’utilisation des avions U2, les Mirages IV, les Antonov et les drones que les autorités iraquiennes ont autorisés.
Le Gouvernement iraquien a réitéré la semaine dernière sa détermination à respecter les obligations du Conseil de sécurité et de coopérer pleinement avec les inspecteurs. Comme je l’ai déjà dit, l’AIEA avait conclu en 1998 qu’elle avait neutralisé le programme d’armement nucléaire de l’Iraq. Nous nous sommes donc attachés depuis la reprise de nos inspections à vérifier si l’Iraq avait lancé à nouveau un tel programme. Aujourd’hui, nous n’avons trouvé aucune preuve d’activités nucléaires interdites en Iraq. Toutefois, un certain nombre de questions sont encore en suspens et nous ne sommes pas encore en mesure de tirer de conclusions finales sur ces questions. Dans ce contexte, nous avons l’intention de faire usage de la plus grande autorité possible que nous confère le Conseil de sécurité. Les informations que nous fournissent les Etats sont vitales. L’expérience de l’AIEA a montré qu’il était possible de d’évaluer l’existence ou l’absence de programme nucléaire dans un Etat même sans la pleine coopération de ce même Etat. Toutefois, la pleine coopération de l’Iraq ne fera qu’accélérer le processus d’inspection.
M. FAROUK AL-SHARA, Ministre des affaires étrangères de la République arabe syrienne, a relevé les progrès substantiels réalisés dans le travail des inspecteurs. Ces progrès, a-t-il dit, ont atteint un point culminant avec l’adoption par l’Iraq d’un décret visant à interdire les armes de destruction massive. Le représentant a attribué ces progrès à la bonne coopération entre l’Iraq et les inspecteurs. Pour lui, le Conseil doit appuyer les inspecteurs et leur donner suffisamment de temps pour mener à bien leur tâche conformément à la résolution 1441. La région du Moyen-Orient, a-t-il poursuivi, se trouve à un carrefour dangereux, entre la paix et la guerre. La région a beaucoup souffert du fléau de nombreuses guerres et continue d’être la cible d’une lutte raciste menée contre des Palestiniens innocents.
Les pays de la région ont répondu à tous les appels visant à mener à la paix avec Israël malgré son occupation continue des terres jordaniennes, syriennes et palestiniennes. Le même Israël continue de posséder des armes de destruction massive en refusant tout contrôle international contrairement aux pays arabes. De plus, Israël refuse de respecter la soixantaine de résolutions adoptées par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité. Même, quand les Etats-Unis votent pour une résolution, elle reste lettre morte. L’encre a séché, le papier a jauni et miraculeusement, Ariel Sharon est devenu «homme de paix».
Or, l’Iraq n’a-t-il pas reconnu la souveraineté du Koweït? L’Iraq n’a-t-il ouvert toutes ses portes sans réserves aux inspecteurs? L’Iraq n’a-t-il pas coopéré à un moment où Israël rejette toute forme d’inspection de ses installations nucléaires, a demandé le Ministre des affaires étrangères? Cette politique, a-t-il estimé, révèle de toute évidence un système de deux poids deux mesures à moins qu’elle ne soit délibérément conçue pour mettre l’Iraq, la Palestine et le monde arabe en général dans une situation telle que leur sort présent et futur sera compromis et que l’avenir du monde sera mis en danger. Il n’y a pas d’autre alternative qu’une solution pacifique pour l’Iraq, a dit le Ministre des affaires étrangères.
Les voisins de l’Iraq comprennent mieux que quiconque que c’est la première guerre dans la région du Moyen-Orient qui soit unanimement rejetée par les Arabes. La majorité du monde dit non à une guerre qui ne peut produire que des sérieuses conséquences pour l’Iraq et déborder sur la région tout entière. La guerre ne peut conduire qu’à l’anarchie totale. Ceux qui veulent semer la destruction devront faire face aux conséquences. Ils ne veulent pas désarmer l’Iraq. Ils ont un objectif caché qu’ils veulent réaliser dans la région tout entière et l’Iraq n’est que le prélude.
S’il s’agissait d’éliminer les armes, il suffirait, a dit le Ministre des affaires étrangères, d’appuyer le travail des inspecteurs et de leur donner suffisamment de temps pour s’acquitter de leur mandat. L’option de la guerre ne peut que saper la coalition internationale contre le terrorisme. Les premiers signes de cette érosion apparaissent déjà sur le théâtre afghan. La simple pensée de la guerre est en elle même la preuve de l’échec du Conseil à s’acquitter de ses responsabilités et le fait que les frontières internationales ne sont pas respectées, a souligné le Ministre des affaires étrangères. On peut donc se demander si la Charte de l’ONU est faite pour défendre la paix et la sécurité ou pour mettre des nations au bord du gouffre.
Pour le Ministre des affaires étrangères, les efforts déployés par des membres éminents du Conseil laissent espérer que l’ordre mondial est toujours en bon état. La Syrie, a-t-il dit, rend hommage à la France, à la Fédération de Russie, à la Chine et à l’Allemagne qui veulent uniquement promouvoir le rôle central de l’ONU. La Syrie a examiné et appuie la proposition française visant à renforcer les inspections. Le moment est historique. Envisager la guerre au XXIe siècle n’est pas un jeu mais une tragédie qui sera condamnée par l’histoire. La paix peut être réalisée si elle est recherchée de bonne foi, a conclu le Ministre des affaires étrangères.
M. DOMINIQUE DE VILLEPIN, Ministre des affaires étrangères de la France, a réaffirmé le prix que la France attache, depuis l’origine de la crise iraquienne, à l’unité du Conseil de sécurité. Cette unité repose aujourd’hui sur deux éléments essentiels: nous poursuivons ensemble l’objectif d’un désarmement effectif de l’Iraq. Nous avons en ce domaine une obligation de résultat. Ne mettons pas en doute notre engagement commun en ce sens. Nous assumons collectivement cette lourde responsabilité car aucun d’entre nous n’éprouve la moindre complaisance à l’égard de Saddam Hussein et du régime iraquien. En adoptant à l’unanimité la résolution 1441, nous avons collectivement marqué notre accord avec la démarche en deux temps proposée par la France: le choix du désarmement par la voie des inspections et, en cas d’échec de cette stratégie, l’examen par le Conseil de sécurité de toutes les options, y compris celle du recours à la force. C’est bien dans ce scénario d’échec des inspections, et dans ce cas seulement, que pourrait se justifier une seconde résolution. La question qui se pose aujourd’hui est simple: considérons-nous en conscience que le désarmement par les missions d’inspection est désormais une voie sans issue? Ou bien, estimons-nous que les possibilités en matière d’inspection offertes par la résolution 1441 n’ont pas encore été toutes explorées? La France a deux convictions: l’option des inspections n’a pas été conduite jusqu’à son terme et peut apporter une réponse efficace à l’impératif du désarmement de l’Iraq et un usage de la force serait si lourd de conséquences pour les hommes, pour la région et pour la stabilité internationale qu’il ne saurait être envisagé qu’en dernière extrémité.
A travers le rapport de MM. Blix et El Baradei, nous venons d’entendre que les inspections donnent des résultats. Lors de leurs précédentes interventions au Conseil de sécurité, le 27 janvier, le Président exécutif de la CCVINU et le Directeur général de l’AIEA avaient identifié précisément les domaines dans lesquels des progrès étaient attendus. Sur plusieurs de ces points, des avancées significatives ont été obtenues, dans les domaines chimique et biologique; dans le domaine balistique; et dans le domaine nucléaire. Nous sommes bien là au cœur de la logique de la résolution 1441, qui doit assurer l’efficacité des inspections grâce à une identification précise des programmes prohibés, puis à leur élimination. Nous sommes tous conscients que le succès des inspections suppose que nous aboutissions à une coopération pleine et entière de l’Iraq. La France n’a cessé de l’exiger. Des progrès réels commencent à apparaître car l’Iraq a accepté le survol de son territoire par des appareils de reconnaissance aérienne; permis que des scientifiques iraquiens soient interrogés sans témoins par les inspecteurs. Un projet de loi prohibant toutes les activités liées aux programmes d’armes de destruction massive est en cours d’adoption. L’Iraq doit fournir une liste détaillée des experts ayant assisté en 1991 aux destructions des programmes militaires. Ces progrès nous confortent dans la conviction que la voie des inspections peut être efficace. Mais nous ne devons pas nous dissimuler l’ampleur du travail restant à accomplir: des questions doivent encore être élucidées, des vérifications doivent être conduites, des installations ou des matériels doivent sans doute encore être détruits.
Pour ce faire, j’ai fait des propositions le 5 février devant le Conseil, qui sont destinées à renforcer l’efficacité des opérations d’inspection, s’inscrivent dans le cadre de la résolution 1441 et ne nécessitent par conséquent aucune nouvelle résolution du Conseil. Elles doivent venir à l’appui des efforts menés par MM. Blix et El Baradei qui sont naturellement les mieux à même de nous dire celles d’entre elles qu’ils souhaitent retenir pour assurer la meilleure efficacité de leurs travaux.
Il y a deux options, celle de la guerre qui peut apparaître à priori la plus rapide. Mais n’oublions pas qu’après avoir gagné la guerre, il faut construire la paix. Et ne nous voilons pas la face: cela sera long et difficile, car il faudra préserver l’unité de l’Iraq, rétablir de manière durable la stabilité dans un pays et une région durement affectés par l’intrusion de la force. Face à de telles perspectives, il y a l’alternative offerte par les inspections, qui permet d’avancer de jour en jour dans la voie d’un désarmement efficace et pacifique de l’Iraq. Au bout du compte, ce choix là n’est-il pas le plus sûr et le plus rapide, a demandé M. de Villepin?
Personne ne peut donc affirmer aujourd’hui que le chemin de la guerre sera plus court que celui des inspections. Personne ne peut affirmer non plus qu’il pourrait déboucher sur un monde plus sûr, plus juste et plus stable. Car la guerre est toujours la sanction d’un échec. Serait-ce notre seul recours face aux nombreux défis actuels? Donnons par conséquent aux inspecteurs des Nations Unies le temps nécessaire à la réussite de leur mission. Mais soyons ensemble vigilants et demandons à MM. Blix et El Baradei de faire régulièrement rapport au Conseil.
La France, pour sa part, propose un nouveau rendez-vous le 14 mars au niveau ministériel, pour évaluer la situation. Nous pourrons alors juger des progrès effectués et de ceux restant à accomplir. Dans ce contexte, l’usage de la force ne se justifie pas aujourd’hui. Il y a une alternative à la guerre: désarmer l’Iraq par les inspections. De plus, un recours prématuré à l’option militaire serait lourd de conséquences. L’autorité de notre action repose aujourd’hui sur l’unité de la communauté internationale. Une intervention militaire prématurée remettrait en cause cette unité, ce qui lui enlèverait sa légitimité et, dans la durée, son efficacité. Nous partageons tous une même priorité, celle de combattre sans merci le terrorisme. Ce combat exige une détermination totale. C’est, depuis la tragédie du 11 septembre, l’une de nos responsabilités premières devant nos peuples. Et la France, qui a été durement touchée à plusieurs reprises par ce terrible fléau, est entièrement mobilisée dans cette lutte qui nous concerne tous et que nous devons mener ensemble. C’est le sens de la réunion du Conseil de sécurité qui s’est tenue le 20 janvier à l’initiative de la France.
Evoquant les liens supposés entre Al Qaida et le régime de Bagdad présentés par M. Powell, le Ministre français des affaires étrangères a indiqué qu’en l’état actuel de nos recherches et informations menées en liaison avec nos alliés, rien ne nous permet d’établir de tels liens. En revanche, nous devons prendre la mesure de l’impact qu’aurait sur ce plan une action militaire contestée actuellement. La France l’a toujours dit: nous n’excluons pas la possibilité qu’un jour il faille recourir à la force, si les rapports des inspecteurs concluaient à l’impossibilité pour les inspections de se poursuivre. Le Conseil devrait alors se prononcer et ses membres auraient à prendre toutes leurs responsabilités. En tout état de cause, dans une telle éventualité, c’est bien l’unité de la communauté internationale qui serait la garantie de son efficacité. De même, ce sont bien les Nations Unies qui resteront demain, quoi qu’il arrive, au cœur de la paix à construire. A ceux qui se demandent avec angoisse quand et comment nous allons céder à la guerre, je voudrais dire que rien, à aucun moment, au sein de ce Conseil de sécurité, ne sera le fait de la précipitation, de l’incompréhension, de la suspicion ou de la peur.
Dans ce temple des Nations Unies, nous sommes les gardiens d’un idéal, nous sommes les gardiens d’une conscience. La lourde responsabilité et l’immense honneur qui sont les nôtres doivent nous conduire à donner la priorité au désarmement dans la paix. Et c’est un vieux pays, la France, d’un vieux continent comme le mien, l’Europe, qui vous le dit aujourd’hui, qui a connu les guerres, l’occupation, la barbarie. Un vieux pays qui n’oublie pas et qui sait tout ce qu’il doit aux combattants de la liberté venus d’Amérique et d’ailleurs. Et qui pourtant n’a cessé de se tenir debout face à l’histoire et devant les hommes. Fidèle à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale. Il croit en notre capacité à construire ensemble un monde meilleur.
Mme SOLEDAD ALVEAR VALENZUELA, Ministre des affaires étrangères du Chili, a déclaré que les rapports présentés aujourd’hui traduisent l’intégrité des inspections menées par la CCVINU en Iraq. Le Chili croit au multilatéralisme et croit en la paix. Le Chili participera de façon responsable aux débats qui auront lieu au sein du Conseil sur la question du désarmement de l’Iraq. Nous regrettons l’ambivalence persistance du Gouvernement iraquien, et nous regrettons la mauvaise volonté dont il fait preuve face aux inspections, et qui peut amener à croire qu’il détient des armes de destruction massive. Le Chili estime que les résolutions du Conseil doivent être intégralement appliquées, et nous reconnaissons que le maintien de la pression exercée sur le régime de Saddam Hussein a été utile et doit être poursuivi sans faiblesse.
L’Iraq doit respecter la résolution 1441 et c’est en fonction de son obéissance à ce texte et au respect de ses obligations que la communauté internationale déterminera la marche à suivre. Les inspections doivent devenir plus pressantes et plus intrusives. Nous attendons que les inspecteurs nous disent ce qu’ils pensent des propositions avancées par la France. Le Conseil de sécurité doit continuer à jouer un rôle clef dans la crise à laquelle nous faisons face, et nous regrettons la fracture qui a été mise à jour sur la question de l’Iraq. Nous pensons que cette fracture est due à un manque de compréhension. Le Conseil doit agir de manière réfléchie, unie et délibérée, comme l’a dit le Secrétaire général, dont nous partageons le point de vue. L’unité du Conseil est la base de la légitimité internationale, et nous nous associons à l’invitation que le Secrétaire général nous a lancée en vue de trouver un consensus permettant une solution globale qui réhabilitera le peuple iraquien dans ses droits. Nous devons épuiser tous les moyens permettant de parvenir à un règlement pacifique du conflit.
M. TANG JIAXUAN, Ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine, a affirmé que l’Iraq doit se conformer pleinement aux résolutions du Conseil de sécurité. Nous demandons instamment à la partie iraquienne de reconnaître pleinement l’importance et le caractère pressant des inspections et de fournir plus de coopération. La dernière visite à Bagdad des inspecteurs en chef a été positive, la partie iraquienne ayant pris des engagements supplémentaires. Nous demandons à l’Iraq de traduire ses engagements dans les faits le plus vite possible.
Il est de notre devoir de garantir la mise en œuvre de la résolution 1441 du Conseil de sécurité. Les inspections ont grandement progressé et ont permis de faire la lumière sur un certain nombre de questions. Toutefois, de nouvelles préoccupations ont vu le jour. Il est du devoir de la CCVINU et de l’AIEA de poursuivre leur travail d’inspection. La Chine estime que le processus d’inspection fonctionne bien et que les inspecteurs doivent bénéficier de davantage de temps pour mener à bien leur travail.
Le Conseil doit renforcer son soutien au processus d’inspection. La question iraquienne a des conséquences sur la paix et la stabilité dans la région du Golfe ainsi que sur la crédibilité du Conseil de sécurité. La priorité actuelle est de renforcer le rôle directeur du Conseil et son rôle de soutien aux inspections. Il nous faut également faciliter un règlement politique productif de cette question. La Chine est disposée à fournir dans le futur une aide technique à l’AIEA et à la CCVINU pour un règlement politique de la question.
Mme ANA PALACIO, Ministre des affaires étrangères de l’Espagne, a relevé l’absence dans la bouche des Chefs des inspections de toute mention d’une «coopération pleine et entière» de la part de l’Iraq. Bien au contraire, a-t-elle dit, l’Espagne a pris note de la liste des manquements et des questions en suspens. Elle se demande donc si la coopération dont fait preuve l’Iraq est réelle ou superficielle. Cette coopération, s’est interrogée la Ministre des affaires étrangères, est-elle le produit des inspections ou celui des pressions internationales qui incluent une menace crédible du recours à la force? La Ministre a ensuite commenté les propositions visant à modifier le système des inspections. Elle a estimé que les moyens dont disposent les inspecteurs peuvent changer mais qu’il serait dangereux de changer le mandat de la CCVINU.
Pour elle, cela pourrait être interprété comme une faiblesse du Conseil de sécurité. Remerciant les Chefs des inspections pour leur travail, elle a rappelé que son pays travaille pour la paix et la sécurité. L’Espagne estime que le règlement de la crise doit rester au sein des Nations Unies et au Conseil de sécurité tout en étant conscient que la paix et la sécurité passent par le respect des résolutions du Conseil. Si le changement d’attitude politique n’intervient pas de la part de l’Iraq, le Conseil sera obligé d’assumer ses responsabilités au nom de la paix et de la sécurité, a dit la Ministre des affaires étrangères.
M. JACK STRAW, Ministre des affaires étrangères et des affaires du Commonwealth du Royaume-Uni, a déclaré que l’Iraq ne respectait pas encore les termes de la résolution 1441, adoptée à l’unanimité il y a trois mois. Nous savions alors que l’Iraq a des armes de destruction massive, a déclaré M. Straw, et les inspections visaient simplement à assurer la destruction de ces armes que l’Iraq a utilisées dans le passé contre ses voisins et sa propre population. Nous devons nous rappeler que le 3 avril 1991, le Conseil avait donné 90 jours à l’Iraq pour se désarmer. Plus d’une décennie plus tard, nous constatons que les gouvernants de ce pays ont menti, a estimé M. Straw en accusant le Gouvernement iraquien d’avoir voulu dissimuler des stocks d’armes chimiques et biologiques qui n’ont été découverts que grâce à des défecteurs. Nous estimons donc qu’il n’y a pas eu de coopération de l’Iraq à la fois sur la substance et sur les procédures. L’Iraq ne respectant pas les obligations qui lui sont imposées par la résolution 1441, nous pensons donc qu’il est en violation flagrante de ses termes. D’autre part, pourquoi l’Iraq aurait-il remis en service certaines installations, notamment des chambres de coulée, s’il ne comptait pas reprendre ses programmes d’armement interdits. Concernant le nucléaire, l’AIEA a-t-elle pu fermer un seul de ses dossiers concernant l’Iraq à travers une véritable collaboration avec le gouvernement de ce pays?
M. Blix a regretté que la coopération du Gouvernement iraquien soit en dessous de ce qu’il attendait. Nous voulons savoir si cela veut dire que l’Iraq refuse de réellement coopérer. Nous disions que Saddam Hussein avait droit à une dernière chance. Nous ne pensons pas qu’il ait saisi celle qui lui avait été donnée par le Conseil. Nous devons donc dire clairement que les graves conséquences dont il est question dans la résolution 1441 seront mises en œuvre en temps opportun. Ces 12 dernières années ont été une période d’humiliation continuelle du Conseil par l’Iraq. Cela doit prendre fin, et nous sommes fiers d’avoir été, avec les Etats-Unis, les auteurs de la résolution 1441 qui a permis le retour des inspecteurs en Iraq. La recherche d’une solution pacifique à la crise doit nous amener à appuyer un processus diplomatique par la menace de l’usage de la force. Nous ne pouvons reculer, car ce serait encourager non seulement l’Iraq, mais aussi tous ceux qui à travers le monde mettent en danger le régime de non-prolifération.
M.COLIN POWELL, Secrétaire d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, a déclaré que son pays n’a pas peur d’assumer ses responsabilités sur la scène internationale à un moment où les organisations internationales sont mises au défi de remplir leur mandat. Les pays ennemis de la paix savent que nous resterons fermes pour préserver la paix. Le Secrétaire d’Etat a rendu hommage aux Chefs des inspections Hans Blix et Mohamed El Baradei tout en se félicitant des améliorations constatées dans le processus d’inspection. Malheureusement, les inspecteurs ne sont pas libres de travailler. Ils sont suivis en permanence et sont mis sur écoute.
Les scientifiques sollicités ne sont pas tous présentés pour les interviews. Je suis également heureux de l’adoption par le Parlement iraquien d’un projet de loi interdisant les armes de destruction massive mais pense-t-on vraiment qu’un décret de Saddam Hussein changera fondamentalement la situation? Pensez-vous vraiment que les deux nouvelles commissions iraquiennes chargées de rechercher des documents supplémentaires vont réellement accomplir cette tâche?
Ces nouveaux développements portent sur le processus d’inspection en lui-même et non pas sur des questions de fond, a insisté Colin Powell. Nous n’avons pas besoin d’inspecteurs supplémentaires mais d’une coopération active, complète, immédiate et inconditionnelle. Il faut que l’Iraq désarme. La résolution 1441 n’a pas pour objet le processus d’inspection mais le désarmement de l’Iraq. Personne dans cette salle ne peut affirmer que les 20 000 pages reçues de l’Iraq constituaient une déclaration complète du programme d’armement iraquien qui comble les lacunes précédentes. La présentation de cette déclaration était considérée comme un test du sérieux de l’Iraq mais cette déclaration a échoué. L’Iraq n’a pas autorisé le retour des inspecteurs par respect pour la Charte des Nations Unies mais en raison de l’unité du Conseil. A ce jour, nous n’avons pas assisté au niveau de coopération espéré. Pourtant, personne n’a travaillé plus durement que les Etats-Unis à l’élaboration d’une résolution qui montre la détermination de la communauté internationale.
Il ne faut pas plus d’inspections mais un accès immédiat et actif à tous les sites. Si nous avions bénéficié du degré de coopération attendu au moment de l’adoption de la résolution 1441, rien de tout cela n’aura lieu. L’Iraq n’a toujours pas expliqué où sont passés les échantillons de bacille du charbon et de tonnes de gaz moutarde, ce qui prouve que l’Iraq n’a pas fourni de déclaration complète et exacte. Il faut continuer d’exiger une coopération entière de l’Iraq et s’assurer que la menace de la force est prise au sérieux. L’inspection est un moyen de forcer l’Iraq à se plier à ses obligations mais ce n’est pas l’objectif de la résolution 1441 qui exige une coopération immédiate. Il est clair que la situation exige du Conseil qu’il commence à réfléchir aux conséquences de l’attitude de l’Iraq. Dans un avenir très proche, il nous faudra déterminer si l’Iraq doit subir les conséquences de ses actes. Nous devons assumer nos responsabilités. La résolution 1441 parle du désarmement et non pas du processus d’inspection qui peut se poursuivre à l’infini sans régler le problème de base, a rappelé le Secrétaire d’Etat américain.
M. IGOR S. IVANOV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a estimé que la réunion d’aujourd’hui est unique dans l’hsi stoire des Nations Unies en ce sens qu’il s’agit de la deuxième réunion au niveau min istériel visant à trouver une solution à la situation en Iraq. Cela témoigne, a-t-il dit, de la confiance qu’a la communauté internationale dans les Nations Unies pour régler les questions de la paix et de sécurité internationales. Chaque fois que le Conseil se réunit, la communauté internationale y attache son espoir d’unité et de solidarité des Etats face à des défis communs. Il ressort des rapports des inspecteurs, a estimé le Ministre, qu’un potentiel d’inspections et de contrôle est en place en Iraq. Il a voulu que les décisions s’appuient non pas sur des émotions vis-à-vis d’un régime mais sur des faits concrets.
Pour lui, le Conseil a appuyé le retour des inspecteurs en Iraq et doit continuer de les aider dans cette voie. Seules des informations professionnelles peuvent fonder ses décisions. Aujourd’hui, a constaté le Ministre, les inspections de l’ONU se font sans heurt et avec la coopération de la partie iraquienne. Des progrès importants ont été réalisés et cela est indéniable. Plus rien, a-t-il insisté, ne fait obstacle à ce que commencent les opérations aériennes sur le territoire iraquien. La situation s’est éclaircie en ce qui concerne les interviews avec les scientifiques iraquiens et deux commissions chargées de coopérer avec les inspecteurs ont été créées. Après avoir souligné ces progrès, le Ministre russe des affaires étrangères a invité Bagdad à accroître, pour son propre intérêt, sa coopération.
La CCVINU et l’AIEA disposent de toutes les conditions pour s’acquitter de leur mandat, a-t-il dit en soulignant que personne ne songe à modifier la résolution 1441. Il a ajouté, dans ce cadre, que l’écrasante majorité des Etats du monde est favorable à ce que le Conseil continue d’offrir aux inspecteurs toute l’aide extérieure. Les inspections doivent devenir plus sy stématiques, a-t-il estimé en rappelant aux inspecteurs leur obligation de respecter le calendrier de la résolution 1441. En adoptant un tel programme, le Conseil aura les critères objectifs pour accroître le niveau de coopération de Bagdad mais aussi pour répondre à la question de la menace que l’Iraq ferait peser sur la paix et la sécurité internationales.
Soulevant une question de principe, le Ministre a argué que les inspections doivent continuer et que toutes les conditions sont réunies pour cela. Cette position est partagée par l’écrasante majorité des pays de ce monde, a-t-il insisté en ajoutant que le recours à la force ne peut se faire qu’après épuisement de toutes les autres voies. Nous en sommes pas encore là et la discussion d’aujourd’hui en est la preuve. Nous sommes conscients de notre responsabilité extraordinaire et nous devons consacrer notre énergie non pas à rivaliser les uns avec les autres mais à rassembler nos efforts, a conclu le Ministre.
M. LUIS ERNESTO DERBEZ, Ministre des affaires étrangères du Mexique, a déclaré que d’après les rapports présentés par MM. Blix et El Baradei, les conditions de travail des inspecteurs se sont notablement améliorées en Iraq, grâce à une meilleure coopération du Gouvernement de ce pays. Celui-ci doit cependant encore faire des efforts, et dire à la communauté internationale dans quelles conditions il a procédé à la destruction unilatérale de certaines de ses armes prohibées. Il doit fournir des preuves tangibles et vérifiables. Le Conseil est à la fois uni dans l’objectif du désarmement et divisé sur la manière d’y parvenir. Or l’unité du Conseil est nécessaire à sa crédibilité. Le Mexique réaffirme sa confiance dans les inspections, qui sont le mécanisme agréé par la communauté internationale pour mettre un terme à la question qui se pose en Iraq. Cependant, la polarisation dont nous avons été témoins ces derniers jours sur la scène politique internationale nous met mal à l’aise. Nous devons retrouver notre unité, et redonner une impulsion aux valeurs de la paix, et le Mexique apporte tout son soutien au mécanisme multilatéral que seule l’ONU permet de faire exister et de mettre en œuvre dans ce domaine.
M. MAMADY TRAORE (Guinée) a déclaré que son pays, la Guinée, est préoccupé par la brusque montée de la tension au sein de la communauté internationale autour de cette crise iraquienne. Pourtant, tout le monde est d’accord sur l’essentiel, à savoir le désarmement de l’Iraq. Comment y parvenir? C’est la grande question, car les avis divergent sur la voie à suivre. C’est pourquoi, mon pays lance un appel à l’instauration rapide entre les différentes tendances d’un dialogue direct et constructif devant nous permettre de surmonter ce climat tendu, qui autrement, risquerait de porter un coup dur au système des Nations Unies, a-t-il dit.
Tout en prenant bonne note des réflexions qui viennent d’être faites, ma délégation tient à mettre l’accent sur l’obligation pour l’Iraq de coopérer activement, en se conformant strictement aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la 1441. Il doit cesser ses manœuvres dilatoires. Le règlement pacifique de la crise en dépend. Tout en exhortant MM. Blix et El Baradei à poursuivre leurs efforts en vue d’explorer toutes les possibilités que leur offre le processus d’inspections, la Guinée réitère la nécessité pour le Conseil de continuer à travailler dans l’unité, seul gage d’atteindre le but recherché.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a estimé que la situation était arrivée à un point crucial. Les rapports de M. Blix et de M. El Baradei font état d’une évolution importance des inspections. Le Gouvernement iraquien a répondu de manière positive à diverses demandes, celles que les filatures des inspecteurs cessent, que les scientifiques soient interrogés sans témoins et a adopté un décret présidentiel interdisant les armes de destruction massive. Un certain nombre de questions restent à régler. M. Blix continue de souhaiter une coopération plus importante tandis que M. El Baradei est convaincu qu’il est possible de désarmer l’Iraq. L’appel lancé à travers la résolution 1441 était crédible en raison de l’unité et de la détermination du Conseil à détruire les armes de destruction massive en Iraq. Le Conseil doit conserver cette volonté d’agir. Il doit rester uni autour de trois axes: une préférence pour l’élimination des armes de destruction massive par des moyens pacifiques; une coopération immédiate, inconditionnelle et active; l’apport de la preuve crédible de la destruction de ces armes. Nous sommes ouverts aux propositions visant à renforcer les mécanismes d’inspection et à accorder davantage de temps aux inspecteurs. Nous souhaitons que tous les moyens pacifiques soient épuisés avant que le Conseil ne mette en œuvre des mécanismes d’application. Le Pakistan attache la plus grande importance à la préservation de l’intégrité de l’Iraq ainsi qu’au bien-être de la population iraquienne. Notre objectif doit être de mettre un terme à leurs souffrances.
M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun) a fait remarquer que si nous comparons les présentations de MM. Blix et El Baradei du 27 janvier à celles d’aujourd’hui, nous constatons des évolutions significatives qui découlent pour l’essentiel du choix sage et raisonnable des autorités iraquiennes de commencer à coopérer enfin pleinement avec les équipes d’inspection de l’ONU. Malgré ces résultats dont nous nous félicitons, demeurent des questions non réglées consignées dans les rapports de l’UNSCOM et dans le rapport Amorin, et qui se rapportent tout particulièrement aux secteurs chimiques et biologiques et aux vecteurs, notamment les missiles. S’agissant précisément des missiles, la délégation camerounaise retient des rapports d’aujourd’hui qu’il est définitivement établi que la portée des missiles Al Samoud 2 fabriqués par l’Iraq va bien au-delà des 150 kilomètres autorisés par les résolutions pertinentes du Conseil, spécialement la résolution 687 (1991). Face à cet état de causes, il appartient maintenant au Conseil de décider de la suite à donner à ce manquement jusqu’ici régulièrement évoqué sans être établi de manière aussi nette.
A ce stade de la mise en œuvre de la résolution 1441 (2002), M. Belinga-Eboutou a souligné la nécessité pour le Conseil de continuer de veiller, comme dans un passé récent, à son unité et à sa cohésion. Les progrès enregistrés par la dernière mission Blix-El Baradei consacrent une inflexion sensible de l’attitude iraquienne. Le Cameroun reconnaît et salue cette évolution positive. Mais, il est bon de rappeler, ce résultat, tout comme le retour des inspecteurs en Iraq, nous devons à la sommation du Président Bush, à la pression collective tous azimuts du Conseil de sécurité et à la projection de la détermination résolue d’un Conseil fort et uni.
La démarche de mon pays a rappelé M. Belinga-Eboutou qui est en faveur de la résolution pacifique de la question du désarmement de l’Iraq en armes de destruction massive, se veut pragmatique et réaliste. Le Cameroun estime en effet qu’à ce stade, tout règlement pacifique de ce dossier dépend avant tout de la détermination de l’Iraq à coopérer pleinement et activement avec les inspecteurs. Le Cameroun partage ce point de vue et exhorte vivement l’Iraq à poursuivre dans la voie où il s’est engagé depuis le 9 février. Au stade actuel, le Cameroun étudie soigneusement le contenu de la proposition de la France, en attendant des destinateurs que sont la CCVINU et l’AIEA, leur opinion objective. Le représentant a souligné à ce sujet, que lors de nos consultations antérieures, le Cameroun avait eu à évoquer l’éventualité d’inspections plus robustes, sous réserve d’un certain nombre de précisions.
Pour que le mécanisme prévu dans la résolution 1441 fonctionne, il est un élément essentiel, un élément clef. Cet élément, c’est une coopération immédiate, active et complète des autorités iraquiennes avec les inspecteurs. Il est clair qu’un nouveau manquement de l’Iraq aux exigences du Conseil de sécurité serait un manquement de trop; et les autorités iraquiennes ne laisseraient alors au Conseil, à bout de patience, d’autres choix que celui de prendre les mesures appropriées pour faire respecter ses décisions conformément aux dispositions de la Charte.
M. ISMAEL ABRAAO GASPAR MARTINS (Angola) a rappelé que le Gouvernement de l’Iraq a fait l’objet de plusieurs résolutions du Conseil visant à endiguer la menace à la paix et à la sécurité internationales. C’est la troisième fois cette année que le Conseil siège pour examiner cette question. En tant que ressortissant d’un pays qui a connu trois décennies de guerre, le représentant s’est réjoui de l’espoir que font naître les rapports des inspecteurs. L’effort politique, conjugué aux pressions diplomatiques, a permis d’accroître la coopération de l’Iraq et à respecter la responsabilité du Conseil de sauver le monde de la guerre, a dit le représentant. En outre, a-t-il ajouté, le Conseil a su faire triompher le multilatéralisme. Il a donc réitéré sa confiance à l’égard des inspecteurs et remercié les Etats membres pour leurs contributions matérielles et diplomatiques à ce processus. Les progrès réalisés aujourd’hui montrent ce que la voie diplomatique peut accomplir, a-t-il dit.
L’Afrique, a rappelé le représentant, a une position très claire sur la question du désarmement de l’Iraq par des voies pacifiques. L’exemple de l’Afrique, en ce qui concerne la création d’une zone exempte d’armes nucléaires, peut d’ailleurs inspirer les pays du Moyen-Orient. Aujourd’hui, a poursuivi le représentant, on ne peut pas dire que l’Iraq ne détient pas de telles armes mais il est tout aussi impossible d’affirmer le contraire. Ce qui est sûr, c’est que la communauté internationale a adressé un message clair au Gouvernement iraquien avec la résolution 1441. Le résultat positif est qu’aujourd’hui la coopération de l’Iraq est une donnée réelle.
L’Iraq peut agir conformément aux vœux de la communauté internationale s’il existe une pression décidée de cette communauté agissant dans les limites de son mandat. Ce résultat est toujours à portée de main quand le Conseil parle d’une seule voix. Pour le représentant, le recours à la force priverait le monde d’informations précieuses qui pourraient être obtenues par les inspections. Il a plaidé pour que le temps nécessaire soit imparti aux inspecteurs afin de décider en connaissance de cause de la marche à suivre. L’Angola a bon espoir que le Conseil représente une coalition unie de ceux qui veulent la paix et la sécurité internationales. Aux yeux de l’opinion publique, le sens des responsabilités du Conseil dépend de sa capacité à soupeser les conséquences des mesures à prendre. Toute décision doit être à la mesure de la gravité du problème. Toute décision, populaire ou non, doit refléter le consensus du Conseil, a conclu le représentant.
M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a déclaré que l’unité et la détermination du Conseil face à la question du désarmement de l’Iraq doivent être maintenues. La Bulgarie soutient par conséquent la CCVINU et l’AIEA, et elle insiste que ces organes doivent remplir les mandats qui leur ont été donnés. L’Iraq a accepté sans conditions les termes de la résolution 1441 et doit donc s’y soumettre en vue de permettre une sortie pacifique de la crise. La mise en œuvre par l’Iraq des exigences qui lui sont imposées et sa coopération avec les inspecteurs restent très insuffisantes, et nous estimons que les autorités de Bagdad sont en pleine violation de la résolution 1441. Il ne revient pas aux inspecteurs de chercher sur le terrain les armes qui ont été interdites à l’Iraq. C’est au Gouvernement de Saddam Hussein de prouver qu’il ne détient plus aucune de ces armes interdites.
La Bulgarie étudie avec attention les propositions françaises concernant un renforcement du régime des inspections en Iraq. Nous considérons ces propositions comme un élément qui devrait entrer dans une stratégie d’ensemble du Conseil visant à assurer le désarmement total de l’Iraq. Notre pays est en faveur d’un désarmement pacifique de l’Iraq qui doit se faire par tous les moyens possibles et pertinents, y compris par l’application de pressions tous azimuts de natures politique et militaire. Cette démarche ne peut cependant connaître de succès que si l’Iraq est prêt à pleinement coopérer. Le Conseil doit faire comprendre au Gouvernement de Bagdad que si une issue indésirable et pénible à la crise s’imposait, la responsabilité lui en incomberait entièrement. Notre pays lance un appel solennel au Conseil de sécurité pour qu’il préserve son unité, qui est garante de sa légitimité.
M. JOSHKA FISHER, Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a pris note des progrès substantiels réalisés dans le travail des inspecteurs mais aussi des manquements signalés par eux. Ces manquements doivent être éliminés et Bagdad doit coopérer avec les inspecteurs et respecter sans conditions les termes des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Les inspecteurs, a dit le Ministre, doivent disposer du temps nécessaire pour s’acquitter de leur mission. Ce qui est essentiel, ce sont la coopération de l’Iraq, l’efficacité du régime des inspections et le renforcement des mécanismes de vérification et de contrôle. Sur l’efficacité du régime des inspections, le Ministre a appuyé les propositions faites par la France le 5 février. Il aussi prôné la mise en place d’un régime permanent de vérification et de contrôle. Un nouveau système renforcé d’inspection et de vérification peut servir à l’ONU pour d’autres crises, a-t-il dit. Toutes les options possibles pour résoudre par des moyens pacifiques la crise iraquienne doivent être explorée à fond. Toutes les décisions doivent être prises par le Conseil qui reste le seul organe habilité à le faire.
Pour l’Allemagne, a expliqué le Ministre, le recours à la force remettrait en question la stabilité d’une région tendue et agitée. Il a rejeté toute optique d’automacité du recours à la force militaire. Toutes les alternatives doivent être explorées à fond, a-t-il insisté en attirant l’attention du Conseil sur la Déclaration, publiée mardi dernier, par certains pays de l’Union européenne dont le sien.
M. MOHAMMED ALDOURI (Iraq) a déclaré que l’Iraq a accepté de se plier aux exigences de la résolution 1441 parce que c’était le moyen de résoudre le soi-disant «problème de désarmement de l’Iraq». Notre pays a soumis au Conseil une déclaration, répondant ainsi à la demande faite aux termes du paragraphe 3 de la résolution. Cette déclaration consistait en plusieurs documents contenant des informations qui auraient dû répondre à de nombreuses questions. Nous demandons que cette déclaration soit honnêtement réexaminée. L’Iraq a aussi ouvert ses portes, de manière sans précédent, aux inspections. Notre pays a sincèrement décidé de prouver qu’il ne détient pas d’armes de destruction massive. Malgré les 632 inspections conduites à ce jour, aucun élément de preuve n’a été trouvé par les inspecteurs, contrairement à ce que prétendent les délégations américaine et britannique. Notre pays a d’autre part soumis ces derniers jours aux chefs des inspections, une liste de scientifiques susceptibles d’être interviewés et d’autres listes sont en préparation. Les vols de U2 et d’autres appareils de surveillance aérienne ont été acceptés par l’Iraq. Ce qui veut dire que notre pays sera surveillé à la fois par des satellites, par des avions opérant à haute altitude, et par des appareils volant à moyenne et basse altitude.
Nous sommes surpris d’avoir entendu ce matin que les législations adoptées par le Parlement iraquien, et qui interdisent la production et l’usage d’armes de destruction massive, aient été déclarées nulles et non avenues par certaines délégations. Les commissions constituées par notre gouvernement sur la question de la vérification de la destruction unilatérale de certains programmes d’armement répondent, quant à elles, aux demandes faites par MM. Blix et El Baradei. Malgré cela, on continue à dire que «l’Iraq est en violation patente de ses obligations». Nous ne savons pas ce que cela veut dire. On ne va pas nous obliger à montrer des choses que nous n’avons pas. «Une main vide n’a rien à montrer», dit un proverbe arabe, et c’est ce que nous répondons à ceux qui ne souhaitent que l’échec des inspections. Concernant la question des missiles Al Samoud, l’Iraq en a fait état dans sa déclaration du mois de décembre dernier. Ce n’est donc pas une pseudo-découverte des inspecteurs. Nous savons que le problème de leur portée peut être techniquement résolu. Nous suggérons que des tirs expérimentaux soient réalisés, et que cette question soit résolue. Concernant le problème supposé du bacille du charbon et de l’agent VX, notre Gouvernement a fait des propositions concrètes pour que la question de la destruction de leurs stocks soit résolue dans la transparence.
Des voix s’élèvent partout à travers le monde pour demander aux Etats-Unis et au Royaume-Uni de garder raison. Mais malgré cela, ces deux pays continuent d’amasser des troupes et des arsenaux à nos frontières pour réaliser un objectif qui en réalité n’est que de nature coloniale. Nous en appelons au Conseil pour qu’il œuvre pour la paix et pour qu’il lève l’injuste embargo imposé depuis trop longtemps à notre pays.
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