LA CNUCED PRÉVOIT POUR CETTE ANNÉE UNE CHUTE DE 27% DES ENTRÉES D’INVESTISSEMENT ÉTRANGER DIRECT
Communiqué de presse TAD/1935 |
LA CNUCED PRÉVOIT POUR CETTE ANNÉE UNE CHUTE DE 27% DES ENTRÉES D’INVESTISSEMENT ÉTRANGER DIRECT
La Chine pourrait se placer en tête des pays destinataires, devant les États-Unis
GENÈVE, le 24 octobre (CNUCED) -- Les entrées mondiales d’investissement étranger direct (IED) diminueront de 27% en 2002 pour s’établir à 534 milliards de dollars des États-Unis environ, selon des estimations préliminaires rendues publiques ce jour par la CNUCED. Ces données indiquent que la Chine pourrait dépasser pour la première fois les États-Unis et se placer en tête des pays destinataires d’IED dans le monde.
Comme en 2001, cette baisse − d’environ un tiers par rapport au sommet enregistré en 2000 − est, une fois encore, plus marquée dans les pays développés (31 %) que dans les pays en développement (23 %) et dans ceux d’Europe centrale et orientale (1 %). L’incertitude de la situation économique et la faible conjoncture boursière minent la confiance des chefs d’entreprise, avec les répercussions que cela entraîne pour les fusions et acquisitions internationales et les plans d’investissement des entreprises. Dans l’ensemble, il faut s’attendre que plus de la moitié des 85 pays pour lesquels on dispose de données bénéficieront d’entrées d’IED plus faibles en 2002 qu’en 2001, selon la CNUCED[i].
Les fusions et acquisitions internationales réalisées entre janvier et le début de septembre de l’année en cours ont diminué de 45 % pour s’établir à quelque 250 milliards de dollars, contre 460 milliards de dollars pour la période comparable de l’année précédente[ii]. Cette chute a été particulièrement brutale aux États-Unis − pays qui avait attiré le plus d’IED en 2001 − où ces fusions et acquisitions représentent l’essentiel de l’IED. Quelques pays en développement et pays d’Europe centrale et orientale sont moins touchés par la chute générale des flux mondiaux d’IED. Cela tient en partie au renforcement des pressions concurrentielles, aggravées par le ralentissement économique mondial, qui amène les sociétés transnationales à abaisser leurs coûts de production en choisissant d’implanter leurs activités là où les coûts sont plus faibles. Il est possible que cette évolution, en particulier la forte baisse des entrées d’IED aux États-Unis, fasse cette année de la Chine le premier pays destinataire d’apports d’IED du monde entier, en lieu et place des États-Unis.
Dans 25 pays développés, les apports d’IED pourraient atteindre 349 milliards de dollars des États-Unis en 2002, contre 503 milliards l’année dernière. Toutefois, dans 10 de ces pays, les apports seront sans doute plus importants qu’en 2001, année pendant laquelle ils n’ont augmenté que dans trois pays (la France, l’Italie et la Grèce). Les baisses les plus importantes en termes absolus seront probablement enregistrées au Royaume-Uni et aux États-Unis
(la baisse sera des trois quarts dans le premier de ces pays, où les entrées seront ramenées de 54 milliards de dollars à 12 milliards de dollars, et des deux tiers dans le second, où elles seront ramenées de 124 milliards de dollars à 44 milliards de dollars). La chute des entrées observée aux États-Unis s’explique essentiellement par le fait que les prêts entre sociétés d’un même groupe sont passés de la position d’entrées nettes à celle de sorties nettes[iii].
En France et en Allemagne, en revanche, les perspectives sont plus encourageantes. Se chiffrant à près de 45 milliards de dollars, les entrées d’IED dans ces deux pays pourraient pour la première fois en trois décennies atteindre des niveaux presque comparables à ceux qui sont observés aux États-Unis[iv]. Les fusions et acquisitions internationales contribuent pour beaucoup à cet accroissement, ainsi qu’à d’autres accroissements observés dans des pays développés. En France, on peut citer parmi les acquisitions importantes celle d’Aventis CropScience Holding SA par Bayer AG (Allemagne) pour 6,6 milliards de dollars. En Allemagne, Reemtsma Cigarettenfabriken GmbH a été achetée par l’Imperial Tobacco Plc du Royaume-Uni pour 5 milliards de dollars, selon les informations dont on dispose, tandis que Veba Oel a été acquise par BP pour 1,7 milliard de dollars.
Selon les projections établies par la CNUCED, les entrées d’IED en Afrique devraient enregistrer une chute brutale, de 17 milliards de dollars en 2001 à 6 milliards de dollars cette année − soit une diminution des deux tiers. Ces mauvais résultats régionaux s’expliquent essentiellement par trois facteurs:
- Ce qu’a eu d’inhabituel l’année 2001, caractérisée par un important redressement des flux dû à deux opérations de grande envergure mais ponctuelles, l’une au Maroc, l’autre en Afrique du Sud[v];
- Le ralentissement économique intervenu dans les principaux pays (comme les États-Unis) où ont leur siège d’importantes sociétés transnationales investissant en Afrique, et la situation déprimée des marchés mondiaux d’investissement; et
- L’incertitude géopolitique régnant dans certains pays africains, qui influe aussi sur l’attitude des investisseurs à l’égard d’autres pays du continent.
Les sociétés transnationales européennes et américaines investissent moins en Asie
Les entrées d’IED dans les pays en développement d’Asie devraient diminuer encore cette année, d’environ 12 %, après la réduction de 24% observée en 2001. Ils s’établiront probablement à 90 milliards de dollars É.-U. cette année, contre 102 milliards l’an dernier. Cette baisse tient en grande partie au ralentissement des entrées d’IED en provenance d’Europe et des États-Unis, malgré la forte croissance économique des principaux pays de la région.
Les résultats obtenus dans l’ensemble des pays en développement asiatiques varient d’un pays à l’autre. En Chine, l’augmentation de l’IED a poursuivi sur sa lancée, et les entrées, estimées à 50 milliards de dollars, atteindront probablement un niveau record. Alimenté par le processus de libéralisation et la restructuration industrielle, et accéléré encore par l’adhésion du pays à l’OMC, l’IED enregistré par la Chine connaît sa croissance la plus rapide dans les industries manufacturières à intensité technologique forte ou moyenne et dans les
services. Une diminution des entrées est attendue dans des économies comme celles de Hong Kong (Chine), de la République de Corée, de la Thaïlande et de la Province chinoise de Taiwan, en partie en raison du remboursement de dettes internes au groupe par des sociétés affiliées étrangères. Dans l’ensemble, la diminution peut-être brutale de l’IED dans la plupart des économies de la région ne sera sans doute pas compensée par une augmentation dans des pays comme la Chine, l’Inde, la Malaisie et les Philippines, selon les projections établies par la CNUCED.
Les entrées d’IED dans l’Amérique latine et les Caraïbes diminueront pour la troisième année consécutive, avec une chute de 27 %, de 85 milliards de dollars à 62 milliards de dollars. Cette chute sera principalement observée au Mexique, où les entrées d’IED observées l’an dernier étaient gonflées par l’acquisition de Banamex par Citicorp; cet investissement excepté, les entrées d’IED au Mexique (14 milliards de dollars) resteraient cette année au niveau de 2001, malgré le ralentissement économique observé au Mexique et chez leur principal investisseur, les États-Unis. Les entrées d’IED au Brésil se sont maintenues à environ 20 milliards de dollars; de fait, le pays est en train de regagner sa position de principal destinataire d’IED de la région, en raison de l’accroissement des investissements dans ses industries manufacturières. En Argentine, le contrecoup de la crise financière de l’an dernier a réduit les entrées d’IED à un minimum pendant les six premiers mois de 2002. Les investissements reprendront sans doute pendant le deuxième semestre, en raison surtout de l’acquisition par Petrobras en juillet de Pérez Compac pour 1,1 milliard de dollars − ils atteindront environ 3 milliards de dollars.
L’Europe centrale et orientale résiste à la tendance à la baisse
La CNUCED estime que l’Europe centrale et orientale obtiendra probablement cette année les mêmes résultats que l’an dernier − des entrées d’IED de 27 milliards de dollars, sans que la situation soit la même partout. Les entrées devraient augmenter en Albanie, en Bulgarie, en Lettonie, en Lituanie, dans la République tchèque et en Slovénie; diminuer en Estonie, dans l’ex-République yougoslave de Macédoine, en Hongrie, dans la République de Moldova, en Pologne, en Slovaquie et en Ukraine; et rester inchangées en Bosnie-Herzégovine, en Croatie, dans la Fédération de Russie et en Roumanie. C’est la République tchèque qui devrait obtenir le meilleur résultat (passant de 5 milliards à 9 milliards de dollars). La Pologne a subi la plus grosse baisse, de 9 milliards à 6 milliards de dollars, tandis que la Fédération de Russie recevra probablement des IED du même niveau que l’an dernier, environ 3 milliards de dollars. Les différences entre tendances tiennent à des différences dans les facteurs externes et internes. Les facteurs externes sont essentiellement la situation économique mondiale et la situation mondiale en matière d’IED. Parmi les facteurs internes, on peut citer le volume inégal des investissements étrangers directs liés à la privatisation, qui explique que l’on observe de brusques augmentations (dans la République tchèque) ou de brusques diminutions (comme en Estonie, en Pologne et en Slovaquie); le manque de dynamisme de l’économie nationale (par exemple, en Pologne); et une attitude d’expectative de la part des investisseurs à l’égard de pays comme la Hongrie qui ont entrepris d’adapter leur régime d’IED aux conditions requises pour adhérer à l’UE. Dans l’ensemble, toutefois, la région continue de résister au ralentissement mondial de l’économie.
La baisse des flux mondiaux d’IED − résultant à la fois du ralentissement économique mondial et des incertitudes aggravées par la récente série de scandales financiers − se traduit par une forte réduction du volume global d’IED. Pour l’économie mondiale prise dans son ensemble, les deux années consécutives de baisse signifient que l’investissement étranger direct contribue moins que par le passé à compenser le fléchissement de l’activité mondiale. Pour les pays en développement, dans lesquels l’IED est la principale source de capitaux, cette baisse se traduira par un moindre volume de ressources au service du développement. De ce fait, la CNUCED prévoit que les pays se livreront une concurrence plus vive et devront donc s’attacher à obtenir les investissements étrangers directs propres à contribuer le plus à la poursuite d’objectifs de développement précis. Les ressources qui peuvent être consacrées à attirer les investissements étant limitées, il est possible que les pays préfèrent le ciblage des investissements à une stratégie consistant à «ratisser large»[vi]. Pour cela, les pays devront déterminer leurs atouts et leurs points faibles afin de cibler les types d’IED propres à la fois à renforcer leurs stratégies de développement et à tenir compte de leurs avantages comparatifs. Certaines de ces difficultés seront examinées à la réunion annuelle de l’Association mondiale des organes de promotion de l’investissement, qui se tiendra du 22 au 24 janvier 2003 au Palais des Nations, à Genève.
Le présent communiqué de presse peut être consulté sur l’Internet à l’adresse suivante:http://www.unctad.org/en/press/pressref.htm.
Pour tout renseignement complémentaire, prière de s’adresser à Masataka Fujita, fonctionnaire responsable, Section des tendances de l’investissement, Division de l’investissement, du développement des entreprises et de la technologie, téléphone: +41 22 907 6217, adresse électronique: masataka.fujita@unctad.org; ou à Muriel Scibilia, chargée de presse, téléphone: +41 22 907 5725/5365, télécopieur: +41 22 907 0043, adresse électronique: press@unctad.org.
Notes
[i]Des données relatives à l’IED sont disponibles pour le premier semestre de l’année en cours dans la plupart des 85 pays, qui absorbaient 95 % des entrées mondiales d’IED en 2001. Les projections relatives aux entrées mondiales en 2002 sont établies sur la base de ces 85 pays. Pour les obtenir, on procède à l’annualisation des données soit trimestrielles soit mensuelles obtenues auprès de sources nationales. La part de ces pays dans leurs régions ou sous-régions respectives en 2001 sert à extrapoler les chiffres régionaux ou sous-régionaux relatifs à 2002. En ce qui concerne les États-Unis, on a utilisé la baisse observée de 65 % des fusions et acquisitions internationales (jusqu’en septembre 2002) pour obtenir les estimations relatives à l’ensemble de l’année. Si on leur applique la même méthode qu’aux autres pays, les entrées d’IED estimées à partir des données relatives aux six premiers mois s’établissent à 31 milliards de dollars seulement.
[ii]Les deux chiffres visent des opérations comprenant une acquisition de plus de 10 % des parts.
[iii]Cela veut dire que les sociétés affiliées étrangères exerçant leurs activités aux États-Unis remboursent davantage de prêts à leur société mère qu’elles n’en reçoivent d’elle. C’est en raison de cette évolution que, pendant le deuxième trimestre de 2002, les entrées d’IED aux États-Unis se sont chiffrées à 0,6 milliard de dollars seulement (Source: «U.S. international transactions: second quarter 2002», BEA News Release, 12 septembre 2002).
[iv]En 1972, les entrées d’IED en France et en Allemagne étaient de 0,7 milliard de dollars É.‑U. et 1,9 milliard de dollars, respectivement, contre 1,4 milliard de dollars aux États-Unis.
[v]Pour plus de détails, voir CNUCED, World Investment Report 2002: Transnational Corporations and Export Competitiveness (disponible en ligne à l’adresse www.unctad.org/wir).
[vi]Pour un examen plus détaillé des questions de ciblage, voir World Investment Report 2002, chap. VIII.
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