En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/8366

FAISANT PART DE SES OBSERVATIONS AUX REPRESENTANTS DE LA SOCIETE CIVILE, LE SECRETAIRE GENERAL SOULIGNE QU’IL FAUT METTRE L’ACCENT SUR L’EDUCATION DANS TOUS LES PLANS DE DEVELOPPEMENT POUR L’AFRIQUE

04/09/2002
Communiqué de presse
SG/SM/8366


            AFR/475


Faisant part de ses observations aux représentants de la société civile, le Secrétaire général souligne qu’il faut mettre l’accent sur l’éducation dans tous les plans de développement pour l’Afrique


Il aborde également les questions

de la paix, de la démocratie, du VIH/sida, du développement durable


Le texte des observations formulées par le Secrétaire général Kofi Annan lors d’une réunion avec les représentants de la société civile à Maputo, le 29 août, est reproduit ci-après:


Merci tout d’abord pour vos chaleureuses paroles à mon égard et à l’égard de l’Organisation des Nations Unies, et merci d’avoir rappelé que j’ai débuté ma carrière l’année même de la naissance du mouvement de libération mozambicain.  Il semble que nos efforts respectifs aient été couronnés de succès, puisque le mouvement de libération a été victorieux et que ses membres dirigent désormais le gouvernement et que, de mon côté, je n’ai pas trop mal réussi ma carrière.  J’espère que nous saurons continuer sur cette lancée.


Monsieur le Recteur, je tiens à vous remercier, vous et les autres professeurs ici présents, pour les efforts que vous déployez afin de former les futurs dirigeants de l’Afrique.  L’éducation revêt en effet une importance critique pour l’Afrique dans la mesure où elle est la condition même du développement des pays et des économies du continent.  Nous avons besoin de ressources humaines qualifiées et c’est la raison pour laquelle les pays africains doivent mettre l’accent sur l’éducation dans tous leurs plans de développement.


Mais pour commencer, Monsieur le Président et Monsieur le Recteur, laissez-moi vous dire à quel point je suis ravi de tous vous rencontrer aujourd’hui.  Je suis véritablement enthousiasmé – mon épouse peut en témoigner – par cette première visite au Mozambique en ma qualité de Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, d’autant que cela fait très longtemps que je souhaitais me rendre dans votre pays et que les Mozambicains célèbrent cette année un événement très important, le dixième anniversaire de l’accord qui a permis l’avènement de la paix.


J’ai appris qu’en cette année très spéciale, vous célébreriez pour la première fois, le 4 octobre, dans un peu plus d’un mois, le Jour de la paix et de la réconciliation, décrété jour de fête nationale, et j’adresse par avance mes félicitations à tous les Mozambicains.


On se souviendra longtemps de l’heureux dénouement de la situation au Mozambique, auquel l’Organisation des Nations Unies est fière d’avoir été associée.  À cet égard, je constate avec satisfaction que l’engagement du Mozambique en faveur de la paix ne s’est pas limité à la conclusion de l’accord de paix.


Votre pays a su en effet s’engager sur la voie de la consolidation de la paix en observant, respectant et garantissant un processus électoral démocratique.


Vous avez su comprendre que l’épanouissement de la démocratie requiert une attention continue de la part du gouvernement en place, des partis politiques et surtout de la société civile, qui doit être dynamique et faire preuve de vigilance.


Vous avez su comprendre qu’une approche pleine de détermination est le meilleur moyen de garantir les droits de l’homme et les libertés fondamentales pour tous.


Et vous avez compris que les efforts en faveur de la paix et la démocratie doivent impérativement s’accompagner d’activités en faveur du développement.  La démocratie marque des points lorsque le peuple se rend compte que la pauvreté est réduite, que la société est plus juste et que ces avantages ne feront que croître au fil du temps.


Aujourd’hui, au terme d’une décennie de paix, l’amélioration de la situation au Mozambique saute aux yeux, qu’il s’agisse du redressement continu de l’économie ou de la reconstruction du pays et de sa capitale.


Le Mozambique a montré qu’il savait faire preuve de courage et de détermination dans des circonstances extrêmement difficiles.  Ce fut notamment le cas il y a deux ans, lorsque le pays a été ravagé par des inondations, et c’est le cas aujourd’hui, face à la terrible épidémie de VIH/sida et, plus récemment, au risque de sécheresse.


Le Mozambique a su s’attirer la confiance de la communauté internationale et a pu conclure avec les donateurs des partenariats pour le développement fructueux et durables.


Vous tous, les représentants de la société civile – et je sais que vous êtes nombreux dans cette salle – jouez un rôle crucial en faveur du développement, en défendant et en accompagnant les efforts sur le terrain, que ce soit dans les domaines de la santé ou de l’éducation, de la réduction de la pauvreté, de la lutte contre le VIH/sida ou de l’émancipation des femmes.


À ce titre, vous êtes tous des partenaires de premier plan de l’Organisation des Nations Unies. Pour réussir dans ses efforts, l’Organisation des Nations Unies n’a pas le choix, elle doit pouvoir s’appuyer sur des partenariats conclus avec la société civile.


J’aimerais maintenant aborder certains autres problèmes rencontrés en Afrique.  Il me semble que le Président a mentionné la situation en Angola.  Je viens d’accomplir une visite dans ce pays et je dois dire que j’ai été très encouragé par ce que j’y ai vu.  La guerre est désormais terminée et il faut maintenant faire comprendre à la population que c’est la paix et que cette paix va changer leur vie.


L’Angola ne manque pas de ressources naturelles et de ressources humaines mais le pays aura besoin de l’aide de la communauté internationale et j’ai bien l’intention de mobiliser son soutien pour assurer la consolidation de la paix.


J’espère cependant que la paix ne se limitera pas à l’Angola et je suis convaincu qu’à force de détermination, nous parviendrons à sortir de l’impasse en République démocratique du Congo et au Soudan.  Là aussi, on note certains signes encourageants.  Si nous parvenons à régler ces trois conflits – Angola, République démocratique du Congo et Soudan – je pense que nous pourrons raisonnablement dire que l’Afrique a été pacifiée.  Les pays impliqués dans les combats en République démocratique du Congo sont si nombreux qu’on a pu parler parfois, comme vous le savez, d’une guerre mondiale sur le continent africain.


La communauté internationale est disposée à nous aider.  Personne n’a oublié le Sommet du Groupe des huit à Kananaskis, à l’occasion duquel les gouvernements du G-8 se sont dits prêts à collaborer avec les responsables africains pour régler les conflits en République démocratique du Congo et au Soudan et consolider et renforcer la paix.  Ils ont également indiqué qu’ils nous soutiendraient dans nos efforts de reconstruction.  J’estime que c’est une chance que les Africains ne doivent pas laisser passer.


J’ai dit à maintes reprises qu’en Afrique, aucun État, aucun dirigeant et aucun citoyen ne pouvait rester indifférent aux conflits qui déchirent le continent.  Nous sommes tous victimes, à plusieurs titres, de ces conflits qui ternissent notre image à l’étranger où, quand on parle de l’Afrique, on voit un continent en crise, en occultant parfois le fait que certains pays vont bien.  Nous sommes donc tous perdants car nous donnons l’impression d’être dans une situation précaire, ce qui décourage les investisseurs, même si nous disposons de ressources naturelles abondantes et, bien des fois, de ressources humaines appréciables.  Je propose donc que nous n’épargnions aucun effort dans les prochains 12 à 18 mois pour régler ces conflits.


Je me réjouis de l’évolution de la situation ici au Mozambique, de ce que la paix et la stabilité ont apporté au pays et des premiers signes de développement économique, même si de toute évidence, comme dans la plupart des pays d’Afrique, la pauvreté demeure un problème et j’ai d’ailleurs abordé cette question avec le Président et nous essayons de trouver des solutions.  C’est donc avec une grande satisfaction que j’accueille le Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), initiative africaine qui a pour but d’établir des institutions solides, d’édifier des sociétés fondées sur l’état de droit et de respecter les institutions démocratiques et les droits de l’homme.


Il en est qui prétendent que le NEPAD a été imposé de l’extérieur.  Je m’inscris en faux contre cette opinion.  Le NEPAD est une nécessité pour l’Afrique, indépendamment du fait que nous ayons ou non du mal à l’admettre.  Nous devons poser des fondements solides pour réunir les conditions d’un avenir de prospérité et de stabilité à long terme.


Les dirigeants doivent pleinement mobiliser le public et la société civile dans le cadre de ce processus.  Je me suis rendu compte, lorsque j’ai rencontré les organisations de la société civile, qu’elles avaient l’impression d’être laissées de côté.  Elles avaient entendu parler du NEPAD, elles savaient que leurs dirigeants se réunissaient dans cette optique mais elles n’y participaient pas. Je demande donc instamment aux responsables africains d’inclure les groupes de la société civile dans le processus.


Bien sûr, lors de son sommet à Kananaskis, le G-8 a également adopté un plan d’action sur les mesures qu’il entend prendre pour nous aider, en se félicitant des engagements que nous avons pris de nous-mêmes, librement et volontairement, en ce qui concerne le NEPAD.  Le G-8 a indiqué qu’il était disposé à élargir son aide et qu’il encouragerait les investissements étrangers directs en Afrique.


Enfin, j’aimerais dire un mot sur le problème du VIH/sida.  Il s’agit d’un véritable fléau pour le continent mais ce n’est pas un problème exclusivement africain.  Oui, l’Afrique est la plus durement touchée mais c’est un problème mondial et nous devons tous lutter contre cette épidémie, qui se propage également très rapidement en Asie, en Europe de l’Est et dans les Caraïbes.  Nous devons donc mobiliser toutes les ressources disponibles.  Car il y a des ressources, il y a des traitements.  Tout est affaire de volonté.


J’ai indiqué que nous aurions besoin de 7 à 10 milliards de dollars par an.  À ce jour, nous disposons d’environ 2 milliards de dollars.  C’est un commencement, et ce n’est pas négligeable, mais cela ne suffit pas.  Je continuerai de demander à ceux qui en ont les moyens de faire preuve de générosité, pour le bien-être de tous.


Selon moi, l’épidémie de VIH/sida n’est pas seulement un problème de santé.  C’est aussi un problème de développement dans la mesure où le sida tue des hommes et des femmes actifs et prive la société de leur précieuse contribution.  Nous devons arrêter cette hémorragie sans plus tarder, en aidant ceux qui ont déjà été contaminés, en faisant oeuvre d’information auprès de ceux qui ne sont pas capables de se protéger, et en soutenant nos propres économies.  Il est fondamental que nous réunissions nos forces dans la lutte contre le VIH/sida car c’est pour notre avenir même que nous nous battons.


Je suis persuadée que lundi, à la réunion de Johannesburg, où le Président et moi serons présents aux côtés d’autres dirigeants, les problèmes de l’eau et de l’assainissement, de la santé et de la productivité agricole, de l’énergie et de la biodiversité, ne manqueront pas d’être abordés de manière extensive.


Je sais que certains sont sceptiques quant à l’utilité de la conférence, mais nous saurons leur prouver qu’ils ont tort en faisant de ce sommet un succès qui montrera au monde la voie à suivre pour permettre un développement durable qui ne mette pas en péril l’environnement.


Un proverbe africain dit que la Terre ne nous appartient pas mais que c’est un trésor qui nous a été confié pour nos enfants et les enfants de nos enfants.  Ceux d’entre nous qui exercent des responsabilités aujourd’hui doivent se montrer dignes de la confiance qui leur a ainsi été accordée.


*     *     *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.