SG/SM/8177

MM. SHARON ET ARAFAT DOIVENT ELOIGNER LEURS PEUPLES DU BORD DU PRECIPICE EN CHOISISSANT UNE PAIX JUSTE, DURABLE ET GLOBALE, DECLARE KOFI ANNAN

27/03/2002
Communiqué de presse
SG/SM/8177


MM. SHARON ET ARAFAT DOIVENT ELOIGNER LEURS PEUPLES DU BORD DU PRECIPICE EN CHOISISSANT UNE PAIX JUSTE, DURABLE ET GLOBALE, DECLARE KOFI ANNAN


On trouvera ci-dessous le texte intégral du discours prononcé aujourd'hui par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, au Sommet de la Ligue arabe à Beyrouth :


Je suis très honoré d’être parmi vous aujourd’hui, et je remercie le peuple et le Gouvernement libanais, en particulier le Président Emile Lahoud et le Premier Ministre Rafiq Hariri, de m’avoir réservé un accueil si chaleureux. Je tiens à rendre hommage à Sa Majesté le Roi Abdallah, qui a assumé la présidence de la Ligue arabe avec fermeté et sagesse pendant l’année écoulée. Et je me joins à vous pour souhaiter la bienvenue au nouveau Président de la Ligue arabe, le Président Lahoud, et au nouveau secrétaire général, Son Excellence Amr Moussa.

Monsieur le Président,


En ce début du XXIe siècle, aucun conflit au monde ne présente une solution aussi claire, aussi largement souhaitée et aussi indispensable à la paix mondiale que le conflit israélo-palestinien. Mais aucun n’est aussi tragiquement embourbé dans la haine et la méfiance, aucun n’est aussi vulnérable aux menées extrémistes. Nous ne devons pas nous accommoder de ce paradoxe, mais au contraire faire preuve de courage politique et d’initiative pour que notre vision de la paix l’emporte sur la réalité actuelle du conflit.


Car on peut sortir de cette impasse. Les dirigeants des deux camps, à savoir le Premier Ministre Ariel Sharon et le Président Arafat, doivent réaffirmer le choix stratégique de la paix, sur la base d’un règlement juste, durable et global. Ils doivent éloigner leur peuple du bord du précipice. Tel est leur rôle, et tel est leur devoir. Ils s’honoreront devant l’histoire et devant leur peuple s’ils se montrent à la hauteur du défi. Mais ils seront jugés sévèrement s’ils faillissent à leur tâche.


Nous espérons tous l’avènement d’une nouvelle ère de paix et de sécurité pour tous. J’en veux pour preuve la résolution 1397 adoptée ce mois-ci par le Conseil de sécurité, qui s’est déclaré « attaché à la vision d’une région où deux États, Israël et la Palestine, vivraient côte à côte dans des frontières sûres et reconnues ». Faisant fond sur ses résolutions antérieures – les résolutions 242 et 338 – le Conseil de sécurité a ainsi établi un cadre ferme pour une solution juste et viable de la question palestinienne. 


Nous sommes tous aussi préoccupés par la dimension régionale du conflit, et tous aussi désireux de voir s’instaurer une paix globale entre Israël et ses voisins, y compris la Syrie et le Liban. Tout comme vos peuples et le peuple d’Israël, la communauté internationale appelle de ses vœux la fin des souffrances et des effusions de sang.

Les peuples du monde arabe ne sont pas les seuls à penser que les Palestiniens ont le droit de vivre en paix et en sécurité dans leur propre État; que la longue occupation doit cesser; que les conditions intenables dans lesquelles vivent les Palestiniens doivent immédiatement s’améliorer et qu’Israël doit immédiatement cesser de recourir à des méthodes injustifiables telles que les assassinats ciblés ou l’usage des armes lourdes dans des zones très peuplées.


De son côté, le peuple israélien n’est pas le seul à penser qu’il a lui aussi le droit de vivre dans la paix et la sécurité, à l’abri du terrorisme; il n’est pas le seul à penser que les attentats-suicides contre des civils israéliens sont moralement répugnants, qu’ils ne doivent pas être glorifiés mais au contraire dénoncés par tous les dirigeants arabes, et que le monde arabe doit reconnaître une fois pour toutes, publiquement et en privé, le droit d’Israël à l’existence.


Beaucoup de gens dans le monde partagent les convictions de l’un ou l’autre camp.


Les Palestiniens ont raison de réclamer des assurances de paix.  Nous voulons tous voir la fin de l’occupation, le retrait des colonies de peuplement israéliennes et la création d’un État palestinien souverain. De leur côté, les Israéliens sont tout aussi fondés à demander des garanties de paix. Nous voulons tous entendre de vous, dirigeants de la Ligue arabe, un engagement ferme et crédible garantissant qu’une fois qu’Israël aura conclu une paix juste et globale et se sera retiré des territoires occupés, il pourra vivre en paix et avoir des relations normales avec tous les pays arabes. Cette garantie peut, que dis-je doit, être votre contribution à la paix israélo-palestinienne.


Vous pouvez vous appuyer sur l’importante proposition présentée par le Prince héritier Abdallah d’Arabie Saoudite. Ce plan, fondé sur le principe dit « des territoires contre la paix », propose des perspectives d’avenir claires et convaincantes. Jamais il n’a été aussi urgent de rétablir la paix et la stabilité.  Je vous demande d’appuyer résolument ce plan et de montrer ainsi au monde, et aux parties au conflit, que vous ne reculez pas devant les choix cruciaux qui s’imposent pour servir la paix.

Mesdames, messieurs,


Permettez-moi maintenant d’évoquer brièvement deux autres pays dont le sort préoccupe profondément les Arabes, les musulmans, et en fait le monde entier.


Au début du mois, j’ai eu des entretiens francs et utiles avec le Ministre iraquien des affaires étrangères à propos de l’application des résolutions du Conseil de sécurité visant son pays, et nous nous rencontrerons encore le mois prochain. En attendant, dans l’intérêt du peuple iraquien et de la paix dans la région, je demande une fois de plus aux dirigeants de Bagdad de se conformer sans attendre à toutes ces résolutions. Plus vite ils accepteront que c’est le seul moyen pour que le régime de sanctions soit levé et que les souffrances de la population iraquienne s’atténuent, plus vite le problème sera réglé. Je compte que vous joindrez votre voix à la mienne pour lancer cet appel.


Pendant ce temps, la situation en Afghanistan nous rappelle une fois de plus les ravages et la misère causés par la guerre. La communauté internationale a fait preuve d’une détermination sans précédent ou presque, notamment à la Conférence de Tokyo en janvier, pour aider les Afghans à reconstruire leur pays et poser ainsi les fondations d’une paix durable. L’Arabie saoudite, qui coprésidait la conférence, et de nombreux autres pays ici présents, ont fait de généreuses promesses d’assistance. Le peuple afghan compte sur votre aide.  Et celle-ci est plus urgente que jamais, maintenant qu’aux ravages de la guerre s’ajoutent les dégâts causés par le terrible tremblement de terre qui a frappé le nord de l’Afghanistan il y a deux jours.  J’adresse mes plus sincères condoléances aux familles de tous ceux qui ont perdu des êtres chers dans cette catastrophe.  

Monsieur le Président,


La persistance des conflits, la méfiance et les turbulences de toutes sortes ont trop longtemps empêché le monde arabe d’exploiter pleinement ses potentialités. En cette période de crise et de tensions, je vous exhorte néanmoins à préparer un avenir de paix et de prospérité, et à prendre des mesures, dans vos propres pays, pour avancer dans cette direction. J’en appelle à vous pour lutter contre l’extrémisme, la haine et l’intolérance, et pour faire en sorte que ces fléaux ne s’insinuent pas dans vos manuels scolaires ou l’esprit de votre jeunesse.


Vos peuples – et surtout les jeunes qui représentent près de la moitié de la population de vos pays – aspirent autant que quiconque à vivre dans des sociétés libres et ouvertes, où prévalent la bonne gouvernance, les droits de l’homme, la liberté d’expression et l’état de droit. C’est à ces conditions seulement qu’ils pourront véritablement exploiter leur potentiel et léguer un monde meilleur à leurs enfants. Et c’est seulement ainsi que la pauvreté, l’illettrisme et l’extrémisme disparaîtront au profit de la paix, de la stabilité et de la prospérité pour tous les peuples de la région.


Je vous souhaite de fructueuses délibérations et vous remercie de l’honneur que vous m’avez fait en m’invitant à m’adresser à vous aujourd’hui.


Wal salaamou alaïkoum (Que la paix soit avec vous).


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