LE COMITE ENTAME L’EXAMEN DU RAPPORT SPECIAL DE « FREEDOM HOUSE »
Communiqué de presse ONG/435 |
Comité chargé des ONG
39e séance – matin
LE COMITE ENTAME L’EXAMEN DU RAPPORT SPECIAL DE « FREEDOM HOUSE »
Les recommandations du Groupe de travail
sur les méthodes d’accréditation présentées au Comité
Le Comité des organisations non gouvernementales, réuni ce matin, sous la présidence de M. Levent Bilman (Turquie), a poursuivi ses travaux en examinant ses méthodes de travail. Dans ce cadre, il a entendu le représentant de la France qui présentait les grandes lignes des conclusions du Groupe de travail, réuni le 21 décembre dernier, pour examiner les méthodes d’accréditation des représentants des ONG. Il a déclaré que ces travaux se référaient surtout aux plaintes déposées par les délégations du Sri Lanka, de la Chine et de la Fédération de Russie au sujet des abus de certaines ONG dans l’utilisation de leur statut et des accréditations accordées dans le cadre de leurs travaux.
Concernant les recommandations formulées par le Groupe de travail, le représentant de la France a souligné le souhait de voir le Conseiller juridique des Nations Unies donner un avis sur les dispositions existantes en matière d’accréditation des personnes participant aux différents travaux des Nations Unies par le biais de leurs ONG, la nécessité pour le Comité de sensibiliser les ONG à leurs droits mais aussi et surtout à leurs devoirs, la nécessité pour la Commission des droits de l’homme de renforcer ses travaux avec le pays hôte en matière de sécurité, la nécessité de diffuser les listes adoptées par le Comité du Conseil de sécurité contre le terrorisme dans le cadre de son mandat, la proposition d’envoyer une lettre signée par le Président du Comité des ONG recommandant au Président de la Commission des droits de l’homme de porter à la connaissance des ONG sa position sur les points susmentionnés.
Le Président du Comité a formé le voeu que les recommandations de ce Groupe de travail puissent être adoptées cet après-midi. Par ailleurs, il a souligné les intéressantes évolutions dans les échanges entre New York et Genève. A cet égard, il a évoqué le succès d’une réunion organisée par Mme Habifa Mezoui, Chef de la Section des organisations non gouvernementales, entre le Comité des ONG et la Commission des droits de l’homme, qui a abouti à l’idée que le Haut Commissariat aux droits de l’homme envoie son Chef de la Section des services d’appui à New York pour participer, lundi prochain, aux travaux du Comité des ONG afin d’entendre les préoccupations des membres du Comité.
Par ailleurs, le Comité a entamé l’examen des rapports spéciaux *, en abordant celui de «Freedom House». Ce rapport spécial répond à des plaintes déposées auprès du Comité par les délégations chinoise et cubaine. Le représentant de Cuba a regretté que la première demande de statut consultatif de «Freedom House», repoussée par le Comité des ONG en 1995, ait finalement été obtenue au Conseil économique et social (ECOSOC) suite à, selon ses propos, de fortes pressions de la délégation des Etats-Unis. Il a également soutenu que
cette ONG est en fait une agence du Gouvernement américain qui, selon lui, tente de perturber l’ordre intérieur de Cuba. En conclusion, il s’est dit insatisfait des réponses fournies par cette organisation qui, au lieu de dissiper ses inquiétudes, entraînaient de nouveaux doutes et interrogations. C’est pourquoi, le représentant a demandé un délai supplémentaire pour étudier ce document, dont il a regretté la distribution tardive.
Pour sa part, le représentant de la Chine, faisant référence au paragraphe consacré à Taïwan dans le rapport spécial de «Freedom House», a jugé inacceptable que l’organisation mentionne cette province chinoise dans la liste des Etats énumérés. Cette liste est en contradiction avec la résolution 25/78 de l’Assemblée générale relative à la représentation de la Chine aux Nations Unies. Le représentant a également estimé que cette organisation, qui jouit du statut consultatif, ne respecte ni les règles de l’ECOSOC ni l’esprit de la résolution 25/78. Dans ce contexte, sa délégation ne peut pas accepter ce rapport et souhaite que l’organisation apporte des précisions supplémentaires sur ses positions. Appuyant la déclaration de Cuba et de la Chine, la représentante du Soudan a rappelé l’extrême importance du plein respect par les ONG dotées d’un statut consultatif des règles et normes des Nations Unies dans la conduite de leurs activités. Elle a aussi fait des remarques sur le fonctionnement de cette organisation à laquelle elle a reproché d’exagérer ses analyses et de porter des jugements de valeur qui vont à l’encontre de l’esprit des Nations Unies. Elle s’est élevée contre les déclarations de cette organisation qui qualifie le Soudan d’Etat terroriste pratiquant un génocide. Elle a également regretté que cette organisation n’ait pas souhaité rester en contact avec la mission soudanaise à New York, ce qui lui aurait permis d’aller constater sur le terrain la situation.
Soulignant l’importance de «Freedom House» sur le plan historique et la compatibilité de ses principes avec les objectifs de l’ONU, le représentant des Etats-Unis a évoqué les activités de cette organisation sur les questions liées aux droits de l’homme et à la démocratie. Il a également déclaré que certains désaccords avec la position de cette ONG ne doivent pas la pénaliser car elle a une fonction importante auprès de l’ECOSOC. Le représentant a rappelé que sa délégation est satisfaite du contenu du rapport et a souhaité que le Comité avance dans ses travaux. Il a aussi rappelé que «Freedom House» n’est pas un instrument du Gouvernement américain mais qu’elle jouit seulement d’un appui de ce Gouvernement. En ce qui concerne Taïwan, l’étude de l’ONG ne prend pas position et ne reconnaît pas Taïwan comme étant un pays indépendant mais indique seulement que d’autres pays reconnaissent cette entité en tant que pays. Une ONG ne peut d’ailleurs pas conférer un statut de ce genre à un pays ou à un territoire, a-t-il ajouté.
Le représentant de l’Allemagne a regretté que cette organisation soit qualifiée de terroriste. Par ailleurs, il a déploré la tendance des représentants à juger les organisations à partir d’une perspective nationale et selon leurs activités dans leur pays. A cet égard, il aurait souhaité que les activités de «Freedom House» dans une dizaine d’autres pays n’aient pas été soulignées, ce qui, de l’avis de sa délégation, n’est pas très objectif. Intervenant en qualité d’observateur, le représentant de la République islamique d’Iran a fait référence à un communiqué de presse de «Freedom House» dont il dénonce la teneur et les stéréotypes qui suscitent la haine entre les individus. En effet, il a évoqué une position de cette organisation déclarant qu’il n’y a pas dans le monde de pays islamique libre. Il a mis en doute les critères de liberté de cette organisation et a attiré l’attention des membres du Comité des ONG sur ces positions et le soin
extrême qu’il faut apporter à ce genre de considération à l’avenir. Tout en appuyant les déclarations des représentants de Cuba, du Soudan et de l’Iran, la représentante de la République arabe syrienne a exprimé ses préoccupations sur les publications de cette ONG sur son site internet qui, selon elle, diffuse des attaques contre l’Islam et les Arabes en particulier et laisse paraître un sentiment de supériorité d’une culture par rapport aux autres. Le représentant du Pakistan a regretté que certaines allégations de «Freedom House» reprennent des idées préconçues et les justifient, notamment en ce qui concerne le conflit entre les civilisations. Il a réaffirmé que son pays respecte la liberté de la presse, de la justice et organise régulièrement des élections libres.
Répondant aux commentaires exprimés par les délégations, le représentant de «Freedom House» a rappelé que son organisation est non partisane et que ses travaux, au fil des ans, se sont établis avec une certaine objectivité et avec la coopération de nombreux gouvernements. Le rapport signale notamment que la majorité des musulmans vivent dans des Etats démocratiques et montre que, dans d’autres, en Iran notamment, la démocratie est à l’oeuvre. Le document ne constitue donc pas une incitation à la haine interculturelle et interreligion. En réponse aux accusations de Cuba, le représentant a indiqué que d’amples informations ont été fournies et que «Freedom House» n’est associée à aucun groupe terroriste. En outre, des personnes ayant une connaissance personnelle de la situation à Cuba et qui ont été victimes de la répression politique ainsi que des universitaires, des parlementaires et des hommes d’affaires éminents ont établi des rapports avec le Gouvernement cubain. En ce qui concerne la question de Taïwan, le représentant a indiqué que son ONG respecte le droit des Etats à se prononcer eux-mêmes et qu’elle n’a jamais prétendu que Taïwan devait devenir un Etat indépendant. Quant aux questions soulevées par la représentante du Soudan, le représentant a rappelé qu’un dialogue a été établi le Ministre soudanais des affaires étrangères et souhaite que cela permette une amélioration de la situation dans le sud du pays. Enfin, il a indiqué que le rapport ne fait que refléter la persécution des chrétiens et d’autres minorités dans le sud du Soudan et exprime l’inquiétude de l’ONG face aux actions terroristes perpétrées dans ce pays par des individus qui s’écartent des grandes tendances de l’Islam.
Le Comité poursuivra ses travaux, cet après-midi à 15 heures.
* E/C.2/2001/3 et add.
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